mercredi, 03 juin 2015
UN COUP DE CHAPEAU
Aujourd’hui, cessons un moment de « faire suer le burn-out ». Offrons-nous un moment de détente, avec Aristide Bruant. (cliquez pour entendre). Je trouve cette chanson délicieusement cynique.
1.
Hier, c'était l'enterrement
De ma pauvre belle-maman.
Un' femm' qu'avait tout's les vertus;
Hélas, nous ne la reverrons plus !
Comm' ell' avait plus d'soixant' ans,
On attendait ça d'puis longtemps;
L'matin, on est v'nu la chercher
Et puis en rout', fouette cocher !…
Le vent soufflait je ne sais d'où,
Trou la la itou (bis);
Le soleil dorait l'horizon
Et zon, zon, zon.
Nous marchions d'un air décidé,
Gai, gai, gai la rira don dé
Et nous marchions tous comm' ça.
Larifla, fla, fla.
2.
Près de moi dans les premiers rangs
S'avançaient les proches parents;
Sous la douleur se laissant choir
Et pleurant tous dans leurs mouchoirs.
Soudain, l'un d'eux s'approche de moi
Et me dit d'un ton plein d'émoi :
« Vraiment, du ciel nous sommes maudits ! »
Tout en pleurant, j'lui répondis :
« Oui, monsieur, je suis comme un fou.
Trou la la itou (bis);
Ça fait un vide à la maison
Et zon, zon, zon.
De pleurs je suis tout inondé,
Gai, gai, gai la rira don dé. »
Et nous pleurions tous comm' ça.
Larifla, fla, fla.
3.
Il commençait à se faire tard
Quand t'nous arrivâmes à Clamart
Nous entrions quéque temps après
Dans un jardin planté de cyprès.
Les hommes pleuraient en sanglotant,
Les femmes sanglotaient en pleurant.
Gendres, neveux, cousins, p'tits-fils
Entonnaient le De Profondis.
Comme on la descendait dans le
Trou la la itou (bis);
Chacun disait une oraison
Et zon, zon, zon.
En criant comme un possédé,
Gai, gai, gai la rira don dé;
Et nous chantions tous comm' ça.
Larifla, fla, fla.
4.
A la sortie, v'là qu'les parents
Prennent d'assaut les restaurants,
Pour se consoler un p'tit brin,
On fit v'nir cinquant' litr's de vin.
Quand t'les cinquant'litres fur'nt bus,
On en fit rev'nir encore plus.
Si bien qu'au moment d'se quitter,
I y avait pus moyen d's'acquitter.
Tout le monde avait bu comme un
Trou la la itou (bis);
On avait son petit pompon
Et zon, zon, zon.
Quand t'votr' crampon s'ra décédé,
Gai, gai, gai la rira don dé;
Faudra l'enterrer comm' ça,
Larifla, fla, fla.
Note : Tous les zoziaux appartiennent évidemment à la famille, plus nombreuse qu'on ne croit, des « bruants » : « jaune », « fou », « zizi » et « des roseaux ». Et en prime, le sapeur Camember est heureux de vous chanter sa romance : « Petits voiseaux ».
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mardi, 02 juin 2015
DÉTAILS 6
Ces quelques fleurs ...
(Saintpaulia, Tulipe, Jonquille).
09:00 Publié dans PAS PHOTOGRAPHE MAIS | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : photographie
DÉTAILS 5
"Est-ce l'Espagne en toi qui pousse un peu sa corne ?
Ou serait-ce dans tes tripes une bulle de jazz ?"
Claude Nougaro.
Mais Tonton Georges n'est pas d'accord. Il verrait plutôt une "Corne d'aurochs".
09:00 Publié dans PAS PHOTOGRAPHE MAIS | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : photographie, claude nougaro, ô toulouse, corne d'aurochs, georges brassens
lundi, 01 juin 2015
QUAND LE SAGE MONTRE LA LUNE ...
... LAURENT JOFFRIN MONTRE SON ...
Je me demande finalement si je déteste autant que je le dis le nommé Laurent Mouchard, alias Joffrin : il publie une chronique des livres tous les samedis dans son journal (Libération). Chaque fois, il me donne l’occasion de me payer sa fiole, tant il multiplie les niaiseries découlant de son optimisme radical (attitude de rigueur dans la gauche molle, je veux dire la gauche morale) face au monde tel qu’il se présente de nos jours. Sur le plan des idées, Laurent Joffrin donne le plus souvent l'impression d'être heureux d'être comme la lune.
C’est à croire que Laurent Mouchard-alias-Joffrin adore se faire détester. Vous savez, cette histoire tortueuse du sadisme du masochiste. Ce qui est sûr, c’est que le monsieur est content d’être qui il est. En tout cas, il n’est habité pas aucun doute. C’est tout au moins la figure qu’il affiche. Je me garderai bien de sonder plus avant.
Ce que je préfère, dans cette affaire, c’est que ça ne l’empêche pas de proférer des âneries, quoique parfois de façon insidieuse. Ainsi peut-il énoncer, dans sa chronique du samedi 30 mai, la chose suivante (la phrase est complète) : « Dans une suite de chapitres limpides, avec une grande rigueur philosophique, le livre repousse progressivement le lecteur sceptique dans ses retranchements, jusqu’à l’enfermer dans une alternative simple : continuer comme avant et violer consciemment un principe moral démontré ou bien réformer, plus ou moins vite, son mode de vie ». En lisant une telle phrase, je me demande ce qui prend Daniel Schneidermann et Mathieu Lindon, tous deux journalistes dans le quotidien de Joffrin-Mouchard, quand ils tressent des couronnes au monsieur, chez Alain Finkielkraut, pour son attitude après le carnage du 7 janvier à Charlie Hebdo.
Bon, à leur décharge, disons qu’ils commentaient l’attitude, non du journaliste, mais du patron de presse, pour saluer le courage qu’il fallait pour s’exposer en accueillant l’équipe décimée, en l’attente de ses nouveaux locaux. Soit. Reste que le journaliste montre assez studieusement et très régulièrement qu’il fait partie de la cohorte des thuriféraires extasiés d’un système dont les côtés haïssables montrent leur groin à tous les coins de rue. Philippe Muray appelait ce système « Empire du Bien ». Auquel adhère fiévreusement « la gauche de progrès et de gouvernement », comme elle a l’indécence de s’autocélébrer. Joffrin est en pole position, ou pas loin.
Quoi, il n’y a rien qui vous choque, dans la phrase que j’ai citée ? Qu’est-ce qu’il vous faut ? Vous pensez qu’on peut écrire sans que ce soit un mensonge : « … violer consciemment un principe moral démontré » ? D'abord, ça confirme l'appartenance du monsieur aux rangs de la gauche morale. Et l'insupportable de la chose.
Ensuite, vous devriez savoir, monsieur Joffrin, que la morale ne se démontre pas : vous avez déjà vu de la démonstration logique ou mathématique, en matière de morale, depuis que l’humanité a inventé la morale ? La morale est surtout affaire de consensus, d'adhésion unanime à une code organisant la vie commune. C’est à ce genre de tours de passe-passe sémantiques qu’on reconnaît les manipulateurs d’opinion : il fait semblant de considérer comme acquis le consensus. Au moment même où ce consensus est plus en miettes qu'il n'a jamais été.
De quoi s’agit-il, en l’occurrence ? D’une secte, comme l’affiche Joffrin dans son titre : « Une secte d’avenir ». Il commente le livre d’un certain Martin Gibert, Voir son Steak comme un animal mort, qui prend la défense des « Vegans ». Ce Gibert m'a tout l'air de donner dans la philosophie comme un navire donne de la bande. Cela veut dire qu’il a au moins l’ambition de donner l’impression de penser et de raisonner. C’est Joffrin qui le dit : « … avec une grande rigueur philosophique … ». Je veux bien.
Les Vegans sont ces fanatiques, ces fondamentalistes qui s’abstiennent de faire appel, en quelque circonstance que ce soit, à tous les produits d’origine animale. On connaissait la différence entre végétariens (pas de viande) et végétaliens (ni viande, ni lait, ni œufs, …). Les Vegans dénoncent en plus les chaussures en cuir, les fourrures, évidemment la corrida et la chasse. J’imagine qu’ils détestent l’expérimentation animale en laboratoire. J’espère juste qu’aucun n’est prêt à tuer des humains pour imposer ses convictions.
Tout ça part d’un sentiment louable : l’horreur légitime suscitée par la souffrance animale. Pas aussi insoutenable que la souffrance humaine, mais pas loin (j'ai lu L'Île du Docteur Moreau, de H. G. Wells, et puis je persiste à placer les valeurs sur une échelle). Mais face à ce déluge de bons sentiments qui voudrait bien culpabiliser tous les bouffeurs de viande, je ne peux m’empêcher de me tapoter aimablement le menton. Tout le monde connaît en effet l’histoire de l’imbécile qui regarde le doigt du sage quand celui-ci montre la lune. C’est le cas de Martin Gibert et, conséquemment, de Laurent Mouchard-alias-Joffrin.
Ce qui est embêtant de la part d’un philosophe, surtout plein d’une « grande rigueur philosophique », c’est qu’il ne considère que l’effet de surface, et qu’il se garde bien de remonter aux causes profondes du sort misérable que l’époque réserve aux animaux de batterie. Il en reste à l’émotion ressentie au spectacle pitoyable du sort qui attend les bêtes à l’abattoir.
Il est tellement dégoûté qu'il appelle tout le monde à cesser de manger de la viande, autrement dit à changer de mode de vie, mais surtout sans remettre en question le système qui a produit la situation. C’est ce que j'appellerai « un apitoiement de téléspectateur ». L’auteur voudrait peut-être étendre au règne animal la grand-messe du téléthon.
Car la chose à dénoncer ici, c’est avant tout la façon dont est organisée la production d’aliments à destination des humains. Ce qui est à dénoncer, c’est l’organisation industrielle de l’élevage et de l’agriculture, qui empoisonne impunément ce que nous mangeons. Ce qui est à dénoncer c'est la structure de l'économie qui découle d'une vision purement capitaliste du monde.
Vouloir transformer le monde en machine et le vivant en produit industriel (le plus rentable possible), voilà l'aspect hideux du monde contemporain, qu'il faudrait analyser et mettre en accusation. Ce dont se gardent bien Martin Gibert et son dévotieux commentateur. Ce que je reproche à ce monsieur Gibert, c'est de se laisser contaminer par la peste émotionnelle, et d'oublier le principal. Est-il sérieux, est-il cohérent de souffrir à ce point du sort fait aux animaux industriels et de ne pas haïr les gens et le système qui font tout pour l'aggraver ?
Par exemple la dernière trouvaille en date des entrepreneurs avisés : la désormais célèbre "ferme des mille vaches". Les Allemands font d’ailleurs beaucoup plus fort depuis plus longtemps que les Français, éternels suiveurs et éternels « petits bras ». Accessoirement, ce qui serait à dénoncer, c’est aussi la réduction de l’étiquetage au rayon « Boucherie » des supermarchés à des appellations du genre « viande de catégorie 1 », pour déréaliser un peu plus l’origine cruelle de ce qui doit atterrir dans l’assiette.
Martin Gibert, que je ne connais pas, n’est sans doute pas un imbécile, mais Laurent Mouchard-alias-Joffrin garde fièrement sur ses épaules sa belle tête-à-claque, et confirme dans sa chronique du 30 mai sa nature de flicaille de la gauche morale, pour tout ce qui concerne le registre sociétal.
Pour ce qui est de la façon dont va l’économie (ce que Marx appelait l'infrastructure), Laurent Mouchard-alias-Joffrin tient à nous rassurer en gardant un absolu silence sur la question : tout va pour le mieux dans le meilleur des mondes possibles. Façon de dire (en latin s'il vous plaît) à l'industriel de l'agroalimentaire : « Ego te absolvo ». Allez en paix, mon fils : faites-nous de la bouffe de merde, mais, je vous en prie, montrez-vous un peu humain avec les animaux.
Nos âmes (et nos estomacs) sont donc en de bonnes mains.
Voilà ce que je dis, moi.
09:00 Publié dans DANS LES JOURNAUX | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : journal libération, laurent joffrin, daniel schneidermann, mathieu lindon, alain finkielkraut, charlie hebdo, philippe muray, martin gibert, voir son steak comme un animal mort, végétariens, végétaliens, vegans, corrida, sectes, gauche morale, ferme des mille vaches, hg wells, l'île du docteur moreau
dimanche, 31 mai 2015
DÉPECER LA GRÈCE
D’abord quelques chiffres : 2010, la dette extérieure de la Grèce se monte à 110 % de son PIB ; cinq ans après, elle se monte à 180 %. Si vous comprenez, merci de m’expliquer. Apparemment la Grèce, non seulement n'a pas remboursé un centime à ses créanciers, mais elle a continué à acheter à tout va. Comme le dit quelqu'un : « Ils sont fous ! ».
Que s’est-il passé ? Oh, pas grand-chose : des gens très bien intentionnés ont prêté de l’argent à la Grèce, mais surtout sans se poser trop de questions sur l'éventuelle solvabilité du client. Par exemple, sous Papandréou arrivé en toute fin de mandat, pour acheter des avions F16, mais sans moteurs ni systèmes de mesures, charge aux dirigeants suivants de compléter la commande à Lockheed-Martin pour les faire voler. En empruntant encore. Et ne parlons pas des sous-marins qui penchent.
Quelques autres chiffres amusants : les banques prêtent à la Grèce (à 4,5 % ou +), mais aussi à la France (à 1,5 %), de l’argent qu’elles empruntent à la BCE (à 0,05 %). Ce qui veut dire qu'elles s'engraissent sans aucune nécessité, et avec le consentement des Etats et de l'Europe. Question : pourquoi les pays n’empruntent-ils pas directement à la BCE ?
Sur la base de ces quelques informations, on peut se demander ce qui se passe. Sans être en quoi que ce soit versé dans la finance internationale, je comprends une chose très simple, qui se voit comme le nez : les pays européens, dans un consensus général, acceptent de se faire racketter, aux frais des contribuables, par les mafias bancaires.
Il me semble que c’est Giscard qui avait inauguré ce truc fabuleux, dans les années 1970 : interdire à l’Etat d’emprunter à 0 % à la Banque de France, pour l’obliger à emprunter à des taux « intéressants » aux banques privées. Intéressants pour qui, les taux ? Peut-être voulait-il favoriser l’emploi dans ces établissements ?
Je ne connais pas dans les détails le dossier grec. J’ignore dans quelle mesure les élites politiques du pays se sont rendues complices des grands argentiers internationaux. Ce que je sais, c’est que, dans un but qui me reste obscur – et même incompréhensible –, des dirigeants politiques de haut vol ont prêté la main à des financiers d’élite pour faire en sorte que la Grèce ne puisse en aucun cas s’en sortir.
Il est même arrivé qu'on lui prête à des taux usuraires pour rembourser une dette précédente. Sans parler des conditions d' « ajustements structurels » (du genre diminutions des salaires et des pensions de retraite, privatisations d'entreprises publiques, etc.).
C'est sûr que les Grecs souffrent de « phobie des impôts » (maladie qui affectait un nommé Thévenoud, je crois, secrétaire d'Etat dans le gouvernement), mais ils sont loin d'être les seuls. C'est sûr qu'ils considèrent que frauder le fisc est un péché très véniel. Mais par ailleurs, il est de plus en plus probable que des gens, sûrement très bien intentionnés, et qui n'ont sûrement rien à se reprocher, travaillent activement à l'effondrement de la Grèce et à l'étranglement de son peuple. Quant à l'Europe concrète, je voudrais bien savoir quelque chose des forces concrètes (et opaques) qui la meuvent.
Pour comprendre l'ignominie, pour comprendre que ce sont les bandits qui sont aux commandes (FMI, Commission européenne, BCE, …).
Voilà ce que je dis, moi.
09:00 Publié dans DANS LES JOURNAUX | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : europe, commission européenne, angela meerkel, troïka, françois hollande, france, allemagne, grèce, grexit, papandréou, bce, banque centrale européenne, mario draghi, christine lagarde, fmi, banque de france, giscard d'estaing, france culture, ruth stégassi, émission terre à terre, bande dessinée, astérix, obélix, idéfix, astérix aux jeux olympiques
samedi, 30 mai 2015
LE FOOTBALL BAS LE MASQUE
L'extraordinaire ferveur populaire qui porte les grandes cérémonies sportives depuis quelques décennies, aidée par la massification de la retransmission médiatique, y est sans doute pour quelque chose. Parce que les foules ferventes qui se pressent autour des petits écrans qui retransmettent, toutes compétitions confondues, les spectacles sportifs de la planète, ces foules sont avides de « beaux gestes », de performances, d’exploits physiques, et qu’elles se moquent bien de savoir dans quelles conditions morales toutes ces belles choses sont produites.
L’affaire Festina n’a pas tué le Tour après 1998. Le bouquin de Willy Voet (Massacre à la chaîne, Calmann-Lévy) pas plus que celui d’Erwan Menthéour (Secret défonce, Jean-Claude Lattès) n’a dégoûté les spectateurs qui se massent dans les vingt et un lacets qui mènent à l’Alpe d’Huez.
Les spectateurs d’OM-VA (Tapie et Mellick sont plus insubmersibles que le pauvre Glassmann : « Le premier qui dit la vérité … ») n’ont pas été dégoûtés par la grosse magouille et continuent à venir adresser au stade leurs prières au dieu football.
Et les savants calculs d’Antoine Vayer, qui ont eu leur heure de gloire dans quelques journaux, ont beau démontrer par A + B qu’au-delà d’une certaine puissance développée (mesurée en watts : de 410 à 450 watts, le dopage est mathématiquement prouvé, et à partir de 350, il peut y avoir des doutes ; cf Jan Ullrich, 1997, la croix-de-Chaubouret : 494 watts sur 29 minutes), il n’est pas possible à un cycliste de ne pas avoir été « aidé » dans sa performance, les compétitions succèdent aux compétitions comme autrefois, circulez y a rien à voir, the show must go on.
Tout le monde sait forcément que toutes les messes sportives, à commencer par les plus grandes, sont le lieu idéal de toutes les corruptions (triches, dopage, trafics, enrichissements, blanchiments, ...), à cause des masses astronomiques d’argent capables de s’abattre comme des griffes sur tous les acteurs et animateurs du spectacle. Le public, s’il ouvre tout grand les yeux, se bouche le nez sur les remugles qui émanent de l’arrière-cour de la plupart des milieux sportifs (le sport amateur n’est pas indemne).
On s'étonne que le téléspectateur moyen, qui gratte le sol de sa basse-cour comme tout le monde, se moque de savoir par quel miracle Zlatan Ibrahimovic, dans sa stratosphère, perçoive un « salaire » ultraluminique de quinze millions d’euros par an, lui-même battu à plate couture par Thiago Silva (vingt-trois millions). Ce qu’il veut, c’est voir « du beau jeu ». Il veut voir des buts. Ça suffit à son bonheur. Il se dit qu’il y a le Qatar, comme si le Qatar sanctifiait tout.
Tout le monde se moque en vérité de savoir que le sport est devenu un « vase d’expansion » pour l’affolant surplus de liquidités que dégagent les activités humaines, et plus particulièrement certaines, plus « spécifiques ». Le terrain de jeu de toutes sortes de mafias, des plus respectablement installées aux plus clandestines et criminelles. Ces terrains de jeu portent les doux acronymes d’UCI, CIO, UEFA, FIFA, ASO (l'entreprise qui possède la marque "Tour de France") et autres honorables confréries.
On sait parfaitement que le Comité International Olympique n’a plus rien à voir avec les grands idéaux de monsieur de Coubertin, et qu’il est depuis lurette une simple entreprise privée (de droit suisse), occupée de ses profits et de contrats juteux, devant laquelle les Etats du monde entier font des courbettes. On sait que Juan Antonio Samaranch a désigné lui-même son successeur (Jacques Rogge), fait coopter son fils au CIO, tué l'amateurisme olympique et ouvert les vannes au règne de l'argent. On sait aussi que la justice américaine l'a soupçonné de corruption lors de je ne sais plus quels JO : malheureusement, il était protégé par son statut.
Larrons en foire (j'ai un peu agrandi la légende).
Alors la FIFA, maintenant ? Mais bien sûr, voyons ! Jusqu’aux sourcils ! Combien font semblant de s’offusquer et de prendre des airs outragés ? Ce n’est pas moi qui le dis, c’est Guido Tognoni, ancien cadre de la Fédération (1984-95 et 2001-03) et ex-conseiller de « parrain Blatter » : « La FIFA, c’est une mafia, d’une certaine façon. On résout les problèmes en famille » (Le Monde, 28 mai). Tous ceux qui connaissent un peu la question disent que tous ceux qui connaissent la question le savent. Bref, tout le monde est au courant. La FIFA ? Une « Association à but non lucratif » assise sur des réserves de plusieurs milliards de dollars !!! Un "association" de quoi, en réalité ?
Se demander si la FIFA peut faire elle-même la police dans ses rangs (oui, il y a un « Comité d’Ethique »), c’est comme demander à BNP-Paribas (quelqu'un me souffle qu'il s'agit de la Société Générale : dont acte, mais qu'est-ce que ça change sur le fond ?) d’empêcher Jérôme Kerviel de miser des sommes déraisonnables : quand le jackpot est au bout, aucun « n+1 » n’y regarde de trop près. C'est comme demander au type qui tient une machine à cash d'empêcher un employé zélé de lui faire gagner le pactole. C'est comme demander au voyou de faire la police. Si Havelange a légué son territoire à Blatter, ce n'est pas sans raisons : on s'arrange entre membres de la « famille ».
Et si ça rate, il y aura toujours les lampistes (Kerviel). Ou des « individus », comme l’a déclaré Joseph Blatter le 28 mai (étant entendu que la « structure » en tant que telle est parfaitement saine). Le truc des « brebis galeuses » (d’autres, en d'autres temps, disaient « vipères lubriques »), ça marche toujours. En s’offrant des gros responsables, les Américains viennent de taper fort (peut-être pas sans arrière-pensées à l’horizon 2018, suivez mon regard).
En vérité, la FIFA est conçue exactement pour faire ce qu’on lui reproche aujourd’hui. Elle a assez d'argent pour acheter ce qu'elle veut et qui elle veut. A charge de revanche. Il en est strictement de même du CIO, de l’UCI, etc. Le problème survient quand ça devient vraiment trop voyant, et que ça saute aux yeux d’un plus large public. Platini n’a-t-il pas révélé avoir voté en faveur du Qatar pour la coupe du monde 2022, au grand dam d’une bonne partie du milieu ? Il a brisé l'omerta.
La FIFA est une entreprise florissante faite pour vendre au plus offrant une occasion unique d’acquérir un prestige géopolitique incomparable. La FIFA est en situation de monopole : elle peut dicter sa loi à tous les puissants qui veulent passer une peu de strass et de brillant sur leur pouvoir. Il est au fond normal qu’il se passe dans le football la même chose que dans le reste d’un monde capitaliste déchaîné et férocement dérégulé. Comme le dit Roberto Saviano dans Extra pure, si l’on en reste au plan économique, rien ne distingue un circuit honnête et normal d’un circuit criminel. Est-ce que ça donne envie de regarder des matchs ?
Ce n’est pas le foot qui est laid, c’est ce qu’en a fait le capitalisme. Pourquoi voudriez-vous que ça change, tant que le public, béat et baba, applaudit les bandits ? Puisque tout le monde voit clair ? Et que tout le monde en redemande ?
Voilà ce que je dis, moi.
09:00 Publié dans DANS LES JOURNAUX | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : football, fifa, joseph blatter, affaire festina, tour de france 1998, willy voet, erwan manthéour, massacre à la chaîne, secret défonce, om-va, bernard tapie, jacques mellick, glassman, antoine vayer, zlatan ibrahimovic, thiago silva, qatar, uci, cio, comité international olympique, uefa, amaury sport organisation aso, joao havelange, jacques rogge, baron de coubertin, fédération internationale de football, journal le monde, bnp paribas jérôme kerviel, roberto saviano, extra pure, larrons en foire
vendredi, 29 mai 2015
POUR TEDI PAPAVRAMI 2
2/2
Tedi, aux yeux de son père, n’est pas assez acharné au travail. Oui, c’est bon, il a ce véritable don violonistique, prodigieux, et puis alors ? Le problème, c’est qu’il aime glander, jouer dans les rues avec son copain Albano : c’est un gamin normal, quoi. C’est la raison pour laquelle, quand il se retrouvera au Conservatoire Supérieur de Paris, en dehors de sa virtuosité instrumentale, il se retrouvera d’une nullité crasse dans toutes les disciplines académiques, à commencer par le solfège. Un comble, qui mettra son père en fureur.
Ce qui domine, c'est que le gamin stupéfie son monde, jusqu’à l'immense Pierre Amoyal, qui accepte de le prendre comme élève. Il se voit offrir une bourse d’études. Une faveur spéciale du « Guide Suprême » délivre un bon de sortie (une rarissime exception) du territoire, et voilà le père et le fils partis pour Saint Jean de Luz (où habite le violoniste), via Paris et l’ambassade d’Albanie, étroitement contrôlés et suivis par les fonctionnaires : attention, ne pas dévier du programme.
Bon, je passe sur les détails. La prestation du petit Tedi (on est en 1983, il a douze ans) convainc d’emblée Amoyal, qui le prépare activement pour le concours d’entrée au CNSM de Paris, afin de le prendre dans sa classe (une autre étant tenue par Gérard Poulet). Simple formalité : il y sera reçu premier sur trois cents : c'est sûr, il stupéfie son monde.
Mais l’Albanie d’Enver Hoxha reste impitoyable : la mère ayant rejoint son fils, les choses se gâtent quand le père débarque à Paris avec l’intention de ne plus retourner à Tirana. Ils seront obligés de demander l’asile politique, ce qui déclenchera des représailles contre la famille restée au pays. Le sentiment de culpabilité des exilés n’en sera que plus vif. Le réseau des nouveaux amis, mais aussi la gendarmerie française leur permettront d’échapper aux recherches des services secrets du dictateur. Ils apprendront que leur maison a été rasée.
Un dernier mot sur la musique proprement dite. Le petit Tedi est tellement doué qu’il transpose pour le violon, « à l’oreille », les sonates du célèbre disque « Horowitz-Scarlatti », qu’il adore. Sa première idole du violon n’est pas n’importe qui : sa Seigneurie Jascha Heifetz, dont l’époustouflant mariage de l’expressivité et de la virtuosité technique l’impressionne au plus profond.
Mais il sera aussi saisi par l’impeccable maîtrise de Nathan Milstein, qu’il vient écouter à Bordeaux. Il cite encore le nom du grand Christian Ferras, dont il évoque le caractère dépressif, l’alcoolisme, puis la défenestration volontaire, à même pas cinquante ans. Il a une pensée pour Zino Francescatti, un autre grand.
Ajoutons pour finir qu’une fois en France, Tedi Papavrami a fini par se soumettre, volontairement et de lui-même, à une discipline de fer dans le travail du violon, s’astreignant à d’interminables exercices, parmi lesquels des gammes exécutées avec la plus grande lenteur, dans le but d’arriver à la plus extrême justesse (est-ce Saint-Saëns, Fauré ou Poulenc qui déclarait,: « Tous les violonistes jouent faux, mais il y en a qui exagèrent » ?). Il s'est aussi mis à la traduction : prenant la succession de l'excellent Yusuf Vrioni (mort en 2003), c'est lui qui a traduit tous les derniers livres d'Ismaïl Kadaré.
Au total, un livre excellent. Bien sûr, l’auteur nous parle de son enfance, de ses chiens, de ses chats (qu’il martyrisait), de l’amour de sa vie (Silva), qui n’a jamais dépassé le stade du platonisme contemplatif, de ses sentiments, de ses impressions, et tout et tout, mais on lui pardonne, car il parle aussi et surtout, sobrement et sans pathos, de ce qu’il a fait, des événements, des situations que lui et sa famille ont traversés. Il dresse aussi quelques portraits et paysages albanais.
Par exemple, il découvre un jour, stupéfait, un aspect de Tirana qu’il ignorait totalement. On lui dit un jour de se rendre dans la maison de Shpati, muni de son violon. Elle est située dans un quartier gardé par des militaires armés, interdit à tous ceux qui n’ont pas une autorisation expresse. Il faut dire que Shpati est le petit-fils d’Enver Hoxha en personne, le dictateur bien aimé, le petit père du peuple. Tedi constate au cours de son incursion dans ce monde tabou qu’il y a deux villes, dans la capitale albanaise.
L’une pour la masse : elle est grise, délabrée, ses rues ne sont pas toujours bitumées, la télévision y est en noir et blanc, les voitures y sont rares, bref, c’est la ville pour tout le monde. Et voilà qu’au beau milieu de cette ville moche, existe une autre ville, réservée à quelques-uns, où se concentrent toutes les « saloperies » capitalistes, les « immondices » impérialistes et autres modernités « dégénérées » (télé couleur en particulier), que tout ça a l'éclat du neuf, et que tout ça est strictement réservé au petit cercle d’élus qui détient le pouvoir. En Russie soviétique, ça s’appelait la Nomenklatura.
Le 20ème siècle a décidément légué bien des laideurs au 21ème.
Voilà ce que je dis, moi.
09:00 Publié dans LITTERATURE, MUSIQUE | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : littérature, musique classique, tedi papavrami, pierre amoyal, cnsm paris, gérard poulet, albanie, enver hoxha, jascha heifetz, vladimir horowitz, nathan milstein, christian ferras, zino francescatti, saint-saëns, gabriel fauré, francis poulenc, ismaïl kadaré, yusuf vrioni, tirana, communisme
jeudi, 28 mai 2015
POUR TEDI PAPAVRAMI 1
1/2
Je n’ai jamais mis les pieds en Albanie. Je connais fort peu d’Albanais. Un très curieux livre d’un nommé Rexhep Qosja (prononcer Redjep Tchossia, paraît-il), intitulé La Mort me vient de ces yeux-là.
Une BD d’un nommé TBC, Europa, en deux épisodes, sur quelques mafias venues de par là-bas (on va dire Balkans) : plus brutal, plus noir et plus désespéré, j’imagine que c’est toujours possible, mais.
Oh, et puis il y a les faits divers : quelques saisies d’héroïne dans les milieux albanais de la banlieue lyonnaise. Et puis un drôle de business, aussi : un immeuble destiné à la démolition dans un quartier en rénovation, squatté par une bande d’Albanais qui « louent » les « logements » à des compatriotes au tarif de 150 € la semaine. Et la police n’a pas le droit d’intervenir tant que personne n’a porté plainte. Mais est-ce qu’un sans-papiers porte plainte ? Ce serait étonnant, non ? Le monde actuel est décidément délicieux.
Le Progrès, 27 mai 2015 (p. 10).
Non, l’Albanie, ce n’est pas que ça, faut pas croire. Il y a le grand Ismaïl Kadaré et ses livres, Le Pont aux trois arches, Le Général de l’armée morte, Avril brisé, Les Tambours de la pluie, Qui a ramené Doruntine ?, …. Et puis il y a Tedi Papavrami. Il n’est pas écrivain. Il a quand même écrit un récit autobiographique, à l’incitation des quelques amis conseilleurs. Le livre s’intitule Fugue pour violon seul (éditions Robert Laffont, 2013).
Ne pas s’attendre à de la littérature. L’ouvrage se veut un témoignage. Car l’Albanie dont il parle est celle d’Enver Hoxha (prononcer Hodja ?), alias « Oncle Enver », l’avatar albanais du « Guide Suprême », l’égal des Staline, Ceaucescu, Pol Pot, à l’échelle d’un pays de 3.300.000 habitants, grand comme la région Poitou-Charente (dixit l’auteur, je n'ai pas vérifié). Je veux dire leur égal dans la folie tyrannique, la joie sanguinaire et la férocité des méthodes policières.
Le cher homme était même assez atteint pour quitter le Pacte de Varsovie, au grand dam du « Grand-Frère » soviétique, et se brouiller avec l’autre « Grand-Frère » Mao Dze Dong, et transformer son petit pays en forteresse retranchée du reste du monde, derrière ses barbelés. Ceux qui voulaient s’échapper de ce « paradis communiste » avaient tout intérêt à réussir du premier coup. Il va de soi que le niveau de vie et l’état économique et industriel du pays sont tombés plus bas que ceux du Burkina-Faso, ou même du Malawi. Ça explique peut-être les mafias.
Mais Tedi Papavrami n’était pas un gamin ordinaire : il appartient à l’espèce rarissime des enfants prodiges, des génies précoces. Ça ne s’explique pas : c’est comme ça. Lui, c'est le violon. Quelqu’un qui vous aligne aussi net les Caprices de Paganini à neuf ans, vous dites comme Victor Hugo dans William Shakespeare (2, IV, 3) : « A Pégase donné, je ne regarde point la bride. Un chef d’œuvre est de l’hospitalité, j’y entre chapeau bas ; je trouve beau le visage de mon hôte ». Il faut voir comment un gamin de onze ans est capable de vous envoyer dans la figure la Campanella de Paganini, en Grèce en 1982 (cliquez pour 10' 21" d'étonnement, ce n'est pas toujours « propre » dans les sautillés, mais bon). Il a onze ans. Et même pas peur.
J’ai commenté, il y aura bientôt un an (22-24 juin 2014) le livre de Nikolai Grozni, Wunderkind (« enfant prodige »), qui m’avait frappé de saisissement, par la terrible âpreté de l’aventure. Lui, c'était le piano. Le monde bulgare de l'époque soviétique, comme une jungle où n’évoluent que des fauves, qui n’attendent que l’occasion de s’entredéchirer, sous un ciel de pierre, dans un air irrespirable, au fond d'une bassine où bouillonne la noirceur. Un livre absolument glaçant et passionnant, avec au centre un Chopin hissé jusqu'au tragique.
Avec Papavrami, l’ambiance est plus amène, parfois même pleine d'urbanité. Grozni détestait son père, n’aimait pas trop sa mère. C’était sans doute réciproque. La famille Papavrami, d’origine bourgeoise, est tolérée par le régime communiste, qui lui laisse la maison ancestrale, avec son jardin, ses mandariniers, son mur protecteur, ses souvenirs. Mais c'est une famille solide, à l'ancienne. Une famille, quoi.
L’équilibre, socialement et politiquement, est toutefois instable. Papa travaille au « lycée artistique », dans la section musique, où sa réputation d’excellent pédagogue du violon fait merveille, en même temps qu’elle le protège tant soit peu des rigueurs du régime. C’est simple : tout le monde le respecte, voire le craint.
Il est frustré dans sa carrière depuis la sortie du Pacte de Varsovie, qui l’a obligé à retourner à Tirana avant d’avoir achevé ses études à Vienne (où il a acheté un violon Bergonzi, dans lequel un luthier parisien ne verra plus tard qu'un faux). Mais la famille vit dans une bonne ambiance de tranquillité, dans une maison agréable, avec un jardin clos de murs.
Des privilégiés, somme toute.
Voilà ce que je dis, moi.
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mercredi, 27 mai 2015
À PROPOS DU PANTHÉON
Que vous inspire la « panthéonisation » de ces quatre grands résistants, grands républicains, Germaine Tillion, Geneviève De Gaulle-Anthonioz, Jean Zay, Pierre Brossolette ?
Total respect à la mémoire de ces personnes, à ce qu'elles ont été, à ce qu'elles ont fait.
Sur la cérémonie en elle-même, excusez-moi, mais j’entends, quelque part au fond du jardin secret, une rengaine têtue, une chansonnette obstinée :
« Pauvres rois, pharaons ! Pauvre Napoléon !
Pauvres grands disparus gisant au Panthéon !
Pauvres cendres de conséquence !
Vous envierez un peu l’éternel estivant
Qui fait du pédalo sur la vague en rêvant,
Qui passe sa mort en vacances ».
Excusez-moi, mais la perspective d'entendre François Hollande prononcer un « discours solennel », ça ne passe pas. Désolé, je ferme les écoutilles à double tour.
09:05 Publié dans DANS LES JOURNAUX | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : panthéon, jean zay, pierre brossolette, geneviève de gaulle-anthonioz, germaine tillion, françois hollande, république, france, société, politique, résistance, deuxième guerre mondiale, georges brassens, supplique pour être enterré à la plage de sète
« POSSÉDÉS » ou « DÉMONS » ?
Ci-contre, l'édition "club" : lire "bessy" (ou "biessy ?"), qui veut dire "Les Démons".
2/2
La deuxième moitié du livre nous fait prendre pied sur le terrain politique. Verkhovensky fils (Piotr Stépanovitch) est le chef d’une section clandestine de révolutionnaires. Il fait croire à ces exaltés tant soit peu nihilistes que celle-ci n’est qu’une cellule dans un vaste réseau dirigé depuis l’étranger par une sorte de Comité Central.
La réunion (intitulée « Chez les nôtres ») a quelque chose de proprement stupéfiant de prescience du régime qu’instaureront beaucoup plus tard Lénine, puis Staline. Sorties du cerveau de Chigaliov (le théoricien qui forme avec l'activiste Verkhovensky la transposition dans le roman du nihiliste frapadingue et historique Netchaïev) et expliquées par « le professeur boiteux », on lit des choses comme : « Partant de la liberté illimitée, j’aboutis au despotisme illimité ».
Plus fort encore : « Pour résoudre définitivement la question sociale, il propose de partager l’humanité en deux parts inégales. Un dixième obtiendra la liberté absolue et une autorité illimitée sur les neuf autres dixièmes qui devront perdre leur personnalité et devenir en quelque sorte un troupeau ; maintenus dans une soumission sans bornes, ils atteindront, en passant par une série de transformations, à l’état d’innocence primitive, quelque chose comme l’Eden primitif, tout en étant astreints au travail ».
Et Verkhovensky explique plus tard à Stavroguine : « Son projet est remarquable (…). [Chigaliov] établit l’espionnage. Chez lui, tous les membres de la société s’épient mutuellement et sont tenus de rapporter tout ce qu’ils apprennent. Chacun appartient à tous, et tous appartiennent à chacun. Tous les hommes sont esclaves et égaux dans l’esclavage ». Ah bon ? Ça vous rappelle quelque chose ?
Et puis encore : « La soif d’instruction est déjà une soif aristocratique. A peine laisse-t-on s’installer la famille ou l’amour, que naît aussitôt le désir de propriété. Nous tuerons ce désir : nous développerons l’ivrognerie, la calomnie, la délation ; nous plongerons les hommes dans une débauche inouïe, nous détruirons dans l’œuf tout génie ».
Allez, une dernière pour la route : « Seul le nécessaire est nécessaire, telle doit être dorénavant la devise de l’humanité. Mais il faudra aussi lui accorder de temps en temps quelques convulsions ; et nous, les chefs, nous y pourvoirons. Les esclaves doivent avoir des maîtres. Obéissance complète, dépersonnalisation absolue ; mais tous les trente ans, Chigaliov autorise les convulsions ; et alors tous se jetteront les une sur les autres et s’entre-dévoreront ; mais jusqu’à une certaine limite seulement, uniquement pour vaincre l’ennui. L’ennui est un sentiment aristocratique. La société de Chigaliov ne connaîtra plus les désirs ». Précisons que Stavroguine, qui écoute ce galimatias, se demande si l'autre n'est pas carrément cintré ou complètement ivre.
Que Chigaliov (à moins que ce ne soit Verkhovensky) et son programme transposent (en caricaturant ?) le hélas trop authentique et historique Netchaïev et son Catéchisme du révolutionnaire ne fait guère de doute. Intéressant de savoir aussi que Lénine s’inspira de celui-ci pour concevoir dès 1902, puis organiser le parti bolchévik qui allait prendre le pouvoir quinze ans plus tard, avec les suites bien connues, mises en musique par Staline et consort.
Pour confirmation, on se reportera à la remarquable bande dessinée La Mort de Staline, de Fabien Nury et Thierry Robin, pour se faire une idée de l’ambiance terrifiante qui régnait au sommet de l’Etat soviétique, y compris et surtout parmi les plus proches du pouvoir suprême, qui savaient comment ils étaient arrivés là, et qui avaient donc toutes les raisons de redouter le pire à tout instant de la part de leurs meilleurs « amis ».
Molotov, Krouchtchev : ils se les caillent sur le balcon, parce que Béria a fait poser des micros partout à l'intérieur. Ça ne les empêche pas de préparer l'avenir d'un certain nombre de leurs « amis » : « De très longues listes, où l'on n'oubliera personne ». Il n'y a pas que dehors qu'il fait très froid. Brrr ...
Le projet de ce petit noyau de révolutionnaires, à qui l’on a fait croire que la même chose se passerait partout dans les campagnes russes, est de gâcher la « fête » voulue par Julie Mikhaïlovna, épouse du gouverneur Von Lembke, une sorte de fantoche et de mari falot, et de semer le trouble dans la ville par tous les moyens, dans l’espoir de provoquer l’insurrection qui balaierait l’ordre établi.
On ne résume pas Les Possédés. Il faudrait encore citer le personnage de Lébiadkine, vaguement officier en retraite et diplômé d’ivrognerie, qui bat sa sœur, laide, boiteuse et plus qu’à moitié folle. On apprendra que celle-ci (Maria Timopheïevna) a été épousée autrefois, par bravade et par Nicolaï Vsévolodovitch (c'est un zeugma), fils de Varvara Petrovna Stavroguine.
Ce personnage, qui occupe dans le roman une place centrale, on découvre dans un chapitre censuré (« La Confession de Stavroguine », ou « Chez Tikhone »), qu’il a longtemps été complètement barré, désespéré, capable de prendre au pied de la lettre, dans une réunion mondaine, le nommé Gaganov affirmant : « On ne me mène pas par le bout du nez », le saisissant aussitôt par l’appendice nasal et lui faisant traverser le salon.
La vie ne lui est de rien, semble-t-il, aussi incapable de s’aimer que d’aimer Lisaveta Nicolaïevna. On comprend, dans sa « confession », qu’il a sans doute violé une fillette, qu’il n’empêche pas ensuite de se pendre après qu'elle lui a déclaré : « J’ai tué Dieu ». Et pourtant, le comploteur Piotr Stépanovitch l’admire tel un demi-dieu, qu’il rêve de voir sur le trône de Russie en tant que « tsarévitch Ivan ». Allez comprendre. Je garde après lecture le sentiment que Stavroguine est un personnage romanesque incohérent (un peu à l'image du livre pris dans son entier).
Lébiadkine et sa sœur seront assassinés, soi-disant par l’ancien forçat évadé Fédka qui croyait trouver une forte somme. Les assassins présumés ont tenté de dissimuler leur forfait en mettant le feu à la maison au cours de l’incendie qui a détruit tout un quartier de la ville, mais la maison, isolée au milieu d’un terrain vague, a refusé de brûler. Fédka sera lui-même retrouvé mort, sur un chemin.
Il semblerait aussi que Dostoïevski a voulu régler quelques comptes avec l'écrivain Tourgueniev, qui s'est paraît-il offusqué du portrait dressé par l'auteur de l'écrivain Karmazinov, qui le présente sous un jour très peu sympathique. Entre « amis », n'est-ce pas.
Alors maintenant, quel est le vrai titre du livre ? J’avais depuis longtemps dans mes rayons Les Démons, dans une édition « club ». Et puis j’ai découvert que ce livre et le « poche » que je viens d’acheter (traduction de Boris de Schloezer) à 1,60 € ne font qu’un. Enfer et damnation. Il paraît qu’il faut dire « Les Démons ». Même si la perspective en est modifiée, ça ne change rien à la folie des personnages.
Ce qui domine de très haut, une fois qu’on l’a refermé, c’est à coup sûr la dénonciation violente de cette folie destructrice contenue dans l’utopie véhiculée par le petit groupe de conspirateurs dirigé par Verkhovensky, et mû par les théories de Chigaliov. Toute la seconde moitié des Possédés est un pamphlet dirigé contre la folie criminelle de Netchaïev et de tous ses semblables. Faut-il les appeler « communistes », « socialistes », « nihilistes » ? Ou plus simplement : « association de malfaiteurs » ?
Je pencherais volontiers vers la dernière hypothèse (il est vrai que l'enrichissement personnel n'est le but d'aucun "révolutionnaire"). En me disant que Dostoïevski nous parle d'un temps, après tout, pas aussi lointain qu'on pourrait le penser.
Voilà ce que je dis, moi.
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mardi, 26 mai 2015
« POSSÉDÉS » ou « DÉMONS » ?
1/2
J’ai toujours entretenu une relation ambivalente avec Fédor Dostoïevski, échaudé vers l'âge de quatorze ans par des tentatives infructueuses dans L'Eternel mari et Le Joueur. Il a fallu du temps : rien de tel que l'étude de Cinna en classe de cinquième pour vous dégoûter durablement de Corneille. Et puis un jour, j’ai eu la chance de découvrir Les Frères Karamazov, qui m’avait transporté très loin et très haut. Si j’avais commencé par L’Idiot ou Crime et châtiment, je n’aurais probablement pas donné suite à l’invitation.
J’ai en effet laissé tomber L’Idiot à la page 454 (sur 751, édition Pléiade), pour dire que j'ai insisté. J’ai abandonné le prince Mnichkine en pleines parlotes. Crime et châtiment, c’était à la page 378 (sur 761, éditions Garnier), pour l’exacte même raison : des causettes interminables en cercles plus ou moins larges, dans des lieux plus ou moins confinés, voire inconfortables.
Après avoir achevé Les Possédés, œuvre qui recèle quelque chose de prodigieux, même si j’ai du mal à situer ce prodigieux-là, je me dis que la « parlote » n’est pas forcément un vice rédhibitoire dans un roman. Mais je devrais plutôt parler de « conversations ». Il m'appert même l'éventualité que la conversation ait été érigée par Dostoïevski en système romanesque à part entière.
Dostoïevski, je vais vous dire : c’est très spécial. Le lecteur est obligé de découvrir les faits, les situations, les relations à travers les yeux, la bouche et les oreilles de chacun des personnages. S’il veut saisir de quoi il est question, le lecteur doit endosser complètement un nouveau rôle à chaque changement d’interlocuteur, à travers les propos que les uns et les autres tiennent, au gré des circonstances. Une sacrée gymnastique : une nouvelle personnalité, sans même savoir de quoi celle-ci est faite, comme si vous changiez en permanence d'yeux, de cerveau, d'identité. Le récit à la troisième personne est réduit à la portion congrue.
L’auteur se garde bien d’expliquer quoi que ce soit, il embarque le lecteur dans une incroyable succession de points de vue spécifiques et de subjectivités embrouillées, souvent exaltées, ambiguës et contradictoires, toujours possédées par une passion inintelligible à la première approche. Comme une pièce de théâtre écrite dans une langue qu'ignore le spectateur, à qui l'auteur dirait : débrouille-toi. Sans sur- ou sous-titrage.
Disons-le, sur les 350 premières pages (la moitié), le sujet du livre reste dans un brouillard savamment entretenu. Ce n’est pas pour rien qu’on lit dans une notice consacrée au bouquin : « Aucune œuvre de Dostoïevski n’est plus difficile à lire que celle-ci, par la confusion et l’obscurité qui enserrent tous les personnages ».
Dostoïevski adopte une convention narrative complexe : c’est à force de s’emmêler dans les confrontations et interactions orales entre les personnages que le lecteur chemine vers la compréhension des caractères, des relations, des projets et intentions des uns et des autres. Le narrateur, qui s’affiche comme simple « chroniqueur » (sous le nom de « G…v »), se contente de témoigner de ce qu’il a vu, entendu, compris, même s’il lui arrive, comme n'importe quel ethnologue dans son enquête chez les Rakotofiringa ou les Pitjantjatjara, de pratiquer l’ « observation participante ».
Attention, ça ne l’empêche pas d’être bizarrement très au fait de tout un tas de détails concernant des événements auxquels il n’a carrément pas pu assister, et que nul n'a pu lui rapporter. Ainsi, comment s’y prend-il pour raconter dans le moindre détail l’assassinat de Chatov, qui n’a eu aucun autre témoin que la demi-douzaine de participants ? Ce n’est à coup sûr à aucun d’eux (Liamchine, Lipoutine, Piotr Stepanovitch, Virguinski, Chigaliov …) que serait venue l’idée de tout lui révéler. Disons que c’est tellement bien fait que le lecteur n’y voit que du feu, et gobe tout sans se poser de questions.
Il y a deux livres dans Les Possédés : la première moitié offre la peinture de la vie ordinaire et quotidienne d’une ville de la campagne russe, une ville dont on ne sait pas grand-chose de la taille ni de la distance qui la sépare de Pétersbourg, et où s’agitent un certain nombre de personnages plus ou moins oisifs qu’on verra en action dans la deuxième moitié. Leur occupation principale semble être de se rendre les uns chez les autres pour parler.
Chacun de ces personnages, à commencer par Stépane Trophimovitch Verkhovensky, intellectuel paresseux et parasite qui vit aux dépens de Varvara Pétrovna, riche veuve Stavroguine, est un peu fêlé, bizarre à sa façon, animé d’un déséquilibre qui lui appartient en propre, comme un trait d’identité. Tous se ressemblent sur un point : la médiocrité, qui confine en plus d’une occasion à la niaiserie et au ridicule.
Cette partie est pour l’essentiel énigmatique : on se demande où ça va. La deuxième moitié fonctionne donc à la manière d’un dévoilement, bien que le lien de nécessité entre les deux soit pour le moins évanescent. Sous les tensions, les désirs, les haines et les hypocrisies, on comprend que le masque des conventions et des rapports sociaux cachait une partie humainement âpre, qui trouve ses origines dans le passé et à l’étranger. Plusieurs des personnages ont séjourné, jadis ou naguère, aux Etats-Unis, en Suisse, à Berlin. Ce qu’ils y ont fait n’est évoqué que pour créer autour d’eux un climat de suspicion ou d’incertitude.
Voilà ce que je dis, moi.
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lundi, 25 mai 2015
DÉTAILS 4
Ferme l’ombre en sortant de toi.
Laisse dans l’insu
Le souvenir des pas.
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VU A LA CROIX-ROUSSE.
Sommité de la statue de Joseph Marie Jacquard, sur la place de la Croix-Rousse.
Où l'on voit que Jacquard avait des pellicules.
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dimanche, 24 mai 2015
L'ASPECT DES CHOSES
Deux photos d'un même objet (juré-craché : à preuve le semis de piqûres qui remonte à partir de la gauche).
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samedi, 23 mai 2015
ÉCOLE À LA DÉRIVE : NATION NAUFRAGÉE
Je suis assez étonné par une des caractéristiques du débat sur la réforme du Collège. Le lecteur de journaux, l’auditeur, le téléspectateur se voient assener à répétition cette constatation brutale et péremptoire : « Le collège en France, par rapport à tous les voisins européens, est le plus inégalitaire ». Même si la réalité est incontestable (150.000 « déchets » par an, ce n'est pas mal du tout), la mise en avant de cet argument par les réformateurs, Hollande-Valls-Belkacem en tête, me semble pour le moins curieuse.
Les tâches qui incombent à l’école deviennent de plus en plus écrasantes. Car il n’y a pas que l’ « inégalitaire » des « chances ». Il y a aussi l’ « inégalitaire » garçon-fille et la « reproduction » des « stéréotypes » de « genre ». Le premier réflexe de tous les importants qui causent dans le poste, face au moindre « problème de société », est de s’exclamer, scandalisés : « Mais enfin, que fait l’école ? ». Il faut que ce soit dit : si tout va si mal dans la société, c’est la faute de l’école.
Comme si la barque n’était pas assez chargée, on exige encore de l’école qu’elle « éduque à la citoyenneté », qu’elle « enseigne la tolérance » et le « respect des différences ». Qu’elle devienne le centre névralgique de la « lutte contre l’antisémitisme », du « combat contre le racisme » et « contre l’islamophobie », de la « guerre au sexisme et à l’homophobie ». N’en jetez plus, la cour est pleine.
C’est sûr, l’unanimité se fait autour d’un même appel, d’une même prière, d’un même espoir, d'une même invocation pathétique : c’est à l’école de sauver la société. C’est de l’école que la société attend désormais le salut. Comme si toute la vie de la collectivité émanait de cette essence suprême : l’Ecole (« républicaine » en général et si possible).
Ma parole, ils sont tous tombés sur la tête. En vérité, les Hollande-Valls-Belkacem enfilent les mensonges et racontent toute l’histoire à l’envers. C’est la société qui fabrique l’école, et non le contraire. C'est pour se fabriquer elle-même, plus tard, on est bien d'accord, mais il reste que c'est la société qui veut l'école, et non l'inverse.
Les inégalités constatées dans le système éducatif sont un produit direct des inégalités visibles au sein de la société. Pour les corriger, il faut que la société commence par se corriger elle-même. L'école suivra. L’état de l’école reflète l’état de la société. Si elle est inefficace à produire de l’égalité, c’est que la société elle-même y a échoué.
Si elle est tiraillée à hue et à dia, c’est que la société est elle-même profondément divisée, fragmentée, éclatée. Ecoutez donc, une seule fois, la demi-douzaine d’intervenants dans un débat sur le collège : pas deux pour mettre en avant la même priorité. C'est bien simple, un consensus national sur l'école est aujourd'hui hors de portée, inimaginable. Et personne n'a l'envergure et l'autorité pour imposer une solution viable, pragmatique et de bon sens.
En gros et de loin, on perçoit bien deux camps, mais irréconciliables : ceux pour qui l’école est d’abord le lieu de la transmission des savoirs à même de faire progresser la nation ; ceux pour qui elle est le lieu idéal pour égaliser les conditions sociales. Résumons : un conception nationale du système éducatif, frontalement opposée à une conception dogmatique, idéologique, voire politique. Ceux qui ont travaillé opiniâtrement à casser l'école française depuis quarante ans sont principalement des idéologues pleins de dogmatisme. Et ne parlons pas de tous ceux qui souffrent de pédagogite aiguë, et prêchent l' « enseigner autrement » et les « méthodes innovantes ».
La société fabrique l’école qu’elle se donne les moyens de mériter, je ne sors pas de là. L’état actuel de l’école préfigure l’état futur de la société présente (le pronostic est donc sombre). L’école n’est pas une fin en soi : elle est un outil entre les mains de la société pour se façonner en vue de devenir ce que la société a projeté qu’elle voulait devenir.
Que veut la société française aujourd’hui ? Bien malin qui pourrait le dire. La France est-elle encore une nation parmi les nations ? Est-elle au contraire le phare des « valeurs », de l’égalité et des droits de l’homme ? Il y a fort à parier que, sans la première, le second est condamné à disparaître. Qui veut une nation forte, aujourd'hui, en France ? Même pas la Le Pen, malgré ses couinements de rat dans le gruyère.
Pas d’école sans projet d’avenir collectif. Je dirais même : sans projet d’avenir national. Mais la France est-elle en mesure de se projeter dans l’avenir ? Quel responsable politique est aujourd’hui capable de proposer une vision d’avenir ? Ils sont tous à se demander comment on pourrait colmater les brèches et les fissures dans la coque du navire (à noter que navire et avenir font anagramme). Une zizanie féroce oppose les membres de l'équipage. Pour varier l’image : ils sont tous à dénoncer « la France panier percé ». C'est bien connu : « La France n'a plus les moyens ».
Dans cette France idéologique et dogmatique, à cet égard, le fait de supprimer toute filière risquant de favoriser telle catégorie de la population, autrement dit la hantise obsessionnelle de l’élitisme, a quelque chose d’absolument dément. Toutes les « filières d’excellence » sont suspectes a priori de favoriser les favorisés. Et ce sont d’anciens excellents élèves qui les font passer à la trappe.
Je signale à ce sujet que la suppression des classes bilangues et européennes aura un effet paradoxal au lycée de Wissembourg : je sais en effet de source sûre que les bons élèves qui y fréquentent ces sections pour passer un bac, entre autres, en allemand, sont souvent d’origine turque. Eh oui ! Le collège va produire de plus en plus de « déchets ».
Si l'école en France ne va pas bien, c'est que la France va mal. Pourquoi voudriez-vous qu'il y ait une Ecole, quand il n'y a plus de Nation ?
Voilà ce que je dis, moi.
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vendredi, 22 mai 2015
DÉTAILS 3
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jeudi, 21 mai 2015
DÉTAILS 2
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mercredi, 20 mai 2015
DÉTAILS 1
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mardi, 19 mai 2015
BOUCHONS
Détails.
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lundi, 18 mai 2015
L'ASPECT DES CHOSES
Détails.
Vers la lumière,
quel que soit le moyen.
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dimanche, 17 mai 2015
ÉCLAT DU VERRE
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samedi, 16 mai 2015
IL Y A DU TOTALITAIRE ...
... DANS LA STATISTIQUE
Résumé : vous n'avez plus à vouloir, ni même à désirer. Grâce aux statistiques, il n'y a plus que des faits observables. Laissez-vous aller au mouvement dominant. La société dans son entier est une éprouvette sur la paillasse de chercheurs qui consignent en permanence en des écrits incontestables le fruit de leurs observations objectives.
En route pour la société scientifiquement établie.
2/2
Deuxième fonction de la statistique : établir des moyennes. Ah, les moyennes ! Quelle formidable trouvaille que la moyenne ! Votre enfant, avec 10 de moyenne, aura son bac. Et le plus fort, c’est que ça tranquillise les parents. On oublie de leur dire que dans le même temps, il est à 50 % des possibilités offertes par l’échelle des notes. Mais si grands sont les mystères de la "docimologie", n'est-ce pas ! ...
C’est pareil pour la température corporelle : vous mettez la tête dans l’azote liquide (- 273°C), les pieds dans la chaudière, vous arrivez à une température moyenne satisfaisante. Oui. Sauf que vous êtes mort. La statistique c’est ça.
Pareil pour le pouvoir d’achat : chiffres à l’appui, l’INSEE va vous persuader – si, si ! – qu’il a augmenté. Ah, avec la même somme, vous en mettez moins dans le caddie ? Je veux pas le savoir : les chiffres le démontrent. Votre impression est donc fausse. Pareil pour le passage à l’euro : vous dites que les prix ont augmenté spectaculairement entre avant et après ? Encore une impression fausse. Ah, il faut autant d’euros qu’il vous fallait de francs pour acheter le pain ? Mais où avez-vous pris ça ? Impression fausse, je vous dis ! Faites confiance à la science des nombres et au savoir-faire des statisticiens, qui savent mieux que vous comment vous vivez.
Etablir des nombres, des pourcentages et des moyennes pour tout, voilà qui nous amène à une autre fonction de la statistique : mettre en évidence des écarts. C’est très pratique : ça vous permet de vous situer, de vous comparer. De vous assigner une place. C'est quelqu'un d'anonyme qui vous dit qui vous êtes. La statistique a ceci d'étonnant qu'elle abolit la nécessité de la relation humaine interpersonnelle. C'est le bureaucrate qui confirme votre existence, et qui décrète de quoi elle est faite.
Mais mine de rien, en produisant cet effet, la statistique en induit un autre : en faisant d’un chiffre, d’un pourcentage, d’une moyenne, la référence commune, la statistique fait disparaître la notion de différence, et la métamorphose, comme par un coup de baguette magique, en inégalité. Voilà : la statistique anéantit la différence et instaure le règne des inégalités (forcément pestilentielles et haïssables). Et qu'on ne me raconte pas qu'elle les « révèle ».
Taux de postes à responsabilités occupés par des femmes, salaires comparés des hommes et des femmes, partage des tâches domestiques, taux de visibilité des minorités ethniques, religieuses ou sexuelles dans les médias audiovisuels, tout y passe. Ceux qui dénoncent l'intolérable de ces situations peuvent remercier les statistiques.
Féministes, musulmans, noirs, homosexuels, handicapés, tous les brimés, les discriminés, les stigmatisés peuvent, grâce aux chiffres scientifiquement établis, peuvent faire valoir à bon droit leurs « légitimes revendications », dans cette société si profondément et injustement « inégalitaire ». Paradoxal, vraiment, que cette "science" qui sert à globaliser, voire régenter la population, serve de base de travail aux « combats » des « minorités ». Sans la statistique, le féminisme serait réduit à néant ? Etonnant, non ?
Encore un autre effet du chiffrage systématique de tous les aspects de la vie : à combien de % êtes-vous « normal » ? La statistique vous le révèle, infaillible. Car elle transforme les espaces de vie en espaces normatifs : les statistiques servies à satiété comme n'importe quel bien de consommation courante, grâce au même effacement des différences, produisent un conformisme fondé non plus sur des « codes sociaux », mais sur la crainte psychologique de trop s’écarter des normes chiffrées. Conformisme non plus de l’apparence, mais intériorisé au niveau de la fabrication du désir individuel. Plus besoin de désirer, plus besoin de vouloir.
« Chiffres à l’appui », « les chiffres sont là » : quand un politicien, un journaliste, un militant de n’importe quelle cause veut prouver qu’il a raison, il a recours à la statistique qui va dans le bon sens : le sien. Car le chiffre impressionne, il intimide l’adversaire, il donne raison par avance. C’est un argument imparable. Son effet est dévastateur dans un débat public, comme Nicolas Sarkozy l’a abondamment prouvé, à la suite d’innombrables autres (« Le 1 % de croissance qui manque, j'irai le chercher avec les dents »).
Je préfère de beaucoup ce que disait Winston Churchill de la chose : « Je ne crois jamais une statistique, à moins de l’avoir moi-même falsifiée ». Mark Twain, dans son autobiographie, disait la même chose un peu différemment : « Il y a trois sortes de mensonges : les mensonges, les maudits mensonges ["damned lies"] et les statistiques », en attribuant la phrase à Disraeli.
Partant de là, il y a quelque chose d’effrayant à constater l’empire que les statistiques exercent sur les esprits en général, et celui des décideurs et responsables en particulier. Un peu comme si tout le monde consentait à l’imposture, et à construire ainsi une représentation fallacieuse de la réalité sociale.
Disons un mot des sondages, qui ne sont qu’une extension, en infiniment plus fantaisiste, voire plus délirant, des statistiques, puisqu'ils reposent par principe sur l’extrapolation à une collectivité entière de résultats obtenus au sein d’un « échantillon représentatif » de la population.
J'aimerais bien, par exemple et au hasard, savoir quel « échantillon représentatif » de la population a été interrogé, au moment du débat sur le mariage homosexuel, pour aboutir aux mirifiques 63 % de la population approuvant cette extension brutale de la conjugalité. Quelle merveilleuse trouvaille que l’ « échantillon représentatif » (méthode des quotas ou autre) : un pas de plus vers la virtualisation des gens de chair et d’os devenus des abstractions. Pour les convaincre que ce qu'ils pensent n'est pas ce qu'ils croient penser. Et que de toute façon, c'est inéluctable, et que le mieux pour leur équilibre mental est de l'admettre. Un pas de plus en direction de l'intimidation par les chiffres et de la manipulation des esprits.
Un moyen pour les comptables qui tiennent tous les leviers de commande de la vie collective (économie, politique, société, …) de transformer les humains concernés par leurs décisions en simples items dans des listes d’items.
Vous avez dit « déshumanisation » ?
Voilà ce que je dis, moi.
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vendredi, 15 mai 2015
IL Y A DU TOTALITAIRE ...
... DANS LA STATISTIQUE
1/2
A quoi servent les statistiques ? Est-ce seulement ce merveilleux outil de connaissance, qui permet de mettre en lumière des aspects de la réalité inaccessibles à la simple perception individuelle ? Faits sociaux, situations politiques, données économiques, recherches scientifiques, les statistiques font partie intégrante de notre monde, dans tous les domaines qui concernent (de très près ou de très loin) notre vie quotidienne.
Non, elles ne sont pas seulement un outil de connaissance : elles sont aussi un outil de gouvernement. Un outil qui peut se révéler terrible à l'usage. Il en est d'ailleurs ainsi pour les sciences humaines : inutile sans doute de s'appesantir sur l'utilisation des avancées dans la connaissance du psychisme humain par la publicité, par la propagande et par toutes les techniques de manipulation mentale. Vous vous rendez compte : sans Sigmund Freud, pas de Scientologie. Pas d'agressions Coca-Cola par panneaux 4 m. x 3. Pas de surréalisme. « Que la vie serait belle en toute circonstance Si vous n'aviez tiré du néant ces jobards » (Tonton Georges a toujours raison).
Les statistiques sont donc entrées dans les mœurs. Il faudrait même dire : « Dans les têtes », tant chacun a désormais intériorisé la notion abstraite de « catégorie de la population », dans laquelle, à force de bourrage de crâne, il tend aujourd’hui à se ranger spontanément, sans qu’un seul flic lui en ait seulement intimé l’ordre.
Qu’il le veuille ou non, chacun a désormais une connaissance statistique de lui-même. Chacun est prié de s'éprouver non plus à partir de ses confrontations concrètes à des réalités contondantes ou suaves, mais par le médium infaillible des chiffres élaborés par des experts dont la science le dépasse de trop loin. Chacun est prié d'acquérir une connaissance objective de lui-même. Les statistiques portent le négationnisme de la subjectivité. C'est en cela qu'elles sont porteuses du germe totalitaire.
Chaque jour, journalistes, économistes, politiciens, « experts » et « spécialistes » produisent à qui mieux-mieux, à destination de tous les individus, l’inépuisable spectacle des statistiques dans le fatras desquelles tous ces "sachants" leur intiment l’ordre de trouver leur place. Les statistiques sont la nouvelle figure de la « collectivité », de la « société ». Si ça se trouve, vous appartenez à des catégories dont vous ne soupçonnez même pas l'existence. On vous définit sans vous demander votre avis. On vous assigne une identité dont vous n'avez nulle idée.
La statistique est par nature l’action de compartimenter les comportements humains en les rangeant successivement dans toutes sortes de cases soigneusement étiquetées en un nombre incalculable de catégories abstraites. La statistique a quelque chose à voir avec la dissection : il s’agit de segmenter un corps pour en étudier de plus près chacun des segments.
Evidemment, comme dans toute dissection, on n’étudie valablement que quelque chose qui fut vivant, mais qui ne l’est plus. Sinon, ça s’appelle un supplice. Premier effet des statistiques : elles font de populations de chair, d’os et d’existences concrètes des abstractions pures et simples. Autrement dit, une population statistique est une humanité chiffrée, comme l’énonce clairement le titre d’Alain Supiot, sur le blog de Paul Jorion : La Gouvernance par les nombres. L’humanité accède enfin à l’existence numérique, seule collectivité sociale aux yeux du statisticien.
Définitions : « 1 – Etude méthodique des faits sociaux, par des procédés numériques (classements, dénombrements, inventaires chiffrés, recensements, tableaux …). 2 – Ensemble de techniques d’interprétation mathématique appliquées à des phénomènes pour lesquels une étude exhaustive de tous les facteurs est impossible, à cause de leur grand nombre ou de leur complexité ».
Historique : « Statistique : n. f. et adj. est un emprunt (1771 selon F. e. w.) au latin moderne statisticus "relatif à l’Etat" (1672), formé à partir de l’italien "statistica" (1663), dérivé de "statista" (homme d’Etat), lui-même de "stato", du latin classique "status" ».
La statistique établit donc des catégories. Ça a des aspects éventuellement rigolos : on peut être « contribuable » et « automobiliste », « électeur » et « pêcheur à la ligne » (on peut s'amuser longtemps à juxtaposer les carpes et les lapins) ; on est rangé par sexe, par appartenance professionnelle, par âge, par situation géographique, que sais-je. On n’en finirait pas. Ce sont les « critères ». Le résultat de tout ça, c’est qu’on a fini par réaliser ce que Voltaire dit de l’homme vu par Micromégas : un amas d’atomes. Voilà, la statistique atomise l’humanité : vous appartenez sans le savoir à mille huit cent quatre-vingt-douze catégories de la population suivant le critère qui est retenu contre vous.
Première fonction selon moi de la statistique : quantifier à l'infini en subdivisant à l'infini. Etablir des nombres. La statistique instaure le règne des comptables sur le corps social et réduit la vie sociale à une gestion bureaucratique. Elle établit une dichotomie rigoureuse entre sujet et objet, étant entendu que, pour le statisticien, personne n'est une personne, vu qu'il n'y a que des objets.
Elle vous apprend qu’au 1er janvier 2015, la France comptait 32.126.316 hommes et 34.191.678 femmes. Soit dit en passant, on voit que la statistique établit clairement que la génétique se moque éperdument de la parité entre les sexes et de l'égalité hommes-femmes.
On en pense ce qu'on veut.
Voilà ce que je dis, moi.
09:00 Publié dans UNE EPOQUE FORMIDABLE | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : totalitaire, totalitarisme, statistique, sciences humaines, publicité, propagande, manipulation mentale, journalisme, presse, politique, société, paul jorion, alain supiot, la gouvernance par les nombres, voltaire, micromégas, recenssement, georges brassens, sigmund freud, psychanalyse, scientologie, coca-cola, surréalisme
jeudi, 14 mai 2015
LE GÉNIE DE LA LUMIÈRE
09:00 Publié dans PAS PHOTOGRAPHE MAIS | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : photographie
mercredi, 13 mai 2015
VU A LA CROIX-ROUSSE
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Réforme du collège : tout le monde s'étripe. Nivellement par le bas contre souci d'équité. Je n'entre plus dans le débat : trop de mal a été fait au système éducatif français depuis quarante ans. 1975 : réforme Haby, le collège unique, je ne veux voir qu'une tête, et surtout pas une qui dépasse. On a continué avec la réforme Legrand : classes indifférenciées contre pédagogie différenciée (il fallait à tout prix « enseigner autrement »). Tout comme ça, ça n'a pas arrêté. A force de faire bouger l'édifice, celui-ci a tremblé sur ses bases, les murs se sont lézardés, le logement a été peu à peu rendu inhabitable.
On n'a pas cessé de réformer l'école, réacs élitistes de droite contre progressistes égalitaristes de gauche. Le résultat ? Un manteau d'Arlequin, des tranches napolitaines. On dirait que chaque secteur de l'éducation (école, collège, lycée, supérieur) s'est autonomisé et mis à fonctionner pour lui-même.
Le résultat ? Ce qui était une succession d'étapes le long d'un processus continu est devenu un ver de terre tronçonné, dont chaque morceau ignore superbement les autres. Ce qui a disparu du système éducatif français, c'est la continuité nécessaire du processus que constitue l'instruction publique.
Et je ne parle pas du massacre accompli contre les filières techniques et professionnelles : demandons-nous pour quelle raison mystérieuse les entreprises artisanales en France ont toutes les peines du monde à trouver des personnes qualifiées à embaucher.
Qu'est-ce que l'école, finalement ? Voici la conception que j'aimerais partager : l'école, c'est l'effort accompli par une société, par une nation, pour s'élever parmi les sociétés, parmi les nations. Les performances d'une école dépendent de l'ambition (du « projet », de l' « objectif ») de toute une société, de toute une nation. C'est peut-être là précisément que le bât blesse. Qui voit encore la France en perspective, derrière l'école ?
Voilà ce que je dis, moi.
Note : Je ne suis pas le seul à le dire, et à l'écrire (on peut cliquer pour s'en assurer). Je me sens de moins en moins seul.
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09:00 Publié dans PAS PHOTOGRAPHE MAIS | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : photographie, lyon, croix-rousse, éducation nationale, système éducatif, réforme du collège, réforme haby, réforme legrand, élitisme républicain
mardi, 12 mai 2015
FOULE ESCLAVE, DEBOUT !
Détail de surface vitrée.
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CONCESSION A L'ACTUALITÉ
Le chef de bureau (capitaine de pédalo n'était pas mal non plus) qui nous gouverne adore inscrire dès qu'il le peut son nom au fronton des temples symboliques où se pressent les foules prosternées devant les idoles actuelles pour rendre un culte dévotieux à ces modernes créatures de la propagande forcenée mise en oeuvre par « L'Empire du Bien ». M. François Hollande a donc accompli un « devoir de mémoire », en inaugurant un majestueux monument en souvenir des victimes de la traite négrière.
L'esclavage, ah, mesdames, voilà du bon fromage au lait qui vient du pays de celui qui l'a fait (chanson d'autrefois). Il est sûrement très beau, très majestueux, très grandiose, le mémorial de l'esclavage (Mémorial ACTe, texto), quelque part dans les îles caribéennes. Je veux croire que c'est une simple coïncidence, si un livre de 2002 vient d'être opportunément réédité : L'Esclavage expliqué à ma fille, de Christiane Taubira. La dame a sur la question un point de vue pour le moins sélectif, pour ne pas dire restrictif.
Nous sommes d'accord : l'esclavage est une honte. La preuve, c'est que personne ne se vante aujourd'hui d'avoir des esclaves, quand il en a. Quand on en trouve, par exemple en France (« esclavage domestique »), les gens font profil bas. Ils sont même condamnés par les juges quand on arrive à prouver les faits.
Sans parler de l'Antiquité grecque et romaine, il y a eu depuis mille cinq cents ans, aux dépens de l'Afrique, trois esclavages successifs.
1 - L' « esclavage africain » : noirs asservissant d'autres noirs vaincus dans des guerres "tribales". Celui-ci n'a jamais cessé et dure toujours (Niger, Mauritanie, ...). Les témoignages et reportages ne manquent pas.
2 - L' « esclavage islamique » : ce furent les Ottomans qui, à partir du 14ème siècle, allèrent, en direction des pays chrétiens (Europe orientale, Balkans), s'emparer militairement des jeunes garçons pour en faire des "janissaires", des cuisiniers, etc., au service de la "Sublime Porte". Jusqu'à ce que le Sultan d'alors décide de les exterminer pour les empêcher de lui disputer le pouvoir.
Mais les Arabes avaient depuis fort longtemps monté des expéditions guerrières à partir de la péninsule arabique et de l'Egypte à travers le désert pour aller s'approvisionner en humains dans les populations noires. Ils suivaient en particulier la « Piste des quarante jours », qui s'est constamment montrée beaucoup plus meurtrière que n'importe quelle traversée de l'Atlantique par un navire négrier. Cette traite a duré sept siècles (et bien davantage).
Aujourd'hui, ce ne sont plus des noirs, mais des Philippins, des Népalais et autres que les royaumes, émirats ou sultanats font venir pour leur faire subir un traitement qui n'a pas grand-chose à envier à l'esclavage (chantiers au Qatar en vue de la Coupe de 2022).
3 - L' « esclavage atlantique », le plus célèbre, le plus dénoncé, le plus reconnu. Il a été prospère pendant deux siècles. Voir la BD de François Bourgeon Les Passagers du vent (à partir du tome 3).
Aucune de ces formes ne peut évidemment trouver quelque justification que ce soit. Mais à entendre, sur France Culture la semaine dernière, madame Taubira vociférer, dire sa haine (c'est elle qui prononce le mot), vomir son Niagara d'imprécations contre les sales occidentaux esclavagistes, l'auditeur pourrait croire que l'esclavage, sous sa forme "africaine" ou "islamique", est de la roupie de sansonnet.
Une simple anomalie sans conséquence. Presque pardonnable. Il faut l'avoir entendue réduire au silence tous les participants de l'émission, à commencer par l'animateur. Quand elle est là, c'est elle qui commande. C'est elle qui tient le crachoir. Elle a une revanche à prendre. Elle a quelque chose à venger.
On dirait que seul l'esclavage atlantique constitue un crime contre l'humanité. Madame Taubira est aussi culottée que Nicolas Sarkozy pour tirer la couverture à soi, mais en plus violent. Pour ne prendre de la vérité que ce qu'elle peut mettre au seul service de ses objectifs et de ses intérêts. Impunément. Arrogance et intimidation en sont les procédés. Et cette dame est ministre de la justice de la république française ! Pour faire la leçon à la république française, et non plus parler au nom de la RF. Quelque chose a dû m'échapper. Qui donc l'a autorisée à cracher sur la république qu'elle est censée représenter ? Devinez.
Ne parlons pas de la "traite africaine" (les noirs n'aiment pas les noirs, voir les conflits entre Nuers et Dinkas, Hutus et Tutsis, etc.). Les différences entre la "traite islamique" et la "traite atlantique" sont de deux ordres :
a) Les Arabes montaient des expéditions militaires pour capturer au loin les hommes et les femmes dont ils avaient besoin. Les Européens se contentaient d'acheter les esclaves à des potentats locaux, en leur laissant le soin de les leur procurer. Les Arabes sont des guerriers, les Européens des commerçants. M'enfin, les rôles sont interchangeables ou complémentaires.
b) Les esclaves emmenés aux Amériques par les Européens le restaient toute leur vie et leurs enfants héritaient du statut, alors que les Arabes affranchissaient les leurs après une vie de bons et loyaux services, même si la discrimination ne cessait pas pour autant.
Je rappellerai juste à la haineuse madame Taubira que, si l'esclavage a été aboli, ce n'est par personne d'autre que les Européens, disons les Occidentaux. Que, s'il existe des lois qui répriment l'esclavage, on les trouve en France et autres pays "évolués". Et accessoirement, que ce sont les pays occidentaux qui ont aboli la peine de mort (à de notables exceptions près). C'est l'Occident, après tout, qui a inventé le Progrès (pas ce qu'il a fait de mieux, peut-être).
L'Occident est tout sauf innocent, mais sait parfois corriger ses fautes. Oui, ça arrive. L'abolition de l'esclavage en est peut-être l'exemple le plus flagrant. Vous êtes priée de ne pas l'oublier, madame Taubira : la raison et la république voudraient que vous laissiez là votre discours de haine.
Montrez, dites que vous aimez la France, madame Taubira. Que vous aimez la république que vous êtes supposée incarner. Faites-nous entendre que vous êtes une Française de cœur.
Si vous le pouvez.
Voilà ce que je dis, moi.
Note : Le choix du titre de ce billet (un fragment de vers du poème d'Eugène Pottier connu dans sa version musicale sous le titre L'Internationale) ne saurait être fortuit.
09:00 Publié dans DANS LES JOURNAUX, PAS PHOTOGRAPHE MAIS | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : photographie, actualité, france, politique, société, françois hollande, parti socialiste, christiane taubira, ministre de la justice, mémorial acte, inauguration, guadeloupe, martinique, guyane, esclavage, traite négrière, mémoire de l'esclavage, république française, qatar, coupe du monde football 2022, françois bourgeon, les passagers du vent, nicolas sarkozy, arabes, traite africaine, traite islamique, france culture, les matins de france culture, marc voinchet, brice couturier, crime contre l'humanité