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mercredi, 22 septembre 2021

TONTON GEORGES, C'EST AUJOURD'HUI


Ne me demandez pas pourquoi, je n'en sais rien. Pour le comment, c'est plus facile : dans le placard de la grande chambre qui faisait l'angle au premier étage, celle juste contre le marronnier, traversée par le gros tuyau métallique qui allait se ficher dans le conduit de la cheminée, il y avait trois ou quatre disques 33 tours 25 cm (on ne disait pas encore vinyle). Yves Montand (Battling Joe, Les Grands boulevards, ...), peut-être Jacques Brel (?), et puis Georges Brassens. Vous savez, Les Amoureux des bancs publics.

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Celui-ci, il a passé et repassé sur l'électrophone de la Guilde du Disque, un machin tout gris, avec un "saphir", et puis un bras blanchâtre qui pesait une tonne. Je pouvais avoir sept ou huit ans. A force de passer et repasser, les oreilles ont fini par demander grâce : les sillons (le sillon en réalité) sont devenus de plus en plus aléatoires et criards. Mais le mal était fait : Brassens, je connaissais par cœur.

Et Houellebecq peut bien dire quelque part que Brassens l'emmerde, je n'y peux rien, j'ai grandi avec, et quand on me parle de tonton Georges, je perds tout esprit critique. Et cela n'a pas changé. Bon, c'est vrai, je vois les faiblesses, et même les défauts, mais je connais toujours par cœur beaucoup de chansons. Tenez, l'autre jour, devant la mairie de la Croix-Rousse, jour de "Grande Braderie", il y avait un homme armé d'une guitare qui chantait "Une Jolie Fleur dans une peau de vache", eh bien les paroles me sont venues comme si ça coulait de source, et j'ai chanté avec lui le reste de la chanson. Il a eu l'air content, il s'est senti sans doute moins seul.

C'était peut-être l'un des deux qui avaient déjà donné un récital Brassens à La Crèche, un soir du monde d'avant. "Le 22 septembre", ce n'est peut-être pas ma préférée, mais ça tombe aujourd'hui, alors je profite de l'occasion. Je ferai une réserve sur une des strophes, qui dit : « Que le brave Prévert et ses escargots veuillent / Bien se passer de moi pour enterrer les feuilles... », parce que A l'enterrement d'une feuille morte est un poème qui me semble vraiment trop niais, comme beaucoup de poèmes de monsieur Prévert, celui que Michel Houellebecq (encore lui) traite carrément de "con" dans une de ses Interventions (Flammarion). En quoi j'ai tendance à être assez d'accord.

Reste cette chanson automnale. Et puis toutes les autres : "Tonton Nestor", "Celui qui a mal tourné", "Mourir pour des idées", "Le Bistrot", au hasard de celles qui me viennent à l'instant. Et je me dis qu'en 2021, ça fait pile quarante ans que Georges Brassens a rendu son bulletin de naissance. Et c'est bientôt le temps des feuilles mortes.

Voilà ce que je dis, moi.

mercredi, 04 août 2021

LA FONTAINE ET LES FONDAMENTAUX ...

... DE L'HUMANITÉ.

*

« Deux Coqs vivaient en paix : une Poule survint,

Et voilà la guerre allumée. »

La Fontaine, Les Deux coqs.

***

Quelque temps après :

« Les p'tits bruns et les grands blonds,

Quand ils sont entre garçons,

Les p'tits bruns et les grands blonds

Rient comme des fous,

Sont comme des frères.

 

Mais quand se pointe un jupon,

Les amitiés se défont,

Les p'tits bruns et les grands blonds

Se font la gueule, se font la guerre. »

Claude Nougaro.

***

Observons l'économie de moyens du premier.

*

On en est longtemps resté là. Mais par bonheur, l'époque moderne a supprimé le jupon. Tout va bien, on vous dit.

dimanche, 14 février 2021

PAS DE COVID POUR ROSELYNE

1985 ECHO DES SAVANES II 30.jpg

Après la cérémonie des Victoires de la Musique qui a vu le triomphe de Benjamin Biolay et où il a sévèrement mis en cause sa ministre de tutelle présente dans la salle pour sa responsabilité dans l'état catastrophique où se trouve le monde de la culture du fait des mesures injustes prises, au prétexte de la pandémie, par le gouvernement auquel elle appartient, madame Roselyne Bachelot s'apprête à passer une nuit agréable.

mardi, 14 février 2017

UN CHANTEUR DE VARIÉTÉS

Je ne suis pas amateur de "variétés", mais il se trouve que j'ai consommé pas mal de sons diffusés par la radio, au point peut-être de pouvoir me présenter comme un cas médicalement intéressant pour les radiopathologistes. Je peux dire que je me suis gavé de chansons (à texte ou chansonnettes). C'en est au point que telle ou telle remonte à la surface tout d'un coup, sans prévenir et sans raison. Je me souviens d'une chanson de Gérard Lenorman (si !), ça devait être en 1971 (je bouffais de l'ammoniaque dans un sous-sol à tirer des plans pour un architecte), dont la mélodie était construite selon un principe complexe d'avancée continue, et qui m'avait marqué à l'époque. Il m'a été impossible de la retrouver. Sans doute n'ai-je pas déployé l'ardeur suffisante pour mener à bien la recherche (une chanson de Lenorman en 1971, a priori, c'est facile, il n'y en a pas des tonnes). 


Pour la chanson de Julien Clerc, le problème ne s'est pas posé, tant le titre ("Quatre heures du matin"), cette redite obsessionnelle, s'est gravé dans mon souvenir. Ce qui m'est resté de cette chanson de 1970, c'est le climat brumeux créé par la musique de Julien Clerc pour habiller un texte écrit par Maurice Vallet sur l'état d'hébétude et de déréliction qui guette le noctambule repus (pardon : repu) de plaisir et d'alcool, un peu avant le lever du jour, quand le corps n'en peut plus, sans avoir pour autant la force de s'abandonner au sommeil. Un état que je connais pour l'avoir connu. Le mariage du texte et de l'arrangement musical tient du miracle d'équilibre. Je tiens cette chanson pour un chef d'œuvre dans son genre

lundi, 02 mai 2016

LA VOIX D'ALLAIN LEPREST

La voix d’Allain Leprest diffère de celle du dernier Johnny Cash, parce qu'elle ajoute à la même rugosité ravinée du terrain sur lequel elle se déplace, une sorte de plénitude lumineuse, dans laquelle on croit entendre à la fois tout le drame de l’existence humaine, la certitude que seule la fraternité sauvera les hommes et une tonalité désespérée devant l’impossibilité de changer quoi que ce soit au destin de l’humanité.


C’est tout au moins comme ça que j’entends « Le temps de finir la bouteille », une chanson (parmi les mille que le chanteur a composées) au texte puissamment chargé de poésie : dans la bouteille, les images d’un rêve fou, forcément conjugué au futur antérieur (que pensez-vous de « Le temps de finir la bouteille, j'aurai enfanté mes parents » ?). Et puis après, quand on a dessoûlé ... Si vous ajoutez l'intensité de la présence scénique du bonhomme, vous aurez une idée de ce que c'est, un artiste. Comme disait Céline : c'est celui qui "met sa peau sur la table".

Allain Leprest, on peut le dire, a mis sa peau sur la table.

Il se dégage de l'ensemble une impression de grande cohérence. L'impression d'une existence entièrement une, d'un univers bien en place, où tous les éléments s'agencent et s'emboîtent selon une belle logique.

Voilà ce que je dis, moi.

jeudi, 04 juin 2015

LES NUITS D'UNE DEMOISELLE

Aujourd’hui, on s’offre un détour coquin du côté de la chanson grivoise. Un petit coup d'oeil et d'oreille sur la chanson de Raymond Legrand et Colette Renard, « Les nuits d'une demoiselle », désormais très connue. Les chansons lestes ont depuis longtemps quitté l'enfer de la censure, au risque de s'en trouver banalisées. Les paroles chantées sont celles du texte original : le décalage entre celles-ci et l’image s’explique par leur modification, nécessitée par le passage de la chanteuse sur une chaîne populaire à une époque plus pudique que la nôtre. 


J’ajoute la version de la chanteuse Jeanne Cherhal en 2014. Je la trouve désopilante : les paroles qu’elle a placées sur la même musique érotisent très plaisamment nos usages de l’ordinateur et des univers numériques. A moins qu’elles ne fassent que traduire le déplacement de la libido humaine sous l’influence des progrès technologiques : « Je me fais compresser le fichier » me semble une trouvaille délectable, en même temps qu’un hommage malicieux à Colette Renard. « Je me fais ouvrir le dossier » et « Je me fais vider la corbeille » ne sont pas mal non plus.

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« Que c’est bon d’être demoiselle

Car le soir dans mon petit lit

Quand l’étoile Vénus étincelle

Quand doucement tombe la nuit

Je me fais sucer la friandise

Je me fais caresser le gardon

Je me fais empeser la chemise

Je me fais picorer le bonbon

Je me fais frotter la péninsule

Je me fais béliner le joyau

Je me fais remplir le vestibule

Je me fais ramoner l’abricot

Je me fais farcir la mottelette

Je me fais couvrir le rigondin

Je me fais gonfler la mouflette

Je me fais donner le picotin

Je me fais laminer l’écrevisse

Je me fais fouailler le cœur fendu

Je me fais tailler la pelisse

Je me fais planter le mont velu

Je me fais briquer le casse-noisettes

Je me fais mamourer le bibelot

Je me fais sabrer la sucette

Je me fais reluire le berlingot

Je me fais gauler la mignardise

Je me fais fafraîchir le tison

Je me fais grossir la cerise

Je me fais nourrir le hérisson

Je me fais chevaucher la chosette

Je me fais chatouiller le bijou

Je me fais bricoler la cliquette

Je me fais gâter le matou

Et vous me demanderez peut-être

Ce que je fais le jour durant

Oh ! Cela tient en quelques lettres

Le jour je baise tout simplement »

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Bon, d'accord, certaines expressions font un peu "fabriqué". Mais franchement, ça ne fait pas de mal de se faire du bien.

Voilà ce que je dis, moi. 

 

Note : les illustrations de ce billet sont empruntées à un petit livre tout à fait à la hauteur de la situation évoquée dans la chanson, un petit livre exquis. L'auteur du texte s'appelle Jean-Claude Carrière. Les dessins sont de la main d'un petit grand homme du cinéma français, du cirque et, comme on le voit, du dessin facétieux : Pierre Etaix. Le titre du livre : Les Petits mots inconvenants (éd. Balland).

jeudi, 27 février 2014

CHANTONS SUR LES CHARNIERS

BIGUINE A BANGUI, BIGUINE A BANGKOK

 

Aujourd’hui on se détend un peu. C’est l’actualité des événements qui se produisent dans le monde qui m’a fait penser à Charles Trenet et à sa chanson « Biguine à Bango ! » (cliquer pour visionner). Oh, la chanson est peu connue, certes, mais elle me fait irrésistiblement penser à ce qui se passe dans les capitales de deux pays : la Thaïlande et la Centrafrique.

 

En Thaïlande, une partie de la population en a assez d’être gouvernée par des gens appartenant à une élite corrompue jusqu’au trognon, et pour le faire savoir, elle est descendue dans la rue, au risque de se faire tirer dessus par les militaires de Yingluck Shinawatra, la sœur du nommé Thaksin, réfugié à l’étranger pour ne pas être coffré comme un vulgaire malfaiteur, pour corruption éhontée. 

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Tiens, au fait, est-ce que ce n’est pas le motif qui a poussé une bonne partie de la population ukrainienne à occuper depuis trois mois la place Maïdan ? Remarquez que, pas très loin de là, j’ai lu quelque part que certains Russes reprochent (en parlant assez bas pour ne pas être entendus de l’intéressé) à Vladimir Poutine d’avoir amassé depuis qu’il est au pouvoir une fortune aux dimensions inimaginables. Il posséderait ainsi plus de quarante résidences luxueuses. Il m'arrive de me demander ce que je ferais de quarante résidences, si j'étais dictateur. Passons.

 

Remarquez que les Tunisiens n’ont pas foutu dehors Ben Ali pour une raison différente, et que la première visite qu’ils ont faite dans le palais du dictateur leur a autant coupé le souffle qu’aux Ukrainiens celle que ceux-ci ont organisée dans l’invraisemblable propriété qu’occupait Ianoukovitch jusqu’à son départ. Et j’imagine que si les Egyptiens avaient pu visiter la propriété de Moubarak, ç’aurait été pareil : du marbre et de l'or. Il paraît même que chez Ben Ali, il y avait dans certaines pièces des murs de liasses de billets (je le tiens d'une bonne source, mais allez savoir).

 

Et peut-être un jour prochain ne sera-t-il plus permis aux Africains, les potentats Obiang, Sassou-Nguesso et autres Bongo de réinvestir dans la pierre et le foncier français (l'affaire des « biens mal acquis ») les sommes colossales qu’ils ont piquées dans les caisses de leurs Etats, sans parler des subventions accordées par la « communauté internationale » au titre de « l’aide au développement » (laissez-moi pouffer) qu’ils ont détournées à leur profit et planquées en Suisse, à Singapour ou aux Îles Vierges britanniques.

 

Vous en voulez encore ? Eh bien voyons du côté d'Ankara et d'Istamboul, et des islamistes de l'AKP dirigés par l'islamiste « conservateur modéré » (!) Redjep Tayip Erdowan (en phonétique). Un bon musulman, c'est certain, qui se garde de l'esprit de lucre comme de la peste. Tout faux ! Pris les doigts dans le cambouis de l'argent sale, le bon musulman !

 

Mais peut-être – espérons-le – qu’il n’est pas obligatoire dans tous les pays du monde que ce soient les bandits, gangsters et autres mafias qui arrivent au pouvoir.

 

Cela reste une question malgré tout, par exemple après lecture du copieux dossier paru dans Le Monde récemment au sujet des fortunes faramineuses accumulées par ce que le journal appelle les « princes rouges » et leurs héritiers. Je parle de la Chine, évidemment. N’est-ce pas le fils de l’un d’eux dont on a retrouvé les restes dans les débris fumants d’une Ferrari dernier cri ?

 

Il ne faut donc pas généraliser. On ne peut imaginer – je parle au hasard – que de tels abus puissent arriver dans notre beau pays de France. Jamais de la vie, voyons. Nous avons les capitaines de pédalo les plus intègres de la planète, tout le monde le sait et personne n’oserait contester cette vérité. Et dire que j’annonçais un moment de détente en commençant. Moralité, si l’on va où l’on a décidé d’aller, ce n’est pas toujours sans sinuosités et méandres. Bon, revenons à nos roustons.

A MANIF BANGUI.jpg

Après la Thaïlande, si nous portons nos regards sur la Centrafrique, que voyons-nous, devant nos yeux ébaubis ? Après le pillage et le meurtre généralisés commis par les milices de la coalition nommée « Séléka », juste retour des choses, c’est maintenant aux milices nommées « anti-balaka » de se dire qu’il est temps de faire couler le sang. Ce n’est qu’une habitude à prendre, comme on peut lire dans l’impressionnante trilogie écrite par Jean Hatzfeld sur la tragédie rwandaise (commencer par l’absolument indispensable Une Saison de machettes).

 

C’est au détour d’amusements aussi simples que ceux fournis par ces informations que la loupiote d’une chanson de Charles Trénet se met à clignoter dans ma tête. Cette chanson, peu connue, je l’ai dit, s’intitule « Biguine à Bango ». Elle dit : « Connaissez-vous la Martinique ? Connais-tu là-bas le Bango ?… ». Voilà, c’est tout. Quoi, ça ne vous suffit pas ? He bien si. Remplacez « Bango » par « Bangui ».

 

Vous pouvez aussi remplacer « Bango » par « Bangkok ». Et vous comprenez pourquoi j’ai parlé de l’actualité en Thaïlande et en Centrafrique. Comment, je ne suis pas très sérieux ? Mais certainement, et non seulement je le reconnais, mais je le revendique haut et fort : il ne faut pas être sérieux sur les choses sérieuses, pas plus qu’il ne faut prendre à la légère les choses légères.

 

Que voulez-vous faire d’autre que du mauvais esprit, au spectacle des horreurs qui se commettent un peu partout dans le monde, et qui constituent le fonds de commerce de tous les médias d’information.

 

En me mettant à fredonner : « Woho ! Woho ! Biguine à Bangui ! » ou « Woho ! Woho ! Biguine à Bangkok ! », j’exorcise en quelque sorte un démon, celui qui, autrement, me laisserait tétanisé d’horreur. On me parlera de dérision, de manque de compassion, et ce ne sera pas complètement faux.

 

Mais je demande qu’on laisse ma compassion un peu tranquille de temps en temps. Ma compassion, si c’était une personne, elle serait classée parmi les grands brûlés, traitée en grand blessé, hospitalisée vite fait dans un service d’urgence, et le monde cesserait de la harceler pour lui laisser le temps de se remettre de tous ses traumatismes et de toutes ses blessures.

 

Ma compassion pour les misères du monde, elle n’en peut plus. Epuisée d’avoir été sollicitée sur tous les fronts des petites et des grandes tragédies qui ensanglantent les contrées émergées de la planète.

 

La compassion, ça suffit ! C'est juste pour ça que je fais semblant de rire ! Parce que, finalement, ça soulage.

 

Voilà ce que je dis, moi.