xTaBhN

Ok

En poursuivant votre navigation sur ce site, vous acceptez l'utilisation de cookies. Ces derniers assurent le bon fonctionnement de nos services. En savoir plus.

lundi, 29 juillet 2024

JE SUIS DE GAUCHE-DROITE ...

... ET INVERSEMENT.

2/2

Dans les mœurs, au contraire, la civilisation européenne (puis occidentale) s'est ingéniée à remettre les normes en question, principalement depuis qu'elle vit sous le régime de la technique omniprésente et toute-puissante, de ses "progrès" et de ses innovations. Regardez pour ça, par exemple, la course au gigantisme des immeubles à laquelle se livrent les pays (Kuala Lumpur et autres tours de Babel). De tels exemples foisonnent.

A cet égard, on n'a pas assez noté à mon sens le caractère profondément subversif du culte de la nouveauté en matière technique : au rythme des inventions, les comportements, les psychologies, les coutumes et les structures mêmes de la société se sont trouvés bouleversés. J'adresse cette remarque à ceux qui pensent encore que la technique est neutre, et que le bien ou le mal qui arrive ensuite n'est que le fruit de l'usage qui en est fait par les hommes.

Cette façon d'intégrer dans nos modes de pensée l'idée des changements permanents dans nos modes de vie, je dirais même cette façon de valider le mouvement continu comme base principale de l'existence, cette façon d'accepter la subversion incessante de nos repères par le surgissement incessant du jamais vu dans notre quotidien, ne pouvait pas épargner le domaine des mœurs, en particulier des codes sociaux et des normes communes admises. Ecoutez le slogan impérieux : « BOUGEZ !!! », ne serait-ce que pour montrer que vous n'êtes pas mort.

Je ne suis ni philosophe, ni sociologue, ni quoi que ce soit, et il y aurait beaucoup à dire sur la promotion de l'individu depuis la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen (ouverture des droits sans limitation, émancipation totale, définitive et définitivement insatisfaite), sur la logique implacable du système économique capitaliste dans lequel s'est déroulée l'évolution (mercantilisation, privatisation et rentabilisation de tout), sur l'abandon par la gauche de la défense des classes exploitées pour se reporter sur des thèmes sociétaux (égalité homme / femme, P.M.A. pour toutes, et autres innovations "cruciales"), et sur nombre de sujets que le cadre de ce billet empêche d'examiner. 

Je constate juste que, dans la société d'aujourd'hui, il n'existe plus aucun consensus sur la manière dont les gens doivent se comporter. Il faut dire que, en matière de mœurs, les codes sociaux résultent forcément d'un consensus autour de « ce qui va de soi » en matière de morale. Mais ce que George Orwell, dans ses Essais, appelait la "common decency", c'est-à-dire ce qu'il convient ou ne convient pas qu'un individu se permette de faire, est devenu incompréhensible.

Quels attardés se posent encore aujourd'hui la question de savoir "ce qui se fait" et "ce qui ne se fait pas" ? Bon, il y a bien quelques tabous qui résistent encore : « il faut respecter l'enfant », « on ne tue pas son prochain » ("ça ne se fait pas, ça n'est pas bien", Catherine Ringer ou Brigitte Fontaine), mais en dehors de ça, hein, l'univers des normes, des codes sociaux se trouve à mi-chemin entre l'EHPAD et le cimetière.

Ecoutez bien ce que dit le refrain : « Il faut en finir avec les stéréotypes », et vous aurez une idée de ce qui cherche à s'imposer comme nouveaux stéréotypes. Tout n'est certes pas permis, mais on n'en est pas loin. Comme le dit le tube ancien (1934) de Cole Porter : « Anything goes » : "tout est permis".

On ne parviendra plus à « refaire société », comme le regrettent ou le voudraient les prêcheurs et autres bonnes âmes, avec plus ou moins de conviction. On ne reviendra pas en arrière. Le refrain du « vivre-ensemble » est obsolète, c'est de l'histoire ancienne.  La société comme "corps" (plus ou moins) homogène est morte et enterrée. Margaret Thatcher ignorait ce qu'est une "société" : elle ne connaissait que des "collections d'individus".

Des individus qui, soit dit en passant, en se fiant à des affinités électives, s'affilient à des « communautés » où ils puissent retrouver une certaine homogénéité de groupe. La doctrine anglo-saxonne a vaincu la tradition française, la France s'est mise au pli, pulvérisée en de multiples micro-sociétés, autant de ghettos qui se côtoient et se croisent sans se rencontrer. 

Alors, avec tout ça, où suis-je, moi ? Pour ce qui est de l'économie, je crois toujours qu'il existe des classes sociales, bien que je sache que, dans le bréviaire marxiste, on ne peut parler de classes sociales qu'à propos de masses conscientes et organisées. Je crois à la justice sociale, à la bonne entente de tous sous condition de répartition équitable des richesses, à la restriction et à la réglementation des voracités qui s'exercent aux dépens des faibles et des précaires : pour tout ça, je reste définitivement de gauche.

En ce qui concerne les mœurs, en revanche, je demeure de droite. Je crois que nos désirs n'ouvrent pas forcément sur autant de droits "imprescriptibles". Et je reste stupéfait devant les revendications des homosexuels, des transsexuels, et plus récemment des associations qui exigent qu'on respecte la décision de certains adolescents qui ne savent pas encore quel sera leur sexe à l'avenir (voir le débat autour des "bloqueurs de puberté"). Je crois aussi que la valorisation souvent outrancière voire punitive des particularismes se situe aux antipodes de l'idée même de société.

Je parle évidemment des particularismes religieux, ethniques, sexuels, et de tout ce qu'on appelle complaisamment la « défense des minorités », au nom de laquelle on condamne le « sexisme », le « machisme », le « virilisme » (l'homme, c'est la violence), ainsi que toutes sortes de supposées « phobies » ("islamo-homo-trans-grosso-phobie"). Tous ces juges nieront bien sûr farouchement souffrir de quelque phobie que ce soit.

Personne ne songe plus à s'ériger en défenseur de la majorité : en dehors des élections, les gens qui constituent l'immense partie de la population sont invités à fermer leur gueule, comme si l'homme et la femme ordinaires, les quidams sans revendication de particularisme, bizarrerie ou spécificité dûment admise ou cataloguée, je veux dire comme si les gens normaux n'avaient plus droit de cité.

Car je crois qu'en société une certaine normalité est nécessaire, indispensable, et même souhaitable, quoi que puissent glapir ceux que ce simple mot exaspère. Nulle norme au monde n'a jamais fabriqué deux êtres humains absolument semblables. Quelle terrible menace l'idée fait-elle peser sur l'humanité ?

Je crois aux limites à ne pas dépasser, et cela quel que soit le sujet. Mais je suis réaliste : je sais qu'une telle attitude est vouée à disparaître, et destinée à connaître le même sort que les dinosaures. Je ne reconnais plus grand-chose du monde dans lequel j'ai vécu. Je regarde se défaire, morceau par morceau, le réel qui fut le mien. C'est comme ça et pas autrement. Pourtant, je suis toujours animé par une grande curiosité au sujet de ce qui se passe autour de moi, dans mon quartier, en France et dans le monde.

Alors, au fond de mon terrier, tout en persistant à sortir mon périscope pour ne pas rester aveugle sur la marche du monde, je m'entoure plus égoïstement d'assez de personnes amicales, d'assez de choses agréables, belles et bonnes, pour cultiver divers moyens d'éprouver de la joie. Et j'y arrive ... tant bien que mal.

dimanche, 28 juillet 2024

JE SUIS DE GAUCHE-DROITE ...

... ET INVERSEMENT !

1/2

Il y a fort longtemps (4 mai 2015), j'ai expliqué ici comment, en politique, je me définissais comme étant « d'extrême-gauche-droite ». Bon, d'accord, il y avait sans doute de la boutade dans la bravade ainsi que, probablement, de la galéjade dans la fanfaronnade (ne pas exagérer mon "extrémisme"), mais en même temps qu'un fond de vérité. 

Mon raisonnement reposait, et repose toujours, sur une notion qui devrait être d'une clarté aveuglante pour tout le monde, ce qui n'est hélas pas le cas : la notion de limite. Les curieux qui rendent visite à ce blog de temps en temps connaissent ma conviction : l'absence de limites rend la vie impossible. J'ajoute : l'absence de limites rend impossible l'exercice même de la liberté. Car, contrairement à ce que pensent la plupart des gens (« Etre libre, c'est pouvoir faire ce que je veux »), la première et la plus grande des libertés est celle de dire NON !

A cet égard, on peut affirmer que la façon dont tourne le monde actuel tient de la maladie mentale, de la psychose parano-schizo-névrotique, de la folie des grandeurs et de la volonté de puissance réunies. Ecoutez-les tous, les artistes, théâtreux, peintres, sportifs, et tutti quanti.

Ils ne parlent que « de se surpasser », « d'être prêts à 300% », « de franchir les limites », « de se moquer des frontières », « d'abattre les cloisonnements », « de transgresser les normes », « de casser les codes » (voir Thomas Jolly, le maître d'œuvre de la cérémonie d'ouverture des Jeux olympiques), « d'en finir avec les stéréotypes » et autres fadaises, fariboles et calembredaines, sur le modèle du funeste « citius, altius, fortius » du père Coubertin, le grand-prêtre et dieu tutélaire de la religion du sport. Le dépassement des limites est devenu la règle. Tout ce qui se présente sous les couleurs de l'écologie et de la défense de l'environnement en sait quelque chose.

Pour moi, au contraire, le principe du respect des limites devrait guider toutes les actions humaines. A croire que je suis moi-même écologiste dans l'âme. Mais absolument toutes, n'est-ce pas, et sans exception, et dans tous les domaines, qu'il s'agisse de l'action politique, de l'action des Etats, de l'action des entreprises (action économique), et de l'action des individus eux-mêmes. Tout n'est pas permis aux Etats, tout n'est pas permis aux responsables politiques, tout n'est pas permis aux acteurs économiques, tout n'est pas permis  aux personnes. 

Quand les Etats se croient tout permis, ils s'appellent Hitler, Staline, Pol Pot ou Khomeiny. En politique, cela s'appelle compromission, retournement de veste, corruption, addiction à l'exercice du pouvoir, etc. En économie, cela s'appelle loi de la jungle, exploitation à outrance des hommes et des choses, liberté pour les loups, prédation des plus voraces sur les plus faibles.

Au niveau des individus, cela s'appelle le grand n'importe quoi moral et psychologique, comme le spectacle cacophonique nous en est donné tous les jours dans le prisme médiatique : il est de plus en plus clair que plus grand monde ne sait à quelle vérité stable se raccrocher. Comme le dit le palindrome-film de l'immense Guy Debord : « In girum imus nocte et consumimur igni » (on peut lire la même phrase en commençant par la fin), « Nous tournons en rond dans la nuit et nous sommes consumés par le feu ».

Or quels paradoxes observe-t-on autour de soi ? Quand on se déclare de droite, on est supposé être favorable au libéralisme économique, et parfois le plus extrême : rien ne doit entraver les initiatives. En ce qui concerne l'économie, en effet, on est opposé à toute régulation, à toute réglementation, à toute restriction du commerce et des échanges, à toute loi organisant le monde de l'entreprise et du travail. En gros et en bref : on veut pouvoir faire des affaires sans se faire emmerder par des gens qui n'ont pas bien compris l'importance de certains intérêts particuliers. 

Mais étrangement, ces mêmes personnes (j'excepte ceux qu'on appelle "libertariens"), dès qu'on aborde les problèmes de mœurs, affichent une attitude plus ou moins rigoriste et conservatrice : la famille, c'est sacré — tu parles ! Il faut protéger le patrimoine et sa transmission. L'adultère, l'homosexualité, quelle horreur ! Bon, je ne sais pas dans quelle mesure cela reste vrai aujourd'hui. Passons. Reste la contradiction : où en est-on avec les limites ?

Chez les gens de gauche, c'est l'inverse : en économie, il faut contenir la voracité des appétits de tous ceux à qui les statistiques économiques, les chiffres de la croissance et les possibilités d'enrichissement servent de boussole et de Nord absolu. Pour eux, il faut protéger les travailleurs des contraintes excessives auxquelles les patrons voudraient les soumettre. En revanche, dans le domaine des mœurs, quand on est de gauche, toute contrainte, toute limitation, toute entrave est haïe, pourchassée, pourfendue. Les moindres désirs éprouvés par les individus génèrent automatiquement autant de droits imprescriptibles. Là aussi, contradiction : où en est-on avec les limites ?

Donc, qu'on soit de gauche ou de droite, dans ce schéma (un peu simpliste, je le reconnais), on se trouve face à une étrange contradiction : sous le pied du conducteur de droite, le frein devient l'accélérateur sous un pied de gauche, et le frein, sous le même pied de gauche, devient l'accélérateur du chauffeur de droite.

Comment font-ils pour s'y retrouver dans le fatras des pédales ? Comment peut-on soutenir d'un seul et même mouvement deux attitudes incompatibles entre elles ? Pour ma part, j'ai été un peu aidé, pour résoudre le problème, par la lecture des ouvrages de Jean-Claude Michéa (cliquer pour voir la notice).

C'est là qu'intervient la notion de LIMITES. Appelez ça des normes, et même des stéréotypes si vous voulez. C'est quoi, les normes ? C'est d'abord des statistiques qui servent à définir, par exemple, les dimensions de nos sièges, de nos crayons et stylos, de nos habitations, de nos villes : c'est la façon de fabriquer un environnement à notre mesure. La norme, c'est ce qui ne s'écarte pas trop de la moyenne. Il est clair que ce genre de normes ne se discute pas.

Suitetfin demain.

vendredi, 17 juillet 2020

EN HAINE DES HOMMES

A quoi joue Emmanuel Macron ? A quels calculs tortueux s'est-il livré en laissant son nouveau premier ministre faire d'Eric Dupond-Moretti et Gérald Darmanin des ministres dotés de portefeuilles honorifiques (à moins qu'il les lui ait imposés) ? Lui seul le sait, et après tout peu importe : ce n'est pas cette question qui m'intéresse ici. C'est la réaction de certaines "associations" qui me fait réagir. 

Ce que je sais de l'avocat célèbre et redouté (surnommé "acquittator") me fait penser, à tort ou à raison, à un autre monstre sacré, mais cette fois du monde théâtral et cinématographique : Gérard Depardieu. Ce n'est pas si faux, puisque le nouveau ministre s'est donné en spectacle sur les planches ("A la Barre", au théâtre de la Madeleine à Paris).

Quoi qu'il en soit, je me contenterai de dire, devant l'incontestable et remarquable talent de la personne, comme devant notre Gégé national  : « Chapeau bas ». En revanche, le petit Darmanin, avec sa gueule de premier de la classe content de soi et toujours très propre sur lui, suscite en moi une antipathie aussi spontanée que vaine. Soyons net : ses joues appellent la gifle. Mais passons.

Ce qui importe, c'est que la nomination de ces deux figures (je veux ignorer le Pitre Bachelot) a fait des vagues dans les escadrilles féministes (du "collectif Nous-Toutes" à "Osez le féminisme" en passant par Tamanrasset), qui n'ont pas tardé à couvrir les canaux médiatiques d'un tapis de bombes verbales. Si j'ai bien compris, ces hallebardières venimeuses reprochent au premier des propos "sexistes", et au second une suspicion de viol. 

Le sexisme, comme le racisme, est assez universellement partagé. Je voudrais bien savoir qui, parmi les noirs qui hurlent à la discrimination (affaire Adama Traoré), n'est pas au moins un peu raciste : je pense en particulier à ceux qui essaient de donner corps au concept fumeux de "privilège blanc". En matière de sexisme, qui n'a jamais – homme ou femme – prononcé au cours d'une conversation (salon, terrasse ou comptoir) l'expression "les femmes" (les gonzesses, quand on est entre hommes) ou "les hommes" (les mecs) ?

Ce genre de généralisation est en soi une signature de la tendance spontanée à résumer la différence des sexes à partir de la somme des expériences individuelles que chacun a de la chose. Je dirai qu'Eric Dupond-Moretti est à cet égard "comme tout le monde", et que les gens qui s'érigent en flics de l'expression d'autrui sont plus à redouter que lui.

Si l'on pousse au bout la logique de ces insatiables "justiciers" auto-proclamés, on débouchera dans une société dont le journaliste ahuri mais puissant Laurent Joffrin rêvait un jour tout haut sur une antenne : où les hommes auront cessé de désirer les femmes !

Qu'une femme puisse considérer comme "harcèlement" ou "agression" les hommages sonores ou même verbaux qu'un homme lui fait en tout bien tout honneur lorsqu'elle passe dans la rue, ça me dépasse : voilà une incompréhensible énormité qui montre à quel point de régression notre société en est arrivée, servilement influencée par l'Amérique protestante (une apparence de vertu inflexible, mais seulement en façade). 

Mais là où les féministes dépassent les bornes de l'acceptable, c'est quand elles appellent à lâcher les chiens sur Gérald Darmanin, en pensant probablement à Artémis, qui avait fait dévorer Actéon par ses propres chiens après l'avoir transformé en cerf (il avait eu le tort de la contempler dans le plus simple appareil).

On aura compris que je ne porte pas le monsieur dans mon cœur, mais ce déchaînement de meute à la curée à l'encontre de quelqu'un dont le procès n'a pas eu lieu (entre dépôt de plainte, non-lieu et classement sans suite, si je ne me trompe) m'apparaît comme une manifestation du fanatisme sectaire le plus odieux. Je vois là deux rangées de furies criant "à mort", entre lesquelles on a condamné (sans jugement) l'accusé à passer pour se faire déchiqueter : la version française du "lynchage".

emmanuel macron,président de la république,éric dupond-moretti,gérald darmanin,ministre de la justice,ministre de l'intérieur,gérard depardieu,théâtre de la madeleine paris,dupond-moretti à la barre,collectif nous toutes,osez le féminisme,adama traoré,sexisme,racisme,privilège blanc,artémis actéon,justice

Je ne commente pas.

Photo Hans Lucas via AFP.

Je vois là la pure expression de la haine de quelques femmes pour le genre masculin tout entier.

Voilà ce que je dis, moi. 

samedi, 13 juin 2020

MAINTENANT J'AI PEUR DE LA POLICE

Post-post-scriptum (13 juin, voir mes billets des 10 et 11) :

Aujourd’hui, je peux dire que la police française me fait peur. Jusqu’à maintenant, je me disais, avec raison à ce que je croyais, que le pouvoir utilisait la police française comme une masse de manœuvre contre les éruptions volcaniques qui secouent le peuple quand il n’en peut plus ou que la marmite se met à bouillir, et qu’ayant usé et abusé de cette masse de manœuvre (mobilisations policières monstres, heures supplémentaires à l'infini et non payées, ...), il avait tellement poussé à bout les policiers qu'ils avaient manifesté sur les Champs-Elysées toutes sirènes hurlantes et gyrophares allumés.

Maintenant, ça a changé. Petit rappel des épisodes.

1 – Dans la foulée de la mort épouvantable de George Floyd à Minneapolis, une manif à Paris profite du rapport d’expertise qui innocente la gendarmerie de la mort d’Adama Traoré en 2016 pour rassembler 23.000 personnes (comptage policier) qui protestent contre, disent-elles, l’iniquité.

2 – Dans la foulée des manifestations qui se répandent dans le monde pour dénoncer le racisme institutionnel de la police américaine, on apprend, en France, que 8.000 policiers se retrouvent sur « facebook » pour échanger des propos très souvent racistes, sexistes et homophobes.

3 – Les manifestations françaises se mettent alors à dénoncer aussi bien le « délit de faciès » et les discriminations qui orientent les interpellations des policiers que la méthode d’immobilisation au sol des individus "récalcitrants" (conseil : faites attention au risque de "délit d'outrage et rébellion").

4 – Le sociologue Sébastian Roché (De la Police en démocratie, Grasset) rappelle sur les ondes de France Culture les innombrables études qui établissent la réalité d’innombrables faits de discrimination : « On  a maintenant depuis plus de dix ans un grand nombre d'enquêtes sur la manière dont la police travaille, sur les contrôles d'identité et sur le traitement des personnes pendant les contrôles et les sanctions à l'issue des contrôles. On a observé les comportements policiers avec une méthodologie très précise. (…) Et aujourd’hui, on a un énorme corpus de données qu'on n'avait pas il y a dix ans. Et toutes ces études montrent une chose simple : dans toutes les villes où on a fait les enquêtes, la police en France a des comportements discriminatoires. ». La question que je me pose : ont-ils des ordres de leurs chefs ? A priori, je réponds : probable ("politique du chiffre" oblige).

5 – Le ministre de l’Intérieur Christophe Castaner, en concédant aux manifestants que s’il y a « suspicion » de racisme de la part de la police, cela mérite sanction. Cette petite concession suscite aussitôt les hurlements de colère du corps policier tout entier qui clame que « son » ministre le lâche et lui retire sa confiance. Castaner a commis le "crime" d'infraction à la sacro-sainte "omerta" qui lie tous les membres de la "famille" dont il est le "parrain". Ce refus violent de toute remise en question d'une composante majeure de la république par cette composante même est tout simplement scandaleux.

6 – Politisation du problème : j’entends à quelques rares reprises dans les médias que pas loin de 50% des policiers (Mélenchon prétend 75%) votent très habituellement Front National (maintenant Rassemblement National) aux élections présidentielle, législatives et municipales. Dans le même temps, Christian Jacob (Les Républicains) et Marine Le Pen (je ne parle pas du préfet Lallement) prennent publiquement la défense de la police en affirmant haut et fort que non, « la police n’est pas raciste » (ce qui est vrai si l'on s'en tient au statut du corps constitué, mais pas forcément si l'on fait une enquête sociologique sur l'orientation politique majoritaire des personnels).

7 – Pendant que le ministre de l'Intérieur bat sa coulpe, se convertit à la reptation ventrale et opère un savant "repli sur des positions préparées à l'avance" en espérant colmater les brèches, Marine Le Pen se démène comme un beau diable pour draguer les faveurs des policiers en allant sur le terrain visiter un commissariat et faire quelques selfies en compagnie de quelques uniformes.

***

Voilà les données du problème telles que j’ai cru pouvoir les rassembler en me fiant aux informations reçues. Les conclusions que j’en tire ne sont pas rassurantes du tout. Car je me permets de faire le lien avec l’éternisation sur le territoire français de la notion d’ « état d’urgence » : d’une part directement avec la déclaration et la prolongation de l’ « état d’urgence sanitaire » pendant des mois ; d’autre part indirectement il y a déjà quelque temps, lorsque Macron a obtenu de ses députés-godillots que soient insérées dans le droit commun certaines des mesures d’urgence que Hollande avait prises après les attentats terroristes de 2015. Or, qui dit "état d'urgence" dit restriction des libertés publiques telles que définies par la Constitution. Le pire, c'est que cet état de choses semble n'inquiéter que très peu de Français.

Tout ça mis bout à bout, je trouve que la situation devient fort inquiétante. Je n’oublie pas que Marine Le Pen figurait au 2ème tour de la dernière présidentielle, qu’elle aspire au pouvoir et que, peut-être, elle y accédera un jour. Je poursuis le scénario : supposons Marine Le Pen présidente de la République française. Elle dispose d’une police dont environ la moitié lui est politiquement acquise. Vous vous rendez compte ? Une tête de pont de l’extrême-droite en plein cœur des institutions de la république ? Une garde prétorienne composée de gens sur-armés, entraînés et dévoués ? C'est alors qu'on pourrait s'attendre au pire.

Conclusion : pour moi, les problèmes liés à l’exercice de la fonction de policier ont cessé d’être purement institutionnels, administratifs ou même moraux. Le problème est principalement politique. Les problèmes de racisme, de sexisme et d'homophobie en sont de simples corollaires : s'il y a du racisme dans la police, c'est seulement parce qu'il y a une proportion peut-être majoritaire de la police qui flirte avec l'extrême-droite. Cette seule idée me terrifie.

D'autant que je note par ailleurs une certaine convergence entre les décisions prises par le gouvernement et la majorité du président Macron (mesures d'état d'urgence maintenues dans le droit commun) et l’envie de pouvoir qui tenaille l’état-major du Rassemblement national de Marine Le Pen. Comme si l'actuel président préparait benoîtement la venue de la seconde.

Oui, vous allez peut-être me dire que j'ai tort de me monter ainsi la tête, mais je le dis : aujourd’hui, je suis résolument républicain, mais j’ai peur de la police.

Voilà ce que je dis, moi.

PS ajouté le 15 juin : j'apprends incidemment, comme au détour d'une phrase, que l'équivalent britannique de notre IGPN est composée exclusivement de membres non policiers. Macron pourrait s'en inspirer.

jeudi, 11 juin 2020

POLICE : 8.000 BREBIS GALEUSES ?

Post-scriptum à mon billet d’hier (11 juin) : Il fallait s’y attendre : les déclarations très modérées de M. Castaner, ministre de l’Intérieur, admettant que s’il y a du racisme dans la police il doit être sanctionné, ont immédiatement suscité une levée de boucliers dans les rangs de la police. Le chœur est unanime : « Nous sommes désavoués ! Au secours ! ».

Ah c’est sûr, faut pas les chatouiller. Le corps policier ne tolère pas la plus petite réserve, le plus léger accroc, le moindre écart au soutien entier et massif du pouvoir à tous les faits et gestes de ses personnels. Quoi, on ose leur demander d'être irréprochables ? De ne pas être racistes ? Quel culot, ce ministre ! Le corps policier est tout entier en colère. Pas touche ! C'est tout ou rien : « Love me or leave me ! ». Qu'on se le dise : le corps policier est un et indivisible. Attaquer un élément, c'est les critiquer tous.

Et bien sûr pas question de se désolidariser des collègues suspects de dérive raciste ou violente : la surface de la cuirasse ne tolère aucun défaut, le vernis doit rester absolument intact. Et bien sûr pas question d’un « mea culpa » qui donnerait raison aux ennemis déclarés de la police (suivez mon regard). Allez, circulez ! Je me dis que certains loulous ne demandaient pas d'autres encouragements pour alimenter leur haine des flics.

Il n'est pas né, le décideur politique qui osera changer quoi que ce soit aux petites habitudes de la gent policière à la française. Le pouvoir avait déjà renoncé, devant la menace, à toucher à son système de retraites. Il faudrait un Samson, un Héraklès, un « Jupiter » pour l'amener à « se réinventer » (n'est-ce pas, M. Macron ?), mais on n'en a plus en magasin : rupture de stock. Circulez, on vous dit ! 

On n'a pas plus le droit de critiquer la police sans se faire accuser d'atteinte à son moral qu'on n'a le droit de critiquer Israël sans se faire traiter d'antisémite. Et tant pis pour les gens ordinaires. On dirait que la police ne conçoit les relations avec ces derniers que sous l'angle du rapport de forces.

Voilà ce que je dis, moi.

***

Pour se faire une idée des raisons de se méfier de la police, il suffit d'écouter (ici, 9') Sébastian Roché, auteur de De la Police en démocratie (Grasset). On a pu l'entendre en direct le 12 juin sur l'antenne de France Culture, interrogé par Guillaume Erner. Il dit surtout que dans toutes les études fondées sur des observations précisément localisées (gares, entre autres), les discriminations à la couleur de peau sont abondamment documentées et tout à fait incontestables. Il n'est pire aveugle que celui qui ne veut pas voir.

mercredi, 10 juin 2020

POLICE : 8.000 BREBIS GALEUSES ?

Quelques questions que se pose un citoyen ordinaire.

1

Les journaux en sont pleins : le ver est dans le fruit policier. Les uns crient aux « violences policières » en brandissant la photo d’Adama Traoré. Les autres dénoncent, sur la base d’informations sur un « groupe facebook » plus ou moins secret, le racisme, le sexisme et l’homophobie qui règnent en douce dans les rangs de la police. Vous avez dit "violence", "racisme", "sexisme", "homophobie" ? C’est curieux, ces quatre accusations : ce sont les mêmes que les « modérés » lancent traditionnellement contre l’extrême-droite. Quand j'ai fait le rapprochement, je me suis dit : « Bon sang, mais c'est bien sûr ! ». Dis-moi ce qu'on te reproche, je te dirai qui tu es. Alors, police et extrême-droite dans le même sac ?

Qu’est-ce qui a fait élire Macron en 2017 ? Est-ce son charisme de jeune premier porté par un bagou de première classe ? Non : c’est le rejet viscéral du parti de Marine Le Pen, considéré en général comme raciste, sexiste et homophobe, et dont on pense qu’il tolère volontiers dans son voisinage des groupes peu connus pour leur pacifisme ou leur non-violence.

Donc ils seraient 8.000 membres des forces de l’ordre à se retrouver dans un « groupe facebook » dédié pour lâcher des insanités en toute confidence auprès des collègues. S’ils sont vraiment 8.000, on ne peut plus parler de « brebis galeuses » ou de problème conjoncturel lié à des individus isolés : le problème est bel et bien structurel. C’est le corps policier dans sa globalité qui est touché.

La vraie question à poser selon moi est donc celle-ci : la police française est-elle d’extrême-droite ? Ou du moins noyautée par l’extrême-droite ? Car se demander si la police française est raciste ou s’il y a des « violences policières », c’est répondre « non » à la question avant même de l'avoir posée.

C'est parler comme Marine Le Pen, le préfet Lallement et Christian Jacob, président du parti Les Républicains : "Non, la police n'est pas raciste !". Le seul fait que Marine Le Pen s'érige en défenseur de la police est en soi révélateur d'une certaine complicité. J'ai entendu – je ne sais pas si c'est vrai – que la dernière présidentielle a vu 50% des policiers voter pour Marine Le Pen. Si c'est vrai, c'est grave.

C’est aussi biaiser avec cette question autrement essentielle : dans quels milieux sociaux et politiques, sur quels critères la police recrute-t-elle ses membres ? De quelle idéologie sont porteurs les jeunes qui présentent leur candidature aux écoles de police ? Quelle idée se font-ils de l'ordre ? Des rapports sociaux en général ? J’attends les études sociologiques qui nous éclaireront sur ce point, mais il y a déjà de quoi nourrir quelques soupçons.

2

Une autre question qui se pose à propos de la police française est de savoir quel est le fond de la doctrine qui sert de base à la formation des futurs policiers. Je serais très curieux de découvrir le « référentiel » où sont détaillés les éléments qu’ils doivent ingurgiter avant d’être admis dans les rangs des forces de l’ordre. Même question à propos des cadres : à part le Code de Procédure Pénale dans ses moindres détails, que leur demande-t-on de savoir avant de les autoriser à distribuer ordres et consignes à leurs futurs subordonnés ?

Ce dont j’ai peur peut se formuler ainsi : quelle représentation des gens ordinaires diffuse-t-on parmi les gens en uniforme au cours de leur formation et après ? Quelle image se font-ils de « monsieur-tout-le-monde » ? J’ai bien peur que là aussi, quelque chose n’aille pas du tout. Je crains en effet que le fond de la doctrine construise l'image d'une population a priori inexistante ou hostile.

Par « inexistante », j’entends une des principales règles des bidasses de base au temps où tous les jeunes Français faisaient leur service militaire : surtout ne pas se faire remarquer, pas de vague, passer entre les gouttes. Quand tu commences à exister aux yeux de l’adjudant, c’est mauvais pour toi, voilà ce qu'il se disait, le bidasse. Si le citoyen ordinaire commence à exister aux yeux du policier, c’est que le citoyen pose problème, voire qu’il est potentiellement dangereux.

C’est ce que j’entends par vision « hostile » : je me demande si, dans le corps de la doctrine inculquée aux forces de l’ordre, la population n’est pas considérée comme un réservoir de menaces multiples. D’où, par exemple, le recours banal aux clés d’étranglement : j’ai entendu un syndicaliste de la police utiliser l’argument de Margaret Thatcher (TINA : There Is No Alternative) et affirmer qu’il n’y a pas d’alternative à cette « clé » pour maîtriser un individu potentiellement dangereux. La question est : est-ce que, dans leurs écoles, les futurs policiers apprennent à voir les citoyens ordinaires comme un danger potentiel permanent ? Cela n’explique-t-il pas, surtout si l’on tient compte de la droitisation globale des forces de police, le recours bien trop fréquent à la violence ?

3

Dernière question que je poserai ici mais sans y répondre, faute d’éléments d’analyse suffisants : quelle stratégie les décideurs politiques (gouvernement) et administratifs (préfets) adoptent-ils en matière de police ? Comment usent-ils de cet outil ? Rien qu’à voir la façon dont les manifestants contre la loi travail (El Khomri) ont été traités, puis les manifestants contre la réforme des retraites, puis les manifestants portant un gilet jaune, on se dit que la stratégie des décideurs est claire comme de l’eau de roche : répression, répression, répression. Les décideurs politiques et administratifs usent et abusent de l’argument d’autorité, sans doute parce qu’ils pètent de trouille à l’idée du schproum qui pourrait se produire s’ils ne réprimaient pas. C’est juste une hypothèse, bien sûr.

Conclusion.

Quoi qu’il en soit, il est sûr que notre police dysfonctionne gravement, et pas seulement du fait de quelques brebis galeuses, mais parce qu’elle est fondée en tant que système sur des conceptions erronées : la société ordinaire est vue en haut lieu comme un pays étranger, a priori hostile, contre la menace duquel il faut se prémunir (on se rappelle Macron inscrivant dans le droit commun des mesures d'urgence prises par Hollande à l'époque des attentats). Alors qu'il faudrait que la police puisse être dans la société comme une catégorie parmi d'autres.

D’une part, si je compare avec les polices allemande et anglaise, je conclus que la violence policière peut parfaitement n’être utilisée par les pouvoirs qu’en tout dernier recours, et non en premier réflexe. D’autre part, je me dis que Jospin avait tout compris quand il a fondé la « police de proximité », qui visait à insérer les policiers dans la vie quotidienne des citoyens ordinaires comme des poissons dans l’eau. Il a fallu qu’un misérable bousilleur du nom de Nicolas Sarkozy détruise cette trouvaille formidable, sous le prétexte qu’un policier, c’est seulement un bâton. Non, les policiers sont des citoyens ordinaires parmi les autres, et devraient se considérer comme tels.

Policiers, rendez-vous compte que votre vie professionnelle pourrait être infiniment plus tranquille et moins conflictuelle, si vous acceptiez, en citoyens ordinaires porteurs de loi, d’uniformes et d’armes, de côtoyer d’autres citoyens ordinaires en qui vous ne verriez pas, a priori, des dangers potentiels ou a priori hostiles. Débrouillez-vous pour être parmi les gens ordinaires comme des « poissons dans l’eau ». Vous avez un sacré chemin à faire pour vous faire aimer par la population, comme cela s’est produit après l’attentat de Charlie Hebdo et après le Bataclan. Vous savez que c’est possible. A vous de voir.

Voilà ce que je dis, moi.

mercredi, 11 janvier 2017

LA GAUCHE COSMÉTIQUE 3

3/3 – Les nouveaux opprimés.

La gauche esthétique et cosmétique s'est introduite dans les consciences, et s'est reconvertie dans la "direction de conscience", vous savez, ce truc mis au point par l'Eglise catholique pour agir sur les individus, en particulier les femmes, par l'intermédiaire de leur confesseur. Le curé, chargé de la conscience des fidèles, était supposé conduire le troupeau de ses brebis dans la bonne direction en leur disant ce qu'il fallait ou non penser, en leur glissant dans l'oreille des « c'est très bien, mon fils » ou « ce n'est pas bien du tout, ma fille », et en leur donnant l'absolution, mais à condition qu'elles fissent pénitence, dissent leur acte de contrition, corrigeassent leurs mœurs et promissent de ne plus recommencer. La gauche cosmétique a adopté le principe mais, faute de curés, s'est tournée vers les juges, les tribunaux, le Code pénal. Il n'y eut plus d'encouragements, il n'est plus resté que le bâton.

Ayant délaissé l'essentiel au profit de l'accessoire et promu au premier rang de ses préoccupations l’attention portée aux relations entre les individus plutôt qu’aux archaïques, prosaïques et dépassés rapports de production, d’exploitation ou de domination de classe, on peut dire que la gauche cosmétique a inventé la moderne « police des mœurs », de la « police des mots », de la « police de la pensée », toutes au taquet pour surveiller comme du lait sur le feu la qualité du « vivre-ensemble », de la « solidarité », de la « tolérance », et prêtes à dénoncer la moindre infraction à ce code d’un nouveau genre sous l’appellation englobante et pratique de « discrimination » (voire pire). Si j'ose dire, "nous n'avons pas les mêmes valeurs" qu'auparavant.

Mieux : un peu comme dans l'ancienne RDA quadrillée par la Stasi, tout le monde s'est mis à surveiller et contrôler tout le monde, au nom de grilles de lectures corrigées, confectionnées par des sociologues, historiens, statisticiens, etc., mais aussi et surtout par de vigilants militants associatifs, activistes de toutes sortes de « causes », souvent influents car bien introduits tout près des lieux de décision. Les féministes se sont mises à guetter la moindre manifestation de machisme ou de sexisme, les juifs ont hurlé à l'antisémitisme, les homosexuels ont traqué le moindre signe d'homophobie, les musulmans se sont mis à l'affût de la moindre allusion islamophobe, les handicapés, obèses, noirs, nains, basanés, yeux bridés se sont mis à monter en épingle le moindre soupçon de discrimination (avec ses subdivisions "à l'embauche", "au logement", "au faciès", ...). Traqueur de "haine" est désormais un métier.

L'épiderme de chacune de ces « communautés » est devenu chatouilleux et d'une sensibilité d'écorché, et chacune n'a plus eu d'yeux que pour ses propres intérêts, klaxonnant dans les médias (très bien relayée par les journalistes) chaque fois qu'elle se sentait lésée, même si peu que ce soit : le « regard des autres » n'est pas encore un délit, mais ça ne saurait tarder (dans la cour de récré, les petites féministes de CE2 iront se plaindre : « Maîtresse, il m'a regardée ! »). 

Nul ne s'est inquiété de ce que pouvait devenir dans ces conditions le sentiment d'appartenance à la société française tout court. Les parties sont devenues plus importantes que le tout, enfin, pas toutes les parties, car il y a du favoritisme en la matière. Pendant ce temps, les puissants ont commencé à sourire, puis à ricaner, puis à rire grassement. En ce moment, ils se marrent à gorge déployée : tout le monde se dispute, tout le monde a oublié qu'ils existent et que c'est eux qui organisent le système et tirent profit des dissensions, ils peuvent dormir tranquilles.

Sous prétexte d'exiger le respect et le droit de ne pas être blessées dans leur être, les minorités, grâce à l'appui de la gauche morale, ont fini par devenir autant de pères fouettards, en se bâtissant sur l'obsession d'interdire à ceux qui ne sont pas d'accord le droit de dire qu'ils ne sont pas d'accord (cf. la citation rebattue de Voltaire : "je ne suis pas d'accord avec ce que vous dites, mais ..."), et de punir ceux qui osent le faire, au moyen d'autant de lois "ad hoc". Les minorités se plaignirent en se présentant comme des victimes. Leur lobbying intense fait qu'elles sont aujourd'hui habilitées à porter plainte. De la plainte à la plainte, il n'y a qu'une petite polysémie à franchir : les « victimes » (1) sont devenues de vraies parties civiles qui réclament justice, sans oublier les dommages-intérêts. Et pendant que toutes les piétailles se chamaillent, les puissants sont au spectacle : les débats "sociétaux" les arrangent. Ça les divertit, de voir les petits s'étriper. Et ça leur donne tout le temps de s'occuper de faire fructifier leurs affaires.

Cette gauche de langage adore créer légalement des délits verbaux pour punir ceux qui ne pensent pas comme elle et qui osent égratigner la susceptibilité de ses protégés. La droite n’est pas exempte de ce genre de dérive : si je me souviens bien, c’est elle qui a ajouté le « négationnisme » à la liste des délits passibles du tribunal, comme s'il était interdit ou impossible de raconter l'histoire ("détail" compris) autrement qu'elle s'est déroulée : franchement, on se demande, parce que, depuis que l'histoire existe, je ne suis pas sûr qu'un seul historien ait fait l'unanimité sur sa façon de la raconter. Cela n'a pas empêché le collège des censeurs modernes d'inscrire au Code pénal des infractions légales comme « sexisme », « homophobie », « islamophobie », « discrimination » « incitation à la haine » (« raciale » ou du fait de l’ « orientation sexuelle »).

Qu’on se le dise : la gauche, tel un chevalier blanc, se porte naturellement au secours des opprimés. Mais chose très étrange : elle a changé d’opprimés. Comme si l’oppression ancienne avait disparu (huit millions de pauvres, pourtant, cela devrait "interpeller"), ou qu’elle avait changé de visage. Autrefois, on luttait pour de meilleurs salaires et une redistribution plus équitable de la richesse produite. Autrefois, personne ne discutait la légitimité de la régulation de l’économie et des lois sur le travail.

Foin de ces vieilles lunes ! Vous pensez, maintenant on est cul et chemise avec les patrons. Alors aujourd’hui, des travailleurs désenchantés peuvent se battre pour que le Code du travail ne soit pas trop mis en pièces ou que leur usine ne soit pas fermée. Manuel Valls n'a-t-il pas lancé cette déclaration d’amour : « Entreprises, je vous aime ! » ? Les nouveaux opprimés (les minorités), ceux qui sont défendus devant les tribunaux par les avocats de cette gauche (lilliputienne à tout point de vue, mais supérieurement armée de lois), sont de l'espèce dont les puissants raffolent : celle qui ne risque pas de faire vaciller le socle de leur pouvoir, juste parce qu'aucun de ces malheureux ne songerait à faire de ces puissants la cible d'un procès, d'un débat ou même d'une simple interrogation.

La classe ouvrière et les exploités du capitalisme déchaîné peuvent aller se rhabiller et s’inscrire à Pôle emploi (fusion de l'Agence Nationale Pour l'Emploi, ex-ANPE, et de l'Assurance Chômage, ex-UNEDIC, résultat : huit millions de pauvres !). Place à la promotion des « droits des minorités » et du « vivre ensemble ». Au PS, on se fout éperdument de combattre pour de meilleures conditions de vie. Au PS, il n’y en a plus que pour le combat des juifs, des femmes, des immigrés, des homosexuels (n’oublions pas les bi-, les trans- et les inter-), des musulmans, des handicapés, etc. (catégories pas tout à fait ad libitum : il faut réussir l'examen de passage).

On parle à satiété de « retisser du lien social », de « refaire société », mais la vérité est qu’une société n'est pas une liste des minorités qui la composent : que fait-on de la masse des gens normaux, repérables au fait tout bête qu’ils ne sont protégés par aucun des signes particuliers dont ils pourraient se targuer pour se proclamer victimes ? Les militants des minorités, en luttant pour faire reconnaître la justesse de leur cause particulière, ignorent-ils l'effet dissolvant que la promotion de celle-ci a sur le ciment social ? L'effet d'exclusion que leur revendication (finalement identitaire) entraîne sur toutes les catégories qui ne sont pas celle pour laquelle ils militent ? Non, de ça, les minorités se foutent comme de l'an quarante. Leur cri de ralliement : nous d'abord ! Les autres s'il en reste !

Question annexe, quand les individus ne sont plus reliés aux individus qu'ils côtoient par des liens de nécessité (les anciennes sociétés rurales), quand l'interdépendance bien concrète qui les attachait les uns aux autres se fait très indirecte, ténue et, pour ainsi dire, abstraite (comme c'est le cas aujourd'hui dans nos sociétés trop complexes), que reste-t-il du sentiment d'appartenance ? Quand les "communautés", qui sont aussi, après tout, des composantes de la société, interviennent en tant que telles pour inspirer les lois, que reste-t-il de la société au sens fort ? Passons.

La vérité est que la « question des minorités » est en France un vulgaire produit d’importation, car si aux Etats-Unis elle est cruciale pour des raisons historiques, la France n’est pas logée à la même enseigne. Et des groupes de militants (« minorités agissantes ») se sont jetés sur le produit américain pour calquer sur ce modèle leur vision, leurs croyances, leurs réseaux, leur organisation, leur stratégie, leur comportement et leurs revendications, pour profiter de cette aubaine inespérée et finalement tirer la couverture à eux. Et ont fait en sorte que certaines parties du tout surpassent le tout en efficience et en pouvoir. C'est chose faite. La "société", au moins en tant que sentiment d'appartenance, est en lambeaux. Au moins en reste-t-il les structures administratives.

Les minorités ? La mise au point de leur discours et de leur argumentaire a été longue et laborieuse, mais a fini, avec l’aide de quelques « grands intellectuels » (des noms ! des noms !), par circonvenir les esprits des responsables de la gauche morale, qui ont alors inscrit ces « légitimes revendications » d’un nouveau genre sur leur programme électoral. C’est ainsi que le sociétal (forcément « progressiste et émancipateur ») a supplanté le social (les conquêtes sociales, "avantages acquis", "privilèges", ...), que le verbe a chassé le réel et que les représentations des choses ont détrôné les choses.

Plus personne de sérieux pour défendre « la France qui se lève tôt ». L'exploité se retrouve à poil (pensons à la désillusion des "chauffeurs Uber").

Enfin désencombrée de tous les laborieux, la gauche esthétique peut s’occuper du plus important : rester au pouvoir.

Plus pour longtemps j'espère, mais pour être remplacée par quoi ?

Voilà ce que je dis, moi.

(1) Il en est beaucoup d'authentiques, mais des victimes, on a parfois l'impression qu'il en tombe de partout. Le plus curieux dans cette promotion de la « victime » en icône des dégâts et des cruautés du monde contemporain, c'est qu'on entend venir, aussitôt après l'appellation, l'exigence, devenue presque "naturelle", d'un « dédommagement » sonnant et trébuchant. Ce quasi-corollaire véhiculé par l'air de notre temps ne laisse pas que de m'interroger gravement. 

jeudi, 31 mars 2016

À PROPOS DE KAMEL DAOUD

Que nous dit le ping-pong médiatique, parfois verbalement violent, autour de Kamel Daoud et de sa tribune parue dans Le Monde daté du 5 février (intitulée « Cologne, lieu de fantasmes », et aggravée par un article paru peu de temps après dans le New York Times, que je n’ai pas lu) ? Reconstitution de la succession des épisodes. 

D’abord les faits. Un 31 décembre 2015, la place de la Hauptbahnhof de Cologne connaît une affluence record : une foule presque exclusivement composée d’hommes, passablement alcoolisés paraît-il, se rassemble pour fêter le passage dans la nouvelle année. Parmi eux, quelle proportion de gens basanés, maghrébins ou réfugiés du Proche Orient ? Cette information est difficile à établir, bien qu’il y ait un certain consensus parmi des gens raisonnables : une proportion non négligeable.  

Des femmes voulant traverser la place, d’un nombre qui a tendu à augmenter au fil du temps, se font entourer et isoler par des grappes viriles. Les mains se baladent, s’attardent sur les seins, sur les fesses, s’introduisent dans le soutien-gorge, dans la culotte : bref, ces messieurs se font des sensations à peu de frais. Y a-t-il eu des viols ? Il semblerait. Combien ? Difficile de savoir. Est-ce qu’un bilan général de l’événement a été dressé (avec les faits similaires qui se sont produits à Berlin, Hambourg, Vienne, Helsinki, où encore ?) ? Je n’ai pas cherché à savoir. 

L’essentiel, après les faits, reste en effet le texte de Kamel Daoud, un brûlot, aux dires de ses dénonciateurs. Je l’ai sous les yeux. Il est assez long pour occuper un peu moins des trois quarts d’une page du journal (il y a encore un dessin (1/4) et une publicité (en pied de page). Que lit-on de si répréhensible ? 

Je relève deux phrases : « L’Autre vient de ce vaste univers douloureux et affreux que sont la misère sexuelle dans le monde arabo-musulman, le rapport malade à la femme, au corps et au désir » et : « Le sexe est la plus grande misère dans le monde d’Allah ». Allez, une troisième, pour faire bonne mesure : « On voit le survivant et on oublie que le réfugié vient d’un piège culturel que résume surtout son rapport à Dieu et à la femme ». 

Le reste ? Cela commence par des considérations sur la place que les sociétés européennes font aux immigrés d’origine arabe, l’étroitesse de la place qu’elles sont prêtes à leur faire et sur le peu d’estime qu’ils manifestent à leur égard. Mais cela continue surtout sur de longs développements au sujet de ce qu’est la femme dans la société musulmane. Pour résumer brutalement : la femme n’appartient pas à elle-même, mais, corps et âme, à la société dans son ensemble. 

Ainsi : « Le corps de la femme est le lieu public de la culture : il appartient à tous, pas à elle ». Et plus loin : « Une femme est femme pour tous, sauf pour elle-même. Son corps est un bien vacant pour tous et sa "malvie" à elle seule. Elle erre dans un bien d’autrui, un mal à elle seule. Elle ne peut pas y toucher sans se dévoiler, ni l’aimer sans passer par tous les autres de son monde, ni le partager sans l’émietter entre dix mille lois ». Pour être franc, je n’ai pas tout compris et j’ai du mal à suivre le raisonnement de l’auteur et à discerner quel objectif il cherche à atteindre. Je me dis que toute la tribune de Kamel Daoud se situe dans un registre littéraire, lyrique, poétique. Ce n’est pas en journaliste qu’il aborde le sujet, mais en écrivain, en créateur de littérature : il a écrit Meursault, contre-enquête (prix Goncourt du premier roman, je crois, je ne l'ai pas lu). Il était journaliste, il déclare qu'il abandonne le métier. Il a peut-être raison.

Mais ce n’est pas comme écrivain ou poète que le considère le collectif qui a signé la réplique « Les fantasmes de Kamel Daoud », toujours dans Le Monde, le 12 février. Un collectif de dix-neuf personnes se présentant comme historiens, sociologues, anthropologues, politistes, auxquels se sont joints un journaliste et un philosophe. Que du beau monde ! De l'intello accroché à sa thèse comme un morpion à son poil ! Du sérieux et de l’universitaire comme s’il en pleuvait, pour bien faire nombre contre les assertions d’un détraqué isolé. 

Le papier n'est pas dénué de tonalités de haine, mettant curieusement dans le même sac Daoud, Rachid Boudjedra et Boualem Sansal. Sous un prétexte fallacieux : une fois transportés sur le sol européen, des propos que les polémistes considèrent comme légitimes (parce que minoritaires) sur le sol algérien deviendraient donc inacceptables parce qu'ils se mêleraient au chœur des loups majoritaires et islamophobes. Curieuse façon de tordre les mots. On a compris : les "intellos" en question font la police.

Ils sont tous d’accord pour le traiter de malade (comme les dissidents de l'URSS partaient en psychiatrie). Le coup classique de la mauvaise foi en argumentation : Kamel Daoud propose un regard peu amène sur certains aspects de la civilisation arabo-musulmane, c’est-à-dire un objet de réflexion sur une question d'ensemble ? Eh bien on va s’en prendre à sa personne (« ad rem » versus « ad personam ») pour la disqualifier. Ma parole, quelle volée de bois vert ils lui mettent ! Bizarrement, ils font remonter son papier au 31 janvier (je lis bien "5 février"). 

Que lui reprochent-ils ? De « racialiser ces violences sexuelles ». Je n’en reviens pas : les faits se sont-ils produits, oui ou non ? Leurs auteurs sont-ils d’origine maghrébine et orientale, oui ou non ? Ces universitaires militants sont manifestement dans la dénégation. Ce n’est pourtant pas la première fois qu’on entend parler de la frustration sexuelle et du machisme répressif qui règnent dans les pays arabo-musulmans. Il n’y a pas si longtemps, c’était en Egypte, où les femmes se plaignaient des mains baladeuses et des attouchements – quand il n’y avait pas viol – dans les transports en commun. 

Mais il est interdit, n’est-ce pas, de « racialiser », d’ « essentialiser », parce que ça « stigmatise » indistinctement toute une communauté. Il est interdit de « faire des amalgames ». Il n’y a qu’à voir les réactions qu’a provoquées Patrick Kanner, ministre de je ne sais plus quoi dans le gouvernement de Manuel Valls et François Hollande (si on peut appeler « gouvernement » le gloubi-boulga qui glougloute à la tête de l’Etat français) : pensez, il y aurait des « Molenbeek à la française » en puissance. Que l'assertion soit pertinente ou idiote, peu importe (en argumentation, l'analogie est une autre figure de la mauvaise foi). Je note juste que, illico, c’est la levée des boucliers de toutes les « bonnes âmes de gauche ». Scandaleux, monsieur Kanner !  

J’en conclus que nous sommes dans une sacrée nasse. D’un côté, l’islam, que tout nous porte à croire qu’il ne se fondra jamais dans la  « République Française » : comment voulez-vous que cette masse de gens caressés dans le sens du poil par les « bonnes âmes de gauche » (Edwy Plenel et son ahurissant Pour les Musulmans) se dissolvent dans la société française, la laïcité, la disparition de ses signes identitaires (donc religieux) ? Sachons-le une fois pour toutes : les Arabes qui se revendiquent fièrement musulmans, implantés en France, ne se sentiront jamais complètement français.

De l’autre, les appels de tous ceux qui craignent la montée d’un climat de guerre civile, qui est exactement ce que cherche à provoquer l’ « Etat islamique ». Faut-il nommer les choses comme elles sont, au risque de susciter des oppositions entre « communautés », qui risquent de déboucher sur la violence ? Faut-il rester aveugle sur la réalité au motif que la paix sociale est en jeu ? Nous n’échapperons pas au dilemme. Et sans doute au conflit.

Qu’on le veuille ou non, les musulmans sont installés en France et, pour beaucoup, y ont pris racine. C’est ce qu’on appelle une « situation » : impossible de changer les données. La France déguste les effets des cinquante années qui ont précédé : importation de main d’œuvre pour permettre à l’économie une croissance rarement (ou jamais) égalée, regroupement familial aux conséquences calamiteuses, abandon de l’idée d’assimilation au profit de « l’intégration », lâcheté des autorités municipales qui ont acheté la paix sociale en déléguant des responsabilités aux associations musulmanes, etc. Aujourd'hui, tout le monde serre les miches. Et je ne vous dis pas ce qui se passe quand le sphincter se relâche sous l'effet de la panique : ça pue.

Ma pente à moi me pousse sans aucun doute à nommer les choses, au risque de choquer les « bonnes âmes » et d’attiser les conflits. J'aime mieux prendre le risque de « stigmatiser » qu'euphémiser en refusant de nommer les choses : « Si les signes vous effraient, combien davantage vous effraieront les choses signifiées », dit Pantagruel à Panurge. Je ne vois pas pourquoi il faudrait à tout prix fuir le conflit. Seuls des gens qui n'existent déjà plus par eux-mêmes vivent dans la terreur du moindre conflit. Je me dis que ce sont de semblables « bonnes âmes » qui, en 1938, ont accepté Munich en croisant les doigts pour qu’il n’y ait pas la guerre. Résultat, comme disait Churchill (on remplace "déshonneur" par "lâcheté") : « Vous avez eu à choisir entre la guerre et le déshonneur ; vous avez choisi le déshonneur, vous aurez la guerre ». La guerre on l'a déjà. Je veux dire qu'on a déjà eu le déshonneur.

Je ne vois pas qui pourrait nous sortir de là. 

Voilà ce que je dis, moi.

Note : je mentionne deux autres épisodes de la polémique dont Le Monde s'est fait l'écho. Le 21-22 février, Kamel Daoud répond sur la même page à Adam Shatz, un "ami" qui lui fait des reproches et ne le comprend plus. Drôle d' "ami" en vérité : Daoud pourrait dire, comme je ne sais plus qui : « Seigneur, protégez-moi de mes aùmis, quant à mes ennemis, je m'en charge ». Une page dont les enjeux, tenants et aboutissants me passent largement au-dessus de la comprenette : je l'avoue, je n'ai pas compris ce qu'il fallait comprendre. Et le 27 février, c'est Michel Guerrin qui consacre sa chronique à la défense de l'écrivain algérien.

Dernière minute : belle plaidoirie de Paul Berman et Michael Walzer pour Kamel Daoud dans Le Monde daté du 30 mars. Il faut que ce soient des Américains qui s'y collent !

jeudi, 24 mars 2016

LA VIE DERRIÈRE LA VITRE

KOLIBRI.JPG

L'atelier de reliure.

Photo Frédéric Chambe.

Ci-dessous : détails.

photographie,lyon,croix-rousse

photographie,lyon,croix-rousse

photographie,lyon,croix-rousse

***********************************************************************

J'avais bien aimé Chirac dans le texte, livre dans lequel Yves Michaud décryptait le langage de l'ancien président. Une démarche salutaire, qu'il faudrait conseiller aux journalistes de généraliser et de systématiser, eux qui, si souvent, n'exercent pas leur métier, mais jouent les porte-voix des politiques, quand ils n'en sont pas de simples perroquets.

Le Canard enchaîné (23 mars) nous annonce la parution de Situation de la France (Desclée de Brouwer), nouveau livre du même Yves Michaud, et je dois dire que l'article de Frédéric Pagès me donne bien envie d'aller voir de plus près de quoi il retourne. Je passe sur ce que l'auteur pense du « Care » (c'était la sinistre Martine Aubry qui avait importé cette notion américaine dans la politique française), mot que Michaud traduit par "bienveillance".

Je retiens juste, pour l'instant, les propos rapportés par le journal, concernant l'islam. Attention les yeux, le philosophe n'y va pas de main morte avec le dos de la cuillère à pot : il parle en effet de l'islam, « "religion obscurantiste, intolérante et antidémocratique" qui ne reconnaît pas la "liberté d'apostasie", c'est-à-dire le droit de la quitter ».

J'approuve entièrement cette façon de considérer l'islam. J'en ai assez, après tout, d'entendre une pléiade de prétendus laïcards plaider sur tous les tons pour la liberté religieuse, pour la tolérance et contre une purement fantasmatique « islamophobie ».

J'avais eu l'impression que les agressions sexuelles contre les femmes dans la nuit de la Saint-Sylvestre à Cologne ressemblaient à s'y méprendre à un attentat concerté. Et j'avais été stupéfait par certaines manifestations, faisant suite à ces attentats sexuels, où ce n'était pas le machisme et le sexisme en vigueur chez les arabes qui était dénoncé, mais le racisme, la xénophobie, l'islamophobie de ceux qui avaient réagi et protesté contre les agressions. Le législateur devrait accorder à certains mots le droit de se défendre et de tirer à vue.

J'en ai assez d'entendre le chœur des loups qui hurlent contre l'écrivain Kamel Daoud, suite à la tribune parue dans Le Monde en réaction à Cologne, au prétexte qu'il y dénonce "la misère sexuelle du monde arabe". 

Qu'on se le dise, il est interdit de nommer les choses et d'appeler un chat un chat : le gang des dénégateurs veille. Eh bien non : l'islam est vraiment une "religion obscurantiste, intolérante et antidémocratique". La France, par rapport à l'islam en tant que tel, est en état d'incompatibilité.

Bienvenue, monsieur Yves Michaud, au club des islamophobes. Alexandre Vialatte pourrait-il encore conclure ses chroniques de son habituel : « Et c'est ainsi qu'Allah est grand » ?

Pas sûr.

Voilà ce que je dis, moi.

dimanche, 10 mai 2015

LES MECS, C'EST TOUS DES CONS !

I - 1 - Je ne sais plus pour quelle banque est faite cette publicité (France Inter), où l’on entend un fils faire la leçon à son père, juste parce qu’il n’est pas assez malin pour s’être rendu client, avec armes et bagages, de cette même banque. Le père croit que son fils lui manque de respect et le prend pour un vieux con, et quand il comprend l’histoire de la banque, il s’exclame soulagé : « Ah, j’aime mieux ça ». On comprend le message : les hommes sont lourds, épais, lents à la comprenette.

2 - Je ne sais plus pour quelle compagnie d’assurance-retraite est cette publicité (France Inter), où une femme tanne son mari pour qu’il s’abonne ici plutôt que là, et le pauvre mec, qui ne sait plus où il a mis les papiers, quand elle lui dit qu’on ne trouve les documents que « sur son "espace personnel" », en ligne, il se justifie pauvrement : « Ah, tu vois bien que j’oublie pas tout ». On comprend le message : les femmes sont subtiles et à la page. Les hommes ? Des benêts, des balourds, des empotés, des étourdis.

3 - Toujours sur France Inter, au moment de Pâques, publicité pour des chocolats. Pépé raconte au gamin l’histoire des cloches. « Mais non pépé, c’est pas ça l’histoire ». Suit le nom de la marque : « Et en plus c’est toi qui vas courir » (au magasin, évidemment). On comprend le verdict : les hommes sont des dinosaures, et les enfants leur font la leçon. Au passage, on entend aussi  le cri de guerre : à la poubelle les traditions et les histoires d'autrefois.

Synthèse : Il y en a d’autres, des publicités qui présentent les hommes comme des couennes, des nouilles, des buses. L’air du temps est imprégné. C’est très à la mode, le « male-bashing » (les mâles méritent une bonne dérouillée ; « male / female », l'anglais n'a pas de nos petites pudeurs langagières, je m'engouffre dans la brèche). Qu'est-ce que nous prenons, mes frères ! Si la publicité véhicule ces clichés, c'est que le "créneau" est "porteur". Je veux dire : la société est réceptive. Demandeuse.

II - Et en plus, quand ils ne sont pas plombés du bulbe, les hommes sont d'immondes salauds. Le 5 mai, Libération fait sa « H-une » sur le thème du harcèlement des journalistes femelles par les politiciens mâles. Il paraît qu’on appelle ça « sexisme ». Il paraît que le sexisme, eh bien c'est pas bien du tout ! C'est même très vilain. « La morale de cette histoire, C'est que les hommes sont des cochons ». Des cochons sexistes !

C’est  Libération qui le dit, dans un dossier de cinq pages complètes (mais avec photos grand format) ! Si j'ai bien compris, le sexisme, ça consiste à considérer les personnes de l'autre sexe comme étant de l'autre sexe. Dites-moi si je me trompe. Soit dit en passant, les féministes les plus enragées contre « l'ordre masculin » ne se privent pas de manifester un sexisme à l'état aigu. Il va de soi que ce sexisme-là est sanctifié. Il y a le sexisme HDL et le sexisme LDL. Le sexisme, c'est comme le cholestérol : il y a le bon et le mauvais.

Faut-il être un mâle niais, arriéré, demeuré (pléonasmes aux yeux de certaines) pour adhérer au mauvais sexisme ! Soyons modernes, nous clame la clameur. Etonnamment, le Manifeste des 40 journalistes femelles prend soin de préciser que c'est Françoise Giroud qui a inventé LA "Journaliste Politique", mieux à même, selon elle, de tirer les vers du nez de ces mâles qui font carrière en politique, grâce à son charme et aux efforts qu'elle fera pour soigner son apparence. Il fallait appâter le poisson.

C'est donc Giroud qui a inventé l'argument de la séduction dans les rapports entre journalistes et personnel politique (plusieurs de ces rencontres ont fini devant monsieur le maire - ou plus directement dans un lit). Moi je dis : qui s'y frotte s'y pique. Moi je dis : fallait pas y aller ! Car cette incitation à développer « ad libido » (pardon) tous les moyens de valoriser leur féminité ne les empêche pas aujourd'hui de hurler : 

2015 5 mai.jpg

Le gros titre en une de Libé, le 5 mai.

Autrement dit, elles sortent la matraque du policier, parce que  le truc de la séduction est d'une merveilleuse efficacité. Autrement dit : on veut le beurre (professionnel, journaliste, si possible un scoop qui rapporte gros, dont la célèbre « petite phrase » est le modèle de base sacramentel) et l'argent du beurre (le mec, j'en fais ce que je veux, c'est moi qui commande). On fait les coquettes. On joue les Célimène, mais des Célimène punitives.

Pauvres hommes politiques : un certain Tantale, dans un mythe célèbre, avait connu pareil supplice. Avouez qu'il y a du sadisme dans l'attitude féminine. Avec cette histoire de devenir des appâts en faisant miroiter leurs appas, tout en refusant les effets totalement prévisibles de leur manège (c'est même fait pour ça), les femmes journalistes gagnent sur les deux tableaux. 

Très fort, très habile, très à la mode, et très pervers, en ces temps policiers : tout prendre sans rien donner. C'est peut-être ça, l'avant-garde du « combat pour les femmes » : se servir du désir masculin pour arriver à ses fins. Sauf qu'utiliser son corps pour gagner sa vie professionnellement, ça porte un nom, sur les trottoirs.

Je signalerai juste qu'une prostituée de métier, elle, paie vraiment de sa personne.  Et qu'il y a des chances pour que ce soient les mêmes effarouchées à la vertu outragée qui veulent, légalement, « pénaliser le client » et « éradiquer la prostitution ». Mot d'ordre et horizon de la démarche : chasser du corps du mâle le démon de la nature humaine (cf. L'Exorciste). On me dira qu'il n'y a pas de nature humaine. Moi je dis : ben si !

A ce propos, Caroline Eliacheff, le mercredi 29 avril, commençait sa chronique sur France Culture par une dénonciation du harcèlement sexuel : « 100 % des femmes ont été harcelées dans les transports en commun ». Je m’attendais déjà au pire. Caroline Eliacheff m’a très vite rassuré : bien qu’elle soit « présentable » (mon copain Yves dit : « Pas fatigante à regarder » ; mon collègue Alain, lui, disait plus subtilement : « Elle est "gentille" »), elle affirme n’avoir jamais été « harcelée ». J’aime mieux ça. C’est une femme raisonnable. 

Tout repose en effet sur la définition du mot « harcèlement ». Pour les féministes, le harcèlement commence, semble-t-il, au moment où un homme regarde une femme et lui fait comprendre qu’il la trouve jolie. C'est souvent primaire, reconnaissons-le. Mais que cela soit bien entendu, une fois pour toutes : c’est intolérable. Le gonze qui manifeste un intérêt pour une gonzesse, c’est un « lourd ». Un « macho ». Bref : un agresseur, qui a le tort de ne pas se crever les yeux au passage d’une jolie femme. Brassens est plus normal. Disons plus humain : « Mais faut dire que je m'étais crevé les yeux En regardant de trop près son corsage ».

Qu'on se le dise : de nos jours, le regard d'un homme sur une femme qui passe devant lui est en soi un agression, tout simplement. Pas pour toutes les femmes cependant : Libération du 6 mai mentionne, avec des pincettes et en se bouchant le nez (on est "degôche", n'est-ce pas), l'incongruité que constitue Sophie de Menthon (ci-dessous).

2015 6 MAI.jpg

Qui est choqué ? Qui la dame a-t-elle fait hurler ? Devinez.

 

Ah, on me susurre que la main accompagne souvent le regard ? On va dire que l’homme est un primate (ce qu’il est, en toute vérité zoologique, comme la femme), un rustaud, un mal-dégrossi, à équidistance du singe, du "Crétin des Alpes" et du paysan du Danube. Tout ça pour dire que c'est un anormal. Je ne crois pas me tromper beaucoup en voyant la Correctionnelle pas loin derrière. L’ « envie de pénal » a encore frappé. Reviens, Philippe Muray ! 

CRETIN DES ALPES.jpg

Le "Crétin des Alpes".

Balzac en parle dans Le Médecin de campagne. Le docteur Bénassis s'en tire avec une déportation en bonne et due forme. Les féministes pourraient s'en inspirer, non ? Qu'est-ce qu'elles attendent ?

 

Selon la Publicité et les Féministes, l’air du temps est catégorique.

Au choix : les mecs sont des cons, ou bien des salauds. 

Et pourquoi pas les deux ? Façon "cumul des mandats" ? Ça aurait au moins un petit air "socialiste", non ?

Voilà ce que je dis, moi. 

mercredi, 29 avril 2015

L'ETAT FOUT LE CAMP ...

... MAIS LE POLICIER PROSPÈRE.

2/3 

Parlant des outils que certains (comme Alain Bauer, « criminologue », grand copain en maçonnerie de Manuel Valls (avec Stéphane Fouks), "ami" de Nicolas Sarkozy, accessoirement franc-maçon haut placé et propriétaire d’une société privée (tiens donc !) de conseil en sécurité) tentent de mettre en place, l'au-dessus de tout soupçon juriste Mireille Delmas-Marty écrit en effet : « Baptisées "sciences criminologiques", ces analyses de risque, soutenues par une industrie de la surveillance en pleine expansion où des cadres issus des écoles de commerce côtoient des retraités des armées et des services de police et de renseignement, permettraient de prédire le risque de récidive » (p. 47). Je retiens surtout que l’ "industrie de la surveillance" est "en pleine expansion" et que les commerciaux copinent sans problème avec policiers et militaires. 

Cette expansion est un signe des temps et éclaire d’un jour curieux le débat autour de la « loi renseignement », je trouve. Légaliser l’intrusion policière dans les vies privées par des instances étatiques, ça revient finalement à calquer « ce qui reste de l’Etat » sur la façon dont n’importe quelle entreprise commerciale (mettons Google ou Facebook) est organisée en vue d’une efficacité parfaite dans le ciblage du client potentiel.

Je vais même vous dire : ce n'est rien d'autre qu'un énorme sondage d'opinions généralisé, permanent et en temps réel. Un sondage d'opinion un peu spécial : on ne vous demande pas si vous voulez répondre à des questions. On a votre réponse avant que quiconque vous ait posé la question. C'est même vous qui l'avez fait spontanément.

Je sais, vous allez dire : « Tant que je n'ai rien à me reprocher ». Eh oui, je sais, vous avez déjà intériorisé l'Etat policier. Vous anticipez : vous concevez vos idées en fonction de ce qui risque de vous être reproché. Et tout ça démocratiquement. Bravo, nous construisons l'avenir radieux.

Je vais vous dire : les nouvelles méthodes commerciales et policières d'intrusion, de pistage et de traçage des trajectoires individuelles constituent l'absolu du marketing publicitaire appliqué à la gestion sécuritaire de la société. L’Etat-puissance-publique aligne son fonctionnement sur le management « à l’américaine » des entreprises privées : se retrouver « aux affaires », c’est être amené à se conformer à la « politique managériale » la plus efficace possible. 

Et les gestionnaires actuels de l’Etat français sont tout bonnement en train d’appliquer à la puissance publique ce qui se pratique dans les entreprises privées : les principes du « lean management », dont le but est de débarrasser l’entreprise de toute la graisse qui entrave et ralentit le processus productif, y compris les stations devant la machine à café (« lean » veut dire « maigre », cf. la RGPP, non-remplacement de fonctionnaires partant à la retraite, si chère à Sarkozy). T'échanges trois mots avec ton collègue du service voisin : tu fais perdre du fric à ton entreprise ! Simple comme bonjour. Soumettre l'Etat au plus sévère régime d'amaigrissement possible, tout en accroissant son efficacité policière. Fallait y penser.

Car le renseignement n’est qu’un aspect de la question. J’ai en effet tendance à mettre bout à bout plusieurs annonces récentes du même tonneau où l’anodin le dispute au correctionnel. Sur le modèle de la Belgique et du Luxembourg, on parle d’instaurer en France le vote obligatoire, en prenant soin de préciser qu’au grand-duché, l’infraction coûte 1.000 €. Vous serez citoyens, ou vous ne serez pas. On vous forcera à être des électeurs libres et responsables. C’est pas fini. 

Sur le modèle de la Suède, cette fois, on parle de faire une loi anti-fessée. On vous forcera à être des parents « immer korrect » (c’est-à-dire, comme ça se passe en Suède, sans cesse en train de négocier avec le gamin pour le persuader de se laisser éduquer parce que c'est pour son bien), sous peine de vous voir déchus de vos droits. 

Pour la loi prochainement destinée à criminaliser les paroles (déjà que) de ceux qu’on traite d’antisémites, d'islamophobes ou d'homophobes, on ne fera pas une loi « sur le modèle de », parce que le lobby est assez puissant en France pour agir en amont de toute déclaration d’allégeance à un modèle quelconque.

En France, le lobby anti-antisémite, antisexiste, anti-islamophobe, anti-homophobe est devenu une composante du pouvoir. Par exemple, studieux et obéissant, le président de la République Française défère à l'injonction, comminatoire et annuelle, d'avoir à se présenter, en tant qu'ultime élu de la dite République, au congrès du CRIJF ou dans une synagogue, si possible en couvrant son crâne d'une kippa (après les attentats de janvier) ! Je renonce à comprendre.

Notez que le vocabulaire se prête volontiers à tous les trafics : le mot « racisme » a une portée beaucoup plus générale qu’« antisémitisme ». C'est sans doute pour ça qu'il a été ajouté a posteriori pour donner l'acronyme LICRA, ligue qui, si je ne me trompe, a été fondée par un juif, et qui, au départ, ciblait exclusivement l’antisémitisme. Le R de "racisme" a permis d’embellir le présentoir dans la vitrine et d'élargir la clientèle, pour mieux vendre une idée déjà instrumentalisée. 

C’est sûr, Philippe Muray était dans le vrai, quand il dénonçait l’ « envie de pénal ». Tous les prétextes sont bons aux yeux des modéliseurs et spécialistes du formatage de l’humain, habités par l’obsession de fabriquer par décret une humanité exempte de tout Mal originel. De toute impureté biologique. De toute idéologie déviante. 

Il faut empêcher une fois pour toutes le Mal de nuire. Il suffit de décréter que le Mal est définitivement banni de notre « Empire du Bien » (Philippe Muray, bien sûr) pour éliminer les infâmes nuisibles qui osent voir dans ce « Bien » même le germe d’un nouveau Mal : tous ceux qui ne sont pas d’accord avec cette vision irénique et policière des choses, tous les méchants qu’on a rassemblés dans ce centre de rétention d’un nouveau genre qu’est l’étiquette « Nouveaux Réactionnaires ». Notez bien "irénique et policière". 

Le "Nouveau Réactionnaire", voilà l'ennemi, voilà le nuisible à éliminer du champ de vision. Je suis toujours étonné du nombre de gens qui se portent volontaires pour faire la police sur la voie publique de la pensée et des opinions. Toujours prêts à porter l'affaire devant la justice pour "incitation à la haine". Il faut faire taire les "Nouveaux Réactionnaires".

En commençant par les empêcher de s’exprimer. C’est la vision néo-conservatrice fanatique et fondamentaliste à la George W. Bush qu’on importe ainsi en France. A une grande différence près : privée de la complète liberté d’expression en vigueur aux USA. Appelons ça la double peine. Fait pas bon passer pour un réactionnaire, de nos jours. Alors que l' "incitation à la haine", elle ne vient pas de là où l'on pense.

Je signale que le mot "réactionnaire" désignait au départ tous ceux qui, après la Révolution, militaient pour rétablir la monarchie absolue, à l'exemple de Joseph de Maistre. Aujourd'hui, il désigne sous forme d'insulte tous ceux qui ne sont pas béats d'admiration devant le processus en cours, dont la seule ambition est d'instaurer un nouvel ordre moral.

« Ce qui reste de l'Etat » sera policier ou ne sera pas.

Voilà ce que je dis, moi. 

mardi, 10 mars 2015

A BAS LES STEREOTYPES !

Il est urgent d’en finir avec les stéréotypes.

 

Les journaux dénoncent à longueur de pages cette ignoble verrue qui transforme le nez si typique de la République en ignoble appendice tuberculeux, avec laquelle on proclame en très haut lieu (François Hollande, Najat Vallaud-Belkacem et consort) que l'on va s'empresser d'en finir par les moyens les plus expéditifs. Il était temps.

 

On apprend, à la veille de Noël dernier (Le Monde daté 19 décembre 2014), que « la délégation aux droits des femmes du Sénat dénonce les jouets stéréotypés ». Et tout le monde (enfin presque) est d’accord pour appeler à la libération de l’infernal carcan qui enserre l’existence des femmes, des hommes et des animaux (« Les animaux sont des êtres humains comme les autres », disait la déjà défunte Brigitte Bardot) dans les hideux « stéréotypes sexués ». Plus personne (enfin presque) ne veut s’entendre rebattre les oreilles avec des petits garçons qui seraient faits pour les petites voitures et des petites filles pour les petites poupées.

FEMINISME 19 12 2014.jpg

Le Monde, 19 décembre 2014.

Elles ont raison : il faut dénoncer.

On ne dénonce jamais assez : c'est un principe.

 

Il faut en finir une fois pour toutes – pour en finir une fois pour toutes avec la « domination masculine » (Pierre Bourdieu) – avec les stéréotypes de « genre », si possible dès la Maternelle, en inculquant dans les jeunes cerveaux le principe sacro-saint de l’égalité entre les garçons et les filles, par exemple au moyen d’un ABCD qui les prédisposera à admettre que les premiers ne sont pas supérieurs aux secondes (ce dont personne ne doute), et convaincra les secondes de ne pas se laisser faire (ce qui s'observe depuis quelques siècles). Grâce à Dieu, à la statistique et à la sociologie progressiste, la société remédie heureusement à cette maladie.

 

À la limite, ils pourront choisir leur sexe tout à fait librement, une fois arrivés à maturité (c'est bien connu : un destin cruel pesait jusqu'à présent sur les individus en les assignant à un rôle sexuel fondé sur la seule présence arbitraire entre leurs cuisses, à leur naissance, d'un petit cylindre de chair flasque ou d'une fente ouverte sur on ne sait quelles profondeurs obscures).

FEMINISME 19 12 2014 INTERTITRE.jpg

Don Quichotte, au secours !

Il y a encore des moulins à vent à combattre !

Ah bon ? On vous fait bouffer de la musique contemporaine au-delà du raisonnable pour vous faire entrer dans le crâne que l’extrême dissonance et les intervalles les plus inouïs constituent le fin du fin de la cuisine musicale qui se concocte dans les laboratoires de la modernité (ils appellent ça, sans doute, la « mélodie » d’avant-garde, voir ici même du 24 février au 4 mars) ?

 

Eh bien de la même façon, on vous gavera, à longueur de médias, à profondeur de journée, à hauteur d'homme et à épaisseur d'esprit, de l’idée que la France se doit d’instaurer la parité intégrale des hommes et des femmes, dût-on pour y parvenir triturer en tout sens la carte électorale et révolutionner le mode de scrutin : si la société tarde ou résiste, le coup de force légal (juste un nouveau règlement administratif) y pourvoira. L'abolition des stéréotypes, tout comme celle des privilèges, un certain 4 août 1789, « sera le genre humain » : elle est d'ores et déjà sur la bonne voie. Même si, y compris parmi les abolitionnistes, semblent se manifester quelques résistances.

 

Rien de mieux en effet, pour se convaincre qu'il subsiste des obstacles à la disparition des stéréotypes sexués, que d’assister, le 8 mars (avant-hier), à la manifestation qui a eu lieu place Bellecour à Lyon, pour célébrer la journée internationale du droit des femmes, et qui prétendait illustrer brillamment, spectaculairement et fastueusement la fin des stéréotypes, comme on le constate ci-dessous.

FEMINISME 9 MARS 2015.jpg

(Le Progrès, 9 mars 2015) 

 

C'est-y pas mignon ! Elles adhèrent toutes au PS ? Ou bien à la Manif pour tous ? Faudrait savoir.

FLAMANT ROSE VOL.jpg

D'un côté, les femmes en rose !

 

LOGO SAMSE.jpg

De l'autre, les hommes en bleu !

 

DRAGEES ROSES.jpgLes fabricants de dragées de baptême ont encore deDRAGEES BLEUES.jpg beaux jours devant eux ! C'est à la Manif pour tous qu'on doit bien rigoler !

 

 

 

 

Voilà ce que je dis, moi.

dimanche, 25 janvier 2015

CHRISTINE ANGOT A LA HAINE 1/?

Quelqu’un qui se fait appeler Scarlett a laissé un commentaire ici même il y a quelques jours. Pour résumer, elle me traitait de « patate ». Je me suis dit aussitôt que le mot n’était guère aimable à l’égard du tubercule (famille des solanacées, à laquelle appartiennent, entre autres, le tabac, le datura et l’aubergine) : je suis bien moins appétissant dans l’assiette. Je réussis cependant assez bien le gratin « dauphinois » (les guillemets à cause du gruyère, il paraît que c’est hétérodoxe).

 

La moutarde est montée au nez de la charmante personne en lisant les propos dont je gratifiais une de ses idoles, en la personne de Christine Angot. Pas même la personne : le personnage qui se présente comme écrivain. J’admets que les mots pouvaient être interprétés de façon désobligeante. Je comparais en effet cet « écrivain » à un fruit qui se serait trompé d’arbre. Tout ça pour dire que la littérature sortie de la plume de la dame n’est pas précisément « ma tasse de thé ». Et après tout, la liberté d’opinion n’est pas un vain mot. J’espère.

 

LASCH CHRISTOPHER CULTURE NARCISSISME.jpgJe suis d’ailleurs effaré de l’écho rencontré par les livres de la dame : faut-il que la magistrale analyse proposée par Christopher Lasch ait été prémonitoire. Pensez que son génial La Culture du narcissisme (Climats, 2000, préface de Jean-Claude Michéa) a été publié en 1979 aux Etats-Unis. A croire que Lasch avait anticipé dès cette époque la mise en devanture des livres de madame Christine Angot.

 

Il a même intitulé le premier chapitre de son livre « L’invasion de la société par le moi ». Ce titre, ça fait un peu "pan dans la gueule" : la peste soit du moi, en vérité, si c'est pour tomber dans la bouillasse et la platitude la plus triviale. En gros et pour aller vite, il pensait que cette invasion n’était pas de très bon augure (c'est le moins qu'on puisse dire) pour un diagnostic sur l’état moral, culturel et psychologique futur de la civilisation en général et en particulier de nos sociétés américanisées.

 

En France, il se passe en littérature contemporaine ce qui s'est passé ailleurs : en musique, décrétons que tous les sons possibles et imaginables, bruits compris, sont musicaux. En arts plastiques, décrétons que tout le réel est artistique. En littérature, Angot illustre à merveille la tendance : décrétons que tout le déroulement de la vie quotidienne d'un individu lambda (raconté, s'il vous plaît, par un auteur qui porte le même nom que le narrateur) est littéraire. En l'occurrence, cela donne, avec Christine Angot, des conversations de dames pipi.

 

Je ne veux pas savoir qui a eu l'idée foireuse d'ériger ça, très pompeusement, en « autofiction ». Foireuse, l'idée : « ... comme dict le proverbe : "A cul de foyrard toujours abonde merde"» (Gargantua, IX).

 

Mais ce n’est pas cette « littérature » vantée par Angot (involutive dans sa platitude jusqu’à la saturation de l’exaspération)  qui m’occupe ici, bien que l’auteur ait quelques peccadilles à se reprocher. « Peccadilles » est même inscrit dans son casier judiciaire, depuis sa condamnation pénale (à deux reprises) pour s’être acharnée à faire des livres de vautour en pillant, vampirisant et s’appropriant la vie privée d'une dame qui a eu le malheur d'être l' « ex-femme de son nouveau compagnon » (dixit l’encyclopédie en ligne). Sans que la moindre question morale lui effleure la conscience. George Orwell appelait ce sens moral la « common decency ». Jean-Claude Michéa traduit la formule par "décence ordinaire". Mais Christine Angot a d'autres chats à fouetter.

 

Si elle s’était contentée de continuer à éplucher ses patates (voir plus haut), je l’aurais laissée dans sa cuisine. Mais voilà, elle ne s'est pas contentée. Voilà qu'elle se mêle de littérature. Voilà qu'elle se pose en juge. Voilà qu'elle décrète ce qui est littéraire et ce qui ne l'est pas. Tout ça parce qu'elle ne peut pas encadrer les romans de Michel Houellebecq. Et dans Le Monde, s'il vous plaît. Elle n'aurait pas dû. Et pour faire bonne mesure, Le Monde (des livres, 16 janvier) fait figurer le libelle de Christine Angot dans un dossier intitulé "Ecrivains contre la terreur". Je trouve la plaisanterie de très mauvais goût.

 

Je vais encore me faire traiter de sale macho sexiste. Patriarcal. Réactionnaire. Archaïque. Bourré de stéréotypes. J'assume d'avance. Tiens, dites-moi de qui est ce vers : « Je fume au nez des dieux de fines cigarettes ». Gogol vous donne la réponse en 0,28 seconde. A condition de connaître le vers en question.

 

« Au nez des dieux », j'insiste.

 

Voilà ce que je dis, moi.

 

vendredi, 21 février 2014

"GENRE" ET BOURRE ET RATATAM

Je l'ai dit : participer à un "débat de société" est totalement vain et ne sert ni à rien ni à personne. Cela ne sert qu'à faire plaisir à ceux qui ont un grand besoin de s'exprimer. Tiens au fait, qu'est devenu le "débat de société" autour de Dieudonné et de sa quenelle ?

A QUENELLE 3.jpg

 Moi je crois que, quand j'exprime des points de vue dans ce blog, ça a le même effet que quand je fais pipi : la petite musique d'une eau tombant dans une autre. Je veux dire : une grande leçon de modestie, voire d'humilité.

 

Mais tant pis, j'y vais de mon couplet et de mon refrain. J'y vais à reculons, mais je m'y colle quand même. Je ne dis pas avec enthousiasme. Je réagis, comme beaucoup de gens, j'imagine, en essayant de mettre la tête hors du déluge de crétinisme et de langue de bois qui s'abat sur la population au sujet du « genre ».

 

Ce n’est pas que la question m’obsède, mais je me sens, à tort ou à raison, obligé d’y revenir. Le « genre » est dans toutes les bouches. Le « genre » est devenu le nouveau dogme, le nouveau catéchisme, le « genre » est du dernier chic, le « genre » est la dernière religion à la mode. Et gare à tous les réactionnaires et à tous les fachos qui partent à l’assaut de cette nouvelle citadelle assiégée pour détruire la Vérité Nouvelle, vous savez, celle qui « vient de sortir ». Si possible de sortir toute nue du puits.

 

La fumée qui commence à me sortir par les naseaux, c’est celle de l’enfumage offensif de tous les tenants de la théorie du « genre » qui, à ce qu’ils disent, permet de renouveler de fond en comble, de la cave au grenier, tout le vieil attirail de la différenciation des sexes. C’est entendu, le mot « sexe » est devenu un mot ordurier, un gros mot, quasiment une insulte.

 

Il semble en effet devenu dangereux de traiter quelqu’un d’ « homme » ou quelqu’une de « femme ». Ce serait à présent « discriminatoire », ce pourrait être considéré comme « stigmatisant » et, à ce titre, passible des tribunaux correctionnels pour atteinte à la dignité de la personne.

 

Je le dis sans ambages, nous nageons en plein délire de la police de la pensée, en pleine fatrasie policière de la censure des mots (par leur interdiction ou leur torsion), en pleine panade de la confiture répressive des nouveaux commissaires du peuple d’un stalinisme soft, rénové et mis au goût du jour. Autant dire en pleine idéologie.

 

Il ne faut pas oublier que les « gender studies », au départ, ont été inventées dans un but militant. Il s’agissait pour son inventeur, du nom de Judith Butler, une lesbienne fière de l'être, une Américaine fière de l'être, sur la base des travaux du célèbre trio philosophique français (Deleuze-Derrida-Foucault) adepte de la « déconstruction », de faire sortir l’homosexualité de sa honteuse marginalité, où une intolérante et intolérable majorité de gens normaux cantonnait une minorité injustement persécutée. C'est le militantisme homosexuel, secondé par le militantisme féministe, qui a fini par imposer sa vision des choses.

 

Car il faut aussi citer, à l'origine de l'obsession du « genre » l'ahurissante fascination de toutes les féministes militantes pour cette ahurissante niaiserie proférée en son temps par Simone de Beauvoir : « On ne naît pas femme, on le devient ». Oui, bien sûr, je sais qu'elle s'élevait à l'époque contre le cliché qui proclame qu'une femme est une femme parce que la nature est la nature.

 

Mais quand je relis cette phrase avec le recul, je me dis avec tout autant de conviction que « l'on ne naît pas homme, on le devient ». Ben oui, c'est tout aussi vrai au sujet de la virilité qu'au sujet de la féminité. Il n'y a pas de raison qu'il soit moins difficile socialement de devenir un homme que de devenir une femme. Et dans le fond, ce sont des vérités fondées sur la réminiscence de ce que disait un certain Jean-Jacques Rousseau : « L'homme est né bon, la société l'a perverti ». Et d'encore plus loin : « La coutume [la culture] est une seconde nature » (Blaise Pascal).

 

Incroyable !!! Rendez-vous compte : l'humain naît de la nature, mais tout le reste (attention : TOUT LE RESTE) est le fait du façonnage culturel et social de la personne par l'éducation, par l'instruction et par la socialité. Et on le sait depuis toujours. Tout le reste est « construction ». Les débats modernes sur les parts respectives de l'inné et de l'acquis ne sont qu'une resucée de la vieille controverse. Et opposer le « genre » et le « sexe » ne devrait rien apprendre à personne. Il faudrait simplement préciser l'origine du succès décisif du mot dans la multiplication des travaux universitaires (d'abord américains) dans les « gender studies ».

 

Et sous la houlette de madame Judith Butler, la grande prêtresse de ce courant, une troupe de plus en plus nombreuse de « déconstructeurs » s’est mise à « déconstruire » à tout va les « stéréotypes » sexuels, qui ne sont à tout prendre que de viles normes, sur lesquelles la société ordonne arbitrairement aux individus de se conformer. La maladie a gagné tous les milieux où évoluent les gens, paraît-il, savants, l’université, les sciences humaines. Je n’ai pas approfondi la question de savoir si, comme certains le prétendent, le « concept » est « efficient ».

 

Moyennant quoi, les tenants actuels du « genre » soutiennent mordicus, contre toute raison, que ce n’est en aucun cas une théorie, suivis par la masse moutonnière des journalistes, pressés de parler de la « soi-disant théorie du genre ». Une théorie déguisée en vérité incontestable, qu’est-ce d’autre qu’une idéologie ? J’aimerais bien qu’on m’explique.

 

Ce qui est sûr, en revanche, c’est que c’est seulement l’action militante acharnée des milieux homosexuels (Judith Butler est lesbienne, et non seulement elle ne s’en est jamais cachée, mais elle l’a très tôt revendiqué haut et fort, au grand dam de sa propre mère) qui a fini par imposer cette représentation particulière du sexe qu’est la notion de « genre ».

 

J’en conclus que tout le monde (croient-ils) a fini par adopter la représentation homosexuelle des questions sexuelles. Bel exploit de propagandistes efficaces, qui ont réussi à substituer leur stéréotype maison au stéréotype dénoncé. Car qu'est-ce d'autre qu'un nouveau stéréotype que la notion de « genre » ? Encore bravo. Bienvenue donc au nouveau stéréotype, désormais en vigueur.

 

C’est sur cette toile de fond qu’il faut voir ce qui se passe depuis quelque temps en France, au sujet de la lutte contre les « stéréotypes » à l’école. Il n’est jamais trop tôt pour entreprendre de modeler l’esprit des enfants, si l’on veut façonner l’ « homme nouveau » tel que certaines officines le conçoivent.

 

Cette entreprise a des précédents, lorsque des gens sûrement très bien intentionnés avaient mis en œuvre de grandioses projets qui avaient pour but de faire advenir le « prolétaire nouveau » ou l’ « Allemand nouveau » : « du passé faisons table rase ». Ce qui m’impressionne, avec cette histoire du « genre », c’est la facilité avec laquelle elle a pénétré dans les esprits et commence à s’imposer effectivement dans les écoles.

 

Ils ont en effet perdu une occasion de s’instruire, ceux qui n’ont pas entendu cet instituteur (pardon, il faut dire « professeur des écoles », et pourtant qu'est-ce qu'il était beau, ce mot qui désignait le métier consistant à instituer un être humain !) exposer la petite expérience qu’il a faite avec ses cobayes, je veux dire ses élèves. Il s’agit de réunir les garçons dans une salle et les filles dans une autre, et de leur demander d’imaginer leur réaction si jamais, un matin, ils se réveillaient dans un corps de l’autre sexe. Quelle idée géniale !

 

Il faut que Peillon donne les Palmes académiques, pour le moins, à ce militant intrépide de la cause de l’ « égalité ». Il paraît qu’ensuite, après confrontation des résultats, la cour de récréation voit davantage filles et garçons jouer ensemble au lieu d’être odieusement séparés par l’odieuse barrière des sexes. Brandissons le drapeau de l’ « égalité » et partons à l’assaut de la forteresse des « stéréotypes ». Mais peut-être après tout ces gens s’imaginent-ils que le monde sera meilleur !

 

Car les stéréotypes, on me dira ce qu’on voudra, c’est essentiel dans la construction du psychisme de la personne, dans la première partie de son existence. On appelle ça des POINTS DE REPÈRE. On me dira ce qu'on voudra, mais il est vital que la personne, comme n'importe quel édifice, soit fondée sur une assise stable et construite avec des matériaux sûrs et bien identifiés, si l'on veut qu'elle soit capable d'affronter les épreuves de l'existence.

 

Alors halte au travail de sape !

 

Voilà ce que je dis, moi.

 

 

 

dimanche, 18 novembre 2012

BD ET LIBERTE D'EXPRESSION

Pensée du jour :

S36.jpg

"SILHOUETTE" N°36

 

« L'oiseau a quelque chose d'étrange. Il fait des choses extraordinaires : l'urubu nettoie les poubelles, l'agami surveille les poulets,le gypaète est barbu, l'albatros pond des oeufs dont le petit bout est aussi gros que l'autre (et l'autre aussi petit que le premier), la huppe pupule, le milan huite et le rhinocéros barète (encore n'est-ce pas un véritable oiseau) ».

 

ALEXANDRE VIALATTE

 

 

 

Quand la BD devint « pour adultes » et mensuelle, j’ai encore suivi le mouvement. Ce furent Charlie (mensuel), Métal hurlant, Circus, A suivre, Pilote (mensuel), Fluide glacial (qui paraît toujours, mais bon, je me suis fatigué). HKH94 1970.jpgEt tout ça depuis le n° 1 jusqu’au dernier (enfin, pas toujours). Ça me fait encore des piles presque jusqu’au plafond, rien qu’avec ce que j’ai gardé, pour vous dire. Il va de soi que j’ai suivi Hara Kiri hebdo jusqu’à l'ultra-célèbre et immortel « Bal tragique à Colombey : 1 mort » (16 novembre 1970), et Charlie hebdo qui lui a immédiatement emboîté le pas, après l'interdiction pour crime de lèse-DE GAULLE.

 

 

Je garde une tendresse pour des revues plus éphémères de cette époque, parce qu’elles faisaient souffler un vent de liberté devenu totalement inimaginable aujourd’hui. Personne, à part le ministre de l’Intérieur, n’aurait alors eu l’idée de faire à sa place la police des moeurs ou  la police de la pensée : aujourd’hui, les flics de toute obédience (sous couvert d’ "associations" religieuses, sexuelles, raciales…) font régner leur intolérance. Attention, c’est parti pour une petite parenthèse !

 

 

Dans les médias (je veux dire tout ce qui est de l’imprimé, du son ou de l’image fixe ou animée), c’est le CURÉ qui a pris le pouvoir et revêtu l’uniforme du FLIC augmenté du Père Fouettard : le CURÉ RELIGIEUX (TOUS les prêtres, imams, rabbins), le CURÉ RACIAL (TOUTES les associations antiracistes), le CURÉ SEXUEL (TOUS les hétérophobes dénonciateurs de « phobies » qu’ils fabriquent pour les besoins de leur « cause », je ne vois pas pourquoi je n’en inventerais pas à mon tour). Quel nouveau PHILIPPE MURAY inventera un anticléricalisme à la hauteur de cette agression de tous les azimuts et de tous les instants ?

 

 

Ce n’est plus « Big Brother is watching you » (1984), c’est l’œil omniprésent du « curé punisseur » qui, telle une caméra de surveillance universelle, vous guette à tous les coins de rue pour vous envoyer en correctionnelle si vous avez la mauvaise idée de lever le doigt pour dire ce qui vous semble être de bon sens, par exemple au sujet du mariage et de l’adoption homosexuels.

LEMONDE 18.jpg

LA PROPAGANDE DES ANTI-LIBERTÉ A LE VENT EN POUPE :

J'APPELLE ÇA CRIMINALISER LA VIE SOCIALE

(Le Monde, dimanche 18 - lundi 19 novembre 2012)

Une intolérance qui se couvre du manteau de la « tolérance » et du « respect » (GEORGE ORWELL appelait ça la novlangue : « L’esclavage, c’est la liberté »), pourvu qu’ils en soient les seuls bénéficiaires. Une intolérance qui se couvre par ailleurs (mais ça va avec) de l'indispensable tunique de la VICTIME. Et le crime qui crée la victime, aujourd’hui, s’apparente presque toujours à la « discrimination », et concerne le plus souvent les gens à couleur de peau exogène, ou à sexualité marginale, ou encore à religion importée. La race, le sexe, la bondieuserie. Le tiercé gagnant.

HK195 1977.jpg

COMMENT CROYEZ-VOUS QUE LES "ASSOCIATIONS" (LGBT OU RELIGIEUSES)ACCUEILLERAIENT CETTE COUVERTURE AUJOURD'HUI ?

(décembre 1977) 

Je vais te dire : fais un beau mélange de tout ça, et tu as le magnifique couvercle d’un magnifique ORDRE MORAL qui s’abat sur toi pour te cuire à l’étouffée. Même Charlie-Hebdo (attention, celui ressuscité par PHILIPPE VAL en 1992, qui n’a pas grand-chose à voir avec le premier, né en 1970), fait un pet de travers tous les 36 du mois par peur des bombes et des procès, et quand il le fait, la merde n’est jamais bien loin, prête à exploser. C'est bien le signe que des forces de l'ordre (racial, sexuel, religieux) convergent et se coalisent contre l'expression libre, non ? De quel côté est-elle, l'intolérance ?

 

 

Ce « meilleur des mondes », PHILIPPE MURAY l’appelait l’ « envie de pénal ». Moi qui n’ai pas la classe du grand PHILIPPE MURAY, je me contente de l’appeler « curé punisseur ». C’est le même uniforme gris. Mais même les nobles imprécations de PHILIPPE MURAY n’ont pas suffi à empêcher le flot malodorant des hordes de gendarmes « antiracistes », « antisexistes », « antihomophobiques », « anti-islamophobiques » de tout submerger.

REVUE AH NANA.jpg

UNE REVUE PUBLIEE PAR DES FEMMES FEMINISTES (septembre 1978, dessin LIZ BIJL)

COMBIEN DE BOUCLIERS LEVÉS ET DE PROCES, SI C'ETAIT AUJOURDHUI ????

Je reviens à mes revues de BD plus éphémères. Pour dire ce qu'était la liberté d'expression à l'époque, je montre quelques couvertures. Parmi les comètes, je citerai Ah ! Nana ! : 9 numéros, avec la géniale NICOLE CLAVELOUX (ah ! son extraordinaire Alice au pays des merveilles) et l’austère CHANTAL MONTELLIER, un féminisme pas encore coincé dans un intégrisme « genriste » à la JUDITH BUTLER. Je citerai Surprise (5 numéros), publié par le dessinateur actuel de Libé, WILLEM, avec une curieuse BD, Ici, on ne nous voit pas.

REVUE MORMOIL BARDOT.png 

Je citerai Mormoil, avec la couverture magnifique du n°3 et sa superbe BRIGITTE BARDOT en prototype, archétype et modèle de l’idiote, croquée par MORCHOISNE, en train de dire : « Mords-moi le quoi ? ». Je citerai Tousse-Bourin, qui a révélé CABANES, Le Canard sauvage, avec DESCLOZEAUX, qui loue aujourd’hui ses services aux chroniques gastronomiques du Monde.

REVUE CRI QUI TUE.jpg

VOUS AVEZ NOTÉ : HONORABLE REVUE DE BANDES DESSINEES EXOTIQUES

Je citerai Piranha, Le Cri qui tue, la revue d’ATOSS TAKEMOTO, qui me permet d’affirmer que j’ai été parmi les premiers lecteurs de mangas publiés en France, longtemps avant que ça s’appelle « manga ». Je citerai enfin Virus, et une pléiade d’autres (Carton, Microbe, Aïe, Le Crobard, on n’en finirait pas, et je ne parle que de ce que j’ai connu), encore plus éphémères.

 

 

Ce n’était pas le « bon temps », c’est sûr, et je n’ai pas de nostalgie. J’observe juste une drôle d’inversion des rôles entre le politique et le sociétal : ce qui était politique était tabou aux yeux du pouvoir et toute incartade réprimée, alors que ce qu’on n’appelait pas encore le « sociétal » (autrement dit « les mœurs ») était laissé totalement libre (enfin, quand je dis "totalement", il s'en faut de beaucoup ...).

 

 

Aujourd’hui, c’est l’inverse : des hommes politiques et de l’ordre social, vous pouvez dire absolument tout ce que vous voulez, et même n’importe quoi, ça fait comme la pluie sur les plumes du canard (il n’y a plus de politique, il n’y a plus que de la « com », et les « susceptibilités » se sont muées en édredons et matelas pour abriter l'amour-propre devenu invulnérable, parce qu'inexistant, pour cause d'absence radicale de convictions).

 

 

Au sujet du « sociétal » (qu’on a cessé d’appeler les « mœurs »), en revanche, l’armée des CURÉS PUNISSEURS (religieux et sexuels et raciaux) se charge de vous fermer la gueule (regardez : même Libé se fait attaquer pour son titre sur BERNARD ARNAULT : « Casse-toi, riche con ! ». Pour une fois qu'ils étaient drôles !).

 

 

 

Moi, j'admire le peuple norvégien pour son attitude exemplaire après les atroces meurtres d'ANDERS BERING BREIVIK, et je vomis les loups qui ont déchiré en effigie RICHARD MILLET après la parution de son brûlot - ANNIE ERNAUX, JEAN-MARIE-GUSTAVE LE CLEZIO et TAHAR BEN JELLOUN venant tout à fait en tête -, ils méritent de retourner se réduire en la bouillie moralisatrice et policière d'où ils n'auraient jamais dû sortir pour empuantir l'air des hommes libres !!!

 

 

Voilà ce que je dis, moi.

 

 

lundi, 27 août 2012

A PROPOS D'EMANCIPATION FEMININE

Pensée du jour : « La France est beaucoup plus géographique qu'on ne pense ».

ALEXANDRE VIALATTE

 

 

Les féministes ne sont pas les seules à soutenir, à défendre, à secourir les femmes. Il faut s’en féliciter. Pour être juste, je dirai a priori que les femmes ne cherchent pas plus que les hommes à être soutenues, défendues, secourues. C’est malgré tout ce que dit la rumeur. Il paraît qu’elles se confient plus volontiers.

femme,féministe,soins de beauté,mode,lutte,égalité,sexisme,maquillage,make up,chirurgie esthétique,bar à ongles,fitness,spa

 

 

Comme elles confient, paraît-il, davantage que les hommes, leur apparence à toutes sortes de spécialistes : coiffure, maquillage, épilation, volume et forme des seins ou des fesses, longueur et richesse des cils, des ongles, spa, fitness, soins de la peau et du visage, j'en passe et des meilleurs. Elles se fient également à toutes sortes de magazines, appelés pour cette raison  « féminins ». Constatons aussi qu'elles constituent l'essentiel de la clientèle des gymnases. Oui, elles se donnent plus de mal que les hommes.femme,féministe,soins de beauté,mode,lutte,égalité,sexisme,maquillage,make up,chirurgie esthétique,bar à ongles,fitness,spa

 

 

J’informe à ce propos celles qui pourraient être intéressées, que vient de s’ouvrir, rue d’Austerlitz, un « bar à ongles ». J'assure que je ne plaisante pas. Selon moi, c’est une bonne nouvelle. Et même peut-être un progrès. C’est un bar dont le quartier commençait à remarquer le manque cruel, et à se demander comment il avait pu jusque-là s’en passer. Mais il paraît qu'il y a des bars à tout : c'est « tendance ».

 

 

Il n’a échappé à personne qu’il existe donc, encore, effectivement, quelques menues différences naturelles entre les hommes et les femmes, au grand dam des "genristes", vous savez, les négationnistes de la différence des sexes.

 

 

Voyons l’une des plus spectaculaires : il est scientifiquement prouvé que la femme, chaque fois qu’elle va aux toilettes, y passe deux fois plus de temps, en moyenne, que son collègue masculin (3' contre 1,5', je parle en moyenne). Certains ont attribué cette petite différence à l’odeur des lieux, moins agréable du côté des messieurs. C’est une hypothèse. C’est bien connu, les femmes sont plus soigneuses et plus attentives. Et ont le sentiment esthétique plus développé. Du moins à ce qu'on dit.

 

 

D’autres penchent pour une explication d’ordre vestimentaire, qui rend la chose plus compliquée, et par là même plus longue. La superposition des couches est effectivement une complication. Quoi qu’il en soit, la World Toilets Organisation (vous pouvez vérifier) est formelle : les femmes passent plus de temps sur le trône que les hommes. Comme le prouvent les files d'attente devant les WC femmes sur les aires d'autoroute. Conclusion logique : les toilettes sont pour beaucoup dans le surcoût que représentent les femmes pour la comptabilité des entreprises. Avis aux patrons.

 

 

Comme quoi, pour elles, le fait d’être porteuses de sens, de valeur, en plus de l’avenir de l’humanité, n’est pas seul en cause sur le marché du travail. En vérité je vous le dis, il faut penser aux toilettes. Elles y passent (tout compris) 3 à 4 ans de leur existence professionnelle (je n'ai pas vérifié le calcul, sur la base de 8 passages par jour, compte non tenu du nombre de rouleaux de papier hygiénique, lui aussi différent), ce qui donne un net avantage (qu'on peut appeler naturel) aux carrières  masculines. On se demande comment les militants de la génération « transgenre » (vous savez, les adeptes du slogan « le sexe n’a rien à voir avec la nature : il est une construction culturelle ») pourraient contester de telles données objectives.

 

 

Mais il subsiste d’autres petites différences entre l’homme et la femme. Signalons en effet que le chemisier au col habillé de pointes de métal se portera avec une jupe asymétrique et des richelieus pied-de-coqfemme,féministe,soins de beauté,mode,lutte,égalité,sexisme,maquillage,make up,chirurgie esthétique,bar à ongles,fitness,spa ("poule" est donc devenu tendancieux et suspect ?), et que tout ça fera swinguer votre dressing. On voit par là qu'il est bon de porter certaines informations à la connaissance du public.

 

 

De même, on est heureux, madame, de vous conseiller le sérum visionnaire LR 2412 4 % qui, ajouté au teint idole ultra 24 H lys rosé 02, et au sérum génifique yeux light-pearl illuminateur regard, vous fera dire, comme madame DE France : « Ça m’intéresse de vieillir ». Je n'invente rien. De son côté, Madame SUBLET n’hésite pas à le dire : « Les rides, je ne les traque pas, je les affiche ».femme,féministe,soins de beauté,mode,lutte,égalité,sexisme,maquillage,make up,chirurgie esthétique,bar à ongles,fitness,spa Elles se donnent le mot, ma parole. N’en doutons pas : il convient, en ces temps de glorification de la jeunesse, de déculpabiliser ceux qui en ont quitté le rivage depuis longtemps. Evitons, tant que faire se peut, de pousser les vieux au suicide. Quoique ...

 

 

Quant au mascara hypnôse [sic] star 01 noir, le rouge à lèvres rouge in love beige dentelle 300 M et le vernis in love jolis matins 220 M, ils seront des "plus" incontestables pour le rayonnement de votre beauté. On voit par là que le progrès fait rage.

 

 

Voilà ce que je dis, moi.

 

 

A suivre.

vendredi, 27 avril 2012

LA BÊTISE FEMINISTE

MARIE DARRIEUSSECQ écrit des livres. Elle a commencé par Truismes en 1996. J’avais lu ça, en son temps. Pas franchement mauvais, pas épastrouillant non plus.

 

 

Tiens, à propos d’ « épastrouillant », savez-vous que le mot se trouve dans A la Recherche du temps perdu ? On le trouve à la page 892 du tome III, dans la collection de La Pléiade. Mais attention, la première Pléiade, l’édition de PIERRE CLARAC en trois volumes, pas celle de JEAN-YVES TADIÉ, en quatre volumes. 

 

 

Notons en passant que, d’une édition à l’autre, La Recherche a vu doubler son embonpoint (bondissant de 3558 à 7408 pages), à cause des bondieuseries de sacro-saintes « notes et variantes », pondues très sérieusement et très laborieusement par des universitaires cavernicoles et binoclards, dont on se demande ce qui les pousse à allonger à ce point la sauce, vu la maigreur squelettique de la rémunération qu’ils en tirent. La gloire, peut-être ? A moins que ce soit l’idéal ? Autre hypothèse : ça fait bien sur un Curriculum Vitae.

 

 

Je reviens à la petite DARRIEUSSECQ. Son histoire de transformation en truie (c’était une coiffeuse, si je ne me trompe) était somme toute assez mal bâtie. Rien à voir en tout cas avec La Métamorphose de FRANZ KAFKA, qui se déroule à une altitude pour le moins métaphysique, totalement inaccessible à la petite MARIE (comme dit la chanson : « La petit'Marie M'avait bien promis Trois poils de ... Pour faire un tapis »).

 

 

Si je me souviens bien, il n’y avait, sur le plan romanesque, presque aucune interaction entre les mutations physiques de la fille et les gens de son entourage. Un vrai défaut de conception. Un vice de forme, quoi. Mauvais signe, pour un « écrivain », je trouve. Et puis, la fin, avec la libération de tous les cochons et leur fuite dans la nature, c’est quand même ce qui s’appelle « finir en queue de poisson », non ?

 

 

La petite DARRIEUSSECQ a réussi à s’introduire dans une certaine intelligentsia parisienne. Visiblement, elle sait y faire, puisqu’après avoir un peu pompé un livre autobiographique de CAMILLE LAURENS, elle a réussi à l’évincer des éditions POL, PAUL OTCHAKOVSKY-LAURENS ayant pris parti pour elle dans la bisbille, que la deuxième avait, hélas pour elle, rendue publique. Je ne dis pas pour autant que CAMILLE LAURENS est un véritable écrivain, qu'on se rassure.

 

 

Aux dernières nouvelles MARIE DARRIEUSSECQ est parvenue à recycler une pointe de sa plume devant un micro de France Culture, où elle lit hebdomadairement un papier en général incolore, inodore et sans saveur, couleur de muraille, c'est-à-dire digne de passer inaperçu, parfois non dénué cependant d’une modeste pertinence, et d’une voix, comment dire, sans caractère. mais sans aucun caractère. Une voix d’une platitude parfaite et présentable. Les malveillants diront que la forme est conforme au fond. Dont acte.

 

 

Qu’est-ce qui lui a pris, l’autre jour, d’aller chercher des poux dans la tête d’une publicité ? Et quelle publicité ? Une invitation à aller faire de la randonnée dans le Jura. On se demande vraiment ce qui lui a pris d’aller y dénicher du sexisme.

 

 

Il faut vraiment que « les chiennes de garde » n’aient plus rien à se mettre sous les crocs et regrettent le beau temps où elles pouvaient se les aiguiser sur les mollets de DOMINIQUE STRAUSS-KAHN, en se déchaînant contre ses fureurs sexuelles. Ah oui, c’était un bon « client ». C'était le bon temps, en quelque sorte. Le venin coulait tout seul, ça venait bien.

 

 

Qu’est-ce qu’elle dit, cette publicité ? On peut voir le spot de 10 secondes sur internet (tapez "jura publicité") : « Tu veux des rencontres ? Vivre une aventure ? Goûter mes spécialités gourmandes ? Alors viens chez moi. Hmmm ! Je suis le Jura. Rejoins-moi sur jura-tourisme.com. Je t’attends ». Voilà, c’est tout. Enfin presque. Le message est comme susurré à l’oreille par une voix féminine qu’on peut trouver sensuelle (mais sensuelle comme une voix synthétique).

 

 

Dernier détail : comme c’est un message radiophonique, pas d’image. Mais le spot, sur internet, se déroule sur fond de photo de paysage verdoyant : un charmant village au pied d’une belle falaise, à l’entrée d’une vallée resserrée. Je suggère à MARIE DARRIEUSSECQ d’aller au bout de son obsession, et d’interpréter (au secours, la psychanalyse !) le paysage présenté comme le pubis offert d’une femme étendue sur le dos, où le promeneur est invité à pénétrer. Comme ça, le tableau sera complet.

 

 

Blague à part, cet aspect n’était sans doute pas absent des cogitations publicitaires quand il s’est agi de choisir la photo. Ce serait d’ailleurs fort intéressant, d’assister à ce genre de séance de « brain-storming », où l’on traduit des désirs subconscients en signes visuels précis, le plus connu étant la forme en V dans les affiches mettant en scène des femmes (deux doigts ouverts sur une épaule nue, par exemple).  

 

 

Voilà donc le message qui fait dresser les féministes sur leurs ergots, flamberge au vent, outrées que la publicité utilise une fois de plus impunément le corps des femmes (donc elles ont bel et bien identifié le pubis) pour vendre des produits ? Elle est là, la bêtise féministe. D’abord faire de la publicité à une publicité, bien sûr. Ensuite, monter en épingle un message somme toute bien anodin. Enfin, se tromper de cible.

 

 

Qu’y a-t-il dans ce message ? Une pute qui vend ses charmes, un point c’est tout. « Tu viens, chéri ? », c’est du racolage actif. Mais que fait la police ? Mais que fait SARKOZY, serait-on en droit de demander ? Mais des racolages comme ça, c’est à chaque instant, partout qu'on en voit. S’en prendre à cette pub-là, parmi cent mille autres, ce n’est rien d’autre, finalement, qu’une lubie.

 

 

Le problème ? C'est le problème que les féministes ont avec le désir masculin. Mais quel homme n'a pas un problème avec son propre désir ? Peut-être les féministes doctrinaires ont-elles un problème avec le désir féminin ? Peut-être, finalement et en fin de compte, les féministes doctrinaires ont-elles un problème avec le désir? En soi ?

 

 

Tout le monde a un problème avec le désir. Le féminisme constitue une des techniques pour y parvenir. Ce n'est pas donné à tout le monde, d'exprimer ça par un symptôme.

 

 

L’obsession victimaire d’un certain féminisme fait oublier à ces dames que la publicité est par nature perverse. Par nature, la publicité pervertit les signes, elle fait feu de tout bois pour attiser le désir (le premier étant sexuel), qu’elle met en scène dans des formes, couleurs, etc. qui objectivent en termes visuels les phénomènes qui se produisent à l’intérieur de la bouilloire humaine.

 

 

Il faut bien se convaincre que, pour vivre, la publicité fait les poubelles. Que la publicité se nourrit exclusivement des déchets de la civilisation. Des crottes de l'imaginaire humain. Que la publicité est l'inverse de la civilisation, puisque son boulot est de sublimer de vulgaires objets, de simples marchandises.

 

 

C’est en soi que la publicité serait à dénoncer.  Et les hommes devraient autant s’insurger que les femmes. Ce n’est pas pour rien que, dès les années 1960, la revue Hara-Kiri (dont l'équipe était constituée d'hommes, presque exclusivement) clamait à tous les vents : « La publicité nous prend pour des cons. La publicité nous rend cons ». J’ajoute qu’elle n’a peut-être pas tort de le faire, vu les performances de notre système éducatif. Passons.

 

 

MARIE DARRIEUSSECQ a donc perdu une belle occasion de se taire. Franchement, vous voulez que je vous dise ? Dans la publicité Jura, il n’y a pas de quoi fouetter une chatte, fût-ce dans le cadre d’une Pospolite Castigatrice, réunie, conformément aux statuts, par le Vice-Curateur du Collège de ’Pataphysique (n'oublions pas l'apostrophe, obligatoire depuis Faustroll).   

 

 

Voilà ce que je dis, moi.

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

vendredi, 23 décembre 2011

SARKOZY DEGAINE SON ARMENIE

Allez ! C’est reparti. Mais qu’est-ce que c’est, cette fièvre qui les prend régulièrement, les politicards, qu’ils soient « uhèmpistes » ou « péhessistes », qu’ils dorment au palais Bourbon ou au palais du Luxembourg, qu’ils aient le pouvoir ou qu’ils veuillent le conquérir ? Encore un tour de cinglés ! De toute façon, pour moi, le Bourbon est un mauvais whisky (américain) et le Luxembourg, un paradis fiscal avec « Chambre de Compensation » (ça veut dire Clearstream) incorporée.

 

 

 On avait déjà la répression des PROPOS sur quelques sujets (antisémitisme, sexisme, homophobie et autres « phobies »), sur lesquels on a voulu coudre la bouche des dizaines de millions d’individus qu’on appelle en général la « population », puisqu’on a abandonné le mot « peuple ». Rien que ça : réprimer des PAROLES, ça me fait déjà craindre le pire.

 

 

Eh bien qu’on se le dise, de même que monsieur GERARD COLLOMB a mis les Arméniens dans sa poche électorale en laissant installer un « monument commémoratif » (en fait, une dizaine de totems bizarres) au pied du clocher de la Charité, de même, le président NICOLAS SARKOZY, en vue de la présidentielle, est parti à la pêche aux voix  arméniennes en leur accordant le vote d’une loi réprimant la négation de « tout » génocide en général (sous entendu : du génocide arménien en particulier).

 

 

Eh bien, je me répète, qu’on se le dise : si un candidat, quel qu’il soit, veut acheter ma voix, il va falloir qu’il donne une rallonge sévère au chiffre des picaillons. Ma voix est hors de prix, monsieur COLLOMB. Ma voix est au-dessus de vos moyens, monsieur SARKOZY. De toute façon, il est probable que vous n’avanceriez pas un centime dans cet investissement. C'est du fonds perdu.

 

 

Et vous avez raison : dans toutes les prochaines élections, vous êtes prévenus, ma voix restera dans ma gorge. J’ai cessé de faire joujou avec les petits papiers. Et je ne ferai aucun jeu de mots sur « urnes » et « burnes ». Ici, on est toujours d’une correction impeccable. On a sa dignité, que diable !

 

 

De quoi s’agit-il ? D’une course à pied. D’un sprint, pour être précis. C’est à qui arrivera le premier pour occuper le créneau. Le « Parti Socialiste » annonce il y a quelque temps qu’il fait mijoter une loi sur le sujet. SARKO bondit sur l'UMP : « Merde, on va se faire griller sur le génocide arménien. Vite une loi ! ». Ben elle est là, la loi. Dans le match SARKOZY-HOLLANDE, avantage à SARKOZY.

 

 

Vous avez vu le coup de main ? Chapeau l’artiste ! Remarquez, c'est une habitude à prendre : les faits divers ont bien servi de galops d'essai, au chapitre des lois-événements. Et ces cons de socialistes, qui voient le fromage arménien leur échapper, vous croyez qu’ils font la gueule ? Mais non ! Ils l’ont dans le baigneur ! Dans le dos ! Dans l’anus ! Dans ce que vous voudrez : piégés par SARKO, ils vont la voter, la loi, comme un seul clampin. Bien obligés ! C’est bien fait pour eux !

 

 

Est-ce que ça veut dire pour autant que les Arméniens ont tort ? Non évidemment. Le sol turc abrite en tout et pour tout 60.000 individus de cette … quoi ? Ethnie ? Langue ? Religion ? En 1900, ils étaient 2.000.000. Je signale en passant que 1915 et 1916 ont vu disparaître non seulement des Arméniens en pagaille, mais en gros toutes les minorités (Grecs, Juifs, …) qui occupaient une portion du territoire ottoman. Aujourd’hui, on appellerait ça « minorités visibles ».

 

 

Avec déportations vers Alep, micmacs avec les Russes, et tout un tas d’atrocités sur lesquelles les historiens sont bien documentés, les « Jeunes Turcs » ont construit leur nouvel Etat sur la « turquification » de la population. Je recommande les photos montrant des officiers turcs posant fièrement derrière leurs trophées : des rangées entières de têtes coupées. On n'est pas plus "raffiné". On ne disait pas encore « nettoyage ethnique ».

 

 

 

Et le MUSTAPHA KEMAL ATATURK des familles, qu’on nous sort en toute occasion du placard comme fondateur moderne et progressiste de l’Etat actuel, c’est bien lui qui obtient l’amnistie pour les massacreurs, si je ne me trompe. La Turquie qui réclame son fauteuil à la table européenne, c'est exactement l'héritière de ça, il faut le savoir. La Turquie actuelle est un pays depuis bien longtemps nettoyé des impuretés raciales. Déjà ça, ça me chiffonne la somnolence postprandiale.

 

 

Ce qui me retourne l’estomac et me badibulgue la comprenette, ces jours-ci, ce n’est donc pas un quelconque problème avec les Arméniens, mais avec les épiciers français qui font commerce de ce genre de marchandise, sous l’emballage de n’importe quel yaourt électoral.

 

 

Car la loi votée jeudi n’est pas la première du genre à instaurer un délit d’opinion, une infraction de parole, un crime de pensée. Il a d’abord été interdit de dire du mal des juifs. On a ajouté l’interdiction de soutenir que les juifs n’avaient pas subi une extermination. Sauf erreur de ma part, cette loi "mémorielle" ne dit rien des tziganes, des handicapés, des homosexuels morts à Auschwitz ou ailleurs.

 

 

Et comme, en tout, « il n’y a que le premier pas qui coûte », et qu’un bon politicard soigne correctement les cuisiniers qui le nourrissent, on a continué sur la lancée : il a été interdit de traiter les handicapés d’infirmes ; d’appeler « pédé » un homme qui préfère les hommes ; de tenir sur les femmes des propos jugés méprisants par les femmes ; sur les noirs des propos jugés infamants par les noirs ; sur la Lune des propos jugés diffamatoires par les Lunatiques ; sur les bébés éprouvette des propos jugés injurieux par les éprouvettes. Et tutti quanti !!!

 

 

NE PENSEZ PLUS, VOUS ÊTES CERNÉS. NOUS AURONS LES MOYENS DE VOUS FERMER LA GUEULE. RENDEZ-VOUS !

 

 

 

Il paraît que nous vivons en « démocratie ». MONTESQUIEU, pour que ce régime fût viable, exigeait que les citoyens fussent vertueux. On voit aujourd’hui ce qu’il en est. Si MONTESQUIEU est dans le vrai, la démocratie est bel et bien foutue. Mais prenons les choses et les hommes comme ils sont, de niveau moral moyen et variable. Et « faisons avec », comme on dit. La simple logique veut que, en même temps que les fous, les handicapés et les imparfaits, la démocratie laisse vivre les imbéciles, les crétins, les bas-de-plafond, bref, toutes les sortes de bêtes et de méchants.  

 

 

 

Cette démocratie s’honore de les laisser vivre, mais aussi et surtout de les laisser s’exprimer. En démocratie, on n’a pas le droit d’interdire aux gens d’être cons. Oui, les cons en jouissent aussi, de la liberté  d’expression. Et c’est normal que ce soient des conneries qui sortent de leur bouche. Aussi longtemps que ça reste des paroles.

 

 

Qu’est-ce que c’est, ces « démocrates » en peau de lapin qui se chargent de faire la police du langage et s’érigent en juges de ce qu’il est licite ou pas de dire et d’écrire ? De penser ?  

 

Les juifs s’honoreraient de laisser dire des blagues, même très mauvaises, sur les juifs. Visiblement, ce n’est pas la voie que prend le CRIJF, sous la houlette de son président RICHARD PRASQUIER. Même chose pour les homosexuels, les femmes, les handicapés.

 

 

Même chose, aussi, pour les Arméniens : j'aimerais assez, et pour tout dire, je considèrerais comme tout à fait normal et compréhensible que les Arméniens vivant en France soient eux-mêmes gênés aux entournures par le coup de lèche-cul que les politicards français leur ont fait en l'occurrence. Il faudrait voir à qui le crime profite.

 

 

Je me rappelle une exécrable plaisanterie du clown alsacien ROGER SIFFER : « Quelle est la différence entre un fumier alsacien et un fumier lyonnais (le spectacle avait lieu à Lyon, évidemment) ? ». La réponse était, vous l'avez devinée : « C'est qu'en Alsace, les fumiers n'ont pas de plongeoir ! ». Ouarf ! On s'éclate !

 

 

Minorités de tous les pays, par pitié, laissez dire du mal de vous ! Plus vous laisserez dire, plus ça voudra dire que vous êtes fortes ! Minorités de tous les pays, montrez-vous supérieures à tous les calculs sordides. Le SACRÉ ne se décrète pas à coups de lois. Minorités de tous les pays, ne vous faites pas les flics de la parole et de la pensée. N'ajoutez pas votre pelletée de terre dans le trou où se trouve la démocratie.

 

 

 

Sinon, pourquoi s’arrêter en si bon chemin ? Je suggère qu’on fasse une loi pour punir les blagues belges de vingt ans de prison. Ça vaudrait le coup, non ? Et châtier les mauvais qui s'en prennent aux rouquins (voir Egypte ancienne), aux unijambistes, aux sauteurs à la perche, aux automobilistes à contresens, aux réverbères à l'envers, aux sauts de puce. Je vous le demande : de quel droit se moquerait-on des sauts de puce (à la Sainte Luce, les jours rallongent d'un saut de puce) ?

 

 

 

Un cri monte des profondeurs (vous vous rappelez ce que vous chantiez à l'église : "de profundis clamavi ad te") : des lois pour punir, DES LOIS POUR PUNIR, DES LOIS POUR PUNIR. A croire que c'est le point culminant de l'avenir démocratique. Chaque « minorité » doit dire : « Toi, sale politicard que je méprise et qui te mets à mon service pour accéder à ton misérable petit poste de petit pouvoir, satisfais mes exigences forcément légitimes et réprime ceux qui m'humilient, et tu auras droit aux voix de mon groupuscule. Sinon, que la fièvre quarte et la vérole de la Vierge de Guadalupe te patafiolent, la paille en cul et le feu dedans ».

 

 

Car le plus rageant, dans cette évolution inexorable, c’est la raison pour laquelle elle est promue : la ligne bleue de l’élection prochaine, le Graal de politicards vulgaires qui font leur marché en trimbalant de client en client leur bouche en cœur, dégoulinante de « convictions fortes ». « Clientélisme » est un mot décidément trop gentil. Il faudrait des termes plus injurieux, plus proches de la vomissure et de l’étron. Des mots plus sales et plus puants.

 

 

Je me contenterai de traiter tous ces premiers de la classe qui se servent de nous pour leur servir de marmitons, de mitrons et de saute-ruisseau, de qualifier tous ces élèves doués qui ont choisi la carrière de vendeurs de vent d’un seul mot : MINABLES.

 

 

Voilà ce que je dis, moi.

 

 

 

 

lundi, 01 août 2011

NORVEGE ET LIBERTE D'EXPRESSION

ANDERS BEHRING BREIVIK, vous connaissez, évidemment, comme tout le monde. Mais si, l’auteur maintenant célèbre d’un célèbre fait divers ! Il a tué entre 70 et 80 personnes à Oslo et Utheia. Par conviction d’Européen blanc et anticommuniste. A la bombe et au fusil. Cela s’appelle passer à l’action. La psychanalyse dirait « passer à l’acte ». ANDERS BEHRING BREIVIK a agi. Je veux dire qu’il n’a pas « exprimé » une opinion. Il a traduit une opinion dans une action concrète. Et criminelle.

 

 

Nous sommes, paraît-il, en démocratie. Nous jouissons, théoriquement, de la « liberté d’expression ». Mais qu’est-ce que la liberté d’expression ? En France, on le sait de moins en moins. J’ai dit beaucoup de mal, au sujet de la France, de la police de la pensée et de la police du langage qui se sont mises en place progressivement, à travers un certain nombre de lois qui punissent des délits de parole.

 

 

Cela s’est passé sous l’influence d’un certain nombre de groupes appelés « minorités ». Tout y passe, le sexe, la race, la religion. On ne peut plus émettre la moindre plaisanterie ni la moindre critique à l’égard des femmes, des arabes, des homosexuels, des juifs, sans se faire accuser de sexisme, de xénophobie (ou d’islamophobie), d’homophobie, d’antisémitisme.

 

 

En Norvège, le premier ministre vient de déclarer que le pays ne changera pas de politique en ce qui concerne l’expression des opinions, et que les opinions extrêmes ont tout à fait le droit de s’exprimer, aussi longtemps qu’il n’y a pas d’acte de violence. Retenez bien ça. Voilà une démocratie. En Norvège, l’extrême droite a le droit de s’exprimer, de formuler ses analyses, ses opinions, aussi extrêmes soient-elles. Elle n’a pas le droit de tuer. En Norvège, on fait la différence entre l’opinion et l’acte.

 

 

 

En France, ceux qui auraient envie de blaguer à propos de l’une des catégories mentionnées de la population s’exposent à l’accusation de PHOBIE, comme si leur cas relevait de la psychiatrie. Et s’exposent à des sanctions désormais légales, qui permettent à des « associations », des bonnes âmes certainement, de porter plainte, avec constitution de « partie civile ». En quoi cette négation française de la vraie liberté d’expression diffère-t-elle de ce que faisait l’U. R. S. S. brejnévienne en envoyant les opposants politiques dans des asiles de fous ?

 

 

Je ne citerai que pour mémoire cette phrase de VOLTAIRE, tellement rebattue qu’elle a perdu toute force et toute réalité : « Je ne suis pas d’accord avec ce que vous dites, mais je me battrai pour que vous puissiez le dire ». Aujourd’hui, c’est devenu : « J’ai horreur de ce que vous dites, et je me battrai jusqu’à ce que le tribunal vous ait puni pour l’avoir dit ».

 

 

En 1784, PIERRE-AUGUSTIN CARON de BEAUMARCHAIS publie Le Mariage de Figaro. La tirade de Figaro au dernier acte est en principe (?) connue (?) des candidats bacheliers. Dans ce monologue, il dit, à propos de la liberté de la presse, quelque chose de parfaitement actuel : « On me dit que, pourvu que je ne parle en mes écrits ni de l’autorité, ni du culte, ni de la politique, ni de la morale, ni des gens en place, ni des corps en crédit, ni de l’Opéra, ni des autres spectacles, ni de personne qui tienne à quelque chose, je puis tout imprimer librement, sous l’inspection de deux ou trois censeurs ».

 

 

Il faut croire qu’au 18ème siècle, sous l’ancien régime, on savait mieux ce qu’est la liberté que nous autres, qui vivons au 21ème siècle, en régime soi-disant démocratique.

 

 

En France, quand toutes les « minorités » auront gagné, on débouchera sur quoi ? C’est relativement aisé à saisir : la vie sociale tout entière sera codifiée selon, d’une part, la liste des interdits ; et d’autre part, la liste des obligations. Et la fonction de l’école sera de faire apprendre par cœur à tous les écoliers les listes de proscriptions et de prescriptions. Et la police veillera à l’observance du code. Au besoin, un bon petit appel à la délation pour vaincre les résistances.

 

 

J’ai déjà abordé le problème. J’y reviens. Comment ça se passe, donc ? Prenez un groupe particulier qui se définit lui-même à travers une identité, mettons, par exemple, les « anti-corrida ». C’est l’identité d’un MILITANT, qui part en guerre contre quelque chose qu’il déteste. Je note d’ailleurs la dissymétrie entre le combat du MILITANT, et le plaisir de l’AMATEUR de corrida. Le premier décrète face au second : tu n’as pas le droit d’éprouver ton plaisir. D'ailleurs, le premier a eu la peau de la corrida en Catalogne.

 

 

Notons en passant que c’est précisément la détestation maladive de quelque chose qui définit la notion de PHOBIE. Mais il faut impérativement dissimuler l’aspect phobique de la guerre entreprise. Et le moyen le plus sûr, c’est tout simplement l’inversion de la charge de la preuve. Faire en sorte que le phobique désigné soit non pas celui qui déteste, mais celui qu’il déteste. Pour cela, profiter de l’horreur unanime qui saisit tous ceux, à l’audition des paroles honnies, qui prêchent la tolérance, avec la bouche en cœur si possible. On imagine le  système judiciaire où ce serait à la personne innocente de prouver qu’elle n’est pas coupable. Très pratique.

 

 

Autre urgence : ne pas attendre que des actes délictueux soient commis à l’encontre du groupe ainsi défini (il convient de dire aujourd’hui « minorité »), et s’attaquer à l’expression même, à la parole. On peut aussi se saisir, à l’occasion, des quelques actes déments commis contre tel groupe pour ériger le cas particulier en grave problème de société. On a profané un cimetière juif ou musulman ? Hurlez à l’antisémitisme, à l’islamophobie ! Présentez-vous collectivement comme une victime.

 

 

La France est donc pionnière en la matière (pour une fois qu’elle n’est pas « en retard » !). Le pays des droits de l’homme (je pouffe !) a réussi à faire de la parole un délit ! Et cette énormité apparaît aujourd’hui tellement évidente que (presque) tout le monde l’admet ! Alors que cela devrait être combattu. Ainsi s’instaure la société d’intolérance généralisée.

 

 

P. S. : Je crois utile de préciser malgré tout que je n’aime guère les extrémistes, quels qu’ils soient et d’où qu’ils viennent. Je trouve par exemple très comique l’insurrection qui gagne les gauchistes dès que l’extrême droite manifeste dans la rue, obligeant les C. R. S. à s’interposer. Mais l’idée qu’il puisse y avoir des TABOUS D’OPINION m’est au moins aussi insupportable.

 

 

 

mercredi, 06 juillet 2011

VICTIME : UN METIER D'AVENIR !

SUITE ET FIN

 

Maintenant la notion de victime. Le grand René Girard en a beaucoup parlé. Il en a même fait le centre (ou le point de départ) de sa théorie. Il a commencé dans Mensonge romantique et vérité romanesque, continué dans La Violence et le sacré. Après, je l’ai abandonné. A partir de Des Choses cachées depuis la fondation du monde. Je dirai pourquoi.

 

Pour faire clair et court, dans tous les groupes humains, chacun ne désire qu’un objet déjà désigné comme désirable par un autre. C’est la notion de « désir mimétique ». Dès lors, s’ensuit une rivalité mimétique du désir. Cette rivalité se répand de proche en proche, par  « contagion », jusqu’à entraîner une « violence mimétique », qui augmente jusqu’à produire la « crise sacrificielle » : le groupe éprouve la nécessité de purger cette violence pour ne pas s’y autodétruire. C’est là qu’intervient la « victime émissaire », qui était de toute façon désignée pour ce moment. Par exemple un « bouc émissaire » chez les juifs de l’antiquité. On procède alors au rite du sacrifice, dans les formes, et la paix est alors restaurée, jusqu’à la prochaine fois.

 

Vous savez l’essentiel. J’avoue avoir été impressionné par ce livre, lu en 1977. Mais il m’a aussi « gonflé ». Girard est lui-même tellement impressionné par sa construction qu’elle devient la clé totale, qui ouvre toues les portes du mystère humain. Le dernier livre de lui (voir ci-dessus) que j’ai lu est une apologie du christianisme : il y soutient que la crucifixion de Jésus Christ est le premier sacrifice qui a échoué à restaurer la paix dans le groupe, les sacrificateurs se rendant compte que la « victime émissaire » n’était pas « émissaire », justement, mais innocente. Dès ce moment, l’humanité entre dans une ère nouvelle, promise au « salut ». Girard était mûr pour devenir professeur dans une université américaine. C’est évidemment ce qu’il a fait. Mais de tout ça, je retiens principalement que la victime, pour René Girard, a un statut d'une grande noblesse et dignité, et remplit une véritable fonction.

 

Car tout ça fait très intello. Redescendons un peu, et même beaucoup, à la hauteur des minuscules Sarkozy et Dati, qui n’ont aucune idée de ce qui précède, puisque l’œil fixé sur la seule prochaine échéance électorale. C’est net, pour brosser comme il faut le chien électoral, il est bon d’instrumentaliser la victime. C’est un « créneau porteur », comme on dit dans le marketing.

 

Parce que, quelque part, si personne ne se conçoit a priori comme un bourreau, tout le monde, quelque part, se sent un peu victime. « Quelque part au niveau du vrai cul. – Tu l’as dit bouffi ! » Cela crée une solidarité dans le malheur quotidien. Avec  Madame Michu, la voisine, ça fait un vrai sujet de conversation. Bon, c’est vrai que ce n’est pas le salon de Madame du Deffand. Mais la tendance est là : « C’est pas une vie la vie qu’on vit. – A qui le dites-vous, ma pauv’dame ! ».

 

Il y a, dans toute foule, une forme de solidarité spontanée avec la victime. Elle est prompte à crier « à mort ». Elle s’identifie facilement à la victime. A entendre les propos de taverne (ou « brèves de comptoir »), elle endosserait volontiers l’uniforme du bourreau.

 

C’est d’ailleurs pour ça que, dans les grands débats de société, il est souvent très pratique d’endosser l’uniforme de la victime. Pour jouer sur ce réflexe de solidarité spontanée. Présenter comme une grave injustice l’interdiction faite aux homosexuels de se marier en tant qu’homosexuels, cela permet de se poser en victime, et c’est très pratique.

 

Présenter l’Etat d’Israël comme victime de racisme et d’antisémitisme quand on le critique politiquement, c’est très pratique (voir, il n’y a pas si longtemps, le cas d’Edgar Morin). Présenter toute plaisanterie sur les femmes, les homosexuels ou les handicapés comme une atteinte  insupportable aux droits de ces personnes, elles-mêmes présentées comme des victimes (sexisme, homophobie et tout ça), c’est aussi très pratique.

 

Et pourquoi est-ce très pratique de se poser en victime, demandera-t-on ? La raison est très simple à comprendre : parce que ça autorise la victime à demander réparation. Ben oui, aujourd’hui, si vous racontez en public une blague, même mauvaise, sur les femmes, les juifs, les Arabes, vous allez voir tous les rapaces et les hyènes de toutes les « associations de victimes » se jeter sur vous pour se partager votre cadavre. C’est une image.

 

Ces associations se nomment LICRA, FIDH, Osez le féminisme, Les chiennes de garde, la fédération « LGBT », etc. Et elles se jettent sur vous par tribunal interposé. Elles portent plainte. Parce qu’on a fait les lois que toutes ces « victimes » réclamaient depuis longtemps, et qui leur permettent de se porter partie civile. Le moindre pet de travers ne doit pas rester impuni. Le glaive de la justice doit frapper.

 

On demande (on obtient) réparation du préjudice subi. Ici, ce sera une affiche de publicité « portant atteinte à la dignité des femmes ». Là, ce sera un propos montrant une intolérable intolérance à l’encontre des juifs, des Arabes, des homosexuels (rayer la mention inutile en fonction du cas rencontré). Tout cela doit être assimilé à de la délinquance. Le coupable doit payer.

 

L’irremplaçable Philippe Muray dénonce très souvent ce qu’il appelle « l’envie de pénal ». J’appellerais cela une tendance à la « pénalophilie ». Des juristes très sérieux s’inquiètent même de la dérive que cette omniprésence des « victimes » potentielles fait planer à court terme sur ce que les journalistes et politiciens appellent vilainement « le » vivre ensemble. Cela s’appelle « judiciarisation » de la vie en société. Bon, en France, les avocats ne sont pas encore, comme c’est le cas aux Etats-Unis, à faire du porte-à-porte pour s’enquérir des « préjudices » dont vous avez été « victime ». Mais la tendance est là. 

 

Allez ! Foin de pessimisme ! En route vers le « meilleur des mondes ».

jeudi, 19 mai 2011

A TRES BONNE ECOLE (LA VRAIE ?)

FORMATONS INITIAL OU FORMATONS CONTINU ?

 

Je veux ici dénoncer l’injustice profonde dont sont victimes les hommes, dans cette société, paraît-il, égalitaire.

 

Nous les hommes n’avons pas assez l’idée de mettre le nez dans ce qu’il est convenu d’appeler la PRESSE FEMININE. C’est un tort. Il m’est arrivé d’acheter, de loin en loin, quelques revues du genre Jeune et jolie, avec l’idée de me faire une idée de ce qu’avaient dans la tête les jeunes personnes auxquelles j’avais à faire. Je ne me rappelle pas tout, loin de là : ce serait trop me demander. La revue doit s’adresser à des filles de douze à quatorze ans, je ne suis pas spécialiste du ciblage marketing. Je n’ai pas été déçu du voyage. J’ai retenu, entre autres joyeusetés « modernes », des conseils pour, par exemple, se raser le pubis de façon à laisser des poils en forme de point d’interrogation, et teindre les poils restants dans un beau rouge profond (ou éclatant : ça dépend des goûts). La revue proposait aussi, dans un autre numéro, aux filles qui désiraient essayer,  une recette pour se faire sodomiser sans douleur (je jure que c’est vrai : j’imagine que c’était en direction des jeunes maghrébines, plus sourcilleuses peut-être sur la question de la virginité jusqu’au mariage).

 

Vous savez à quoi je compare toutes ces revues ? Vous ne devinerez jamais : à des  « établissements privés d’enseignement secondaire, chargés de la FORMATION INITIALE ». Il faut absolument considérer Jeune et jolie comme un COLLEGE. Mais un collège aux dimensions nationales, bien sûr. Dans l’ensemble, strictement rien n’est omis de ce qu’une fille d’aujourd’hui doit savoir : il s’agit d’une véritable FORMATION INITIALE des filles pré-pubères et des adolescentes. Tout ce qu’il faut savoir pour vivre au quotidien est, mois après mois, minutieusement décrit, mettant ainsi la jeune lectrice en possession de tout le code, concernant les rapports entre garçons et filles, les rapports entre filles, le soin qu’il faut apporter à son aspect extérieur, et tout et tout. Comment la jeune fille a-t-elle vécu ses premières règles ? Que doit-elle penser des regards appuyés de ce garçon de la classe qui ne lui adresse jamais la parole ? Accessoirement, quels produits doit-elle acheter pour s’enduire le visage avant de partir pour le collège ? Doit-elle opter pour le transparent quand elle va en soirée ? Bref : qu’est-ce qui l’attend, dans le monde où elle vit ? De tels « collèges » pullulent. L’offre d’enseignement est surabondante, et les revues, comme on dit dans le domaine politique, « se tirent la bourre ». Mais l’offre existerait-elle sans la demande complémentaire ?

 

Les femmes, de leur côté, font face à une offre encore plus variée et nombreuse, en matière de tels « établissements d’enseignement en FORMATION CONTINUE ». La longueur des rayons consacrés à la presse féminine : vous avez déjà vu, forcément. Je n’insiste pas. Les hommes ne lisent pas assez les revues féminines, ou alors feuillettent distraitement, dans les salles d’attente, l’œil vaguement allumé, les pages consacrées aux dessous affriolants de l’année prochaine, aux maillots de bain qu’il faudra absolument porter, parce qu’on y voit, en quadrichromie, un peu de peau lisse et soyeuse et des formes, intéressantes du fait de leur jeunesse, rarement une vraie  chatte, rarement une vraie fesse. Mais il faut lire le reste, les conseils, les portraits en quizz (quelle cuisinière, quelle amie, quelle bricoleuse, quelle amoureuse, quelle bête de sexe êtes-vous ? Cochez la case.), les articles « de fond » (si !), si l’on veut espérer approcher, un tout petit peu, ce que les femmes, aujourd’hui, ont dans la tête : dans quelle sorte d’univers intérieur elles évoluent. Pas toutes, évidemment. Mais enfin, cela dessine un ensemble, disons pour parler lourd, de « repères culturels » que toutes sont amenées à côtoyer, même si elles n’y sont pas immergées. C’est ce que le Ministère de l’Education Nationale appelle la FORMATION CONTINUE.

 

Mais les hommes, qu’est-ce qu’ils ont, sans même parler de FORMATION CONTINUE, oui : qu’est-ce qu’ils ont comme revues, en matière de FORMATION INITIALE ? Petits, ils ont lu, éventuellement, les publications de Fleurus ou de Bayard presse (Je Bouquine), résolument unisexes, c’est-à-dire non sexuées, encore perdues dans les limbes de l’innocence de l’enfance (c’est la même chose pour les filles). Un peu plus grands, ils vont peut-être s’intéresser aux arts picturaux (les revues consacrées aux tagueurs et grapheurs), aux sports (revues sur le skate, les rollers et autres « sports de glisse », à la rigueur le football). Plus tard encore, on attaque les sports mécaniques (revues sur la bagnole, la moto). Mais je fais remarquer que toutes ces revues ne sont masculines qu’IMPLICITEMENT : aucune ne s’adresse explicitement au viril des garçons, mais à ce qu’ils sont supposés aimer à leur âge, jamais au sexe masculin, en tant que tel. Il n’y a pas de PRESSE MASCULINE.

 

Conclusion : la FORMATION INITIALE des garçons est laissée, honteusement, à l’abandon. C’est un terrain totalement en déshérence. Et même arrivés à l’âge de la FORMATION CONTINUE, qu’est-ce qu’ils trouveront ? Des revues « de charme » ? Certes, mais quel rapport avec cet énorme effort éditorial en direction de toutes les filles, de toutes les femmes, dans la FORMATION, tant INITIALE que CONTINUE, où elles apprennent COMMENT IL FAUT ÊTRE ? Comment il faut paraître ? Les revues destinées aux garçons, elles, leur apprennent A QUOI ILS DOIVENT S’INTERESSER, quasiment pas à ÊTRE. Il y a là quelque chose de profondément injuste et  inégalitaire : ils sont laissés, pour se former à ce qu’il faut savoir pour vivre en société, dans le brouillard du hasard, l’incertitude des rencontres, les aléas des groupes auxquels ils s’agrègent, disons-le en un mot : à l’IMPROVISATION.

 

Je pose la question : pourquoi, comme c’est fait largement pour les filles, n’ouvrirait-on pas des « établissements privés d’enseignement secondaire pour la FORMATION INITIALE » destinés aux garçons ? Je veux parler de revues qui leur donneraient les clés : ça veut dire quoi, l’érection au réveil ? Qu’est-ce qu’elle veut, celle qui ne te regarde jamais, mais qui se débrouille pour n’être jamais loin de toi ? Comment fait-elle pour te voir sans jamais te regarder ? Bref : livrer quelques secrets au sujet de l’adversaire. Non : c’est vroum-vroum et pouët-pouët.  Et l’on s’étonne que les garçons soient un peu bêtes, quand les filles sont de véritables initiées, en comparaison. C'est simple : ELLES SAVENT TOUT, grâce au collège qu'elles trouvent dans les maisons de la presse. Les garçons, c’est la grande faiblesse du MINISTERE DE L’ENSEIGNEMENT EN MAGASINS DE JOURNAUX.