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mercredi, 24 avril 2019

CE QUE ME DIT LA CATHÉDRALE (fin)

Ajouté le 25 avril : ce texte a pris de telles dimensions par rapport à son premier état que je crois préférable, pour que le lecteur puisse se faire dès le départ une idée de l'esprit dans lequel je l'ai écrit, de faire figurer en tête le dernier paragraphe, celui qui sert de conclusion.

Tout ça, en fait, c'était pour dire que la France d'aujourd'hui et les Français d'aujourd'hui ne méritent pas Notre-Dame de Paris, et qu'ils n'ont pas les moyens, non seulement de faire quelque chose de comparable (c'est aveuglant d'évidence), mais d'assurer l'entretien correct de l'édifice. Ce monument qui les dépasse de tellement haut au-dessus d'eux qu'ils ressemblent à des poulets qui grattent le sol mais des poulets qui, contre toute vraisemblance, tentent, par leurs discours, de se faire passer pour des aigles. Ceux qui ont fait Notre-Dame travaillaient pour Dieu, c'est entendu, mais je retiens surtout qu'ils savaient que ce qu'ils faisaient était destiné à quelque chose (ou quelqu'un, mais pas forcément) de plus grand que leur petite personne : ils savaient qu'ils ne verraient pas de leur vivant l'accomplissement de l'œuvre, mais ils y allaient bravement. Aujourd'hui, il n'y a plus rien au-dessus de nos petites personnes, même pas d'idée de la France, dont les Français ne sont plus à la hauteur.

SUR CE QU'EST DEVENUE LA FRANCE

Suite et fin du post-scriptum.

Mais je ne suis cependant pas complètement américanisé, et certains brillants emblèmes du  rayonnement de la culture américaine n'ont jamais franchi mon seuil : d'abord, aussi incroyable que cela paraisse, je n'ai jamais mis les pieds dans un fast-food ; ensuite, je me refuse à laisser entrer chez moi jusqu'à l'ombre du moindre de ces "nouveaux objets connectés" que l'industrie ne cesse de produire ; enfin, aussi loin que ma mémoire remonte, je n'ai jamais prêté le moindre orteil de mon intérêt à tout ce qui s'appelle "super-héros", "Marvel" et compagnie. Ce sont des exemples.

Autant la potion magique confectionnée par Panoramix pour la tribu de Gaulois préférée des Français me fait sourire (ah, les molaires des Romains en suspension après les uppercuts magistraux d'Astérix !) parce que tout ça ne se prend pas très au sérieux (Astérix n'est pas un super-héros, il n'est une figure ni du Bien ni du Mal), autant les divers super-pouvoirs inventés par les scénaristes américains (attention, ne pas confondre Batman, Spiderman, Superman, Captain América, Silver Surfer et toute la kyrielle : chacun tient à sa spécialité) m'indiffèrent.

Cet imaginaire-là me laisse de marbre, à cause de l'insupportable bloc de sérieux dans lequel tous ces personnages sont pris. Le fait que ce soit le support d'une propagande de bas étage n'y est pas pour rien. L'engouement de beaucoup de Français pour ce genre est révélateur d'une migration des mentalités du pays hors de nos terroirs. Et puis, j'ai vu un certain nombre de mauvais, très mauvais, exécrables films américains, et même de "navets au carré" (je me rappelle avoir payé ma place et être resté atterré au visionnage de Porky's).

En revanche, je connais un peu (je ne suis pas un "connaisseur", mais j'ai beaucoup fréquenté les salles "Art et essai") le cinéma français, et je garde de pas mal de films le souvenir d'images fortes. Les vieux Gabin (Pépé le Moko, Le Jour se lève, Gueule d'amour, La Belle équipe, La Grande illusion, etc.), Les Visiteurs du soir (Alain Cuny enchaîné américanisation de la france,france américanisée,consumérisme,mcdonald,jazz,musique de jazz,la revue nègre,joséphine baker,jim crow,racisme,ségrégation raciale,guerre de sécession,nordistes,sudistes,milton mezz mezzrow,mezzrow la rage de vivre,bix beiderbecke,louis armstrong,frères lumière,lyon,régis debray,debray civilisation,le chanteur de jazz,john ford,le massacre de fort apache,john ford rio grande,lford la charge héroïque,la dernière séance eddy mitchell,58 minutes pour vivre,jean gabin,pépé le moko,le jour se lève,la belle équipe,les visiteurs du soir,alain cuny,claude chabrol,bertrand tavernier,voyage à travers le cinéma français,sarkozy,nypd,otan,de gaulle,abkhazie,ossétie du sud,géorgie,crimée,vladimir poutine,géopolitique,géostratégie,ukraineappelant "Anne", "Dominique et Gilles", Jules Berry en diable furieux à la fin, ...), il y en aurait tant que je préfère renvoyer aux films, par exemple, de Bertrand Tavernier, en particulier à son merveilleux Voyage à travers le cinéma français, véritable déclaration d'amour, et à l'argumentation serrée. Je reconnais donc la qualité, mais je sais aussi où se trouve la "force de frappe". En terme de proportions, la France est bien lilliputienne par rapport au Gulliver américain. La France a quelque chose à dire, mais sa voix ne "porte" pas.

Côté télévision, pourquoi les Français se sont-ils agglutinés pendant des années autour du feuilleton télévisé "JR" ? Comment se fait-il qu'ont fleuri à la télévision française des émissions dont le concept a été inventé par les Américains (toute la télé-réalité vient de là), avec une audience incroyable ? Où est né le concept de "série télévisée" (bon, c'est un avatar du "feuilleton" bien de chez nous, mais) ? Ce n'est pas pour rien qu'a émergé le concept de "soft power". Bon, tout le monde s'y est mis, mais c'est comme dans la boxe : il y a plein de catégories, et on sait qui est l'indéboulonnable champion toutes catégories. Et on est bien obligé de reconnaître que la grande majorité des Français est américano-centrée.

Autant de preuves que les Français ont commencé depuis longtemps à voir le monde avec des yeux américains. Inutile d'évoquer la cascade des innovations technologiques que nous devons à leur industrie et dont nous ne saurions nous passer, moi compris, si j'excepte quelques menues babioles, et qui sont devenues le paysage quotidien hors duquel nous ne saurions pas vivre.

Et si on se tourne vers le champ géopolitique, comment ne pas admettre, là encore, que l'Europe vit depuis plus d'un demi-siècle à l'abri du "parapluie américain" et que la France a fait partie intégrante de l'OTAN, bien à l'abri, comme une sorte de protectorat américain ? De Gaulle a eu la stature pour tenir tête et s'en retirer, mais il a suffi, quelques décennies plus tard, d'un petit bousilleur du nom de Sarkozy, lui-même très américano-centré (trottant dans Central Park vêtu d'un T-shirt NYPD entouré de ses gardes du corps), pour voir la France rentrer au bercail sans contrepartie, "pieds nus, en chemise et la corde au cou". Politiquement, la France et l'Europe sont indissolublement liés à l'Amérique, comme un vassal à son suzerain

Et pas besoin d'être un géopoliticien professionnel : c'est bien à la stratégie américaine que nous devons certains événements qui se sont produits à l'est de l'Europe depuis une dizaine d'années. En serions-nous là si les USA n'avaient pas poussé à la roue pour que l'OTAN accueille en son sein la Géorgie (pour l'empêcher, Poutine lui a soustrait par la force l'Abkhazie et l'Ossétie du sud) ? S'ils n'avaient pas été pour quelque chose dans la demande de l'Ukraine d'adhérer à l'Union européenne, voire à l'OTAN, provoquant d'une certaine manière la main-mise de la Russie de Poutine sur la Crimée et la poussée "sécessionniste" dans le Donbass ? Et je comprends Poutine : comment tolérer qu'une menace armée puisse venir camper à proximité de sa frontière ? Et l'Europe est restée impuissante : elle a suivi Oncle Sam.

Les Russes auraient-ils réagi par la violence s'ils n'avaient perçu dans la stratégie américaine une volonté d'encerclement plus étroit de leur pays (voir les pays baltes) ? Et sous l'influence de quel allié puissant l'Europe a-t-elle intégré en procédure accélérée des anciens du Pacte de Varsovie dans l'Union Européenne ? Qu'a fait l'Europe, France comprise ? Elle a obtempéré à l'ordre des choses américain. Vivre avec l'idée qu'il faut toujours se méfier de la Russie, faire de Poutine un méchant diable et non pas un partenaire possible, voilà bien un exemple où l'Europe et la France ont adopté sans discuter le point de vue américain (voir l'assentiment des Européens aux sanctions voulues par les Américains, qui n'ont aucune envie de voir sur ce terrain une Europe indépendante, alors même qu'elle a besoin du gaz russe).

Ce n'est donc pas par les seuls produits de consommation et par nos façons de les consommer que nous sommes devenus américains (j'aurais pu évoquer l'apparition des fast-foods – White Tower, autour de 1928, il me semble – et bien d'autres trouvailles qui ont mis à mal les traditions alimentaires françaises, au moins autant que leur dévastation par les pratiques de la grande distribution, concept lui-même importé des USA). L'américanisation de nos divertissements, de nos existences matérielles et de nos orientations géostratégiques ne sont que de tout petits aperçus d'une vassalisation beaucoup plus vaste de l'Europe par la grande "puissance industrielle".

Mais je n'ai pas envie de m'attarder aujourd'hui sur les dégâts commis sur les mentalités françaises et européennes par les multiples inventions intellectuelles et sociétales sorties du ventre de la "nouvelle idéologie américaine" :

— "politiquement correct" au motif que toute minorité a le droit qu'on ne lui "manque pas de respect" et qu'on n'attente pas à sa "dignité" (frontières entre "communautés" de plus en plus jalousement gardées, archipellisation (Jérôme Fourquet) des sociétés) ;

— l'organisation des dites minorités en vue d'influer à leur profit sur l'organisation de la société tout entière grâce à des lois obtenues par "lobbying" ;

— les ravages des "gender studies", fondées par Judith Butler, elles-même inspirées principalement par deux "déconstructeurs" bien français : Michel Foucault et Jacques Derrida ("déconstruire", c'est s'acharner à prouver qu'aucune institution humaine ou convention sociale n'est "naturelle", ce qu'on sait depuis la naissance de la première société, mais ça permet à chaque particularisme, voire chaque individu qui se juge brimé de crier à l'injustice et de déclarer fièrement à la face de l'ordre existant : « De quel droit  ? », de se proclamer victime, de demander compensation et de contraindre la collectivité tout entière à satisfaire sa demande de faveur particulière, sous prétexte d' "égalité") ; 

— la transposition abusive en France de la question noire telle qu'elle se pose exclusivement dans les Etats d'Amérique du fait de la traite négrière transatlantique, et de façon particulièrement aiguë aux Etats-Unis (bizarrement, l'histoire de l'esclavage des noirs par les noirs – qui persiste – et par les arabes fait beaucoup moins de bruit) ;

— importation de l'individualisme le plus effréné en lieu et place de la "vieille" société française, où le rôle de l'Etat est prépondérant pour assurer la cohésion du corps social, etc. Notre président Emmanuel Macron est lui-même tout imprégné de l'idéologie américaine, avec sa conception purement managériale de l'Etat et de l'administration. Une idée "française" ne peut exister comme objet spécifique que si elle est la base d'un projet collectif largement mobilisateur. On en est loin. 

En un mot : l'Amérique s'est insinuée dans tout ce qui conditionne et produit nos façons de voir le monde, et c'est tout notre mode de vie qui a été modifié en profondeur par les importations massives de tout ce qui est américain, marchandise concrète et autres. Au point que je ne suis pas sûr qu'on puisse encore parler de "civilisation européenne". En revanche, si l'on peut parler de "civilisation américaine", je me demande si on ne doit pas l'attribuer à sa seule "puissance de feu" dans tous les domaines (militaire, financier, culturel, idéologique, ...).

Nos yeux, nos oreilles, nos cerveaux, nos pays eux-mêmes, sont, depuis la fin de la guerre, plongés dans un bain d'Amérique. Non, il n'y a pas de "petit village gaulois qui résiste encore et toujours à l'envahisseur" : nous sommes devenus américains, exactement comme les Gaulois sont devenus romains, la puissance romaine a simplement été remplacée par la puissance américaine. Si la civilisation est inséparable de la puissance (ça se discute), alors nous vivons dans la civilisation américaine. Pourquoi, après tout, serait-il si difficile de reconnaître, à la suite de Régis Debray, que "nous sommes devenus américains" ? On a le droit de s'en accommoder, et hocher la tête avec résignation, mais c'est un fait et une réalité.

Tout ça, en fait, c'était pour dire que la France d'aujourd'hui et les Français d'aujourd'hui ne méritent pas Notre-Dame de Paris, ce monument qui les dépasse de tellement haut au-dessus d'eux qu'ils ressemblent à des poulets qui grattent le sol mais des poulets qui, contre toute vraisemblance, tentent, par leurs discours, de se faire passer pour des aigles. Ceux qui ont fait Notre-Dame travaillaient pour Dieu, c'est entendu, mais je retiens surtout qu'ils savaient que ce qu'ils faisaient était destiné à quelque chose (ou quelqu'un, mais pas forcément) de plus grand que leur petite personne : ils savaient qu'ils ne verraient pas de leur vivant l'accomplissement de l'œuvre, mais ils y allaient bravement. Aujourd'hui, il n'y a plus rien au-dessus de nos petites personnes, même pas d'idée de la France, dont ils ne sont plus à la hauteur. Qui est prêt à travailler pour quelque chose de plus grand que soi ?

Bon, assez causé pour aujourd'hui.

Voilà ce que je dis, moi.

mardi, 23 avril 2019

CE QUE ME DIT LA CATHÉDRALE

Ajouté le 25 avril : ce texte a pris de telles dimensions par rapport à son premier état que je crois préférable, pour que le lecteur puisse se faire dès le départ une idée de l'esprit dans lequel je l'ai écrit, de faire figurer en tête le dernier paragraphe, celui qui sert de conclusion.

Tout ça, en fait, c'était pour dire que la France d'aujourd'hui et les Français d'aujourd'hui ne méritent pas Notre-Dame de Paris, et qu'ils n'ont pas les moyens, non seulement de faire quelque chose de comparable, mais d'assurer l'entretien correct de l'édifice. Ce monument qui les dépasse de tellement haut au-dessus d'eux qu'ils ressemblent à des poulets qui grattent le sol mais des poulets qui, contre toute vraisemblance, tentent, par leurs discours, de se faire passer pour des aigles. Ceux qui ont fait Notre-Dame travaillaient pour Dieu, c'est entendu, mais je retiens surtout qu'ils savaient que ce qu'ils faisaient était destiné à quelque chose (ou quelqu'un, mais pas forcément) de plus grand que leur petite personne : ils savaient qu'ils ne verraient pas de leur vivant l'accomplissement de l'œuvre, mais ils y allaient bravement. Aujourd'hui, il n'y a plus rien au-dessus de nos petites personnes, même pas d'idée de la France, dont les Français ne sont plus à la hauteur.

SUR CE QU'EST DEVENUE LA FRANCE

Post-Scriptum.

En guise de réponse sur l'américanisation de la France, de ses mœurs et de son esprit.

Un lecteur bien intentionné me fait remarquer qu'à son avis, l'américanisation de la France dont je parle concerne exclusivement, dit-il, "le consumérisme". Je me permets d'être en complet désaccord avec cette estimation, que je trouve à la fois indulgente pour nos "amis" américains et erronée. Je suis parti autant de convictions anciennes que d'une lecture récente. Je pense depuis très longtemps que toute la culture qui s'exprime sur le territoire national est très largement et en profondeur inspirée de ce qui se passe outre-Atlantique, et ce depuis fort longtemps.

C'est la culture américaine sous toutes ses formes qui est devenue un produit d'exportation massif et puissant, au point de s'être universalisée jusqu'à faire pendant un temps du burger McDo une sorte d'étalon monétaire permettant de comparer les pays. Tous les pays du monde sont, chacun à sa manière, affectés par la culture américaine. La seule culture universelle aujourd'hui est la culture américaine. C'est pour notre malheur, mais c'est comme ça. 

Pour ne prendre que l'exemple du jazz, cela remonte aux années 1920. Le jazz a débarqué en France avec les Américains en 1917. Les années qui ont suivi la guerre ont vu se déclarer un véritable engouement pour cette musique, par exemple autour de ce qui s'appelait alors la "revue nègre", dont le clou du spectacle s'appelait Joséphine Baker. C'était à la fois le jazz et la culture des noirs américains qui motivait l'intérêt croissant des Français, pour lesquels tout cela était d'une nouveauté radicale.

Mais le jazz à Paris n'avait pas la même place qu'à New York, où il était frappé du stigmate "coloured" : les Français, au contraire des noirs américains, ignoraient ce que voulait dire "Jim Crow", base de la ségrégation raciale aux Etats-Unis. Certains ont beau dire, il n'y a jamais eu de ségrégation raciale de ce genre sur le territoire français. Demandez aux nombreux jazzmen noirs américains pourquoi ils ont adoré venir jouer dans les clubs et les caves parisiens.

C'est sûr, l'histoire des noirs dans les deux pays n'a strictement rien à voir, même si des agités du bocal n'auront jamais fini de dénoncer l'esprit arrogant et colonialiste de la France. Inutile de nier l'histoire du colonialisme à l'européenne, mais il est foncièrement différent de l'esclavagisme aux Etats-Unis et de la ségrégation qui a suivi. Les états du Nord et du Sud se sont même livré une guerre sans merci à cause de ça. Il n'y a jamais eu en France de guerre entre Françaçis à cause de l'esclavage, ni de place réservée aux blancs dans les bus ou de robinet d'eau réservé aux noirs.

Cela dit, le jazz est bien une musique américaine, et il a conquis sans coup férir l'Europe, qui l'a accueilli avec enthousiasme. Et je n'ai pas peur de dire qu'à cet égard, je me sens moi aussi un peu américain : après avoir lu, au milieu des années 1960 (j'étais ado), en version "poche" achetée en gare de Perrache avant de partir pour l'Allemagne, La Rage de vivre, où "Mezz" Mezzrow (aidé du journaliste Bernard Wolfe) raconte son existence souvent bien malmenée, mais passionnante, je me suis littéralement jeté sur les disques signés par les innombrables noms qui apparaissent dans le livre (à commencer par le génial Bix Beiderbecke et sa bande de bras-cassés alcooliques, Bessie Smith, Louis Armstrong, Jimmy Noone, je n'en finirais pas, je les reconnaissais presque tous à l'oreille). Le jazz a fait ma conquête. On peut dire qu'avec le jazz, l'Europe s'est américanisée. Et moi avec.

On pourrait dire la même chose à propos du cinéma. Bon, oui, c'est vrai, il y a un vrai cinéma français. Je dirai que c'est normal : les frères Lumière sont bel et bien de France (et même de Lyon), mais quelle est la place de celle-ci dans le monde ? Vers quels pays vont les principales recettes ? Et surtout, vers quels films vont en priorité une majorité de Français, en dehors des belles surprises (de succès et de finance) ? Pas besoin de répondre, je suppose.

Même sur le plan industriel : voici ce qu'écrit Régis Debray dans l'irréfutable Civilisation (Gallimard, 2017, sous-titre : "Comment nous sommes devenus américains" !) : « 1925, la Metro Goldwyn Mayer rachète les parts du Crédit Commercial de France de la société Gaumont. Confirmation du transfert de l'usine à rêves de Paris vers Hollywood. » (p.86). En 1926, le monopole de fabrication du film vierge est abandonné par Pathé à Kodak. Et en 1927, le producteur américain du Chanteur de jazz, premier film parlant de l'histoire, déclare : « Si cela marche, le monde entier parlera anglais ».

Il ne croyait pas si bien dire, et voyait clairement le cinéma américain comme un instrument au service de la puissance, ce qu'il est devenu. Conclusion : dès les années 1930, la puissance des capacités de production a changé de continent. Le tableau de la France américaine par Régis Debray est absolument imparable. Je ne suis pas un fanatique du monsieur et de ses œuvres, mais franchement, il ne dit pas beaucoup de bêtises. C'est plutôt l'attitude qui m'agace, la posture adoptée par le personnage. Je lui reprocherais volontiers l'espèce de consentement à la faillite, mais aussi la position de surplomb absolu qu'il adopte, en vieux sage venu de Sirius, qui voit les choses de façon tellement globale qu'elle s'en trouve a priori incontestable, comme si son point de vue avait trouvé un moyen de ne jamais être pris en défaut. J'imagine que la base de son attitude est : "On ne va pas contre l'histoire". Son dernier chapitre ne s'intitule-t-il pas "Pourquoi les "décadences" sont-elles aimables et indispensables ?". Passons.

Moi-même, je dois avouer que je revois avec plaisir, de loin en loin, la trilogie de John Ford sur la cavalerie américaine (Le Massacre de Fort-Apache, Rio Grande, La Charge héroïque, c'est un exemple parmi beaucoup d'autres) et je regardais volontiers La Dernière séance, la mémorable émission télé d'Eddie Mitchell consacrée au cinéma américain. A cet égard, que je le veuille ou non, je suis américanisé.

Et cela alors même que je reconnais crûment ce cinéma comme rouleau compresseur de la propagande américaine (je me rappelle, dans 58 minutes pour vivre – eh oui, j'ai vu ça, j'avoue – une réplique du pilote qui vient, après moult péripéties, de poser son Boeing en catastrophe : « C'est un vrai char d'assaut, cet avion américain », je suis à peu près sûr que ce n'est pas la citation exacte, mais c'est l'ambiance). Le problème, c'est que c'est très bien fait, parce que tout est conçu avec maîtrise pour produire un effet précis : c'est un cinéma efficace, un cinéma de professionnels. Alors que même certains films français de bonne qualité ne sont pas toujours exempts de couleurs "franchouillardes".

Demain, suite et fin du "post-scriptum".

dimanche, 07 juillet 2013

MON ANTHOLOGIE MONTAIGNE

 

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COUPLE BOURGEOIS, PAR AUGUST SANDER

 

***

Montaigne fut le premier écologiste. Je ne l’affirme pas, je le prouve : « Mais, quand je rencontre, parmi les opinions les plus modérées, les discours qui essaient à montrer la prochaine ressemblance de nous aux animaux, et combien ils ont de part à nos plus grands privilèges, et avec combien de vraisemblance on nous les apparie, certes, j’en rabats beaucoup de notre présomption, et me démets volontiers de cette royauté imaginaire qu’on nous donne sur les autres créatures. Quand tout cela en serait à dire, si y a-t-il un certain respect qui nous attache, et un général devoir d’humanité, non aux bêtes seulement qui ont vie et sentiment, mais aux arbres même et aux plantes. Nous devons la justice aux hommes, et la grâce et la bénignité aux autres créatures qui en peuvent être capables. Il y a quelque commerce entre elles et nous, et quelque obligation mutuelle ». Qui y trouverait à redire ?

 

Peut-être Carolyn Christov-Bakargiev, responsable d’une foireuse foire d’art contemporain (« arcon » en abrégé, opposé à l’ « art temporain », je crois que la dame sévit à la Documenta de Kassel), qui a par ailleurs rédigé une Déclaration des Droits des plantes (elle travaille même sérieusement à leur faire accorder le droit de vote, des élections locales jusqu'à l'ONU) : elle trouverait Montaigne d’une insupportable pusillanimité. Une femme tonique, une merveilleuse éradicatrice de civilisation, à l'image exacte des canons de l'époque où elle a été condamnée, hélas, à exister.

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ELLE A POURTANT L'AIR NORMAL, MADAME CAROLYN CHRYSTOV-BAKARGIEV

Dans l’Apologie de Raymond Sebond (II, XII), Montaigne tourne dans tous les sens la question de ce qui différencie l’homme de l’animal. Le moins qu’on puisse dire, c’est qu’il n’est pas convaincu que l’homme est un animal si différent que ça des autres animaux : « ceux qui entretiennent les bêtes se doivent dire plutôt les servir qu’en être servis ».

 

On n’est pas plus net, ce me semble, et la hiérarchie établie par la doxa biblique, le Vatican et la Sorbonne latinisante entre les êtres vivants n’est, aux yeux de Montaigne, qu’une manifestation d’arrogance dérisoire. Pascal Picq et tous ses copains de l’abolition des frontières entre l’homme et l’animal doivent hoqueter de bonheur en voyant se profiler à l'horizon la tombe à venir de l’humanité. Et toc ! Pascal Picq voit une amorce du politique dans les rituels tribaux des groupes de chimpanzés, c'est vous dire ce qui nous pend au nez. Moi je dis à Pascal Picq : « Ben mon pote, on n'est pas sortis de l'auberge espagnole ». Remarquez que Sarkozy en chimpanzé (avec Hollande en Cheetah ?), ça n'aurait rien de bien défrisant. Notez que "cheetah" veut dire "guépard" (d'après mon dictionnaire).

 

Marcel Gauchet, dans Le désenchantement du monde (1985), rappelle que « le christianisme est la religion de la sortie de la religion ». Je soupçonne quant à moi le sieur Michel de Montaigne d’y être pour quelque chose. Vous voulez une preuve ? Prenez le chapitre XVI du Livre II des Essais (De la gloire) : « Le marinier ancien disait ainsi à Neptune en une grande tempête : Ô Dieu, tu me sauveras si tu veux ; tu me perdras si tu veux. En attendant, je tiendrai mon timon toujours ferme et droit ».

 

La Fontaine, au siècle suivant, a dit la même chose autrement : « Aide-toi, le ciel t’aidera ». Eh oui, l’homme chrétien n’attend plus passivement le bon vouloir de la providence : il fait quelque chose pour faire advenir la providence. L'action humaine entre en action. C'est une révolution, car c’est le début de la fin du christianisme. Si l’homme doit agir pour que le Ciel l’aide, c’est que le Ciel n’est pas tout-puissant, et que l’homme est devenu impatient, et il s'agace de cette bizarre impuissance du Ciel à combattre le Mal qui le menace. La remarque de Montaigne, comme celle de La Fontaine, c’est une marque du slogan futur : « Deviens ce que tu fais ». Dit autrement : agis, et tu seras sauvé. Tout le monde actuel, quoi, à part le "sauvé", vu la façon dont tourne ce qui reste de la nature. Mais comme dit l'autre (c'est toujours "l'autre") : il suffit d'y croire.

 

Et l'on se demande pourquoi nous sommes déchristianisés !!! Je le disais : avec Montaigne, le ver est dans le fruit : il voit l'homme non plus comme l'exclusive créature de Dieu, mais comme l'une parmi toutes les autres. Une sorte de « primus inter pares ». Avec Montaigne, le vrai n'est plus légitime. Tout simplement parce que, avec Montaigne, il n'y a plus de vrai de vrai.

 

Montaigne n'est peut-être qu'un symptôme de la montée en puissance qui attend l'Occident au tournant, mais ce ver dans le fruit que j'y vois, cette démission de légitimité du vrai, c'est exactement au même rythme qu'il croque dans la pomme que nous sommes. Le « canard du doute », qu'on trouve dans Les Chants de Maldoror, d'Isidore Ducasse, alias Comte de Lautréamont. Comme dit Maldoror : « Je te salue, vieil océan ! ».

 

Voilà : je te salue, vieil océan.

 

Voilà ce que je dis, moi.

 

 

 

lundi, 06 août 2012

QUOI DE NOUVEAU DANS LES NOUVELLES ?

Le soleil est revenu, hier matin. Du coup, il a fait chaud. Très chaud. Est-ce que ce sera bon pour la vigne ? Parlons de la SYRIE.

 

 

Je n’aimerais pas vivre en Syrie en ce moment. Les plages sont polluées et il y fait beaucoup trop chaud. Rendez-vous compte, 40 ° l’après-midi. Et puis le sable y est de qualité assez moyenne. Et puis la clim de l’hôtel marche seulement quand elle l’a décidé. Et puis le champagne qu’on y sert est d’origine douteuse, je veux dire chinoise. Et puis ils ne savent pas ce que ça veut dire, servir frais. L’Iran a bien essayé de remédier au problème, mais leur produit ne contenait ni alcool ni bulles.

 

 

Pour tout dire, leur ruse a été vite éventée : ils prétendaient faire rentrer des devises en recyclant la pisse de leurs chameaux. Mais y a-t-il seulement des chameaux en Iran ? C’était peut-être de l’huile de vidange passée en centrifugeuse, il paraît qu’ils en ont beaucoup là-bas, des centrifugeuses. Et puis, dans les hôtels syriens, le personnel, très courtois et stylé au demeurant, n’est pas formé correctement. Pensez donc, accomplir son service sans gants blancs. A croire qu’ils préfèrent se salir les mains à des besognes inavouables.

 

 

Et puis, en Syrie, l’hygiène corporelle laisse à désirer. Bon, je comprends bien leur souci d’économiser l’eau, mais ça finit par sentir la chair en décomposition, ce qui n’est pas bon pour le tourisme. On ne peut rien contre l’odeur de cadavre, sous ces latitudes.

 

 

Bon, j’arrête. Ce n’est pas que ça n’aurait pas été amusant. J’aurais mis BACHAR EL ASSAD en maître-nageur implacable d’une piscine olympique remplie d’une eau vaguement rougie, et ajustant à la kalachnikov le premier qui se laisserait aller à pisser dans l’eau. Et puis je me suis dit que ça devenait laborieux, lourd, voire fâcheux. Au sens de MOLIERE. Pourtant, l’humour noir, je suis à fond pour.

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IL EST PAS MIMI, EN MAÎTRE-NAGEUR ?

 

L’humour noir, c’est un souverain antidote au poison sentimentaliste, à la dégoulinade humanitaire, au grand épanchement douloureux étalé par tous ceux qui sont, pour leur bonheur et leur sécurité, très loin de ce qui s’appelle un « champ de bataille ». Tous ceux qui peuvent donc éprouver des « bons sentiments », et surtout le faire savoir. Et tout ce qui est antidote, surtout pour la tête, je suis pour : ce n'est pas pour rien que j'ai baptisé ce blog ALEXIPHARMAQUE. Contrepoison, si vous préférez. Contre tous ceux qui proclament : « Voyez comme je suis bon ! ».

 

 

Rappelons-nous ce que LOUIS-FERDINAND CÉLINE découvrit à Paris, en décembre 1914, hospitalisé au Val-de-Grâce après les deux graves blessures reçues à Poelkapelle (une balle ricochante (= avec ébarbures de plomb) et un éclat d’obus non loin du rocher, autrement appelée partie pétreuse de l’os temporal) : l’insouciance, la veulerie et le mépris de « l’arrière » et des « planqués » pour la mort de ceux qui étaient au front. On peut dire que ça lui a ouvert les écoutilles.

 

 

Les apitoiements de toutes les bonnes âmes sur les victimes civiles de la guerre de Syrie, sont le meilleur moyen de ne rien comprendre à ce qui se passe en réalité. Franchement, dans le monde, qui est prêt à se déclarer, à froid, partisan de la guerre et adversaire de la paix ? Tout le monde est d’accord pour que le sang ne coule pas. Tout le monde est pour la paix. TOUT LE MONDE EST POUR LA PAIX.

 

 

Seulement voilà, le sang coule quand même. Acroire qu'il ne peut pas s'empêcher. Je serais à la place des grands sentiments humanitaires, je serais profondément vexé, et j’annoncerais à grands renforts de trompettes que, pour punir les couleurs de sang (couleurs = ceux qui le font couler, ndlr), je me lance dans une grande BOUDERIE. Ils seraient tous bien attrapés, comme dirait le petit Nicolas, de SEMPÉ et GOSCINNY. Et que je ne cesserai que quand, … que lorsque, … que si … Et voilà tout. C’est vrai, il faut savoir leur parler, aux dictateurs.

 

 

La vérité ? Je ne la connais certes pas, mais je me dis que si le sang continue à couler malgré les bouderies de vierge effarouchée de KOFI ANNAN et de l'ONU (je suis injuste : on ne peut raisonnablement en vouloir à un combattant qu’on envoie au combat avec des menottes aux mains, rappelons-nous Srebrenica, et l’interdiction faite aux casques bleus de s’opposer par la force aux troupes fanatisées de RATKO MLADIC), c’est bien que des volontés (et des stratégies) extrêmement puissantes sont en train de s’affronter sur le terrain syrien, et que le vulgum pecus dont je fais partie en est réduit au rôle de spectateur paralytique.

 

 

Et ça, je ne peux plus. Je ne peux plus jouer ce rôle du « saule pleureur de victimes innocentes ». Trop c’est trop. Trop de victimes. Je ne peux plus m’apitoyer. Personne ne peut m’obliger à passer ma vie à pleurer sur le sort des victimes. Devant ma radio ou ma télévision. En tant qu’individu individuel, je ne peux que proclamer fièrement mon incapacité à agir sur les événements qui font l’histoire, et ma fierté à me proclamer « spectateur 100 % pur gros porc ». A ma grande honte. Mais, à la réflexion, la honte se dissipe.

 

 

D’ailleurs, franchement, le feuilleton syrien me saoule au point que j’ai décidé de quitter la salle de projection avant la fin. Je suis désolé pour vous qui mourez, vous qui souffrez, vous qui êtes torturés à mort, vous qui avez perdu un fils, une jambe ou la tête. Je ne peux strictement rien pour vous. Toute cette affaire n’est pas de mon ressort. Je ne suis pas décideur. Elle ne me concerne donc pas. Du ressort de quel citoyen de base est-elle, d’ailleurs ? L’ « opinion publique » ? Laissez-moi rire. C’est bon pour l’Orphée aux Enfers d’OFFENBACH, une œuvre qui va gaillardement sur ses 160 ans :

 

« Qui je suis ? Du théâtre antique

J’ai perfectionné le chœur ;

Je suis l’Opinion Publique,

Un personnage symbolique,

Ce qu’on appelle un raisonneur.

Le chœur antique en confidence

Se chargeait d’expliquer aux gens

Ce qu’ils avaient compris d’avance

Quand ils étaient intelligents.

Moi je fais mieux, j’agis moi-même,

Et, prenant part à l’action,

De la palme ou de l’anathème

Je fais la distribution. »

 

 

En gros, OFFENBACH a mis sur la scène cette voix de mazzo-soprano pour qu'elle figure l'énorme BLA-BLA ambiant. L’opinion publique n'existe pas. C'est un bruit de fond. Ce sont les journaux, les radios, les télévisions qui la font, l’opinion publique. A la limite, les journaux, les radios et les télévisions (ajoutons internet), je leur en veux de me mettre ce spectacle sous les yeux et les oreilles. De me l’imposer, leur opinion publique.

 

 

 

Qu’est-ce que ce bourrage de crâne peut finir par créer dans le dit crâne ? C'est fait pour terrasser de terreur. Je vais vous dire : c'est fait pour inspirer la peur, la culpabilité, la certitude de l’impuissance devant le réel que d’autres nous façonnent à leur gré. Et pour finir, la soumission à je ne sais quelle fatalité.

 

 

Je vois bien ce qui risque d’arriver, avec l’histoire syrienne : chaos, islamisme, guerre totale, vu le nombre de pays importants impliqués dans l’affaire, mais je vais vous dire : comme je n’y peux rien, j’estime avoir le droit, que dis-je, j’estime avoir le DEVOIR DE M’EN FOUTRE. Expliquez-moi à tire-larigot que l’ordre du monde se joue là, et pas ailleurs.

 

 

Que ce qui est imposé aux Syriens est terrible. Eh bien je vais vous dire, l’ordre du monde, JE LE COMPISSE, JE LE CONCHIE. A quoi ressemblerait le monde, aujourd'hui, si SARKOZY n'avait pas envoyé ses Rafales sur Benghazi ? Qu'est-ce qui peut m'obliger, moi, citoyen basique, à ne pas supporter les morts d'ailleurs ? En quoi il me concerne, franchement, l'ordre du monde ?

 

 

Pour une raison qui n’est peut-être pas excellente : pendant que la caméra mondiale est braquée en permanence sur la Syrie, il n’y a plus personne pour regarder les violences en Somalie, le viol industriel qui règne au nord-ouest de la République Démocratique du Congo, les violences au Sud-Soudan, j’arrête là. Quel être raisonnable aurait la prétention de croire qu'on peut faire régner l'ordre et la paix sur notre planète ?

 

 

Ce qui m’étonne, c’est que les foules spectatrices soient toujours convaincues, qu’il est possible de sauver les autres (« Mais faites quelque chose ! », entend-on depuis les débuts de cette autre atrocité que constitue l'action humanitaire). Donc qu’il faut les sauver. Comme SARKOZY qui, en déclenchant la foudre contre KHADAFI, a réussi à déstabiliser gravement tous les pays de la région sahélienne. Là encore, je ne peux que conspuer cette maxime chère à ma tante A. (voir hier) : « Quand on veut, on peut ».

 

 

Vous comprenez pourquoi je me suis tourné vers la ’pataphysique ? C’est parce que

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Voilà ce que je dis, moi.

 

 

 

 

lundi, 02 juillet 2012

DES (MAUVAISES) NOUVELLES DE LA FRANCE

J’espère que vous n’avez pas mis trop de temps à vous rendre compte que, sous HOLLANDE, ça n’a pas duré pour qu’il en aille tout autrement que sous SARKOZY, c’est-à-dire, évidemment, que tout est comme avant et que rien n’a changé.

 

 

Une seule chose a disparu du paysage, et c’est déjà un drôle de soulagement : le plaisir de sale gosse de NICOLAS SARKOZY qui consistait, patiemment, jour après jour, à dénicher une nouvelle fourmilière pour y foutre un grand coup de tatane, à seule fin de jouir en ricanant méchamment du spectacle du grouillement innombrable et affolé des insectes. La fourmilière pouvait s'appeler "carte judiciaire", "RGPP", "Hôpital public", "Ecole", "Police", peu importait. Reste à voir comment HOLLANDE va réparer tout ça.

 

 

C’est vrai que SARKOZY avait érigé en méthode de gouvernement l’ébahissement permanent des foules : « Oh non, quand même, ça, il n’osera pas ! – Ben si, qu’est-ce que vous croyez ? ». C’en était très curieux, d’ailleurs, de voir SARKOZY dans son déguisement de président, trop grand pour lui. C’était ça le plus sidérant : le voir déguisé en président, avide de voir les visages des Français sidérés, ahuris, jour après jour, de voir une fourmilière après l’autre démolie à coups de bottes par le sale gosse caractériel.

 

 

Dans le fond, SARKOZY, pendant cinq ans, a fait diversion. Il a inventé le quinquennat de la diversion : pendant qu’il s’agitait au premier plan, les bottes cloutées de ses cabinets ministériels attaquaient une nouvelle fourmilière, en prévoyant déjà leur cible suivante, et en se demandant s’ils allaient l’attaquer de la pointe ou du talon. On va pouvoir quitter des yeux l’écran et sortir de la salle pour aller se soulager la vessie. Est-ce que ce sera reposant pour autant ? Pas sûr, Arthur.

 

 

Ah si, quand même, avec la présidence HOLLANDE, ce sera plus reposant pour les journalistes. Les rédacteurs en chef ont déjà cessé d’éditorialiser à tout va au moindre battement de cil de l’époux de CARLA, que j’avais presque envie (dans mes temps morts) d’appeler « monsieur BRUNI ». Et ils ont cessé d'envoyer leurs journalistes en rafales de grappes d'escadrilles aux trousses de l'agité de la focale. C’est sûr, FRANÇOIS HOLLANDE souffre moins pathologiquement de n’être pas constamment au centre des conversations.

 

 

Mais franchement, vous croyez qu’il va faire mieux que le sidérateur professionnel qui l’a précédé ? Les finances, l’activité industrielle, le « pouvoir d’achat des Françaises-et-des-Français », vous croyez que ça va s’arranger ? Personnellement, je dis que non, et que le pire est à venir.

 

 

Pour une bonne raison (qui est très mauvaise en soi), c’est que la logique du spéculateur est une logique proprement USURAIRE. Ceux que les « journalistes » économiques (si on peut nommer cette engeance) appellent mensongèrement des « investisseurs », ne sont rien d’autre que des usuriers, de la même espèce que l’affreux Gobseck inventé (et observé) par BALZAC. Avec les dettes souveraines, ils ont trouvé un prodigieux gisement à se faire du gras.

 

 

 

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Je signale à ceux qui ne se tiendraient pas au courant que le taux maximum possible (défini par l'Etat, au-delà c'est de l'usure), pratiqué par les banques, en France, pour un emprunt de 1524 euros (c’est précis), est de 20,65 %, soit 1,72 % par mois. Et que ça passe à 19,5 %, jusqu’à 3000 €, pour les crédits renouvelables (vous savez, les "revolvings"). Donc ça reste juteux (pour qui ?). Le Figaro.fr du 9 mai 2012 indique que la Grèce pourrait emprunter « sur les marchés » au joli taux (à dix ans) de 22 %. CQFD.

 

 

Les prétendus « investisseurs » des « journalistes » sont bel et bien des USURIERS à qui toutes les autorités politiques du monde ont décidé de laisser impunément la bride sur le cou. Et qu’on se le dise, depuis que l’Etat français n’a plus le droit d’emprunter à 0 % auprès de sa banque centrale, depuis la scandaleuse loi de GISCARD et POMPIDOU (1973), l’Etat français a été obligé de se tourner vers les USURIERS pour financer les salaires et les retraites des fonctionnaires, mais aussi les cadeaux fiscaux faits à droite et à gauche.

 

 

Sans que ça l'empêche de brader les bijoux de famille de l'Etat lui-même (patrimoine immobilier, autoroutes, privatisation des grands services publics, mis au rencart au nom de la très européenne "concurrence libre et non faussée", etc.).

 

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CE CROCHU-LÀ EST PEINT PAR QUENTIN METSYS

 

Je note que ni MITTERRAND ni JOSPIN n’ont touché à cette loi scélérate. Gauche et droite sont un seul et même bateau. Cette loi a passé autour du cou de tous les dirigeants politiques, quelles que fussent leurs couleurs et leurs paroles, un nœud coulant, dont on s’aperçoit aujourd’hui qu’il est passé autour du cou de tous les contribuables.

 

 

Tout ça pour dire que, avec HOLLANDE ou SARKOZY à la barre, c’est kif-kif bourricot et du pareil au même. Et qu’ils obéissent au doigt et à l’œil, sous peine d’étranglement, à la sacro-sainte « loi du marché », qu’on peut tout bonnement appeler la LOI DE LA JUNGLE. L’un comme l’autre, ils sont au garde-à-vous, le petit doigt sur la couture du pantalon, en attendant les verdicts éminemment « rationnels » (!!!!!) de Wall Street et des entreprises qui gagnent leur vie en vendant des opinions (on les appelle couramment des « agences de notation »).

 

 

Non, je ne suis pas optimiste. « Tu vas pas mourir de rire, Et c’est pas rien de le dire » (Mickey 3 D).

 

 

Voilà ce que je dis, moi.

 

 

 

 

jeudi, 24 mai 2012

LA GUERRE DES DESSINS

Cela fait une éternité que le journal Le Monde s’est converti à la publicité, à la photographie et au dessin de presse. Une éternité qu’il s’est mis à publier les cours de la bourse. Une éternité qu’il a cédé à la pipolisation, imitant en cela la dernière page de Libération, en publiant des portraits curieusement neutres et alléchants de personnalités plus ou moins fêtées dans les médias.  

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Une éternité que Le Monde s’est adapté à la modernité, je veux dire à la « nécessité » d’aérer de toutes les manières possibles des contenus d’une sévère austérité, d’une densité fatigante, et pour tout dire capables de flanquer des indigestions carabinées. Une éternité qu’il propose pour remédier à ces défauts des articles allégés de toute matière grasse.

 

 

Bref : le « journal de référence » a suivi le cours des choses pour s’adapter à un public de « jeunes cadres dynamiques », d’une allègre modernité, et qui, pour cette raison, consacrent trop de temps à leur jogging, à leur(s) maîtresse(s), à leur ordinateurs pour en perdre à vouloir s’informer en allant trop au fond des choses. On ne sait jamais : peut-être que ça colle aux doigts.

 

 

De son côté, le journal Libération n’est pas resté inactif, et a su accompagner souplement l’évolution des mœurs. Cela fait en effet une éternité que, sous la houlette inspirée, quoiqu’énergique, de SERGE JULY (le journaliste devenu patron qui, à ce titre, fut considéré comme acheté, avant d’être « à jeter »), il a abandonné la Révolution à son triste sort.

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Une éternité qu’il a délaissé la futilité de ses célèbres « petites annonces » pour s’intéresser à son tour aux personnes dignes d’intérêt, c’est-à-dire celles qui portent l’étiquette « vu à la télé ». Une éternité qu’il a jeté dehors l’extraordinaire, génial et décoiffant  supplément Un regard moderne où le collectif Bazooka portait le visuel à ébullition. Adieu CHRISTIAN CHAPIRON (Kiki Picasso), JEAN-LOUIS DUPRÉ (Loulou Picasso) et OLIVIA CLAVEL (Electric Clito).

 

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 ET ÇA REMONTE A 1978 !

 

Je ne sais pas si c’est le mot « ébullition » qui s’impose, parce que je pourrais aussi bien parler d’explosion, de dynamitage, mais on me reprocherait l’outrance. Au sujet de Bazooka, il ne saurait y avoir d’outrance, puisqu’aucune ne serait en mesure d’égaler la leur, à l’époque.

 

 

Si je peux donner mon avis, je pense que Bazooka, en son temps, a fait basculer l’univers graphique dans l’infini émiettement de la marchandise, du fait du triomphe de la consommation comme mode de vie. Pour ce qui est du graphique, je dirai que personne mieux que Bazooka Production n’a compris (ou reflété, ce serait peut-être plus juste) le sens de l’époque qui s’ouvrait (avec à la clé récupération des détournements situationnistes).

 

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Bref, ça fait une éternité que Libération s’est converti à la social-démocratie « responsable », que la social-démocratie « responsable » s’est convertie à l’économie de marché, et que l’économie de marché s’est convertie à l’intégrisme libéral et à la lutte de tous contre tous (THOMAS HOBBES, Léviathan). Rassurons-nous : la destruction du monde par l’économie est en cours.

 

 

Tout ça pour en venir à quoi, vous demandez-vous peut-être ? A ceci : en dehors du fait que la presse française n’a cessé de décliner et de perdre des forces et du caractère, les deux journaux cités ci-dessus cultivent une tradition : le dessin de presse. Et c’est là que leurs chemins se séparent. Au Monde, le dessinateur s’appelle PLANTU (son vrai nom est JEAN PLANTUREUX, si, si, je vous assure). A Libération, il s’appelle WILLEM (BERNARD WILLEM HOLTROP).

 

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DESSINS PARUS LE 21 MAI 

 

La différence entre les dessinateurs reflète exactement la différence entre les journaux. Pendant que PLANTU adopte la couleur conformiste de la feuille qui le rémunère, et se prend pour un nouveau DAUMIER (y compris pour la sculpture) et pour le porte-drapeau internationaliste de la liberté de la presse (« cartooning for peace », créé en 2006) et de l’humanisme journalistique, avec bonnes intentions et certificat de belle âme, le rigolard WILLEM, plus individu, donc infiniment préférable, promène son regard et son ricanement vaguement désenchanté dans toutes sortes d’endroits plus ou moins mal famés, couchant sur le papier les vachardises plus ou moins prononcées de son ironie plus ou moins féroce.

 

 

Une autre différence entre les deux dessinateurs est que, dans Le Monde, il est publié en « une », alors que dans Libération, il faut le chercher en pages intérieures. Mais la grande différence est dans la teneur elle-même des dessins. PLANTU est effroyablement gentil. Bon sang, que ses dessins sont sages. C’est énervant à force d’être sympa. Je me demande si cette gentillesse est propre à l’individu, ou si c’est la « ligne » du journal qui commande.

 

 

Sans doute un peu les deux, mon général : Le Monde n’aurait jamais demandé, par exemple, à CABU un dessin de « une ». CABU, c’est tout juste bon pour un hebdomadaire satirique paraissant le mercredi ou pour Charlie Hebdo.  CABU est trop méchant pour travailler au Monde. Regardez comme il arrange SARKOZY (et BERNADETTE CHIRAC au passage).

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COMME DIT LINO VENTURA : C'EST DU BRUTAL !

(et très bien vu, je trouve)

 

 

Cette gentillesse de PLANTU fait en général son dessin lisse et mou : il manque des piquants, bon sang de bonsoir ! Et puis, cette petite souris qu’il ajoute à tous ses dessins, est-ce qu’il ne l’a pas tout simplement piquée à GOTLIB ? Bon, c’est vrai, chez GOTLIB, ce n’est pas une souris, mais une coccinelle, mais elle a une véritable existence, elle devient un vrai personnage, qui vit des aventures. La souris de PLANTU ne sert à rien. Clin d’œil, si vous voulez, mais sans signification.

 

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 Tiens, regardez un peu ce que PLANTU et WILLEM dessinent le 7 mai, lendemain du 6 (vous vous rappelez ? Ah bon, moi, j’ai déjà oublié). Si vous voulez mon avis, PLANTU joue les « chambres d’écho » pour les événements, alors que WILLEM est davantage dans le commentaire politique. Le dessin de WILLEM est en actif ce que celui de PLANTU est en passif.

 

 

 

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Voilà ce que je dis, moi.

 

 

P. S. : j'aime beaucoup aussi ce portrait de NICOLAS SARKOZY :

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 BEAU PORTRAIT CUBISTE, ET TRES RESSEMBLANT

vendredi, 27 avril 2012

LA BÊTISE FEMINISTE

MARIE DARRIEUSSECQ écrit des livres. Elle a commencé par Truismes en 1996. J’avais lu ça, en son temps. Pas franchement mauvais, pas épastrouillant non plus.

 

 

Tiens, à propos d’ « épastrouillant », savez-vous que le mot se trouve dans A la Recherche du temps perdu ? On le trouve à la page 892 du tome III, dans la collection de La Pléiade. Mais attention, la première Pléiade, l’édition de PIERRE CLARAC en trois volumes, pas celle de JEAN-YVES TADIÉ, en quatre volumes. 

 

 

Notons en passant que, d’une édition à l’autre, La Recherche a vu doubler son embonpoint (bondissant de 3558 à 7408 pages), à cause des bondieuseries de sacro-saintes « notes et variantes », pondues très sérieusement et très laborieusement par des universitaires cavernicoles et binoclards, dont on se demande ce qui les pousse à allonger à ce point la sauce, vu la maigreur squelettique de la rémunération qu’ils en tirent. La gloire, peut-être ? A moins que ce soit l’idéal ? Autre hypothèse : ça fait bien sur un Curriculum Vitae.

 

 

Je reviens à la petite DARRIEUSSECQ. Son histoire de transformation en truie (c’était une coiffeuse, si je ne me trompe) était somme toute assez mal bâtie. Rien à voir en tout cas avec La Métamorphose de FRANZ KAFKA, qui se déroule à une altitude pour le moins métaphysique, totalement inaccessible à la petite MARIE (comme dit la chanson : « La petit'Marie M'avait bien promis Trois poils de ... Pour faire un tapis »).

 

 

Si je me souviens bien, il n’y avait, sur le plan romanesque, presque aucune interaction entre les mutations physiques de la fille et les gens de son entourage. Un vrai défaut de conception. Un vice de forme, quoi. Mauvais signe, pour un « écrivain », je trouve. Et puis, la fin, avec la libération de tous les cochons et leur fuite dans la nature, c’est quand même ce qui s’appelle « finir en queue de poisson », non ?

 

 

La petite DARRIEUSSECQ a réussi à s’introduire dans une certaine intelligentsia parisienne. Visiblement, elle sait y faire, puisqu’après avoir un peu pompé un livre autobiographique de CAMILLE LAURENS, elle a réussi à l’évincer des éditions POL, PAUL OTCHAKOVSKY-LAURENS ayant pris parti pour elle dans la bisbille, que la deuxième avait, hélas pour elle, rendue publique. Je ne dis pas pour autant que CAMILLE LAURENS est un véritable écrivain, qu'on se rassure.

 

 

Aux dernières nouvelles MARIE DARRIEUSSECQ est parvenue à recycler une pointe de sa plume devant un micro de France Culture, où elle lit hebdomadairement un papier en général incolore, inodore et sans saveur, couleur de muraille, c'est-à-dire digne de passer inaperçu, parfois non dénué cependant d’une modeste pertinence, et d’une voix, comment dire, sans caractère. mais sans aucun caractère. Une voix d’une platitude parfaite et présentable. Les malveillants diront que la forme est conforme au fond. Dont acte.

 

 

Qu’est-ce qui lui a pris, l’autre jour, d’aller chercher des poux dans la tête d’une publicité ? Et quelle publicité ? Une invitation à aller faire de la randonnée dans le Jura. On se demande vraiment ce qui lui a pris d’aller y dénicher du sexisme.

 

 

Il faut vraiment que « les chiennes de garde » n’aient plus rien à se mettre sous les crocs et regrettent le beau temps où elles pouvaient se les aiguiser sur les mollets de DOMINIQUE STRAUSS-KAHN, en se déchaînant contre ses fureurs sexuelles. Ah oui, c’était un bon « client ». C'était le bon temps, en quelque sorte. Le venin coulait tout seul, ça venait bien.

 

 

Qu’est-ce qu’elle dit, cette publicité ? On peut voir le spot de 10 secondes sur internet (tapez "jura publicité") : « Tu veux des rencontres ? Vivre une aventure ? Goûter mes spécialités gourmandes ? Alors viens chez moi. Hmmm ! Je suis le Jura. Rejoins-moi sur jura-tourisme.com. Je t’attends ». Voilà, c’est tout. Enfin presque. Le message est comme susurré à l’oreille par une voix féminine qu’on peut trouver sensuelle (mais sensuelle comme une voix synthétique).

 

 

Dernier détail : comme c’est un message radiophonique, pas d’image. Mais le spot, sur internet, se déroule sur fond de photo de paysage verdoyant : un charmant village au pied d’une belle falaise, à l’entrée d’une vallée resserrée. Je suggère à MARIE DARRIEUSSECQ d’aller au bout de son obsession, et d’interpréter (au secours, la psychanalyse !) le paysage présenté comme le pubis offert d’une femme étendue sur le dos, où le promeneur est invité à pénétrer. Comme ça, le tableau sera complet.

 

 

Blague à part, cet aspect n’était sans doute pas absent des cogitations publicitaires quand il s’est agi de choisir la photo. Ce serait d’ailleurs fort intéressant, d’assister à ce genre de séance de « brain-storming », où l’on traduit des désirs subconscients en signes visuels précis, le plus connu étant la forme en V dans les affiches mettant en scène des femmes (deux doigts ouverts sur une épaule nue, par exemple).  

 

 

Voilà donc le message qui fait dresser les féministes sur leurs ergots, flamberge au vent, outrées que la publicité utilise une fois de plus impunément le corps des femmes (donc elles ont bel et bien identifié le pubis) pour vendre des produits ? Elle est là, la bêtise féministe. D’abord faire de la publicité à une publicité, bien sûr. Ensuite, monter en épingle un message somme toute bien anodin. Enfin, se tromper de cible.

 

 

Qu’y a-t-il dans ce message ? Une pute qui vend ses charmes, un point c’est tout. « Tu viens, chéri ? », c’est du racolage actif. Mais que fait la police ? Mais que fait SARKOZY, serait-on en droit de demander ? Mais des racolages comme ça, c’est à chaque instant, partout qu'on en voit. S’en prendre à cette pub-là, parmi cent mille autres, ce n’est rien d’autre, finalement, qu’une lubie.

 

 

Le problème ? C'est le problème que les féministes ont avec le désir masculin. Mais quel homme n'a pas un problème avec son propre désir ? Peut-être les féministes doctrinaires ont-elles un problème avec le désir féminin ? Peut-être, finalement et en fin de compte, les féministes doctrinaires ont-elles un problème avec le désir? En soi ?

 

 

Tout le monde a un problème avec le désir. Le féminisme constitue une des techniques pour y parvenir. Ce n'est pas donné à tout le monde, d'exprimer ça par un symptôme.

 

 

L’obsession victimaire d’un certain féminisme fait oublier à ces dames que la publicité est par nature perverse. Par nature, la publicité pervertit les signes, elle fait feu de tout bois pour attiser le désir (le premier étant sexuel), qu’elle met en scène dans des formes, couleurs, etc. qui objectivent en termes visuels les phénomènes qui se produisent à l’intérieur de la bouilloire humaine.

 

 

Il faut bien se convaincre que, pour vivre, la publicité fait les poubelles. Que la publicité se nourrit exclusivement des déchets de la civilisation. Des crottes de l'imaginaire humain. Que la publicité est l'inverse de la civilisation, puisque son boulot est de sublimer de vulgaires objets, de simples marchandises.

 

 

C’est en soi que la publicité serait à dénoncer.  Et les hommes devraient autant s’insurger que les femmes. Ce n’est pas pour rien que, dès les années 1960, la revue Hara-Kiri (dont l'équipe était constituée d'hommes, presque exclusivement) clamait à tous les vents : « La publicité nous prend pour des cons. La publicité nous rend cons ». J’ajoute qu’elle n’a peut-être pas tort de le faire, vu les performances de notre système éducatif. Passons.

 

 

MARIE DARRIEUSSECQ a donc perdu une belle occasion de se taire. Franchement, vous voulez que je vous dise ? Dans la publicité Jura, il n’y a pas de quoi fouetter une chatte, fût-ce dans le cadre d’une Pospolite Castigatrice, réunie, conformément aux statuts, par le Vice-Curateur du Collège de ’Pataphysique (n'oublions pas l'apostrophe, obligatoire depuis Faustroll).   

 

 

Voilà ce que je dis, moi.

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

jeudi, 05 avril 2012

BOUALEM SANSAL CONTRE L'ISLAMISME

Là commence l’errance du frère aîné, qui veut refaire tout le père-iple du père, parce qu’il veut comprendre. Comprendre qui c’était, comment il a fait pour devenir ce qu’il fut, rouage dans une machine à exterminer pour commencer, pour finir « cheikh » respecté dans un minuscule bled algérien, où il est finalement massacré.

 

 

Le livre n’est pas seulement raté parce qu’il est « à thèse », mais aussi à cause de la forme de « journal » que l’auteur a choisie : le frère aîné, doué et brillant, rédige le journal de sa quête à la recherche du père dans une langue très maîtrisée ; mais le cadet, qui a failli virer voyou, en tenant lui-même son journal, ne peut espérer fournir au lecteur des outils d’analyse un peu sophistiqués, sous peine que le récit perde totalement en crédibilité : son niveau d’instruction l’interdit. Il en reste à l’instinct, aux réflexes primaires.

 

 

Ce qui manque donc au livre, pour devenir satisfaisant, c’est un point de vue englobant, plus élevé, capable d’entrer dans la question avec un peu de subtilité et d’intelligence. C’est tout à fait regrettable, car du coup, le récit reste à l’état de rudiment.

 

 

L’aîné, qui découvre la Shoah, a mené un recherche jusqu’au bout, pour « comprendre », comme dit le commissaire du quartier, Com’Dad, une recherche qui l’a conduit au suicide par asphyxie aux gaz d’échappement dans son propre garage. Il doit, comme il dit, « payer sans faute », pour son salaud de père.

 

 

Il faut bien dire que l’exposé de la découverte du nazisme du père par le fils a quelque chose de terriblement scolaire. L’auteur nous inflige ce que tout le monde sait sur des pages et des pages, et ne craint pas de donner l’impression d’un cruel ressassement.

 

 

Là où le récit acquiert de la force, à peu près au centre du livre, c’est quand Rachel explique la logique des nazis « de l’intérieur », comme un processus industriel rationnellement mis en place et en œuvre. L’examen froidement méthodique des capacités respiratoires d’un bébé et d’un adulte pour calculer les quantités de gaz « zyklon b » et le temps qu’ils mettront à mourir dans la chambre à gaz a quelque chose d’hallucinant, et pour tout dire, de très « culotté ».

 

 

Mais la thèse de BOUALEM SANSAL est découpée à la hache : que ce soit en Algérie ou dans les banlieues françaises, les islamistes djihadistes préparent pour l’humanité un système comparable à celui que les nazis ont fait subir au peuple juif, aux tziganes et à toutes sortes de « dégénérés » et d’ « Untermenschen ».

 

 

L’équation « islamistes = nazis » est aussi carrée que ça. Ce que confirme BOUALEM SANSAL lui-même, interviewé sur Youtube ou Dailymotion. On en pense ce qu’on veut évidemment. Par exemple, en Tunisie, RACHED GHANNOUCHI, le chef du parti islamiste Ennahda, a annoncé qu’il renonçait à inscrire la charia dans la constitution. En Egypte, ce n’est pas gagné, loin de là.

 

 

En tout cas, ce qui est clair, ce qui est sûr, c’est que, dans de nombreux pays musulmans, et à un moindre degré dans certaines banlieues françaises, des individus fanatiques, des groupes de musulmans extrémistes s’efforcent de grignoter du terrain jour après jour sur le territoire de la République. Et je n’ai qu’à moitié confiance, pour ce qui concerne la France, dans un gouvernement quel qu’il soit pour faire face au problème.

 

 

S’il y a un problème, ni MITTERRAND, ni CHIRAC, ni JOSPIN, ni SARKOZY ne l’ont résolu. Et ça fait trente ans que ça dure. Ça a commencé quand l’Etat français a démissionné de ses responsabilités en abandonnant la gestion « sociétale » (religion, activités culturelles ou sportives, etc.) des populations musulmanes aux « associations ». C’est-à-dire aux musulmans eux-mêmes. Les gouvernants auraient voulu entretenir un bouillon de culture anti-français, ils ne s’y seraient pas pris autrement. Appelons ça de la lâcheté, et puis n’en parlons plus.

 

 

Et Monsieur NICOLAS SARKOZY a la mirobolante idée de fusionner les Renseignements Généraux et la DST pour faire la DCRI (donnée à son pote SQUARCINI) en même temps que des économies, deux services qui n’avaient ni la même finalité, ni le même mode de fonctionnement, ni la même « culture ».

 

 

Cela donne la catastrophe policière du groupe dit « de Tarnac », et cela donne la catastrophe policière et humaine de MOHAMED MEHRA, à Toulouse et Montauban. Encore bravo. Au fait, pourquoi le tireur d’élite a-t-il reçu l’ordre (on ne fait pas ça sans en avoir reçu l’ordre exprès) de viser la tête ? Est-ce que ça ne serait pas pour l’empêcher de parler ?

 

 

Voilà ce que je dis, moi.

 

 

 

vendredi, 27 janvier 2012

PROPAGANDE ET DEMOCRATIE (fin)

Résumé : les succès de SARKOZY sont bâtis sur une grosse machine à PROPAGANDE. Le Parti Socialiste a beaucoup réfléchi et, après mûre réflexion, a fini par se dire : « Pourquoi pas moi ? ».

 

 

Donc cette fois, qu’est-ce qu’on a mis en face de NICOLAS SARKOZY, comme produit ? On a troqué la preuse (ben oui, pourquoi y aurait pas de féminin à « preux » ? Vous voyez que j’ai l’esprit et la grammaire larges) héroïne nationale, SEGOLENE ROYAL, contre un fromage de HOLLANDE qui, à vue de nez, ne sort pas tout frais de la fabrique.

 

 

 

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LA BLAGUE EST UN PEU FACILE, MAIS INEVITABLE 

 

Ce n’est pas faute de conseillers en communication (chargés précisément du packaging du produit). Mais cette fois, promis, on va faire moins amateurs. Bon, c’est vrai, le moteur tourne de temps en temps sur « trois pattes », mais on a des bons mécanos dans l’équipe. Vous allez voir ce que vous allez voir. Roule Raoul.

 

 

Ce qui est sûr, c’est que la com’ de SARKOZY en 2007 n’est pas tombée dans l’œil d’un paralytique, et que le verrouillage des images n’est pas tombé dans l’oreille d’un aveugle. Au « grand meeting inaugural de la campagne de FRANÇOIS HOLLANDE », au Bourget, dimanche dernier, c’est une officine du Parti « Socialiste » (ou payée par lui) qui a exclusivement fourni les images offertes par la télévision dans la soirée. Exactement ce qu'avait fait SARKOZY en 2007. Entre eux, ils se piquent les trucs qui marchent. Enfin, ils espèrent que ça marche.

 

 

Ouverture de la parenthèse sur la bande-son du « meeting-du-Bourget-de-FRANÇOIS-HOLLANDE ».

 

 

C’est sûr qu’elle a été particulièrement soignée. On se serait cru chez STANLEY KUBRICK en personne, l’orfèvre en matière de bande-son, un des rares cinéastes à avoir fait des films qui « s’écoutent » vraiment. Tiens, regardez voir Eyes wide shut, et écoutez le piano obsédant de GYÖRGY LIGETI.

 

 

Au Bourget, je ne sais pas si vous avez fait attention à ça. Vous entendez l’orateur – mais est-ce que FRANÇOIS HOLLANDE est un orateur ? Ecoutez bien, vous entendez autre chose en même temps : la foule l’acclame pendant qu’il parle. C’est une acclamation EN CONTINU. Etonnant, la clameur collective semble ne jamais s’interrompre. Un sourd rugissement, venu du fond des êtres, sert de socle constant aux envolées du candidat du Parti « Socialiste ».

 

 

La foule trépigne donc sur place. L’orateur, pour donner l’impression que c’est lui qui déclenche cet enthousiasme, en même temps qu’il domine la situation, doit pousser sa voix. Le public est si heureux d’avoir trouvé le chef charismatique, qu’il l’incite à se dépasser, et le chef est tellement charismatique qu’il déclenche l’hystérie du public. La clameur le dispute à l’orateur dans des assauts alternés d’intensité et d’enchantement. J’ai trouvé ça spectaculaire.

 

 

Dans la tradition du discours de campagne, le public laissait sagement le chef développer un thème. Puis, lorsque le point culminant avait été atteint et que des mots qui marqueront forcément l’histoire avaient été prononcés, dans un élan lyrique particulièrement réussi, il laissait jaillir son allégresse comme un « sonneztrompettes éclatantes, taratata, taratata » (chœur des enfants au début de Carmen).

 

 

Ici, me semble-t-il, le Parti « Socialiste » a mis au point dans ses laboratoires de propagande une belle innovation : la manifestation permanente d’un enthousiasme collectif qui ne demande qu’à se répandre, à se propager dans la population entière, après avoir été dûment enregistrée dans la boîte aux images. On n'arrête pas un peuple enthousiaste qui déferle sur la place Tahrir. C'est l'effet de masse. Le peuple en marche est irrésistible. C'est le message des communicants du Parti « Socialiste ».

 

 

Tout cela est très au point, vraiment. Car évidemment destiné au sacro-saint « 20 heures » de TF1. C'est important, l’élaboration de la bande-son. J’espère que les « chauffeurs de salle » ont été dûment rémunérés, voire récompensés. Qu’on se le dise : le Parti « Socialiste » non plus, ne laissera rien au hasard, en 2012, pour ce qui est de la « communication ».

 

 

Clôture de la parenthèse.

 

 

Cela veut dire une chose : la machine à PROPAGANDE, qu’on soit à gauche ou à droite, tourne à plein régime. Bon, c’est vrai, je me suis déjà interrogé sur l’épaisseur de la feuille de papier à cigarettes qui sépare la droite de la gauche.

 

 

 

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C'EST-Y PAS BEAU ?

(le candidat avant son régime)

 

Et BERNARD ACCOYER peut toujours dire que si FRANÇOIS HOLLANDE est élu, la France subira un désastre comparable à celui d’une guerre. « Paroles verbales ». Mauvais cinéma. Gesticulation théâtrale. Car il faut posséder un nuancier excessivement précis, ou une balance de revendeur de haschich pour apprécier ou peser la différence entre P. S. et U. M. P.

 

 

Oui, je sais, on va encore me dire que j’exagère. Que le bipartisme existe toujours bel et bien en France. Et patali et patala. C’est vrai, on met une pincée de social et de redistributif d’un côté, on insiste de l’autre sur la sécurité et la performance économique.

 

 

Mais regardez 1983 : c’est bien le Parti « Socialiste » et FRANÇOIS MITTERRAND qui se sont convertis une fois pour toutes à l’économie de marché, à la concurrence « libre et non faussée », bref, à l’ultralibéralisme. Et qu’ils ont froidement laissé tomber, disons le mot : trahi les « couches populaires ».

 

 

Ce faisant, il faut le reconnaître, ils ont bien anticipé la chute du Mur de Berlin, la défaite du (soi-disant) « communisme » et le triomphe aveuglant du capitalisme, du libéralisme et de la finance débridée. Ont-ils pour autant eu raison de le faire ? Moi, je dis non.

 

 

Du coup, comme il n’y a plus qu’un seul système, mais que ça serait compliqué et risqué de le dire, gauche et droite sont obligés de faire comme si la guerre froide continuait. Ils sont tous obligés d’aller fouiller dans les poubelles de l’Histoire pour dénicher des « thèmes » qui les démarqueront de l’adversaire. A condition de ne pas se les faire piquer (cf. les GUY MÔQUET, JEAN JAURÈS sortis de la bouche de SARKOZY ; remarquez, MARINE LE PEN s’est bien mise à parler de « justice sociale » et de « redistribution »).

 

 

On n’est plus dans la politique. On est bien dans l’argumentation publicitaire. En débat public, ils haussent le ton comme au théâtre pour faire croire qu’ils s’engueulent et que de vraies « convictions » antagonistes les habitent et les opposent, irréconciliables. Mais regardez-les, les larrons en foire, les margoulins qui surveillent les clôtures des prés où leurs bêtes pâturent. S’agirait pas que le maquignon d’en face me pique la Blanchette, sinon qu’est-ce qui va me rester comme fromage ?

 

 

Il y a quand même quelques indices qui laisseraient presque des raisons d’espérer. Je ne sais pas si j’ai raison, mais il me semble que, si la machine à PROPAGANDE turbine plus fort que jamais, son rendement baisse de façon spectaculaire. Comme si la production d’automobiles régressait vers ses premiers âges, quand on faisait des moteurs de 200 CV qui tiraient péniblement la bagnole à 40 km / h.

 

 

Je ne voudrais pas trop m’aventurer, mais j’ai comme l’impression que le BARATIN a un peu plus de mal à faire de l’effet. Alors je voudrais vous dire que si, le 22 avril 2012, soir du premier tour de la présidentielle, j’entends qu’au deuxième tour, ce sera BAYROU contre LE PEN, je débouche le champagne.

 

 

Vrai, si les deux GEOLIERS (les deux GARDE-CHIOURME, si vous préférez) de la vie politique en France se font blackbouler, le lendemain matin, les flics pourront à bon droit et raison me placer en cellule de dégrisement pour une semaine. Et je redeviens OPTIMISTE, promis, juré, craché. Même si je ne me berce de nulle illusion quant à la nature profonde de FRANÇOIS BAYROU et de MARINE LE PEN.

 

 

Rien que la perspective d’un Parti Socialiste dans les choux et d’un U. M. P. dans les pommes, ça me donnerait une de ces patates !

 

 

Voilà ce que je dis, moi.

 

 

 

 

 

 

 

jeudi, 12 janvier 2012

SONDAGE ET POLITIQUE : LE BOCAL

Résumé : L’action politique est réduite à l’étude des sondages, la politique est réduite à l’action publicitaire, le politicien est réduit à vendre des aspirateurs et des encyclopédies au porte-à-porte.

 

 

Le problème de la politique, en France plus qu’ailleurs du fait de particularités particulières, c’est que deux entreprises se partagent le marché, et que chacune aimerait bien grignoter la part de l’autre, ou des T. P. E. (très petites entreprises) qui font semblant de jouer le même match. Tout ce qui s’appelle « vie politique » en France, est accaparé par deux usines, dont chacune prétend régner à elle seule sur le marché. Non, je devrais dire deux entreprises complices dans ce qu’on peut appeler un délit d’entente illicite.

 

 

Les produits ne sont pas très différents l’un de l’autre. Plus de social et de redistributif pour bien claironner qu’on est « à gauche ». Plus de sécuritaire et de libéral pour que l’image de marque de « la droite » soit aussitôt identifiée et mémorisée. Mais à part ces petits « marqueurs identitaires », allez, soyez sympas, dites-moi ce qui les différencie, les deux V. R. P. ? Rien ! Que dalle ! Pas lerche ! Peau de zébi !

 

 

La trublionne cataloguée sur le bord tout à fait droit de l’échiquier l’a bien compris, et ce n’est pas idiot du tout, de dénoncer l’U. M. P. S. Elle a même raison. A voir la peur qu’elle déclenche à droite et la haine qu’elle déclenche dans les cercles de la bien-pensance de la gauche morale, tiers-mondiste et « solidaire », les lignes de production des usines citées risquent de se trouver bientôt perturbées.

 

 

Le dernier Charlie-Hebdo, un torchon bien dans cette ligne, présentait la semaine dernière, parmi les caricatures des candidats, celui de la fifille à son papa sous la forme d’un énorme étron fumant au beau milieu de la page. C’est facile et rapide : ça évite de se lancer dans d’ennuyeuses et subtiles analyses du phénomène Front National, et de se demander si ce succès annoncé (je demande à voir) ne pousse pas sur le répugnant fumier U. M. P. S.

 

 

Le roquet BRICE COUTURIER, qui aboie sur France Culture dès que la silhouette d’un « facho » se dessine dans le paysage, se demandait, lundi matin (9 janvier), si les deux journalistes du Point (SOPHIE COIGNARD et ROMAIN GUBERT) qui viennent de publier une charge contre L’Oligarchie des incapables, ne « faisaient pas le jeu du Front National ».

 

 

Aboyons le moins possible contre la classe politique vermoulue qui nous gouverne ou y aspire, nous aboie le roquet BRICE COUTURIER, car, chut, ça « fait le jeu du Front National ».

 

 

Il ne vient pas à l’esprit de ce monsieur, habituellement intelligent, raisonnable et parfois percutant, de se demander si ce n’est pas précisément au spectacle offert par les Arlequin, Pantalon et autres Matamore qui nous gouvernent et hantent les plateaux de télé munis de leurs « éléments de langage », que nous devons le pronostic d’un Front National à 30 % publié en une de Libération ce même 9 janvier. 

 

 

C’est vrai que Libération fait fort avec sa une : un gigantesque 30 % (plus de 10 cm) joue les grenades dégoupillées en haut de la page. La phrase apporte un sérieux correctif à l’effet bœuf produit par la maquettage : « 30  % n’exclueraient [sic !] pas de voter Le Pen » (notez la superbe faute sur « exclure », et on est en « une »). Notez la formule « n’excluraient pas » : en clair, ce n’est pas complètement inenvisageable, mais bon, ce n’est pas fait. Notez aussi, bien sûr, le conditionnel.

 

 

Le mot d’ordre de cette une : la montagne de l’image, la souris du résultat. Pour vous en convaincre, jetez un œil en bas de page 3. Vous savez combien ils sont, dans le sondage, à souhaiter la victoire de MARINE LE PEN ? Ils sont 15 %, pas un cheveu de plus. La moitié. Ils sont de plus en plus honnêtes, à Libé. C’est présenté comme un « sondage exclusif ». Bien sûr, coco : tu l’as acheté avec le pognon que je donne pour acheter ta feuille de chou.

 

 

En fin de compte, les sondages tiennent un discours. Les politicasseurs, qui ont lu ce discours, élabore leur propre discours à partir de là, au sujet duquel on va faire des sondages pour tester l’impact du discours, et c’est reparti pour un tour. La machine s’auto-alimente.

 

 

On pourrait même soutenir que la pratique du sondage fabrique du discours qui s’auto-proclame « politique ». Ce que nous disent nos responsables est directement induit de ce que leur apportent les sondages. C’est la machine folle, qui fonctionne pour elle-même, sans considération pour quelque autre réalité. Du fictif qui produit du fictif, qui produit du fictif….

 

 

Ça me fait penser à GOTLIB : « C’est comme le pot-au-feu, c’est meilleur à chaque fois ». C’est dans l’intégrale de la Rubrique-à-brac, page 329. C’est intitulé « La Vache ». L’auteur nous fait partager sa vision épique de la digestion de l’herbe qui se passe dans le circuit compliqué, entre l’estomac de l’animal et la cavité buccale. « Et ça remet ça. – C’est reparti comme en 14. – Ça y va à la manœuvre ».

 

 

Regardez comment réagissent d’un seul élan Protocolaires d’une gauche de plus en plus caviardée, saumonée et faisandée et Thuriféraires d’une droite de plus en plus décomplexée, policière et vaguement putschiste, face au danger « populiste » (voir mes notes des 5 et 6 janvier). Ils ont peur de perdre le monopole (duopole, pour être exact, mais est-ce même si exact ?) des affaires.

 

 

A quoi sert l’énorme 30 % de la une de Libération pour annoncer un score possible du Front National ? A quoi sert d’exploiter les faits divers affreux, bien mis en scène à la télé ? A quoi sert d’exploiter les risques d’explosion de l’euro, d’éclatement de l’Europe ? A quoi sert d’insister sur les bisbilles franco-allemandes auxquelles le peuple ne peut strictement rien ?

 

 

Le but me paraît bien clair et identifiable : la PEUR. Plus je crée un sentiment de peur dans la population, plus j’ai de chances de tirer les marrons du feu. Regardez le déguisement de NICOLAS SARKOZY : après le Père Noël des riches, le voilà Père Courage (pour l’extérieur) et Père Protecteur et Fouettard (pour l’intérieur). Plus j’accentue le contraste entre la peur et NICOLAS SARKOZY, plus je sers à NICOLAS SARKOZY. Pas sûr que ça marche à tous les coups.

 

 

Plus rien à tirer de tout ça.

 

 

Voilà ce que je dis, moi.

 

 

 

 

 

 

vendredi, 06 janvier 2012

HARO SUR LES POPULISTES ! (fin)

Résumé : gare aux populistes, c’est SARKOZY qui vous le dit.

 

 

 

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Rien de tel que « les populismes » (vous ne trouvez pas ça drôle, que les politicloches « convenables » en parlent toujours au pluriel ?) pour faire reluire le rôle de ces premiers de la classe qui nous gouvernent, et qui ont appris à « monter des dossiers » et « monter des projets » dans des écoles spécialisées.

 

 

Dans d’autres écoles spécialisées, on les a entraînés à mettre la bouche en cœur pour débiter leurs mensonges et à ne jamais s’énerver contre un « adversaire » (ou soi-disant tel) sur un plateau de télévision. On leur a dit que « le premier qui s’énerve a perdu » (sous-entendu : perdu tout crédit dans l’opinion des spectateurs, et ça c’est mauvais lors des élections). Ce sont leurs « conseillers en com. » qui leur ont dit. Alors ils se contrôlent.

 

 

D’ailleurs, ils n’ont pas de mal à se contrôler, puisque, il n’y a pas si longtemps, ils étaient assis sur les mêmes bancs de l’E. N. A. Ils sont même à « tu » et à « toi » depuis de si longues années que les escarmouches feutrées auxquelles ils font semblant de se livrer avec leurs complices-adversaires pour faire croire que « tu » est à droite et « toi » à gauche, est un spectacle dont la routine a désormais du mal à faire oublier le feutre dans lequel elles sont emballées.

 

 

Je rappelle que DOMINIQUE DE VILLEPIN, en pleine Assemblée, quand il insulte FRANÇOIS HOLLANDE en l’accusant de « lâcheté », à la première suspension de séance, tous deux se retrouvent à la buvette, bien contents du spectacle qu’ils ont donné au bon peuple. Rien de tel qu’une minute « va-de-la-gueule » pour établir dans l’esprit des populations, d’une part la réalité de l’ « affrontement », et d’autre part la force des « convictions ».

 

 

Mais ils ont malgré tout de plus en plus de mal à faire tenir le masque. Et s’ils arrivent, en s’y mettant à tous, à rassembler un gros tiers de gens qui « y croient » encore (ça veut dire qui vont voter, 56 % d’abstention aux dernières cantonales, plus les blancs et nuls), c’est tout simplement parce qu’il y a beaucoup trop de gens qui regardent la télévision.

 

 

Si on collait aux politicruches l’interdiction de cumuler deux fonctions électives et de renouveler un mandat électif plus d’une fois, en y ajoutant l’obligation du décompte des bulletins blancs comme suffrages exprimés, c’est-à-dire si on vivait dans un régime démocratique, là ils commenceraient à avoir la pétoche, ils commenceraient à ouvrir l’œil et l’oreille sur ce qui se passe dans le monde et dans la population, les politicrottes.

 

 

Mais pour en arriver là, il faut changer la loi. Pour changer la loi, il faut se faire élire au sein d’une majorité. Pour cela, il faut suivre la voie parlementaire, respecter les échelons institutionnels, exécuter les procédures démocratiques. C’est exactement l’histoire de l’œuf et de la poule : si tu veux démocratiser le système, il faut entrer dans le système. Pour entrer dans le système, il faut en accepter les règles. Or, etc.… On n’en sort pas.

 

 

Je n’ai même pas parlé de la façon dont la vie politique est organisée en France. Et je suis obligé de reconnaître que Madame LE PEN touche assez juste en parlant de l’U.M.P.S. (U.M.P. + P.S.). Deux partis trustent les pouvoirs, bien constitués en une seule et unique mafia bien décidée à empêcher les gêneurs d’intervenir dans leurs petits jeux.

 

 

Vous savez ce qui me plairait, le soir du premier tour, et qui me ferait rigoler ? Arrivent en tête Madame LE PEN et FRANÇOIS BAYROU. Je sais, je sais, ça ne change rien au problème de fond de la pauvreté en hommes du personnel politicoq, et par conséquent de sa médiocrité. Mais un bon coup de pied dans la fourmilière U.M.P.S., rien que ça serait jubilatoire.

 

 

En attendant ce drôle de moment drôle, qu’est-ce que c’est, Madame LE PEN ? Qu’est-ce que c’est, JEAN-LUC MELANCHON ? Des repoussoirs. Des épouvantails. Et le mécanisme est d’une simplicité monacale : plus l’épouvantail épouvantera, plus le repoussoir repoussera, plus les FILLON, COPÉ et consorts seront forts. A la limite, les « populistes » ne font pas encore assez peur pour que les autres en face dorment sur leurs deux oreilles en attendant la prochaine élection.

 

 

JEAN-MARIE LE PEN était un autre carnassier, qui avait prouvé son pouvoir de nuisance. La seule chose qui me fasse peur, avec fifille à papa, c’est le gros bras et le front bas qui, caché derrière le rideau, est prêt à sortir au coup de sifflet. La chroniqueuse de France Inter, SOPHIA ARAM, a eu récemment un aperçu de ce à quoi on peut s’attendre. Je me dis, et je ne suis pas sûr que ça me rassure, que ceux d’en face en ont autant à leur service, en cas de besoin.

 

 

En attendant, les populistes sont soigneusement montés en épingle pour servir d’épouvantails et de repoussoirs. Mais je vais vous dire, des populistes comme ça, le 6 février 1934, droite et gauche officielles en auraient rêvé. Tranquilles, les populistes, aujourd’hui, les pieds dans les pantoufles à regarder la télé. C’est bien simple, ce sont des populistes virtuels, qui gueulent peut-être un peu dans quelques meetings, mais qui se contentent de gueuler : « Qu’est-ce qu’on va leur mettre, aux prochaines élections ! ».  Le comble du paradoxe.

 

 

Des vrais populistes, pas des pour-de-rire, vous auriez vu ce qu’ils en auraient fait, des trois millions de manifestants qui battaient le pavé contre la réforme des retraites ! Si de vrais populistes les avaient pris en main, vous croyez que les préfectures et les commissariats auraient pu résister ? Dans « populisme », j’entends forcément l’usage de la force, de la violence. Chaque manifestant est un projectile en puissance.

 

 

Là, qu’est-ce qu’on voit ? Les 5 % annoncés de MELANCHON, les 20 % espérés par MARINE LE PEN, ils attendent sagement l’arme au pied que le jour de l’élection soit arrivé. Franchement, les enfants, arrêtez de vous faire peur !

 

 

Les populistes d’aujourd’hui, ils sont virtuels, comme tout ce qui passe par la télé pour se faire connaître et pour balancer sa propagande. Ils sont aussi neutralisés que tous les autres, du seul fait qu’avant d’entrer sur le plateau, ils passent chez la maquilleuse. Le populisme aujourd’hui, c’est un populisme de média. Le général BOULANGER, en son temps, il n’était pas dans le médiat, mais dans l’immédiat. La foule était prête à suivre. Et s’il a cané au moment fatidique, c’est de son propre écroulement.

 

 

Aujourd’hui, quand la foule est dans la rue à gueuler, les chiens de garde syndicaux sont là pour empêcher tout « débordement ». Tout est « médiatisé » au moyen de deux artefacts : la télé est le plus connu. L’autre est l’urne électorale. La télé, c’est pour tout mouliner en discours et en image, c’est-à-dire en spectacle. L’urne, c’est pour que l’électeur ait l’impression d’être un acteur.  Il y a un troisième média : le syndicat, qui fait semblant de monter à ébullition pour mieux faire retomber la pression.

 

 

Vous verrez ce qui se passera, le jour où le citoyen retrouvera au fond de sa mémoire le souvenir de ce que c’est vraiment, l’action politique.

 

 

En attendant, il faut se contenter des simulacres.

 

 

Pourquoi croyez-vous qu’il n’y a plus d’action politique ?

 

 

Voilà ce que je dis, moi.

 

 

 

mardi, 06 décembre 2011

LA JOURNALISTE FARCIE (fin)

Résumé : on est gouvernés, informés et employés par des mafias. Very bad trip, brother !

 

Une illustration et une variante de cette connivence viennent d’être offertes par le magazine « M » du journal Le Monde, sous la plume de Raphaëlle Bacqué et Judith Perrignon. Il s’agit, là encore, de faits connus. Pas de révélations à attendre. Rien que de la confirmation, du déjà-vu.

 

Il s’agit des atomes très crochus qui se sont trouvés entre un certain nombre de femmes journalistes et un certain nombre d’hommes politiques, et dont les diplodocus sont, d’une part, Christine Ockrent avec Bernard Kouchner, et d’autre part, Anne Sinclair avec Dominique Strauss-Kahn.

 

Béatrice Schönberg & Jean-Louis Borloo en montrent un exemplaire plus récent, quoique déjà défraîchi. Audrey Pulvar & Arnaud Montebourg, j’avoue que je n’étais pas au courant. Ils sont très bien quand même, et je les félicite. Citons encore les noms d’Alain Juppé (Isabelle Legrand-Bodin, journaliste à La Croix), François Hollande (Valérie Trierweiler) et Michel Rocard (le nom de l'épouse journaliste n'est pas cité, et on s'en tape).

 

Raphaëlle Bacqué mentionne cette remarque de Philippe Val, vous savez, cet homme d’affaires, cet œuf couvé par Charlie Hebdo, éclos à France Inter, quand il s’adresse à Audrey Pulvar : « Tu aurais dû cacher ta relation… ». C’est merveilleux. Je n’en demandais pas tant : « Tu aurais dû cacher ta relation … », avoue ce grand moraliste. Oui : on peut faire tout ce qu’on veut, aussi longtemps que ça ne se sait pas. Secret et solidarité. C’est la règle de la « famille » (Cosa Nostra), rhabillée en « règle professionnelle ».

Ce qui est drôle aussi, dans le double article dont je parle, c’est le nombre des noms qui ne sont pas dits. Raphaëlle Bacqué parlant seulement d’Audrey Pulvar, c’est dans l’article de Judith Perrignon qu’on a envie de dire : « Des noms ! Des noms ! ».

Il faut dire qu’elle fait un peu d’histoire. Dans les années 1960, Jean-Jacques Servan-Schreiber possédait L’Express. François Giroud en dirigeait le service politique. Ils embauchèrent Michèle Cotta, Irène Allier et Catherine Nay. C’était stratégique. Et ça a marché.

Surnommées les « Amazones », elles allaient, selon JJSS, « mettre de la chair derrière les idées » et « Vous êtes un bataillon de charme, vous allez les faire parler ». Ça devient transparent, non ? Donc, Catherine Nay devint la maîtresse d’Albin Chalandon. Le missile avait atteint la cible. Car ces femmes étaient bien des missiles.

Judith Perrignon évoque ensuite l’arrivée « d’autres générations de jeunes femmes » dans la profession journalistique. Une très jolie phrase : « On leur confiait toujours les couloirs plutôt que les éditos ». Je dirai que « faire le couloir » est, encore de nos jours, plus honorable que « faire le trottoir », même si c’est pour y pratiquer le même métier. 

Je cite : «  L’histoire de cette voix reconnaissable entre toutes qui s’inventait un nom pour appeler sa maîtresse dans la salle de rédaction – à chaque fois faussement sérieux, celui qui décrochait demandait : "De la part de qui ? " ». Des noms ! Et : « L’anecdote de ce responsable communiste racontant au téléphone le détail d’un bureau politique à une journaliste, par ailleurs allongée à côté d’un ténor socialiste agrippé à l’écouteur (…) ». Des noms ! Des noms ! Des noms !

 

Et Françoise Giroud qui, « avec le temps, prenait l’air d’une mère maquerelle ». Ce n’est pas moi qui écris cette saloperie, je vous jure, c’est page 53. Autrement dit, je n’invente rien : une jolie nénette futée,  bien balancée, embauchée comme journaliste dans un service politique, envoyée pour interviewer un homme politique, est invitée à employer tous les moyens pour revenir avec de la belle information, bref : de la confidence. Et si la nana n’a pas froid aux yeux et à la culotte, l’affaire est dans le sac.

 

Des missiles, je vous dis. C’est l’empire soviétique sous Brejnev. En plus soft, je veux bien. Mais ça couche quand même, ça baise et ça fornique. Moi ce genre de galipettes n’est pas pour m’effaroucher. Je dis comme Boby Lapointe : « Ça ne me mettait pas à l’aise, De la savoir Antibaise, Moi qui serait plutôt pour, Quelle avanie ! ». Ce qui me gêne aux entournures, c’est le mélange des genres.

 

Une femme et un homme qui se plaisent, pas de problème, ça finit au plumard, et je trouve ça très bien. « Ils furent heureux et eurent de nombreux orgasmes », comme on dit dans les « contes de fesses ». Mais le tableau de Michèle Cotta envoyée dans les pattes de Chalandon pour s’envoyer Chalandon, c’est autre chose. Ce genre de missile télécommandé, ça porte un nom bien clair et bien net : pute. Pour faire marcher les ventes de L’Express. A l’époque. Aujourd’hui, le « modus operandi » semble, en France, s’être généralisé. Et celui qui envoie la nana en mission est un maquereau.

 

Quand Judith Perrignon déplore que la réciproque ne soit pas vraie, là, je commence à me marrer franchement. Bon, elle reconnaît qu’il y a moins de femmes politiques que d’hommes. J’ajouterai que la profession journalistique s’est féminisée beaucoup plus vite. C’est vrai qu’il y a donc un grand déséquilibre entre l’offre et la demande. Mais qu’attend le marché pour s’auto-réguler ? Que fait Sarkozy ?

 

Mais s’il y a moins d’hommes journalistes qui succombent aux charmes des femmes politiques, est-ce vraiment, comme elle le soutient, parce que : « La politique reste le reflet d’une société patriarcale » ? Hé, ma belle, où tu l’as vue, la société patriarcale ? Ça fait longtemps que ses lambeaux s’en sont allés au fil de l’eau.

 

Elle ajoute quelque chose d’assez juste, je pense, sur le narcissisme tyrannique qui règne sur les mondes politiques et médiatiques. Un narcissisme réciproque, selon toute vraisemblance. Qui s'auto-alimente, et qui forme un terreau favorable à tout ce que les féministes américaines vomissent sous le nom de "séduction".

 

Moi, je crois que si les hommes journalistes vont, tout comme les femmes journalistes, de préférence vers les hommes politiques, c’est d’une part que ceux-ci sont les plus nombreux, d’autre part que le journaliste politique, mâle ou femelle, va par nature vers le pouvoir. Et j’en conclus que, si le journaliste mâle ne couche pas avec l’homme politique, c’est qu'ils sont tous deux, tout simplement, hétérosexuels.

 

Cela ne change rien au fait que, homme ou femme, quand il s’agit de politique et de pouvoir, le journaliste est tenté par la prostitution, quand il n’y est pas incité, comme on l’a vu. Le problème du journaliste politique, dans son monde professionnel tel qu’il est organisé et structuré en France, il est là : « Que suis-je prêt à faire ? Jusqu’où suis-je capable d'aller pour rapporter de l’information exclusive ? Quelle part de ma dignité et de ma liberté personnelles suis-je prêt à abandonner pour cela ? ».

 

Dans la façon dont les professions médiatiques fonctionnent aujourd’hui en France, je suis obligé de penser qu’elles comportent a priori une part de prostitution disponible. Combien de héros et d'héroïnes résistent à la tentation ? Ben oui, c’est que chacun a une carrière à faire. Toutes les jolies journalistes ne s'appellent pas Tristane Banon.

 

Voilà ce que je dis, moi.

mardi, 24 mai 2011

ELOGE DE LA DISCRIMINATION

L'ETAT DES MENTALITES

 

Ce qui est grand n’est pas petit. Ce qui est bleu n’est pas vert. Ce qui est LÁ n’est pas ICI. Ce qui est loin n’est pas près. Ce qui est A n’est pas B. Ce qui est lourd n’est pas léger. Ce qui est dur n’est pas mou. Ce qui est vivant n’est pas mort. Ce qui est virtuel n’est pas réel. Ce qui est vrai n’est pas faux. Ce qui est devant n’est pas derrière. Ce qui est en haut n’est pas en bas. Ce qui est à gauche n’est pas à droite. Ce qui est jour n’est pas nuit. Ce qui est eau n’est pas terre. Ce qui est pointu n’est pas rond. Ce qui est lisse n’est pas rugueux. Ce qui est vertical n’est pas horizontal. Ce qui est pluie n’est pas soleil. Ce qui est chaud n’est pas froid. Ce qui est obscur n'est pas clair.

 

Bon, je commence à vous bassiner la cafetière, je sens. J’explique : je viens de faire une liste (minuscule) de discriminations, voilà. C’est une suite de 1 et 0 d’avant la logique mathématique, d’avant l’invasion par le numérique. Discriminer, ça veut dire faire la différence. Vous voulez un exemple ? On a entendu ça sur France Culture, le 24 mai 2011, au bulletin d’information de 7 heures. Ce n’est pas vieux. Un lieutenant colonel de réserve (français) analyse la nouvelle stratégie des forces internationales en Libye, qui consiste à y envoyer des hélicoptères de combat, forcément plus vulnérables que des avions. Ces hélicoptères, je cite : « permettent d’opérer une discrimination plus fine des cibles au sol ». C’est un spécialiste qui parle. Maintenant, je remonte un tout petit peu plus loin : le début de la "Genèse" dans la Bible. Qu'est-ce qu'il fait, Dieu ? Il sépare. Premier jour, il sépare la lumière et les ténèbres. Deuxième jour, le firmament sépare les eaux d'au-dessous des eaux d'au-dessus. Troisième jour, il sépare la Terre et la Mer. Quatrième jour, il sépare le jour et la nuit. Sixième jour, à son image, il créa l'humanité, en ayant soin de préciser : "mâle et femelle". Et après tout ce travail de séparation, il se repose. Si c'est pas de la discrimination, ça.

 

Le sort indigne qui est fait à ce noble mot de discrimination, le sombre destin qui est devenu le sien de nos jours devraient faire se dresser les cheveux sur la tête de ceux qui en ont, maladie contre laquelle je suis désormais vacciné. Comme d’autres termes dont j’ai déjà parlé (« phobie », « tolérance ») ou dont je parlerai (« racisme », « victime »), le temps présent range le bocal « discrimination » sur le rayon du Mal. A ce titre, il est intolérable, inacceptable, inadmissible. D’ailleurs, c’est fait : il est proscrit. Nous avons en effet, à présent, une H.A.L.D.E. La halde est un petit animal exotique, féroce, qu’on a introduit récemment sur le territoire français pour assurer la pérennité de l’espèce, paraît-il menacée. Une drôle de bestiole quand même. Mais il semblerait que cet effort louable ait été vain : elle est morte. Il est vrai qu’elle a été illico remplacée par un animal autrement imposant : on le nomme « défenseurdesdroits » (sic !).

 

Mais foin de cours de zoologie : la Haute Autorité de Lutte contre les Discriminations et pour l’Egalité, est (était) chargée de la Police des Droits. La principale difficulté, c’est le concours d’entrée. Le diplôme s’intitule « B. A. S. V. » : Brevet d’Aptitude au Statut de Victime. Et la refonte en Défenseur des Droits ne va pas faciliter les choses. Il ne suffit pas de se dire victime pour être admis dans le cénacle des victimes, en effet, de même qu’il existe aujourd’hui infiniment plus d’ « artistes » auto-proclamés que d’artistes véritables. Une sélection sévère s’impose (dans la déchetterie actuelle, on utilise le pléonasme « tri sélectif »). Un examen préalable et rigoureux décide si la personne est recevable au statut envié de victime (« envié » car – et c’est flagrant avec le sémillant Nicolas Sarkozy – il « ouvre droit à réparation ». Traduction : « Ça peut rapporter gros. »). Mme Diallo, que tout le monde connaît maintenant, n’est pas, en l’état actuel des choses, une victime de Dominique Strauss-Kahn, mais une plaignante (ben oui, puisqu’elle a porté « plainte » !). Mais j’y reviendrai une autre fois.

 

Discrimination, c’est la faculté humaine de démêler : le vrai du faux, le fait du droit, le réel du virtuel, l’homme de la femme, etc., je ne vais pas recommencer. Cela a beaucoup à voir, donc, avec la capacité de jugement. Sans discrimination, donc,  pas d’espèce humaine (je vais tout de suite à l’essentiel). L’histoire de l’humanité fourmille d’exemples qui montrent qu’être capable de discriminer a été indispensable à son évolution. Tiens, un parmi d’autres : pour nous, la couleur verte, c’est simple, sauf si tu es daltonien. Eh bien, dans le langage d’une tribu d’Amazonie dont j’ai oublié le nom (peut-être existe-t-elle encore), il y a deux cents (200) mots pour la signifier, pour les multiples verts observables dans la forêt, suivant le lieu, le moment de la journée, la plante, la qualité de la lumière, etc. Vous imaginez à quelle subtilité on peut parvenir pour évoquer deux cents nuances possibles d’une même couleur ? Essayez donc : vous en voyez combien de différents, des verts, quand les arbres, au printemps, commencent à pousser leurs feuilles à l’air libre ? Encore un : la botanique a un grand ancêtre, le suédois Carl von Linné (1707-1778), qui a passé sa vie à discriminer : il a dessiné des « arbres », avec des embranchements qui, au fur et à mesure de la description des plantes, se ramifient, pas à l’infini, mais presque. Même chose pour la zoologie évidemment.

 

Pour pouvoir s’y reconnaître dans ce monde, l’homme a donc eu besoin de classer ses éléments en leur donnant, à chacun, un nom différent. Allez, un dernier exemple pour la route : que serait aujourd’hui la divine informatique sans  discrimination ? Car qu’est-ce que c’est, une arborescence informatique, sinon un système de classement, de distinction et de hiérarchisation ? Je n’y peux rien : en zoologie, par exemple, vous avez l’ « ordre » (mettons les falconiformes chez les rapaces diurnes), puis vous avez les « familles » (mettons les accipitridés, chez les mêmes), ensuite vous avez les « genres » (mettons les aigles, pour faire simple), et puis vous avez les « espèces » (mettons l’extraordinaire milan royal, avec sa longue queue rousse échancrée). Et après les espèces, il y a les « individus » (d’une buse variable à l’autre, il reste des différences. Il faudrait dire : la différence fait de la résistance).

 

Hiérarchiser ! Le sale mot a été lâché ! Hiérarchiser, aujourd’hui, c’est proprement diabolique. C’est drôle : nous passons nos journées à hiérarchiser et à classer (ce que nous voulons faire ou ne pas faire, les informations qui nous intéressent ou non, les personnes que nous souhaitons voir ou ne pas voir, les livres que nous avons envie ou non de lire (je parle pour ceux qui lisent des livres), etc. On appelle souvent ça des « priorités.). Et avec ça, on nous donne des coups de marteau sur le crâne pour nous convaincre que c’est mal ? Mais c’est la schizophrénie à l’état pur, ma parole ! Hiérarchiser, c’est discriminer, et puis c’est nécessaire : est-ce qu’il faut aller à droite ou à gauche ?

 

Alors aujourd’hui, ce qui prime, c’est la « lutte contre toutes les discriminations » ? « Bon sang, mais c’est bien sûr », disait Raymond Souplex à la fin des Cinq dernières minutes (à mes yeux le seul commissaire Bourrel qui soit, c’est vous dire mon âge). Mais au fait, qu’est-ce qu’on appelle ici « discrimination » ? Jean Yanne, dans un sketch célèbre, proclame sa haine des « routes départementales ». Là, on se rapproche du sens couramment donné à « discrimination » aujourd’hui. Cela veut dire que dans le pays de ce Jean Yanne de permis de conduire, il n’y a que des routes nationales, peut-être ? Bon, c’est évidemment le gag. Mais ça montre en douce que l’idée est tout simplement folle. Intraduisible dans les faits. C’est heureusement en vain qu’Hitler a essayé de purger la race aryenne des éléments juifs qui la corrompaient. 

 

Alors on peut bien rameuter des Vacher de Lapouge, des Gobineau pour introduire dans l’espèce humaine des hiérarchies fondées sur des critères vaseux, voire délirants, pour segmenter l’humanité en catégories homogènes qui seraient naturellement hiérarchisées (vous savez : « supérieur », « inférieur »). Il ne faut pas appeler ces tentatives haineuses et fondées sur la trouille et le fantasme du beau nom de « discrimination ». On a « ségrégation », par exemple, ou « apartheid », qui ont à peu près gardé la force de leur sens. Je ne mentionne pas « exclusion », tout à fait dévitalisé à présent.  

 

Georges Perec a écrit un petit livre intitulé Penser/Classer (Le Seuil) : si on ne classe pas, on ne pense pas : c’est le règne animal. Des allumés du bocal ont prétendu, il y a bien longtemps, exporter la théorie darwinienne de l’évolution dans le domaine social. Mais ces agités de la rampe, genre Spencer, ont allègrement confondu l’ « évolution » dont parlait Darwin avec le « progrès », cette marche inéluctable de l’humanité vers sa propre amélioration (rien que la notion de progrès, d’ailleurs, est aujourd’hui mal en point). Ils ont voulu transformer de simples « faits », produits dans leur lente et longue succession, en « lois », c’est-à-dire en principes devant guider l’action des hommes et des sociétés. Ils ont voulu ériger des « conséquences observables » en « objectifs à atteindre », avant même d’avoir analysé la subtilité des mécanismes mis en jeu dans l’extraordinaire grand mécanisme qu’on appelle l’évolution.

 

Je crains cependant que le succès du mot « discrimination » pour désigner divers « apartheids » ne soit dû à un mouvement irrésistible. Chose curieuse, en effet, il devient quasiment impossible de lutter contre certaines gangrènes du vocabulaire. D’un côté, vous avez les « différences », qu’il faut absolument respecter, sous peine d’atteinte à la sacro-sainte « tolérance ». D’un côté, donc, il faut « respecter les différences » (nous sommes devenus de constants et talentueux « respecteurs de différences » à tout crin). De l’autre, il ne faut pas faire de « discriminations », sous peine, évidemment, d’atteinte à la sacro-sainte « tolérance ».

 

Si les mots ont un sens, « différence » et « discrimination » sont strictement superposables. Alors je dis : il faudrait savoir. D’un côté, le mot d’ordre de « créolisation » du monde, l’appel vibrant, insistant au « métissage » culturel (melting pot, world music, tout est dans tout et réciproquement). De l’autre, des revendications d’ « identité » de plus en plus fortes, parfois violentes. il faudrait savoir : « créolisation », « métissage », c’est exactement le contraire de « différence », d’ « identité ». Vous ne trouvez pas ça bizarre ? Incompréhensible ? Abracadabrantesque ? Il y a de quoi vous rendre chèvre ! 

 

Si les mots ont un sens, si les mots dessinent les choses qu’ils désignent, il y a, quelque part par là, si je suis gentil, du bourrage de crâne, si je suis moins gentil, la mise en place d’un monde totalitaire, d’autant plus sournois qu’il s’est débrouillé pour susciter l’adhésion enthousiaste du plus grand nombre. Ça ne vous inquiète pas ? Ça ne vous rappelle aucun souvenir ?

 

Allez, comme disait le bon Jean-Jacques Vannier, « la vie est belle, et c’est tant mieux ».

mardi, 17 mai 2011

ON L'APPELLERAIT UNE MAFIA

Mazarine Pingeot, vous vous souvenez ? La fifille à papa Mitterrand. Est-ce  que celui-ci la gardait « sous le coude », pour la « sortir », comme certains l’ont affirmé, quand des malintentionnés ont voulu lui jeter dans les pattes son amitié compromettante avec René Bousquet, celui qui signa des « bons de déportation » vers les camps ? Ce serait pour éteindre l’incendie avant qu’il ait vraiment pris, magie-magie, qu’il aurait projeté sa fille en pleine lumière ? Bon, c’est vrai, les dates ne coïncident pas vraiment. Ce qui reste sûr, en tout cas, c’est ce dévoilement brusque d’un morceau de la vie en coulisse d’un homme politique très important : la fille secrète, la fille cachée.

  

« Secrète » ? « Cachée » ? Pas pour tout le monde. C’est sûr que le « bon peuple », sous-entendu les cons, n’était pas au courant. Pourquoi ? Parce que le « bon peuple », c’est le spectateur, c’est celui qui avale les salades que journaux, radios et télévisions débitent du haut de leur étal des quatre saisons, selon la règle : « Une salade chasse l’autre ». Mais mis à part le « bon peuple », c’est-à-dire la quasi-totalité de la population, c’est-à-dire tous ceux qui, au sens propre, ne comptent pas, mis à part les gogos, donc, tout le monde était au courant. « Tout le monde » ? Tu exagères, camarade blogueur. A peine : "tout le monde", ici, ça veut dire tous ceux dont le métier est de savoir, des diverses polices jusqu’aux hommes politiques (adversaires compris, notez bien !), en passant par les « passeurs » de l’information, c'est-à-dire l’ensemble de la profession journalistique.

 

Quelles pressions a subies Jean-Edern Hallier, quand il a décidé, déguisé en bourgeois de Calais avec la corde au cou, de brûler, sur un trottoir, un manuscrit dans lequel, probablement, il éventait le secret de François Mitterrand ? On n’en sait rien. Depuis, il est mort en faisant du vélo. Toujours est-il que l’affaire était connue dans toutes les rédactions. Mais jamais imprimée. Voilà l’exemple cru de ce qu’on appelle la connivence (synonyme de complicité) entre la « profession politique » et la « profession journalistique » (les guillemets ne signifient pas tout à fait la même chose dans les deux cas, parce que la politique n'est pas un métier, ou ne devrait pas être considérée comme tel par ceux qui s'y lancent, non plus que par le peuple, et que le simple (et vrai) métier de journaliste interdit théoriquement toute connivence).

 

Tous ces gens (je parle des chefs, grands ou moins grands, les petits étant appelés du doux nom de porte-flingue) fonctionnent selon le principe de la bande. Vous vous rappelez ce cycliste, dont j’ai oublié le nom (était-ce Christophe Bassons ?) qui a cafté, après le Tour de France 1998 (affaire Festina, Willy Voet, etc .) ? Vous vous rappelez Jacques Glassmann, dans l’affaire OM-VA, en 1993 ? Qu’est-ce qu’ils ont fait ? Vous ne connaissez peut-être pas François Rufin (Les Petits soldats du journalisme, Ed. Les Arènes) : son livre était courageux, il a donc été « ostracisé ». A cause d’eux, ce qui se passait dans les cuisines du cyclisme, du football et de la presse était soudain mis sur la place publique. Comme si, au restaurant, un marmiton venait dire aux clients que le chef vénéré crachait dans sa sauce grand veneur pour lui donner la bonne consistance. Suivant le camp dans lequel on se trouve, ça s’appelle « dénonciation » ou « délation », bien que la limite soit floue.

 

Eh bien en politique, c’est exactement pareil, tout au moins en France où, dans les hautes sphères de la politique, de l’économie, du spectacle et des médias, ça se tutoie, ça passe ses vacances ensemble (Sarkozy-Clavier n’est qu’un minuscule exemple), ça dîne en ville, ça se pique les femmes, enfin j’en passe, et des meilleurs (comme disait Victor Hugo). Entre puissants, on se respecte. Et le refrain chanté jadis par Guy Béart est toujours d’actualité : « Le premier qui dit la vérité, il doit être exécuté ». Et personne, qu’il soit dans la chiourme ou dans la valetaille médiatique, ne souhaite, d’une part se fermer le robinet à infos parce qu’il a « trahi la famille », d’autre part se suicider, c’est-à-dire être liquidé professionnellement (Alain Genestar, qui a dû se recaser, doit quand même se souvenir de ce qu’il a perdu dans l’affaire de la une de Match, avec la photo de Cécilia Sarkozy en compagnie de son amant). C’est de l’ordre de « je te tiens, tu me tiens ». Bref : tu respectes l’omerta, ou tu es mort (symboliquement, quoique…). En Sicile, cela porte le doux nom de mafia : entre « hommes d’honneur » (c’est comme ça qu’ils s’appellent), il y a des choses qui ne se font pas. Cela s'appelle un système : ça doit être entièrement cohérent. Cela veut dire que l'étanchéité entre l'intérieur et l'extérieur doit être parfaite. C'est tout ou rien, comme dans une secte. Les Américains ont une formule pour ça : "Love it or leave it !" Ceux qui ne sont pas avec nous sont contre nous.

 

Tout ça pour arriver à Dominique Strauss-Kahn, c’est un peu long, n’est-ce pas ? Mais cette petite mise en perspective par le contexte et quelques éléments historiques était utile. Pour ce qui concerne Dominique Strauss-Kahn, il y a bien quelques bulles qui sont remontées du fond vaseux vers la surface, mais somme toute, la surface est restée lisse, même après l’affaire "Piroska Nagy" au F. M. I. Pour vous en faire une idée, je vous conseille la lecture de trois articles de presse, qui montrent que, si ça se met à parler, c’est bien que, jusque-là, ils la bouclaient. Il respectaient la règle.

 

Le premier, intitulé « L’étrange omerta des médias sur le cas DSK », est signé dans Le Monde (daté du 17 mai) par Christophe Deloire, auteur de Sexus politicus en 2006, où il consacre un chapitre à DSK, et qui eut, paraît-il, du succès, mais où les témoins restent anonymes. Le deuxième, intitulé « DSK et les femmes : un secret de Polichinelle », est signé Jean Quatremer dans Libération du 17 mai : il raconte avoir en 2007 publié sur son blog quelques lignes où il évoque le problème de Dominique Strauss-Kahn avec les femmes. Aussitôt, il reçoit un coup de fil de Ramzi Khiroun (vous savez, le « communicant de DSK », l’homme à la Porsche Panamera), qui lui demande de retirer son billet, sur le thème : "Tu ne vas pas nous faire ça !" (Il le tutoie alors qu'ils ne se sont jamais rencontrés). Refus. Il accepte à la rigueur de publier quelque chose pour expliquer le sens de sa démarche. Mais si l’internet reprend son blog, chez les collègues médiatiques : rien. Le troisième article passe dans Le Monde daté du 18 mai : Raphaëlle Bacqué remonte dans le passé pour montrer « Les Deux visages de DSK ». Compte-rendu honnête et somme toute bien écrit.

 

Avec ça, on a une idée un peu précise du personnage. Pour être franc, Dominique Strauss-Kahn, je me rappelais ses tribulations judiciaires (MNEF, Alfred Sirven, la cassette Méry), et je ne voyais pas bien ce qui pourrait différencier un tel homme de Sarkozy à la présidence (est-il possible d’être en même temps un homme d’argent (la suite d'hôtel à 3000 euros la nuit, voir Le Monde du 17 mai) et un homme de gauche ?). Mais il y a aussi, dans le numéro de Libération (17), en face du texte de Jean Quatremer, l’article que Patricia Tourancheau consacre à Tristane Banon, qui raconte aujourd’hui que DSK l’avait agressée en 2002 (elle avait 23 ans). Elle n’a pas déposé plainte. Cet article paraît aujourd’hui. Elle était jeune journaliste, justement, et interviewait DSK. Elle ne voulait pas se suicider professionnellement. C’est sûr que l’autre face de Dominique Strauss-Kahn, je n’en avais aucune idée. Et pour cause : personne ne m’en a parlé. Les organes de presse ont, dans leur ensemble et avec une belle unanimité, fait silence. C'est pour ça que, quand j'apprends la nouvelle de l'arrestation, j'en tombe sur le cul, sidéré, comme la presse du monde entier. Cela veut dire que l'omerta a fonctionné à merveille : la "famille" est très soudée. Les "hommes d'honneur" font corps.

 

Alors ils sont trois, jusqu’ici, à cracher le morceau, à « passer à table ». Mais d’abord, c’est bien tard, parce que ça prouve que tous adhèrent au système, tant qu’il n’y a pas d’ « accident », c'est-à-dire en temps normal, c’est-à-dire tout le temps. C’est aussi pour ça que ça fait événement. C’est pour le « bon peuple » qu’il y a un « coup de tonnerre ». Ensuite, tous ces braves gens qui, à l’occasion, se gargarisent en rigolant des diverses « théories du complot », est-ce que, pendant toutes ces années, ce n’est pas eux qui en ont fomenté un, de complot ? Est-ce que l'arrestation de Dominique Strauss-Kahn ne fonctionnerait pas comme ce qu'on appelle le réel en psychanalyse ?

 

Cela me donne seulement envie de dire un gros "merde" à tous ces bonimenteurs indignes.

 

Ça, des journalistes ? Laissez-moi rire !