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mercredi, 15 mai 2013

AH ! RECREER DU LIEN SOCIAL !

 

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Plus il y a d’associations (loi 1901), moins ça « fait société ». Je passe sur le fait que ça veut sans doute dire que, en dehors de cet acte volontaire et conscient d’adhésion à un groupe limité en vue d’une certaine activité (une association loi 1901), les gens n’ont plus besoin les uns des autres. Soit dit par parenthèse, je me demande si ce n’est pas précisément ça, « faire société » : avoir besoin les uns des autres. Je ferme la parenthèse.

 

Un moyen de « faire société », ce serait par exemple de se rattacher unanimement à un principe unique. Et de s’y rattacher sans qu’il y ait délibération et acte volontaire : faire société – enfin c'est mon avis : demandez aux Suisses si quelqu'un les a forcés à planter le drapeau rouge à croix blanche dans leur jardin – est de l’ordre du réflexe, c’est de l'ordre du senti, de l'irréfléchi (« Au fait, t’as acheté le sapin ? »). C’est ce qui ne pose pas question, mais s’impose sans forcer personne, à coup d'article défini, c'est-à-dire quelque chose d'inaccessible au doute. Autrefois, le dimanche, on allait même jusqu'à habiller les enfants avec « les habits du dimanche ». On peut dire que ça, c’est fini.

 

Prenez la "nation", par exemple. Il est loin, le temps où Pierre Daninos (est-ce dans Le Jacassin ?) pouvait faire sourire en racontant la douce manie d’un oncle qui, tous les 14 juillet, n’allait assister au défilé des troupes que pour se placer derrière un homme à chapeau et pour, au passage du drapeau, faire voler la coiffe de l’impudent en lui lançant, comminatoire : « Monsieur, on se découvre devant le drapeau ! », approuvé et applaudi par les témoins. Une telle anecdote aujourd’hui aurait des airs kitsch, voire paléontologiques, pour ne pas dire franchement révoltants.

 

Plus sérieusement, que signifie le mot « nation » dans la tête de jeunes générations auxquelles on ne prend même plus la peine d’enseigner (de transmettre) l’histoire de la formation de la nation française ? Qu'est-ce qu'un "patrimoine commun" ? Il paraît que l’Histoire de France est devenue complètement hors de propos, hors de saison, hors-sujet. Etonnez-vous que, au lieu de sentir quelque chose vibrer à l’intérieur en entendant retentir la Marseillaise, des petits cons se mettent à siffler. Où est-elle, l'idée capable de fédérer les Français ?

 

Ajoutez à cela autre chose. Moi qui suis d’une génération qui a été « appelée sous les drapeaux », ne croyez pas que je vais exprimer une quelconque nostalgie de ce qui s’appelait « service militaire », tant j’ai pu toucher du doigt et absorber à haute dose du concentré d’abruti dans le bain où nageaient quelques galonnés conformistes par métier, beaucoup de sous-galonnés bornés par vocation, quand ils n'étaient pas simplement tarés par nature.

 

Mais sans qu'on soit favorable au retour du « service militaire », il faut bien reconnaître ses deux apports : la découverte de gens de milieux absolument hétérogènes, découverte que je n’aurais jamais faite autrement, et dont je suis obligé d'avouer le bénéfice a posteriori ; la reconnaissance de la dignité du drapeau comme symbole national, je veux dire unificateur. Mais si la conscription nationale a été aussi facilement abolie, c'est qu'il y avait un consentement général pour cela. Le ver était dans le fruit. Combien auraient voulu qu'il y en eût encore et toujours, des "conscrits" ?

 

Ne rêvons pas : la France, comme entité nationale, achève de se dissoudre, et ce ne sont pas des groupuscules, appelés « bloc identitaire » ou autre, qui peuvent s’opposer au processus. Aucun groupuscule n’est en mesure d’arrêter un mouvement qui touche la collectivité dans sa globalité. Qui touche les fondements. Tout s’est passé tranquillement, par petites étapes (suppression de l'enseignement de l’histoire de France, instauration de l’armée de métier n’en sont que deux aspects), presque sans douleur.

 

Tout ça fait qu’on peut se demander qui pourrait bien, aujourd’hui, se déclarer « fier d’être Français ». Qui, à part quelques bandes d’excités ou quelques nostalgiques ? Dès lors, difficile de « faire société », pas vrai ?

 

Voilà ce que je dis, moi.

 

 

 

mardi, 14 mai 2013

AH ! LE VIVRENSEMBLE !

 

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Ah, qu’il est content, le « zompolitic », quand il peut prononcer, sur un plateau de télévision et d’un ton pénétré, voire confit en dévotion, à l’heure de grande écoute, un hommage vibrant à tout ce qui peut favoriser « le vivrensemble » (ne pas oublier l’article défini) ! A tout ce qui se porte au secours de la défense du « bien commun » ! Il faut que tout le monde sache que le « zompolitic » est par principe, par conviction et par contrat moral favorable à tout ce qui permet de « faire société ». Il faut le comprendre, le « zompolitic » : ses prébendes en dépendent.

 

N’empêche que tout ça est beaucoup moins clair qu’il n’y paraît. J’ai bien l’impression, en effet, que plus ça va, et moins il y en a, de société. C’est une impression, ce n’est pas une analyse. Mais c’est une impression qui s’appuie sur quelques observations. Et je mets ça en relation avec le fait, par exemple, que, il y a un certain temps, les associations se sont mises à proliférer. Je me demande si ça ne va pas avec. C’est très curieux, cette multiplication des petits pains associatifs.

 

Au point que je me demande si on n'est pas en droit d'affirmer que moins il y a de société (singulier), plus il y a d’associations (pluriel). Comme un lien de cause à effet, quoi. Qu’est-ce que c’est, une association ? Très souvent, c’est trois pelés et un tondu qui aiment jouer aux boules, lire des poèmes ou marcher en grappe dans la nature. Des statuts déposés en préfecture, un président, un secrétaire, une assemblée générale annuelle, etc.

 

Mais ces associations sont comme monsieur tout-le-monde : couleur gris muraille, elles passent inaperçues, personne n’en parle jamais, sinon dans les pages locales de la PQR (presse quotidienne régionale). Si on se demande à quoi elles servent, on pourrait sans doute répondre : à rien. Les gens qui se regroupent pour jardiner ou chanter en chœur n’ont pas besoin d’une quelconque structure juridique. Ah si, pour chanter, il faut un local, pour jardiner, il faut un lopin. Pour ça, on a inventé la municipalité, et elle, elle a besoin d’un répondant juridique. Ventre-Saint-Gris et palsambleu, c’était donc ça !

 

En fait, les associations auxquelles je pense sont celles auxquelles se réfèrent les journalistes. C’est-à-dire celles qui se sont frayé un chemin direct jusqu’à leur oreille. On ne se doute pas comme il est vital, pour avoir un accès direct aux médias, d’être constitué en association, et si possible, d'en être le président. En France, "président", ça en jette.

 

Prenez le ridicule Louis-Georges Tin : sur la seule foi de son nom, quel journaliste serait assez écervelé pour approcher de sa bouche un micro ? Maintenant, présentez-le (comme il prend soin de le faire lui-même) comme président d’un vague « Conseil Représentatif des Associations Noires » (CRAN, calqué abusivement sur le CRIF mis en place par les Juifs de France, vous voyez le procédé publicitaire gros comme une montagne, Conseil Représentatif, ça cloue le bec à tout le monde), les micros déroulent le tapis rouge, comme on l’a vu ces derniers jours avec les commémorations de la condamnation vertueuse de l’esclavage, et l’esclavage, ba-caca, c’est très vilain, « les associations » (alias monsieur Louis-Georges Tin) l’ont bien dit. Est-ce que cela marque une quelconque volonté de « faire société » ? On s'en fout. Circulez. Il s'agit d'imposer à une majorité la reconnaissance des « droits » des « victimes ».

 

Moins récemment, on a entendu les journalistes évoquer « les associations », au moment des débats sur le mariage homosexuel. « Les associations » tenaient à faire connaître leur volonté de faire aboutir le projet imposé au gouvernement par le lobbying des dites « associations ». « Les associations » se sont officiellement réjouies du vote de la loi.

 

Le mariage des homosexuels sera donc un bienfait, un progrès de la démocratie, et ceux qui ne sont pas d’accord, c’est rien que des homophobes, et l’homophobie, ba-caca, c’est très vilain, « les associations » l’ont bien dit. Est-ce que ça marque une quelconque volonté de « faire société » ? On s'en fout. Circulez. A se demander s'il y a encore des gens qui seraient volontaires pour « faire société ». Là encore, il s'agit d'imposer à une majorité la reconnaissance des « droits » des « victimes ».

 

Ce que je trouve étonnant, dans ces affaires, c’est la facilité incroyable avec laquelle les journalistes ont recours à cette formule sacramentelle : « Les Associations ». Quel interlocuteur magique se cache derrière cette appellation d’allure alchimique ? Mystère. Remarquez, il y a une variante bien connue : « Les ONG ». C’est du même acabit, rappelez-vous le séisme de Port-au-Prince et la pétaudière semée par « les ONG », qui ne s’autorisaient que de leur propre générosité, qui avait forcément la priorité sur la générosité des autres.

 

Qu’on se le dise, « les associations » ont pris le pas sur « la société ». Si vous ne savez pas qui se cache derrière la formule, c’est que vous faites partie des « anonymes », autre catégorie chère au cœur des journalistes. Pour eux, « les associations », ce n'est pas anonyme du tout. Journaliste, métier pathétique. Ayons une pensée apitoyée pour tous les paumés qui le pratiquent.

 

Moi, on me dira ce qu’on voudra : plus il y a d’associations, moins il y a de société. Au lieu de société, mettez « Etat », mettez « Autorité », si vous voulez. Toujours est-il que plus il y a d’associations qui tirent à hue et à dia en cherchant à occuper la plus grande surface médiatique et à capter à leur profit la manne de la charité publique, et plus on y comprend moins.

 

Peut-être après tout cela vient-il du fait qu’une association se forme en vue d’atteindre un but précis et délimité, et que, somme toute, ce but représente l’intérêt particulier de quelques-uns, pour qui l’ « intérêt général » est une expression antédiluvienne, ou à tout le moins moyenâgeuse, qui n’a plus lieu d’avoir cours.

 

Moins il y a de Société, plus il y a d’appétits privés. Et Lycée de Versailles.

 

Voilà ce que je dis, moi.

 

Note : CRAN veut donc dire Conseil Représentatif. On attend que le ridicule Louis Georges Tin mette sur la table les preuves de cette étrange « représentativité ». Mais non, il préfère réclamer à la Caisse des Dépôts des millions d'euros pour « apurer la dette (sic) » contractée à l'égard des noirs en 1835. Alors, Tin, représentatif de qui, au juste ?

 

 

lundi, 22 avril 2013

QUE FAIRE AVEC LE MAL ? (3)

 

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POEME :

IL EST PAS MIGNON,

MON PETIT APION ?

ET MON P'TIT MORPION,

IL EST PAS TROGNON ?

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(ceci est la photo d'un morpion accroché à deux poils)

***

La « confession à la chrétienne » fut pendant des siècles le moyen mis au point par l’Eglise catholique pour expulser le Mal hors de l’âme des individus (et je ne parle pas de la messe). Mais aujourd’hui, il y a bien peu d’Eglise catholique (trop de gens voudraient la voir disparaître, elle est d'ores et déjà réduite au rôle de "groupe identitaire" parmi d'autres), encore moins de confession chrétienne. La question se pose : que faire avec le Mal ?

 

Il ne faut pas se leurrer : aucune société ne peut ne pas se poser la question. La preuve, c’est que toutes se la sont posée. Quelques-unes fonctionnent encore avec des institutions dédiées à cette tâche : les Dogons, par exemple, malgré les assauts conjugués des touristes, de l’argent et des marchandises en plastique, maintiennent encore un arsenal de croyances destiné à maintenir l’ordre dans l’ordre du monde, et à le rétablir en cas de besoin par toutes sortes de procédures compliquées (voir les ouvrages de Germaine Dieterlen, et surtout les entretiens de Marcel Griaule avec Ogotemmeli dans Dieu d’eau, 1948).

 

Quand l’idée est venue aux hommes qu’il était possible de chasser le Mal, ils ont inventé tout un tas de gestes et de cérémoniaux : ils ont arraché le cœur d’un semblable, ils ont précipité un semblable dans le feu ou dans l’eau, ils lui ont fait subir toutes sortes de tourments. Le semblable en question s’est appelé la victime. C’est sur celle-ci que se concentraient tous les maux accumulés.

 

Il est couramment admis de désigner aujourd'hui la victime sous le nom de « bouc émissaire » : attaché au milieu du village, le dit bouc recevait toutes sortes d’ordures, les paquets de boue et de fange dont s’allégeaient les habitants, puis il était bouté hors du village, bien loin dans le désert. Il paraît que ça se passait chez les juifs de l’antiquité. Avouez que c’est mieux qu’un sacrifice humain, bien que le spectacle perde en palpitant, comparé à un bon vieux sacrifice juteux et saignant.

 

Mais un rite ne dépend pas de ce qu’on y fait ou du protocole auquel il obéit : il s’agit avant tout, pour le rite et son responsable (prêtre, sorcier, chaman, ...), d’être efficace. Si la population, après le cérémonial, est effectivement libérée de tout le poids de Mal accumulé, elle n’en demande pas plus, pour recommencer à vivre. Le rite a marché.

 

René Girard a écrit là-dessus un livre génial : La Violence et le sacré (1972). Je ne vais pas vous réciter tout ça, je vais vous le faire  en bref et en simplifiant. Grosso modo, pour désirer quelque chose, un individu doit attendre que ce quelque chose lui soit désigné par quelqu’un comme étant désirable : si A désire X, B a raison de désirer X à son tour. Peut-être parce qu'il voudrait bien être comme A. C’est ce que Girard appelle « désir mimétique ».

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Je continue : dans un groupe, à force que les gens désirent les mêmes choses, ils deviennent à la fois des rivaux et des répliques les uns des autres. Pendant qu'à force de rivaliser, le destin des rivaux est, à terme, de se foutre sur la gueule, à force de désirer la même chose, le destin des rivaux est de devenir mécaniquement semblables les uns aux autres. C’est ce que Girard appelle « indifférenciation violente ». J'espère que vous suivez.

 

A force de monter entre des individus rivaux, la tension finit par produire la violence. Et comme cette violence risque d’aboutir à l’anéantissement de la collectivité en tant que telle (cela s’est vu par exemple chez les Iks, nord-est de l’Ouganda), les sociétés, pour se protéger et se pérenniser, ont élaboré, au fil de l’histoire, des protocoles expérimentaux dont le seul but était d’empêcher le massacre généralisé. On a appelé ça des « rites ». Lorsque le potentiel de violence atteint le maximum supportable, un mécanisme (la « crise sacrificielle » de René Girard) se déclenche pour rétablir la paix entre tous. C’est le moment du sacrifice proprement dit.

 

Pour que le sacrifice ait lieu, il faut que quelque chose soit sacrifié. C’est parfois quelqu’un. Les Grecs appelaient ce quelqu’un le « pharmakon » (mot qui signifie aussi bien « poison » que « remède »). René Girard multiplie les références à des peuplades exotiques, où un roi était élu à l’unanimité, mais qui était à terme destiné à jouer le rôle du pharmakon : être un jour sacrifié. Et ça marchait (enfin, c'est ce qu'on dit) ! Le pauvre roi commençait par être sacralisé, honoré, mais il devait finir dans la marmite : être brûlé après avoir été adoré, c'est dur !

 

L’important était que se produisît un « unanimité violente » contre la victime désignée. Le sacrifice de la « victime émissaire » n’est efficace qu’à condition d’unanimité : le bouc émissaire, s’il réussit à concentrer sur lui seul toute la violence contenue et retenue jusque-là dans la population, à ce moment précis, tout va bien. Ite missa est. Deo gratias. Allez en paix, et revenez dans un an. Le rituel d’élimination du Mal a rempli sa tâche : maintenir la force du « vivre ensemble ».

 

On pensera ce qu’on veut de l’hypothèse de René Girard, mais je crois qu’elle mérite attention. Au fond, elle repose tout entière sur cette autre, qui veut que nulle personne humaine ne désire quelque chose qui ne lui ait pas été désigné auparavant comme désirable par quelqu'un d'autre. C'est plausible, mais ... 

 

Malheureusement ça se gâte ensuite.

 

Voilà ce que je dis, moi.

 

 

dimanche, 21 avril 2013

QUE FAIRE AVEC LE MAL ? (2)

 

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SPECTACULAIRE ENVOL VERS LA LUMIERE DU SYMBOLE DE FRANÇOIS HOLLANDE ET DE TOUT LE PARTI SOCIALISTE DANS LES SONDAGES

APRES LE "CHOC DE MORALISATION"

ET LA CONFESSION DE JERÔME CAHUZAC

(car nous parlerons aujourd'hui de la confession, mes bien chers frères)

***

Je lançais donc un cri d’alarme : le Mal est désormais parmi nous, et ses racines inextricablement et durablement enchevêtrées s’enfoncent dans notre sol et étendent leur rhizome. La végétation qui émerge de ce sol où le Mal se mélange au Bien est désormais impure, et c’est son air que nous respirons, et ce sont ses pousses que nous trouvons dans nos assiettes.

 

Si nous étions en terre d’Islam, quel bonheur serait le nôtre ! D’une simplicité angélique. D’un côté le Coran, de l’autre le Sheitan (Satan). L'âme du musulman peut dormir sur ses deux oreilles, en paix avec elle-même. 

 

Au moins là, le Mal, il est nommé, et l’on se donne les moyens de le chasser, à coups d’exorcismes et de bûchers purificateurs. A coups de confession, aussi : on ne se doute pas du bienfait qu’a fait à l’humanité souffrante l’invention de la notion de péché, et du bienfait qui allait avec, quand le pégreleux en robe noire, derrière sa grille en bois, vous soufflait dans le nez, en même temps que son haleine fétide chargée d'ail et de molaires pourries, là-bas dans le fond, l'absolution rédemptrice : « Ego te absolvo ! Mon fils, vous direz trois Pater et deux Ave. Allez en paix ! ».

 

On repartait le cœur léger et l’âme guillerette, prêt (et autorisé) à recommencer. L’invention du péché, celle du Manuel du confesseur, celle de l’absolution furent des bouées de sauvetage lancées à l’humanité (au moins l'occidentale chrétienne), auxquelles celle-ci s’est accrochée avec succès pendant combien de siècles ?

 

La confession et le péché, l’aveu, l’absolution et la rémission, quel merveilleux moyen de se débarrasser  du Mal ! On l’expulsait hors de soi jusqu’à la prochaine fois. C’est sûr, il y avait une prochaine fois, aujourd’hui, un bon commercial dirait que c’est un « marché captif » : le client ne peut pas vous échapper. Il reviendra forcément. Même que l’homme en noir pouvait en rajouter dans la culpabilité : « Depuis combien de temps, mon enfant, n’êtes-vous pas venu ? ».

 

La civilisation qui a inventé la responsabilité personnelle, qui n’est finalement que la rançon de la liberté individuelle, a inventé dans la foulée le moyen souverain de résoudre en permanence le conflit entre la conscience et le monde (enfin, disons les actes commis dans le monde), entre la conscience et les autres.

 

J’ouvre une parenthèse. Pour être honnête, il faudrait dire que les curés sont allés très loin avec l’acte de contrition : « J’ai péché par pensée, par action et par omission ». La totale ! Quoi que tu fasses ou ne fasses pas, impossible d’échapper ! Que des moyens infaillibles mis au point pour, en accumulant les peccadilles journalières, se retrouver chargé de noirceurs et retrouver fissa le chemin du confessionnal. Je ferme la parenthèse.

 

Donc, carrément impossible de se coucher le cœur en paix : tout le monde a forcément, tous les soirs avant de s’endormir, quelque chose à se reprocher, ou quelque motif de s’en vouloir dans tout ce qu’il a pensé, dit, fait ou pas fait. C’est normal : le monde produit du Mal sans jamais s’épuiser, à jet continu. Le commercial en soutane n’a pas à bouger de sa chaise : le pénitent s’avance vers lui, à genoux, en se frappant du poing la poitrine : « Mea maxima culpa ».

 

C’était le bon temps où l’homme, ayant vaqué à ses occupations pendant la journée, faisait un détour par le confessionnal, rentrait chez lui et dormait du sommeil du Juste et l'âme en paix - non sans avoir au préalable dûment honoré bobonne de sa petite besogne repopulatrice. Le monde était bien organisé. Au moins dans les têtes.

 

Voilà ce que je dis, moi.

 

 

 

dimanche, 14 avril 2013

WILHELM MEISTER DE GOETHE 1/3

 

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ON EST PEU DE CHOSE

 

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Parenthèse inaugurale : François Hollande croit faire une diversion fructueuse en publiant le patrimoine des ministres ? Mon oeil ! Ce n'est pas le patrimoine des politiques qui est le problème. Une fois de plus, la classe politique ouvre la boîte à fumée, espérant mettre le couvercle sur l'essentiel (voir ici même les jours précédents).

 

***

 

Madame, Mademoiselle, Monsieur, autant le dire tout de suite : j’ai terminé la lecture de Wilhelm Meister, de Wolfgang Goethe. Enfin, quand je dis terminé, je devrais plutôt dire que j'en suis « venu à bout ». L’invraisemblable pensum, mes amis ! Comme disait mon père, quand nous tordions le nez sur la nourriture : « Quinze jours sous une benne ! Des briques sauce cailloux et des cailloux sauce brique ! Voilà tout ! ».

 

Eh bien, pour obtempérer, peut-être, j’ai bu le calice jusqu’hallali (je peux me permettre : qui sait concrètement ce que c'est, la lie ?), même si je me suis plusieurs fois adressé à lui : « Père, éloigne de moi ce calice ! ». Mais il semble que je ne m’appelle pas Jésus, ni mon père Dieu. Dont acte. Je ne l'ai d'ailleurs jamais cru, ni n'en ai fait mystère.

 

Je suis donc venu à bout de ce truc indigeste ! De la page 367 à la page 1353 du volume Pléiade des romans de Goethe : pas tout à fait mille pages ! Je ne crains pas d'affirmer haut et fort que j’ai survécu ! Je ne dirai pas, comme Sacha Guitry : « Si l’on pouvait mourir d’ennui, je serais mort à Angoulême » (cette phrase, merveilleuse de vacherie, est dans Les Mémoires d’un tricheur). Eh bien pour ce qui est de l’ennui, le Wilhelm Meister de Goethe, pour le lecteur, vaut largement l’Angoulême de Guitry, pour le bidasse. Goethe n'est pas un romancier.

 

 Pour le dire franchement, je n’ai jamais rien lu de plus profondément emmerdant, de plus essentiellement et mortellement mortel ! Mais comme c’est, paraît-il, un chef d’œuvre incontournable de la littérature mondiale, je tenais absolument à en avoir le cœur net : il fallait que j’allasse (si si !) jusqu’au bout, pour pouvoir, m’étant fait une opinion concrète et directe de la chose, en parler en pleine connaissance de cause.

 

Si on veut dire du mal de quelqu'un, autant savoir de quoi on cause. Je ne suis pas comme Pierre Bayard, l'auteur de Comment parler des livres que l'on n'a pas lus ? . Je signale en passant que ceux qui attribuent à Pierre Bayard la paternité de l'expression "plagiat pas anticipation" sont à la fois de vulgaires ignorants et des ignorants vulgaires. Revenons à Goethe.

 

Je ne résiste pas au plaisir de citer à nouveau le Klein Zaches d’E. T. A. Hoffmann (Le Petit Zachée surnommé Cinabre) que j’ai évoqué récemment : « En outre, Candida avait lu le Wilhelm Meister de Goethe, les poésies de Schiller, l’Anneau magique de Fouqué, et en avait oublié presque tout le contenu ». Je me permets d'insister sur : "en avait oublié presque tout le contenu". 

 

Qu’on se rassure, je ne m’appelle pas Candida et je ne suis pas la fille du très savant Mosch Terpin : il me reste quelques bribes de ma lecture. Qu'on se rassure au carré : je ne ponds pas ici un machin savant, genre frais émoulu de l'Université. Je m'en voudrais. Je veux juste faire part à qui en veut des impressions ressenties lors de la lecture par un lecteur de bonne foi.

 

Première remarque : Goethe pouvait, s’il l’avait voulu, faire tenir ses 1000 pages dans 200. Nul n’arrivera à me persuader du contraire. L’histoire aurait même pu tenir dans le format « nouvelle ». Qu’est-ce que ça raconte ? Wilhelm est un fils de bourgeois qui devrait se préparer au noble métier de gérant de l’entreprise paternelle, florissante au demeurant. Mais il s’est entiché de théâtre en général, et de la jeune actrice Marianne en particulier, avec laquelle il file le parfait amour.

 

Envoyé sur les routes pour récupérer quelques créances, le hasard place sur sa route une troupe d’acteurs, dont il va suivre quelque temps le destin médiocre et mesquin, comme producteur, puis comme auteur et même acteur. Après la troupe de Mélina, il entre chez Serlo, acteur chevronné, puis il se donne comme mission d’annoncer au seigneur Lothaire la mort d’Aurélie, son amante délaissée.

 

Au château de celui-ci il retrouve Jarno, qui lui avait fait une curieuse impression au château du comte. Il faut savoir que ce comte a versé dans le mysticisme après avoir vu Wilhelm déguisé, qu’il a pris pour un autre lui-même, et que la comtesse en pinçait secrètement pour le jeune homme. Il faut savoir que Wilhelm a gravé dans son cœur l’image d’une belle « Amazone », qui n’est autre que Nathalie, qui l’a fait soigner dans la forêt où la troupe a été attaquée par des bandits.

 

J’espère que vous suivez. Non ? Alors j’arrête. D'ailleurs moi aussi, j'ai du mal à suivre. J’arrête donc. Finalement, il y a pas mal de détails. Mais ces détails, tout le monde s'en fout, car ils ne sont là que pour espérer produire, sur le lecteur, je ne sais quels effets de réalité. Il y a donc beaucoup de détails. C’est un peu normal, vu le nombre de pages. 

 

Mais ces détails, comment dire ? Ce sont des péripéties qui se déroulent sans être vécues. Tiens, je crois qu’il y a du vrai dans la formule qui vient de me venir. Personne n'est doué de vie, dans ce livre. C'est un livre mort. C’est un livre qui, quelque bonne volonté qu’on y mette, vous reste totalement extérieur. Les personnages n’existent pas, ou si peu. Personne ne prend vie sous la plume de l'auteur.

 

Pour une raison assez claire : les actions que l’auteur leur prête n’agissent jamais sur le cours des événements ou sur les autres personnages. Leur peu d'existence personnelle tient aussi à leur absence de profondeur psychologique : Goethe se contente, pour les définir, d'un trait caractéristique, ce qui suffit à peine à en dessiner une silhouette qu'on pourrait mémoriser. Et ne parlons pas d'identification du lecteur !

 

Même la curieuse Philine, cette fille jolie et rendue complètement fofolle par son aspect primesautier, a bien du mal à exister. C’est un personnage théorique, dont le lecteur sent très vite qu’il est là pour figurer dans le casting. Avec les ectoplasmes de personnages qu’il invente, Goethe semble avoir procédé comme une équipe de télé-réalité préparant la prochaine série : un peu pour tous les goûts.

 

Les autres personnages féminins qui assaillent l’apprenti Wilhelm sont à l’avenant : Marianne l’amoureuse engrossée, Philine, la séductrice écervelée, Thérèse, qui se résoudrait bien au mariage, mais …, la comtesse, avec sa faiblesse coupable. Même que Aurélie, l'actrice, on ne sait pas bien, pour finir, pourquoi Wilhelm se fait un devoir d’aller engueuler Lothaire de l’avoir abandonnée et laissée mourir (de quoi, d'ailleurs ? On ne sait pas).

 

Et je vais vous dire : on s’en fout.

 

Voilà ce que je dis, moi.

 

 

jeudi, 11 avril 2013

POLITIQUES : TOUS POURRIS 1/3

 

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ON EST PEU DE CHOSE, MESSIEURS

 

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Vous vous rappelez cet appel : « Dieu, si tu existes, envoie-moi un signe ! ». C’était Raymond Devos. Un prodigieux, celui-là. Eh bien à mon tour, je lance un appel solennel :

 

« Hollande, si tu existes, envoie-nous un signe ! ».

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En fait, je devrais plutôt demander à Madame Politique, si elle existe, de nous envoyer un signe, parce que Hollande, en ce moment, a plutôt l’air d’un petit rat pris au piège. Madame Politique n’est pas mieux lotie, vous me direz. Existe-t-elle encore ? J’en doute fort.

 

Je les entends, tous les curés laïques et toutes les grandes consciences républicaines et démocratiques, dressés « contre le Front National » : « Il ne faut pas entonner le refrain du "tous pourris". Ça fait le lit de tous les populismes » (ah, ce pluriel à "populisme" !). Eh bien moi, je dis que, s’il est vrai que les individus qui composent le « personnel politique » ne sont pas tous corrompus, ils sont arrivés à leur poste grâce à un système de sélection des élites politiques qui est corrompu jusqu’au trognon.

 

Le personnel politique est (peut-être) individuellement honnête, mais pourri collectivement. C'est le système en soi qui est malhonnête. Et c'est parce que le système est malhonnête qu'il est tout à fait légitime de crier : « TOUS POURRIS ! ».

 

Regardez le tableau de la vie dite politique en France, depuis … depuis … depuis … non, je renonce à dater : encéphalogramme plat ou presque. Enfin, moi, je n’appelle pas ça « faire de la politique ». Non, qu’on appelle ça « soigner sa carrière », je veux bien, mais « politique », non monsieur. « Je fais carrière dans la politique », ça sonne tout de suite plus vrai. Et « carrière politique », c’est aussi un oxymore : une contradiction dans les termes.

 

On commence par conseiller municipal, on continue maire, on poursuit conseiller général ou régional, puis président du conseil général ou régional, pour atterrir un jour, couronnement des ambitions, sur les bancs de l’Assemblée Nationale ou du Sénat. Certains voient plus loin, mais c’est donné à quelques rares auxquels, s’ils sont passés par Sciences-Po Paris, HEC et l’ENA (la promotion se porte très près du "Voltaire" en ce moment), les plus grands espoirs sont permis. Sans oublier que les fils ont tendance à s'installer sur le siège tout chaud laissé par les pères.

 

Résultat de ce parcours ? On voit toujours les mêmes bonshommes. Le casting ne varie pas d’un iota d’une élection à l’autre. Quand il entre en maison de retraite, le Français aura vu les mêmes trombines depuis qu’il est né, ou presque. Et le plus fort, c’est qu’on trouve ça tout naturel.

 

Les journalistes s’extasient, comme un chœur d’imbéciles : « Député depuis quarante ans de la même circonscription, c’est extraordinaire ! Comment faites-vous ? ». Mais non, bande de crétins congénitaux : non seulement ce n’est pas naturel, mais ce n’est pas NORMAL. C’est même de ça qu’elle est morte, la vie politique en France : la durée des carrières politiques.

 

Même chose quand ils s’adressent à Gérard Collomb : « Maire de Lyon ! Président de la Communauté Urbaine ! Sénateur du Rhône ! C’est extraordinaire ! Comment faites-vous ? ». Au passage, allez comprendre pourquoi aucun de ces fieffés imbéciles n’abrège Communauté Urbaine de Lyon en C. U. L., on se demande pourquoi. Au total, avec ses trois fonctions, une rémunération plus que confortable. C'est aussi de ça que la politique est morte : la surface politique occupée indûment par Gérard Collomb (et il n'est pas le seul).

 

Il faut savoir qu’avant d’occuper ces places officielles et électives (j’oubliais maire du 9ème arrondissement, mais c’était avant), il avait assez nagé dans toutes les eaux du PS, même les plus usées (Pierre Mauroy, si je me souviens bien), pour se voir confier je ne sais plus quelle fondation. Ah ça, on pourra dire qu’il les a gravis, les échelons de la « carrière ». En a-t-il assez sué pour arriver là où il est (merdelion) ! C’est sûr qu’ « il en a voulu ». Moi qui l’ai connu à la fac (si, si), je peux témoigner qu’il « en voulait » déjà. Passons.

 

Le problème de la politique en France, vous voulez que je vous dise, il est là et pas ailleurs. Et c’est un problème de temps et d’espace. Plus exactement de durée et de surface. Et pour résoudre, un seul moyen : réduire, comprimer, restreindre, limiter, circonscrire, borner. Empêcher la tache d’huile de se répandre dans l’espace et dans le temps. Empêcher qu’un citoyen ait la possibilité de « faire carrière » dans la politique.

 

Réduire la durée. Réduire la surface. Si Hollande existe, comme il persiste à vouloir nous en persuader, s’il veut entrer dans le club très fermé des « grands présidents », il fera une seule, mais une grande, une immense chose : briser les reins à toute « carrière politique ». Autrement dit : casser la durée et l’espace ouverts aux citoyens avides de pouvoir, d’honneur et de ..., non rien.

 

Comment casser toute carrière politique ? En réduisant la durée d’un parcours politique à deux mandats, mettons dix ans. On n’arrivera pas à me convaincre que s’occuper des affaires d’une collectivité (locale, territoriale ou nationale) puisse constituer l’objectif de toute une vie.

 

Non, « politique », ce n’est ni une profession, ni un métier.

 

Voilà ce que je dis, moi.

 

 

mercredi, 10 avril 2013

LE CAS HUSAK

 

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CAS REMARQUABLE D'ANENCEPHALIE CHEZ UN SUJET FEMININ

 

***

Tout le monde a oublié le nom de GUSTAV HUSAK, ancien dignitaire du communisme tchécoslovaque. Heureusement que je suis là. C'était effectivement un cas : le bien nommé « Cas Husak » (ne pas confondre avec "cosaque"). D’abordHUSAK GUSTAV.jpg considéré comme un « modéré », il finit, après la fin du « printemps de Prague » et du pauvre Alexandre Dubcek, par s’aligner purement et simplement sur la rigidité intransigeante (et agonisante) de l’Union Soviétique. La poubelle de l’Histoire a refermé sur lui son couvercle magnanime.

 

Disons-le tout de suite : il n’est pas resté sans descendance. Le « Cas Husak » a proliféré après la chute du mur et la fin du communisme, deux événements qui ont offert sur un plateau, aux dignitaires méritants et ingénieux du système finissant, des moyens pour une réhabilitation fulgurante, en même temps que pour une promotion digne d’un coup d’Etat tribal en Afrique de l’Ouest. Sans parler du compte dans une banque des Îles Vierges britanniques (ou à Singapour, je ne sais plus).

 

Bon, j’arrête avec le gag épais (mais rappelons-nous celui de Gotlib : « Le gars GH' est formidable, et il fait rire tout le monde»).

GARS GH 3.jpg

Venons-en à Cahuzac. Vous avez noté que tout le PS, « Dans une ténébreuse et profonde unité » (sonnet des Correspondances, Ch. B.), a conspué le « mauvais socialiste », le « mouton noir », bref, l’exception exceptionnelle et unique :

 

« Comme un seul ils ont déclaré,

Sans vergogne,

Qu’on les avait déshonorés,

Déshonorés ».

 

Heureusement, Tonton Georges permet de faire face à toutes les situations. Merci, Tonton Georges.

 

Cahuzac est donc le seul pourri du Parti Socialiste. Le seul pourri ? On serait bien content de l’apprendre, si c’était vrai. Jean-Claude Guérini ? PS. Comment s’appelle-t-il, le trésorier de l’actuel président ? Augier, je crois. PS. Kucheida, qui passait au tribunal hier ? PS. Sylvie Andrieux à Marseille ? PS. Gérard Dalongeville, à Hénin-Beaumont ? PS. J’en oublie peut-être un certain nombre. Et même plusieurs. Pour ne pas dire quelques-uns.

 

Vous avez entendu le chœur des petits saints, dirigé par les vierges madones Caroline Fourest et Clémentine Autain, entonner le grand refrain du : « Crier "Tous pourris", c’est tout bénef pour le Front National ». D’autant plus que, c’est vrai, il est probable qu’il en reste, des gens honnêtes, dans le personnel politique. Oui, je me dis que ça doit pouvoir se trouver. Peut-être bien. Ce n’est pas complètement impossible.

 

Certains se souviendront cependant que, dès 1948, Gilbert Cesbron, dans Notre Prison est un royaume, mettait dans la bouche de ses lycéens impertinents cet appel : « On demande un député honnête ! » (ils jettent le trouble dans une réunion politique).

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Tiens, prenez Gérard Filoche, celui qui « pète un câble » chez Michel Field. Indigné, qu’il était, par Cahuzac ! Personnellement offensé. J’espère que vous avez été émus par ses sanglots en direct dans le micro et devant la caméra : un grand moment de vérité politique, vraiment ! Si ce n’est pas une preuve, ça ! Ah bon ? Ça non plus, vous n'y croyez pas ?

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Accessoirement, ce qui est rigolo, c’est que Pierre Moscovici a beau soutenir qu’il n’était au courant de rien, Laurent Fabius démentir qu’il détient un compte en Suisse, plus personne ne les croit. Et le « plus personne » a, somme toute, raison. Dans le peloton du Tour de France, les soupçons de dopage tombent aussi forcément sur « ceux qui marchent à l’eau claire » (il paraît qu'il y a encore des héroïques), et il n’y a pas de raison qu’il en soit autrement : ils n’avaient qu’à pas être honnêtes.

 

Ou plutôt : ils n'avaient qu'à pas être là. Comment voulez-vous que le public fasse la différence ?

 

Je connais quelqu’un qui, à la fin de la guerre, pressenti pour la Légion d’Honneur, mais qui, ayant appris qu’un magouilleur de première, un de ceux qui ont retourné leur veste juste avant la limite, allait la recevoir en même temps que lui, redressa la tête, regarda bien en face la personne qui en parlait, et lui lâcha en pleine figure : « Si celui-ci est décoré, il faudrait que je sois fou pour l'accepter, la décoration ! Ce n'est même pas la peine d'en parler ! ». Ce qu’on appelle le sens de l’honneur.

 

Mais pour un qui l'a, le sens de l'honneur, combien iraient la chercher à plat ventre, la Légion d'Honneur ? Ce n'est sans doute pas du même "honneur" qu'il s'agit. De toute façon, si les vrais hommes "d'honneur" sont "légion", où est passé l'honneur ?

 

N’importe quel professeur vous le dira : dans n’importe quelle classe, un seul salopard à la grande gueule bien pendue, s’il s’y prend bien, suffit pour rendre tout un groupe d'élèves infernal et odieux. A-t-on pour autant déjà vu une telle classe faire la police dans ses rangs et mettre le trublion à la raison ? Non : ils la ferment. En politique, c’est pareil : si le soupçon met tout le monde « dans le même sac de nœuds de vipères lubriques », tous les « innocents » en puissance n’avaient qu’à pas être là. Ou faire la police dans leurs rangs.

 

Dans un groupe, la lâcheté, l’aveuglement, la complaisance ou l’incompétence des individus majoritaires face au salopard, ne sauraient tenir lieu d’absolution. Et c’est même le contraire, puisque ce sont autant de formes avérées de leur complicité. Qu'ils le veuillent ou non, ils y sont, dans le sac. Quelqu’un peut-il me dire la différence à faire entre cette passivité, même ignorante, et l’Omerta mafieuse ?

 

Messieurs, je ne vois plus qu'un moyen de vous dédouaner : cessez d'être complices, PARLEZ !

 

La conclusion logique du raisonnement est la suivante :

 

« Faites le ménage, ou alors : du balai ! ».

 

Voilà ce que je dis, moi.

 

 

mardi, 09 avril 2013

ÊTRE UN OTAGE FRANçAIS

 

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CE QU'ON VOIT QUAND ON ENLEVE TOUT CE QUI N'EST PAS L'APPAREIL DIGESTIF

(la fonction digestive ne permet pas, hélas, de déterminer le sexe)

 

***

Puisque personne ne me demande mon avis sur la question, je vais le donner.

 

Oui, c’est vrai ça : que faire pour sauver la vie des otages français, que des méchants méchants détiennent abusivement et qui menacent de les tuer si … ?

 

Que faire ? Ma réponse sera brève, concise, laconique et, pour tout dire, compendieuse : RIEN. Pas un centime de rançon, pas un soupçon d’effort diplomatique, ce qui s’appelle RIEN. Un otage français doit être considéré a priori comme un individu perdu pour la nation.

 

Tiens, je lui donne une idée, à la nation. Avant même toute réflexion, rien que pour emmerder les auteurs de ces crimes, elle serait bien inspirée d’organiser, à chaque prise d’otage, des funérailles nationales solennelles pour les personnes injustement soustraites à l’affection des leurs.

 

On porterait aux Invalides, en grande cérémonie, autant de cercueils vides revêtus du drapeau national, avec l’inscription « Mort pour la France », attribution posthume de la Légion d’Honneur et pension à la veuve. Le président, détenteur de la fierté nationale, prononcerait un discours martial où il promettrait que le crime ne resterait pas impuni. Voilà qui serait digne et fort !

 

Je vous garantis que ça aurait une autre gueule que les voies tortueuses de diplomates ou de services secrets, et que les atermoiements des responsables politiques qui, pris entre le feu émotionnel et médiatique des affections familiales et le feu terroriste de bandits lancés en plein hold up, promettent maladroitement je ne sais combien de millions de dollars à verser sur un compte offshore.

 

La seule chose à faire, c’est de menacer les preneurs d’otages des pires représailles, au cas où il leur prendrait la fantaisie de faire subir le moindre mal à leurs captifs.

 

Ce n’est pas que la vie des personnes injustement séquestrées ne m'importe pas ou n’a aucune valeur : des individus, tout comme moi, des personnes qui n’ont pas moins de valeur, mais pas plus. Regardez la balance : dans un plateau, un être vivant menacé, dans l'autre, tout un pays. L'équation, elle est là.

 

Qui sont les preneurs d’otages ? Motif religieux, idéologique, philosophique ou autres, ce sont des bandits. Au nom d’Allah, au nom de la lutte armée, au nom de la cause, au nom de tout ce que vous voulez : ce sont des gangsters. Le plus souvent organisés en mafia, parfois en secte dominée par un gourou (Boko Aram au Nigéria).

 

La prise d’otage est un acte de guerre. Proclamer que, par principe, la vie des otages est sacrée, c’est se déclarer vaincu avant d’avoir combattu. C’est se coucher, s’humilier, se déclarer vaincu par qui ? Quelques fruits pourris de l’humanité.

 

La honte d’être Français me submerge, chaque fois qu’un otage est libéré contre rançon. Comment ? N’importe quelle fripouille peut faire plier ma nation, au simple prétexte qu’elle détient quelques individus en possédant la carte d’identité et le passeport ?

 

Qu’est-ce que c’est que cette « nation », qui en passe par les quatre volontés de quelques canailles, passe sous leurs fourches caudines, garnit leur compte en banque et améliore leur arsenal ?

 

Qui se déclare vaincu ? L’Etat français. Une collectivité nationale, une institution politique, une entité fondée sur le droit, une structure qui regroupe 65 millions de citoyens. Comment peut-on envisager une seconde d'hésiter entre les deux plateaux de la balance ?

 

Demandez-vous pourquoi il y a si peu de prises d’otages sur des citoyens britanniques : tout le monde sait que les gouvernants anglais ne négocient jamais avec les preneurs d'otages. Pourquoi le Français est-il une denrée recherchée ? C'est simple : le Français est une marchandise qui rapporte gros, pour la seule raison que le client est facile, et qu'il paie bien.

 

Et le client est d’autant plus facile que tout le monde s’y met : les proches, les associations montées pour la circonstance, les spécialistes des droits de l’homme.

 

Le bandit, dans sa grotte ou dans son palais, peut compter sur tous ces alliés involontaires, qui sont juste ses complices : ils sont dans la place, lancent des appels, collent des affiches, interpellent le pouvoir et l'opinion publique, rédigent et font signer des pétitions, manifestent, interviennent dans les médias, font ce qu'il faut pour que nul n'oublie les otages. Plus ils sont actifs et influents, meilleur c’est pour faire grimper les enchères.

 

C’est tout simplement insupportable.

 

Otage libéré est synonyme de défaite nationale.

 

On me dira : « Tu en parles à l’aise, blogueur insensible. Ça se voit que tu n’es pas dans cette situation ». Je sais. Et je ne saurais dire quels seraient mes sentiments au cas où. En attendant, et en souhaitant que cela n’arrive à personne, je campe sur ma position : « Messieurs les preneurs d’otages, vous n’aurez rien ! Mais comptez bien vos abattis ! Vous n’emporterez rien au paradis d’Allah ! ».

 

Françoise Claustre (Tchad, 1974), Jean-Paul Kaufmann (Liban, 1985), Ingrid Betancourt (Colombie, 2002), beaucoup d’autres ne me le pardonneraient pas. Je sais.

 

Voilà ce que je dis, moi.

 

 

mercredi, 13 mars 2013

DE LA COMPLEXITE AU SLOGAN

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BOB HUDDELSTON

 

***

 

« VINGT-HUIT POUR CENT ! » : RETOUR SUR LE 8 MARS.

 

Ainsi donc, il y a 28 % d'écart de salaire au détriment des femmes. Chiffre choc. Injustice criante. Situation scandaleuse, dénoncée à hauts cris le jour de la « Fête des droits des femmes », le 8 mars, depuis une trentaine (tiens, tiens, ça ne bouge donc pas ?) d’années. On pourrait s'interroger sur l'utilité et l'efficacité du métier de statisticien. La statistique, ici, semble ne servir à rien. Insupportable, intolérable. Les médias n’ont pourtant pas épargné leurs peines pour seriner ce refrain. Quasiment, en termes journalistiques, un « marronnier ». 

 

Simple question : à quel protocole scientifique ont eu recours les statisticiens pour aboutir à ce chiffre ahurissant de 28 %, que les médias ont repris sans jamais l'expliquer ? Un chiffre statistique, ça se construit. Et pour le construire, tous les statisticiens sérieux vous le diront, il faut respecter scrupuleusement un processus qui, globalement, s'appelle alors un "protocole". Exactement comme dans un laboratoire de chimie ou de biotechnologie. Alors de deux choses l’une.

 

Soit l’INSEE possède des informations assez précises pour déterminer, réparties par sexes, les rémunérations liées à des postes de niveau égal (« A travail égal, salaire égal », comme c’est la règle absolue, je le signale en passant, dans tout ce qui est « Service Public »). Quand on a une petite idée du maquis inextricable que les rémunérations constituent, on voit d’ici la difficulté, que dis-je, l’Everest que représente la simple collecte des données. L'improbabilité culmine à son maximum.

 

Soit, comme j’ai le mauvais esprit de le subodorer, des gens sûrement bien intentionnés sont allés chercher (où ça ?) la masse salariale globale distribuée aux travailleurs français, qu’ils ont divisée en deux parts réparties selon le sexe. Cela doit être plus facile à trouver, une "masse salariale".

 

Il suffit alors de diviser les deux sommes ainsi obtenues par le nombre, d’une part, de "travailleuses", et d’autre part, de "travailleurs"photographie,monstres,freaks,cirque,femme,société,france,insee,statistique,féminisme,tf1,propagande (ah ! Quand reviendras-tu, Arlette Laguiller ? « Dis, quand reviendras-tu ? Dis, au moins le sais-tu ? »). Ce n’est déjà pas si évident, et il y aurait déjà de quoi s’interroger sur une telle collecte de données, sans doute plus aisée à réaliser que la précédente. Mais je ne suis pas, Dieu soit loué, statisticien.

 

En admettant comme véridique ce différentiel de 28 %, j’arrive à la conclusion que les femmes touchent globalement une part de la masse salariale globale inférieure de 28 % à la part distribuée aux hommes. Jusque-là, ça va.

 

Mais il me vient à l’esprit que les tâches effectuées par les personnels féminins et masculins des entreprises ne sont peut-être pas les mêmes, alors que la rémunération est fonction du niveau de responsabilité exigé par le poste.

 

Le problème change alors d’aspect. Impossible alors de crier à l’injustice, à l’inégalité intolérable de traitement réservé aux hommes et aux femmes. C’est en effet plus compliqué que ça, et l’on sait que dès qu’il s’agit de passer au 20 heures de TF1, comme il croit s’adresser à des bœufs, le présentateur déteste la complication, et a tendance à découper l’information à la hache pour ne pas effaroucher l’audience.

 

Parce que ce serait trop compliqué d’expliquer que les femmes prennent souvent un temps partiel faute de mieux (caissière de supermarché à 20 heures par semaine) ; qu’elles s’orientent souvent vers des carrières professionnelles considérées comme « subalternes », et pour cette raison moins bien rémunérées ; qu'elles tiennent souvent à concilier travail et vie de famille ; etc. 

 

Bref, qu’il s’agit moins d’un scandale inégalitaire ou d'une discrimination à l’arrivée dans l’entreprise, que d’un problème, au départ, d’organisation de la société : choix de filière professionnelle, structure familiale, choix d’un équilibre de vie, partage des tâches, etc.

 

Toutes sortes de facteurs expliquent donc ce différentiel de 28 % global, calculé à partir de deux chiffres de masse salariale : les femmes occupent davantage de postes "subalternes", d'emplois à temps partiel, etc. C'est donc un simple mensonge de présenter les choses comme si la femme, à poste égal, était payée 28 % de moins que si c'était un homme qui le détenait. Un mensonge, une malversation, une imposture. Une imposture médiatique de plus, dira-t-on.

 

Cet état de fait constitue-t-il une injustice ? Ce n’est ni sûr ni évident. Un problème politique, peut-être et même sans doute. Sur lequel on peut proposer et confronter un certain nombre d’analyses (je vois bien un match Pierre Bourdieu contre Raymond Boudon, par exemple). Mais d’un problème complexe, une fois de plus, le laminoir médiatique a fait un pur et simple SLOGAN. Exactement comme dans la publicité. Marrant, non ?

 

Une fois de plus, en ce 8 mars, journaux, radios et télés ont joué les rouleaux-compresseurs, les marteaux-pilons pour que les dizaines de millions de « cerveaux disponibles » impriment jusque dans le dernier-né de leurs neurones ce slogan : 28 %, 28 %, 28 % ! Comme les boggies des wagons sur les rails d'autrefois : 28 %, 28 %, 28 %. C'est un rythme à prendre. Le montant de l’injustice faite aux femmes, comme on voudrait en convaincre la population.

 

Mais qui dénoncera cette fable médiatique ? "Storytelling", vous avez dit ?

 

Voilà ce que je dis, moi.

 

 

jeudi, 17 janvier 2013

POUR UNE POIGNEE DE SABLE EN FEU

Pensée du jour :

« Le malheur est un marche-pied [sic] pour le génie, une piscine pour le chrétien, un trésor pour l’homme habile, pour les faibles un abîme ».

 

HONORÉ DE BALZAC
 

Alors, fallait-y y aller, fallait-y pas y aller ? Où ça ? Comment ? De quoi ? Ben les Rafales, les bombes, la France à l’assaut de ses anciennes colonies ! La guerre, quoi ! Fallait-il, une fois de plus, endosser l'uniforme du justicier et du redresseur de torts, du défenseur de la veuve et de l'orphelin ? S'occuper des affaires des autres ? Ils ont appelé l'opération du nom d'un charmant félin, le SERVAL, qui, paraît-il et dans les temps anciens, fut un compagnon de chasse de l'homme (je crois ce qu'on me dit, moi, je fais confiance, vous pouvez pas savoir). 

Alors, fallait-il que le président de la France, FRANÇOIS HOLLANDE, décidât que la France entrât en guerre ? Personnellement, j’ai tendance à penser qu'oui (l'apostrophe, c'est juste pour éliminer l'hiatus - et non pas "le" hiatus, comme disent les étourdis et les ignorants). Pour la raison simple que, certes, ce sont les affaires des autres, mais pas complètement quand même, à cause, par exemple, de l'importance de la communauté malienne en France. Eh oui, l'industrie a eu besoin des bras maliens. Faut assumer.

 

Si, face à la pétaudière géopolitique que constitue la Syrie, rien ne semble bouger, en revanche, face à la main de fer que quelques centaines de gangsters, de sadiques et, pour tout dire, de FASCISTES ont abattue sur les populations du nord du Mali, il fallait donc agir sans attendre qu’ils se fussent implantés à demeure et qu’ils eussent étendu la surface de leur conquête à l'ensemble du Mali. Et plus, si affinités, comme on dit. Pour la France, c'est d'une certaine manière de l'autodéfense. 

 

Que ces fascistes soient aussi musulmans n’y change rien, et en plus il est permis d’en douter fortement : des salafistes tunisiens n’ont-ils pas fait brûler le sanctuaire soufi (la tendance mystique et pacifique de l’Islam, s'il en est) de Sidi Bou Saïd, avec les Corans qui y étaient. Des musulmans qui brûlent le Coran ? Voilà un scoop, coco.  Fascistes j’ai dit, fascistes je maintiens. Et des bandits par-dessus le marché, dont le projet est, à travers le Sahara, la construction d'une autoroute de la drogue à destination de l'Europe. Coupeurs de mains pour compléter la panoplie et soigner l'image médiatique. 

 

Parmi eux figurent d’ailleurs peut-être des Toubous tchadiens, les anciens mercenaires sur lesquels KHADAFI faisait pleuvoir l'or de son pétrole. Il y avait en tout cas beaucoup de Touaregs qui, une fois le mécène tué atrocement (= lynché sans procès),  sont rentrés chez eux (façon de parler, ils sont nomades, nous dit-on), en emportant tout un tas de lance-missiles perfectionnés qu'ils avaient appris à manœuvrer. 

 

Remarquez, KHADAFI est mort, mais l'argent continue à affluer dans les caisses des salafistes pour qui l'Arabie saoudite est le paradis sur terre, mais qui, au passage, ne peuvent pas encadrer les Frères musulmans. Et on nous raconte que l'Arabie Saoudite et le Qatar sont nos alliés ?

 

En tout cas, on leur achète tellement de pétrole qu'ils peuvent tout se permettre : acheter le PSG ou des hôtels particuliers du XVIIIè à Paris, et donner aux salafistes et autres djihadistes assez d'argent pour former des armées anti-occidentales. Heureusement, tous sont des sunnites, et s'entendent pour vouloir exterminer ces salopards de chiites et leurs cousins alaouites. On prend les paris sur ce qui va se passer entre eux, quand ils auront eu la peau d'ASSAD, en Syrie ?

Les Toubous du Tchad et les Touaregs de nulle part et de partout croient-ils seulement en quelque chose d’autre que l’argent ? C'est quoi au juste, ce fantasme des « droits des peuples à disposer d'eux-mêmes », au moment où la cocaïne des cartels de Colombie et d'ailleurs nous arrive à travers le Sahara ? Au nom du « droit à l'autodétermination », sans doute ?

 

Je pose juste la question. Reste que couper des mains et brûler des sanctuaires est le fait d'une petite bande de "tableraseurs du passé", qui me semblent autrement dangereux que les "sans-culotte" de 1793, qui n'avaient au moins dans le collimateur que tout ce qui déparait la sacro-sainte égalité. Les bandits fascistes du Sahel, eux, sèment leur bon plaisir et leur mafia partout où ils font le malheur des autres en débarquant dans leur existence. Et tout ça, grâce à la guerre en Libye.
 

Les LE PEN, à côté, c’est du pipi de chat et de la roupie de sansonnet, et quand on compare, ça fait même étrange de les entendre traiter de « fachos ». Ils n’ont pas encore coupé de mains, eux. LE PEN en Algérie ? Certes, mais il n’a rien fait d’autre que ce qu’ont fait les AUSSARESSE, BIGEARD, MASSU et compagnie. Je le dis d’autant plus volontiers que je ne suis pas près de voter pour MARINE. Il ne faut pas confondre fascisme et "créneau porteur".  

 

Bref. Personnellement, je suis aussi assez favorable à l’entreprise au Mali, parce que j’ai entendu un général déclarer sérieusement que l’opération n’était que la 2ème phase de ce qui avait été commencé en Lybie par un certain … NICOLAS SARKOZY. Car ce qui est prouvé, c’est que la catastrophe malienne découle directement de la décision va-t-en-guerre de NICOLAS SARKOZY, inspiré par son « Père Joseph » nommé BERNARD-HENRI LÉVY, de tuer le Colonel KHADAFI.

Les charmants garçons d'AQMI (ex-GSPC), du MUJAO et d'Ansar Eddine ne sont que des ingrats : ils devraient savoir gré à NICOLAS SARKOZY de leur avoir ouvert en grand les portes des arsenaux pléthoriques et superbement garnis de MUHAMMAR KHADAFI.
 

Digne successeur de son prédécesseur, FRANÇOIS HOLLANDE prend bien soin de placer ses pieds dans les traces laissées par ceux du gars à qui il sortait, en plein débat préélectoral : « Moi, président de la République, … Moi, président … ». Mais pour être honnête, il faut dire que HOLLANDE a été obligé de prendre sa décision d’intervenir à cause de la situation créée par l’irréflexion congénitale propre à SARKO, et par son besoin souverain de faire du spectaculaire (dictature du 20 heures de TF1).
 

« Le changement c’est maintenant », qu’il disait. Remarquez, SARKOZY nous avait déjà fait le coup de la « rupture » en 2007. Et en fait de « rompre », il avait surtout « cassé » (l’hôpital, l’école, la justice, la police, …). Ah c’est sûr, HOLLANDE prend bien soin de ne rien casser. Moi dans mon coin, j’avais déjà pensé qu’il ne « cassait rien » (comme on dit vulgairement), HOLLANDE. Et pourtant si : il a envoyé l’armée « casser du nègre et du bougnoule », comme on disait joliment, du temps de la « coloniale ».
 

Surtout, il prend soin de ne rien casser de ce qu’a fait le prédécesseur, NICOLAS SARKOZY. C’est sûr qu’il veille à ce que les ruines laissées par lui restent en l’état, aussi propres et nettes qu’il les a trouvées en entrant dans les « lieux » (si vous voyez ce que je veux dire). Rien n'est plus seyant que de belles ruines bien entretenues. Voyez Pompéi.
 

Reste que les frontières dessinées par les colonisateurs de l’Afrique avant leur départ relèvent la plupart du temps de la plus haute fantaisie. Cela vient en grande partie, ai-je cru comprendre, du fait que ce sont des officiers de l’infanterie terrestre qui ont manié le crayon. Alors que les frontières tracées sur les cartes, mettons, en Asie du Sud-Est, l’ont été par des officiers de marine, et que sur le plan ethnique, en gros, ces frontières ont du sens (idée de l'immense géographe YVES LACOSTE). Pas celles des pays du Sahara.

Le marin, il a un peu étudié le terrain, il a vu les populations dont il a fumé l’opium, il agit avec un certain tact et une certaine subtilité. Le biffin, lui, il carbure à l'alcool, il ne se tracasse pas, il prend une grande règle et c’est parti pour tracer de beaux traits bien rectilignes. Ça y est, vous avez un Etat. Ben non, ce n’est pas comme ça que ça se passe. Un Etat, avec tous ses attributs, pour que ça ait une cohérence, il faut procéder autrement. Les seuls traits qui aient un peu de sens, là, sont ceux qui suivent le tracé des fleuves. Et encore : quels fleuves ?
 

A cet égard, de la Mauritanie au Soudan (c'est-à-dire de l’Atlantique à la Mer Rouge), en passant par le Mali, le Niger et le Tchad, ainsi que par le sud de l’Algérie, de la Lybie et de l’Egypte, l’arbitraire des tracés relèverait du registre le plus comique si, dans la réalité, ceux-ci n’étaient pas de pures fictions. Je crois rêver quand j’entends un journaliste déclarer doctement que « l’Algérie va fermer ses frontières ». Il sait ce que c'est, une frontière de 1400 kilomètres ? Dans le désert ? C’est ce qui s’appelle avoir le sens des réalités. Oui : des réalités virtuelles. Voilà ce que c'est quand on joue trop à la console.
 

Voilà ce que je dis, moi.

mardi, 15 janvier 2013

ELOGE D'HENRI BERGSON 1

Pensée du jour :

« La brute se couvre, le riche ou le sot se pare, l’homme élégant s’habille », Traité de la vie élégante. 

HONORÉ DE BALZAC

 

 

Ce n'est pas pour me vanter, mais je viens d’achever la lecture des œuvres d’HENRI BERGSON. Drôle d’idée, non ? Remarquez, on me dira que la tâche est loin d’être insurmontable. D’abord parce que ces « œuvres » ne sont pas si nombreuses que ça. C’est tout à fait vrai. Quatre livres, en tout et pour tout, ça reste à hauteur d’homme. Je ne parle pas des deux recueils d’articles, du petit bouquin intitulé Le Rire, des Ecrits et paroles, et de divers papiers plus récemment publiés.

 

Je me suis limité aux quatre piliers du temple bergsonien : Essai sur les données immédiates de la conscience (1889), Matière et mémoire (1896), L’Evolution créatrice (1907), Les Deux sources de la morale et de la religion (1932). Un peu moins de mille pages. J'avais acheté (45 francs, si je me souviens bien) le volume chez le libraire du péristyle de l'opéra quand j'étais en classe de première. Oui, il ne faut jamais désespérer.

 

Oui, ça n’a l’air de rien, je sais. Encore faut-il s’y mettre, et puis s’y cramponner. Les trois premiers livres (augmentés de toutes les activités annexes) suffisent, en 1927, à lui faire attribuer le prix Nobel, même si c’est celui de littérature (révélateur, d'un certain point de vue).

 

Résultat des courses ? D’abord une impression curieuse : BERGSON écrit dans un français absolument parfait (en plus, absolument accessible et dépourvu de jargon) une philosophie qui exige une attention soutenue, pour ne pas dire un important effort de contention. N’a-t-il pas déclaré un jour : « Il faut avoir poussé jusqu’au bout la décomposition de ce qu’on a dans l’esprit, pour arriver à s’exprimer en termes simples », c’est-à-dire, comme PASCAL, DESCARTES ou ROUSSEAU, dans « la langue de toute le monde ». Voilà un philosophe qu'il est bon !

 

Voyez plutôt les dernières lignes de son dernier grand livre (1932) : « L’humanité gémit, à demi écrasée sous le poids des progrès qu’elle a faits. Elle ne sait pas assez que son avenir dépend d’elle. A elle de voir si elle veut continuer à vivre. A elle de se demander ensuite si elle veut vivre seulement, ou fournir en outre l’effort nécessaire pour que s’accomplisse, jusque sur notre planète réfractaire, la fonction essentielle de l’univers, qui est une machine à faire des dieux ». Prémonitoire ou carrément utopique ?

 

Il a eu le temps d’écrire, juste avant, cette phrase merveilleuse, au sujet du « monde inconnu » qu’il appelle de ses vœux : « Le plaisir serait éclipsé par la joie ». Considérons cela comme le point d’orgue de l’œuvre du philosophe. Mort en 1941, il a eu le temps de voir venir l’horreur sur ses tout vieux jours. Pas celle de la bombe atomique. C’est déjà ça.

 

Je ne sais pas vous, mais moi, ça m’épastrouille, ces phrases. Cette force. Pour clore son œuvre sur de pareilles considérations, il faut être soit devenu sénile (en 1932, il a 73 ans), soit resté complètement culotté, tout comme un jeune con. Pour quelqu’un qui prend ça direct en face, ça peut sembler du n’importe quoi.

 

Pour quelqu’un qui referme le bouquin là-dessus, ça fait un effet incroyable, même si, la nuit et dans le brouillard, ça vous a un arrière-goût du fossile EDGAR MORIN, vous savez, le boursoufleur d’idées générales, le gonfleur de baudruches conceptuelles globalisantes et creuses.

 

Certains riront de mon pléonasme, toute globalisation abusive étant forcément creuse : « On ne saurait remplir du tout avec du rien » (je cite de mémoire et en substance). Quand je conduisais l’attelage de bœufs du père PIC, ce qu’il me disait là, c’était l’évidence. Et ça l’est restée. Il reste qu’EDGAR MORIN aura mouliné beaucoup de vent. Et « gonflé » beaucoup d’auditeurs. J’espère. Peut-être à tort.

 

BERGSON, contrairement à MORIN, ne dit jamais qu’il est en train de dire le sens du monde. Certes, dans son dernier livre, il se laisse aller à une exaltation, à un optimisme au sujet de l’avenir humain. Mais d’après ce que j’en ai compris, HENRI BERGSON ne brasse jamais du vent. Mais c'est un philosophe, lui. C’est peut-être pour ça qu’il ne passe jamais à la télé.

 

Ah, on me dit qu’il est mort en 1941. Soit. D’ailleurs, il aurait peut-être aimé les plateaux de TF1 : les « belles dames » à la mode se bousculaient à ses cours au Collège de France, et ce ne sont pas les dignités et responsabilités internationales qui l’ont effarouché ou fait fuir. Il avait une « cause » à défendre : ne fait-il pas l’éloge de la Société des Nations  (SDN, ancêtre de l’ONU) à la fin des Deux Sources … ?

 

Je crains qu’HENRI BERGSON, en effet, n’ait appartenu au camp des increvables optimistes.

 

Voilà ce que je dis, moi.

dimanche, 13 janvier 2013

VERS L'ANDROGYNIE TRIOMPHANTE !

Pensée du jour :

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GUERRIER CHEYENNE, par EDWARD S. CURTIS

« Avant de revenir à la littérature, aux pièces, aux films dont l’homme a si inextricablement encombré le mois de janvier qu’une chatte n’y retrouverait pas ses petits, il sied peut-être de le considérer encore un peu à l’état pur, tel qu’il sortit de la main de Dieu. L’homme le voit venir avec tant de joie qu’il tombe pour l’accueillir dans mille extravagances. Il se répand en gestes arbitraires. Roseau pensant, il se conduit au premier de l’an comme un roseau qui ne penserait pas ».

 

ALEXANDRE VIALATTE

 

Résumé : les homosexuels vont pouvoir se marier. La messe est donc dite. Je finissais sur diverses considérations touchant la bague au doigt et sur l'histoire, racontée par RABELAIS, puis reprise par LA FONTAINE, de Hans Carvel, qui n'a d'autre solution, pour s'assurer de la fidélité de sa femme, que de faire du sexe de celle-ci un anneau permanent. Le Ciel en soit loué, nous ne vivons plus dans l'ère préhistorique de l'hétérosexualité monopolistique et triomphante.

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OÙ SE PORTE LA MAIN DE HANS CARVEL, POUSSEE PAR LE DIABLE ?

Car ces temps obscurantistes seront très bientôt balayés. Pour le plus grand bénéfice de la société, nous dit-on. « La France est rance, la France est en retard », nous serine la propagande homosexuelle à longueur de médias, enjoignant à l’ensemble de la population, qui n’en peut mais, d’enfourcher ce nouveau dada de la modernité. « Regardez, même la très catholique Espagne s’y est mise », entend-on.

 

 

Hier matin, dans l'émission Répliques, d'ALAIN FINKIELKRAUT, il faut avoir entendu le ton méprisant d'évidence péremptoire de madame IRÈNE THÉRY, qui ne cessait de couper la parole à ses deux interlocuteurs, sur le mode : « Mais voyons, vous n'y êtes pas, a-t-on idée ? » sans doute du haut de l'autorité de la science qu'elle professe (la sociologie, si j'ai bien compris).

 

 

C’est donc l’ÉGALITÉ républicaine qui se trouve aujourd’hui convoquée devant le tribunal parlementaire. Passons sur la nouvelle confiscation de valeur que constitue cet abus de langage. Passons sur le fait que les personnes concernées représentent une minorité de la « communauté » homosexuelle (puisque communauté il y a, paraît-il). Je connais un certain nombre d'homos à qui la simple idée de "se marier" apparaît tout à fait farfelue, pour ne pas dire ridicule.

 

 

Passons aussi sur l'incroyable chamboulement symbolique qu’impose (il n’y a pas d’autre mot) cette infime minorité à la totalité d’une population de 64 millions d’individus. Si c'est une loi de clientèle qui doit être votée, pourquoi ne le dit-on pas ? Car ce qui est sûr, ici, c'est que c'est une offre légale générale qui se propose de satisfaire une demande sociétale particulière. C'est bien l'ordre des choses symboliques pour tous qui change, au bénéfice de quelques-uns. Et c'est aux Etats-Unis que nous devons l'importation en France de l'idée de loi minoritaire, instaurant ainsi une sorte de privilège réservé.

 

 

 

Et la volonté générale s'incline devant le désir particulier. La nouvelle gagne à être connue : le Parlement est désormais un supermarché où les lobbies peuvent venir faire leurs emplettes. Pour y faire voter ce que les juristes appellent des « lois spécifiques », peut-être ? Des lois « ad hoc » ? Remarquez, je me suis laissé dire que c'est à peu près ainsi que fonctionne la machine administrative de la Communauté Européenne, où les lobbies du chimique, de l'agroalimentaire, du biotechnologique se bousculent entre les rayons avec leurs chariots.

 

 

Attardons-nous seulement sur l’idée que le mariage homosexuel constitue une avancée, un PROGRÈS. Il me semble que le simple fait de le présenter ainsi éclaire la scène d’un jour particulier. Car il repose sur l’idée implicite que l’homosexualité, dès qu'elle est traitée à égalité avec l’hétérosexualité, acquiert la même valeur, la même dignité que celle-ci, ce qui reste à démontrer.

 

 

Que les deux sexes soient égaux en droits et en dignité, comment ne pas en être d'accord ? Mais cela autorise-t-il à décréter les différentes sexualités (ou pratiques sexuelles) elles-mêmes égales en droits et en dignité ? Qui, s'il est de bonne foi, ne reconnaîtrait pas ici un abus de langage, un coup de force sémantique, bref, un MENSONGE ?

 

 

 

Dit autrement : la sexualité de la personne érigée en marqueur incontestable de sa dignité. L'identité de la personne se définirait par sa sexualité ? Je vois là quelque chose d'un peu hallucinant tout de même. Assez obscène, même. C'est peut-être inactuel, voire toute à fait virtuel, mais je vivais sur l'idée (toute archaïque peut-être) que la façon dont je prends mon pied ne regarde que moi.

 

 

 

Formulé autrement, je dirais que la lessive « homo » exige d'être placée juste à côté de la lessive « hétéro », dans la vitrine du magasin et sur le rayon du supermarché. « Quoi ! Tu connais pas le nouvel homo ! », aurait glapi COLUCHE. Les deux lessives sont affichées au même prix. Et ça ne vous semble pas louche ?

 

 

Soit dit en passant, une pléiade d'autres sexualités, d'autres orientations et pratiques sexuelles attendent à la porte de la loi une reconnaissance pleine et entière. Je ne vais pas énumérer : où finit le goût personnel ? Où commence la perversion ? Les lobbies n'ont pas fini de faire la queue aux caisses du supermarché parlementaire. 

 

 

Tout ça parce que le « client » est roi et qu’il doit avoir le choix. Dès l’enfance (je pense au projet de diffusion, sous couvert d'éducation à la tolérance, d’un film sur ce thème dans les écoles primaires), l’individu doit pouvoir se dire qu’il a le choix entre deux voies égales, et que c’est à lui de décider.

 

 

Alors qu’il faudrait savoir : l’homosexualité, qu’est-ce que c’est ? Résulte-t-elle d’un choix ? Est-elle la résultante d’une éducation ? D'une structure psychologique ? Une anomalie ? Une déviation ? Un destin ? Une fatalité ? Est-ce qu’on est (ou naît) homosexuel ? Est-ce qu'on le devient ? Est-ce qu’on le décide ? Il faudrait savoir. Des partisans du mariage gay pensent qu'on est homo.

 

 

Et je n'ouvre pas un nouveau front du côté des psys, parce que ça ferait beaucoup trop long. Certains (CHRISTOPHER LASCH, peut-être, mais il n'était pas psy, mais il faut impérativement avoir lu son livre La Culture du narcissisme) diraient sans doute que la loi sur le mariage homosexuel constitue l'irruption du narcissisme au coeur de nos institutions. Alors ?

 

 

Alors je crois que c’est exactement dans le fait de présenter l’homosexualité comme découlant d’un choix que se situe la PROPAGANDE. Autrement dit le MENSONGE. Il faut dire que le lobby (le "réseau", si vous préférez) fait le forcing depuis des lustres. Un forcing insidieux, peut-être, mais qui touche au but. Mon ami R. voit ici l'action des francs-maçons contre ce qu'il reste chez nous de chrétienté. Peut-être. Ce qui est sûr, c'est que la loi instaurant le mariage homo sera une loi votée sous influence.

 

 

 

L'entreprise qui trouve son aboutissement légal aujourd'hui vise, sous prétexte de déculpabiliser les franges marginales (ben oui, quoi, qu'on le veuille ou non) de la population qui se sentent attirées par le même sexe (ce qu'il ne me viendrait pas à l'esprit de vouloir interdire, évidemment, ni même contester), à installer en tête de gondole, à égalité de sens, de droit et de dignité, la lessive « homo » juste à côté de la lessive « hétéro » sur les rayons du supermarché qu'est devenue l'existence dans la société de consommation. Comme une alternative, quoi. Elle est là, la confiscation de l'idée d'égalité républicaine.

 

 

Et au bout du bout du raisonnement, qu’est-ce qu’on trouve ? L’idée que l’homosexualité constitue un progrès décisif par rapport à l’hétérosexualité. Examinez l’évolution de la question depuis les années 1970, vous y trouverez la recette pour qu’un dogme particulier finisse pas s’instaurer en vérité universelle, comme une avancée vers des lendemains qui chantent.

 

 

 

Le processus ne se restreint pas à la France. De même que le député doit transposer en droit français les directives européennes, de même, aujourd'hui, il se soumet à telle ou telle directive mondiale. Il y avait autrefois (paraît-il) une vingtaine de boîtes gay à San Francisco, elles sont (paraît-il) plus de 20.000 aujourd'hui. Qui fut premier, l'oeuf ou la poule ? L'offre ou la demande ? Curieuse évolution du sens de l'expression « société de consommation ». Le mariage homo marque le triomphe de l'idée de consommation comme seule boussole de l'existence humaine.

 

 

S’il en est ainsi, il est temps d’abolir les frontières entre les sexes. L'affaire suit son cours. Des différences faisons table rase, aurait dit EUGENE POTTIER, auteur de L’Internationale. Applaudissons à l’homosexualisation du monde ! Vive le « genre », aussi varié, divers et bigarré qu’il soit ! Longue vie à l’androgynie qui s’annonce à grands sons de trompette, comme avenir de l’humanité enfin rénovée ! L’horizon se dégage ! Pas trop tôt ! On en avait soupé, de la différence des sexes !

 

 

 

Ce qui change, dans l'histoire ? Oh, pas grand-chose. Juste ce qu'on appelait, dans des temps désomais révolus, obsolètes et archéologiques, le SENS DE LA VIE. Pardonnez ma ringardise, mon passéisme et mes gros sabots.

 

 

Voilà ce que je dis, moi.

 

 

samedi, 12 janvier 2013

VIVE L'ANDROGYNIE UNIVERSELLE !

Pensée du jour :

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CAVALIERS CHEYENNE, par EDWARD S. CURTIS

 

« Endeuillé par l’anniversaire de la mort du bon roi Dagobert, qui ne savait pas mettre sa culotte (c’était le début de la civilisation, l’homme hésitait encore devant ce vêtement nouveau), le mois de janvier vient de s’écouler, dramatisé par le passage du loup et par les exigences fiscales. Le mois de janvier rappelle à l’homme combien le progrès est chose ancienne ».

 

ALEXANDRE VIALATTE

 

Justement, le progrès, on va en parler. Car c’est plié : le mariage homosexuel – habilement maquillé en « mariage pour tous » (ce qui ne veut pas dire que tout le monde devra obligatoirement se marier sous peine d’amende, ouf) – sera inscrit dans le Code Civil. La majorité « socialiste » (je pouffe !) votera pour. Je ne vois pas ce qui pourrait empêcher la chose. La manifestation de dimanche 13 n’y changera strictement rien.

 

 

Les résistances au projet de loi sont reléguées au rang de vieilleries, mises au grenier, mises au compte d’un passéisme ringard, d’un conservatisme vieillot, d’un immobilisme paléontologique. Bref, à jeter d’urgence aux poubelles de l’Histoire. Le slogan frénétique de tout ce qui est « moderne » est, depuis déjà quelque temps : « BOUGEZ ! ». C’était déjà ce que célébrait (à sa façon) un « esprit libre » comme PHILIPPE MURAY.

 

 

Je ne sais plus quel conseiller de HOLLANDE déclare qu'il ne faut pas confondre "république stable" et "république immobile". Et j'ai entendu CHANTAL JOUANNO (du parti de BORLOO et favorable au mariage) déclarer qu'elle ne voudrait en aucun cas pouvoir être taxée de "ringardise". C'est le terme employé. Ce sont autant d'aveux de capitulation devant le nouveau "politiquement correct". Eh oui, que faire devant L'AIR DU TEMPS ? Devant ce que les médias (poussés par derrière par des lobbies influents) s'efforcent de faire apparaître comme la nouvelle idéologie dominante ?

 

 

J’ai déjà évoqué la parenté entre le débat actuel et la tentative avortée de FRANÇOIS MITTERRAND et ALAIN SAVARY de priver l’enseignement privé de tout apport d’argent public. C’était en 1984. Eh oui, bientôt 30 ans. Un million de catholiques dans les rues pour défendre la « liberté », qu’ils disaient. C’était déjà un bel exemple de CONFISCATION d’une de nos trois valeurs républicaines. Un joli tour de passe-passe. Disons aussi un joli montage de PROPAGANDE (cf. EDWARD BERNAYS). Une propagande abondamment relayée par toutes sortes d'"autorités" intellectuelles (sociologues, philosophes, etc.).

 

 

Le même tour de passe-passe est en train de se produire. Cette fois, c’est la deuxième de nos valeurs républicaines qui s’y colle. C’est au nom de l’ « ÉGALITÉ » qu’on va instaurer pour les homosexuels le droit de venir devant monsieur le maire et de se passer légalement la bague au doigt.

 

 

Remarquez, je dis ça, mais l’argot célèbre depuis longtemps ce qu’il appelle la « bagouze » : « A première vue, si j’étais un peu plus marle, un peu plus expérimenté de l’existence, je l’aurais flairé craquousette de la bagouse, chochotte probable ». C’est de l’ALPHONSE BOUDARD dans le texte. Les homosexuels mâles n’ont en effet pas attendu la loi pour se la passer, la bagouse.

 

 

EPHEMERO 1 CLOEON DIPTERUM.jpgBon, d’accord, ce n’est pas au doigt qu'ils se la passent, « bagouse » voulant dire « anus » (à ce titre, l'anus est, avec la bouche, le seul orifice "transgenre", car seul l'insecte appelé "éphémère" est dépourvu de bouche, d'anus et de tout ce qu'il y a entre les deux, ce qui amoindrit tant soit peu ses perspectives d'orgasme).

 

 

Mais RABELAIS déjà parlait de l’ « anneau d'Hans Carvel». L’anneau magique (entrevu en rêve) servait à Hans Carvel à s’assurer que nul autre que lui ne puisse visiter l’orifice féminin de sa jeune et ardente épouse. Et s’éveillant au matin, il se rendait compte qu'il avait dormi en glissant un doigt dans le dit orifice. Mais bon, Hans Carvel vivait aux temps antédiluviens de l’hétérosexualité régnante. Intolérable aujourd'hui. Inacceptable. Inenvisageable. 

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« Je te donne cestuy anneau [c'est le diable qui parle]; tant que tu l'auras au doigt, ta femme ne sera d'autrui charnellement connue sans ton su et consentement. 

 

Le diable disparut. Hans Carvel, tout joyeux, s'éveilla et trouva qu'il avait le doigt au "comment a nom ?" de sa femme ». La périphrase interrogative entre guillemets se déchiffre aisément en prenant juste la première et les deux dernières lettres. C'est beau, la littérature.

 

 

Voilà ce que je dis, moi.

 

 

vendredi, 11 janvier 2013

"REPUBLIQUE IRREPROCHABLE", VOUS DITES ?

Pensée du jour :

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SIOUX OGLALA, par EDWARD S. CURTIS

 

« Les enfants n'avaient autrefois que des souvenirs mérovingiens ».

 

ALEXANDRE VIALATTE

 

 

« République irréprochable », vous dites ? « Moi, président de la République, je n’aurai pas la prétention de nommer les présidents des chaînes de télévision publiques, je laisserai ça à des instances indépendantes ». J’ai bien entendu ? Vous vous souvenez, j’espère. Alors là je dis bravo tant que vous voulez. C’est sûr, j’applaudis le candidat qui a le courage de proclamer la pureté de ses intentions. En rupture avec les manières du président sortant.

 

 

Oui, j’applaudis à deux mains (j’ai essayé avec une seule, mais ça marche moins bien) cette déclaration du candidat FRANÇOIS HOLLANDE, face à un NICOLAS SARKOZY légèrement surpris, voire tétanisé. Malheureusement, la pureté des intentions s’est cassé le nez sur la sordidité de la réalité. Et je l’entends, le refrain de la réalité :

 

« Parole, parole, parole, parole, parole,

Encore des paroles que tu sèmes au vent ».

 

Tout le monde connaît ces mots que DALIDA réplique à ALAIN DELON en train de lui jouer la grande scène du « retour de flamme ».

 

 

Le chef de bureau qui nous gouverne, quittant les mots et la propagande pour affronter la réalité, voici ce qu'il dit : « Moi, président de la République, je nomme mon pote OLIVIER SCHRAMECK président du CSA ». OLIVIER SCHRAMECK ? Mais si, rappelez-vous, le grand copain de LIONEL JOSPIN, son directeur de cabinet (1988-1991) quand il est ministre de l’éducation, son directeur de cabinet (1997-2002) quand il est premier ministre. Un grand serviteur de l’Etat, donc, OLIVIER SCHRAMECK.

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Cela méritait bien un sucre d’orge : « Qu’est-ce que tu dirais du CSA ? – Ben, à la rigueur et faute de mieux, tope là ». Je n’étais pas dans le bureau où s’est prise la décision, mais ça doit ressembler à ça. Et HOLLANDE a dû ajouter : « Les gens diront ce qu’ils voudront, faites ce que je dis, ne faites pas ce que je fais ». Comme dit le philosophe HENRI BERGSON : « Pour se faire une idée de la vérité, il faut se référer non aux mots qu’une personne prononce, mais à ses actes ». Qui ne serait pas d’accord ? La « République irréprochable » attendra, elle a déjà été tellement patiente.

 

 

Bon, on dira, pour être gentil : « Pour cette fois, ça va, circulez, mais n’y revenez pas. – Promis, papa ». Malheureusement, ce genre d’embrouilles (et d’arrangements avec ses propres serments prêtés la main sur le coeur) notre président élu semble en avoir rapidement fait un mode de vie ordinaire. Il le fait voler en escadrille, l'arrangement. FRANÇOIS HOLLANDE a dû pratiquer le tir en rafales, visiblement, il s’y connaît.

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IL VOUS FAIT RIRE, VOUS ?

Secrétaire général de la présidence ? PIERRE-RENÉ LEMAS, ex-préfet. Directrice de cabinet du président HOLLANDE ? SYLVIE HUBAC, ex-conseillère d’Etat. Recteur de l’énorme académie de Versailles ? PIERRE-YVES DUWOYE, ex-directeur de cabinet de VINCENT PEILLON. Préfet de la très convoitée Région Aquitaine ? MICHEL DELPUECH, ex-préfet de la Région Picardie. Attendez la fin, ce n’est pas fini.

 

 

Ambassadeur en Afghanistan ? STANISLAS LEFEBVRE DE LABOULAYE. Administrateur provisoire de Sciences-Po ? JEAN GAEREMYNCK, conseiller d’Etat. Directeur de la Caisse des Dépôts et Consignations ? JEAN-PIERRE JOUYET (tiens, tiens, il a pas fricoté avec SARKOZY, celui-là ?). Chargé de remettre un rapport sur l’Epargne ? PIERRE DUQUESNE. Directeur de Veolia Transdev, n°1 européen des transports ? JEAN-MARC JANAILLAC. Plus que deux à caser : où va-t-il les mettre ?

 

 

Nous trouvons CLAUDE REVEL, qui a mené carrière « dans le conseil » (l’appellation est drôle, mais ça mène à tout à condition d’en sortir), chargée de rédiger un obscur rapport sur les efforts internationaux de la France pour se positionner « en matière de normes » (texto). Et la DRH du groupe La Poste, alors, alliez-vous me demander ? Voilà une question qu’elle est bonne. SYLVIE FRANÇOIS, elle s’appelle.

 

 

Alors vous allez dire : « Tout ça ne nous dit pas l’heure. Pourquoi cette énumération, blogueur compulsif ? S’il y a un lien entre tous ces gens, quel est-il ? ». Votre intuition a percé le mur de la devinette que j’avais concoctée. OUI, IL Y A UN LIEN. Il suffit de se souvenir par quelles écoles notre président hélas élu (rassurez-vous, je dirais le même hélas si ç’avait été l’autre). Sciences-Po ? HEC ? Vous n’y êtes pas. 

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PROMOTION "VOLTAIRE" DE L'ENA (1980)

HOLLANDE DOIT SE DIRE : "PUTAIN ! ENCORE TOUT CE MONDE A CASER !"

(mais je ne vois pas la planche d'appui pour le tir aux pipes, dommage)

Ceux qui ont dit « ENA » ont gagné (mon estime). Oui, tous ces gens sont des camarades de FRANÇOIS HOLLANDE au sein de la « Promotion Voltaire ». Et c’est GILLES MARCHANDON, autre ancien de la dite promotion, qui, dans l’association des anciens, s’occupe du service « carrières ». Retenez bien ce prénom et ce nom : monsieur PROMOTION VOLTAIRE est le meilleur ami de FRANÇOIS HOLLANDE. Qui le lui rend bien. Avec les intérêts.

 

 

Je remercie un « hebdomadaire satirique paraissant le mercredi », sans les informations duquel la population française se verrait interdire le moindre accès aux cuisines de la cantine où on les fait manger, et à la cabine de pilotage de l’avion où on les a embarqués.

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QU'EST DEVENU LE SLOGAN IMMORTEL :

"LA LIBERTÉ DE LA PRESSE NE S'USE QUE SI L'ON NE S'EN SERT PAS" ?

(mais c'est vrai, qui se souvient des piles Wonder, qui ne s'usent que si l'on s'en sert ?)

Si vous tapez : « Moi président de la République », vous tombez sur un Youtube de 3’22 qui montre le candidat étalant la pureté de ses intentions. Je n’insère pas la séquence ici même, parce que je ne voudrais pas souiller ce blog, ni la pureté de ses intentions, dont je suis sûr que personne ne doute. Moi, président de cette République ? Vous rigolez ? La main sur le coeur, je le proclame : « NON MERCI ! ». Remarquez, je suis à l'abri : personne encore ne m'a demandé de me porter candidat.

 

 

Voilà ce que je dis, moi.

 

 

lundi, 10 décembre 2012

EDWARD BERNAYS, HERAUT, ZERO OU HEROS ?

Pensée du jour : 

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PHOTOGRAPHIE DE GUILLAUME HERBAUT, ENVIRONS DE TCHERNOBYL

« "Il y a beaucoup de choses dans le grand chosier", écrit Littré au mot "chosier", qui n'a jamais été employé qu'une fois dans la littérature française. Précisément dans cette expression-là. Par Rabelais, si j'ai bonne mémoire. Et Littré reste vague dans sa définition. Mais il n'a pas besoin d'être précis. Tout le monde comprend que dans le grand chosier il ne saurait y avoir que beaucoup de choses ».

 

ALEXANDRE VIALATTE

 

NB : la mémoire de VIALATTE (cf. Antiquité du grand chosier, éditions Julliard, tiens, à ce propos, coucou, J.) lui joue des tours, voici "in extenso" la notice de LITTRÉ : « chosier, s.m. Usité seulement dans cette locution proverbiale : va, va, quand tu seras grand, tu verras qu'il y a bien des choses dans un chosier. Cela se dit pour indiquer à un enfant et même à une grande personne qu'il y a bien des choses dont on ne peut rendre compte ».

 

 

Comme disait ma grand-mère, un peu de culture éloigne de l'absolu, beaucoup de culture en rapproche.

 

***

 

 

Résumé : je demandais ce qui faisait d’EDWARD BERNAYS (mort à 103 ans !!), le roi de la manipulation des foules et de l’opinion publique, un génie révolutionnaire du 20èmesiècle. Son rôle est loin d’être négligeable dans l’avènement du culte de la marchandise, promue au rang d’unique idole devant laquelle l’humanité est appelée à se prosterner.

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Ben voilà : il a pioché dans deux univers radicalement différents pour élaborer une théorie radicalement nouvelle. D’un côté, les analyses de GUSTAVE LE BON sur la psychologie des foules (soit dit en passant, cet homme mériterait aussi qu’on s’intéresse à lui). De l’autre, les motivations inconscientes qui font agir les individus, mises au jour par le tonton SIGMUND FREUD de BERNAYS, avec la psychanalyse.

 

 

Pour EDWARD BERNAYS, ce qui meut une foule n’a rien à voir avec ce qui peut mouvoir un individu, et d’autre part et surtout, en aucune manière, ce qui meut la foule n’est lié à ce qu’il y a en elle de rationnel, mais dépend du « ÇA ». Dans la théorie de FREUD, le « ça » est la partie la plus enfouie de l’individu, et partant la moins contrôlée par le « moi » et le « surmoi ».

 

 

Sans entrer dans les détails, comparons simplement le « ça » à une sorte de réservoir de pulsions et de motivations secrètes, méconnues de l'individu, qui n’attendent qu’un déclic pour se manifester. Ce qui fait bouger une foule, selon BERNAYS, est situé au-dessous du seuil de la conscience. FREUD appelait ça le « subconscient ».

 

 

Aujourd’hui, les agences de publicité maîtrisent parfaitement la chose et ont élaboré en conséquence des questionnaires susceptibles de renouveler le répertoire des arguments et des images susceptibles de déclencher l’acte d’achat en allant fouiller dans les motivations secrètes que les gens portent dans leur tête, sans le savoir. Cela porte le nom d’ « enquête de motivations ». 

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C'EST SÛR, CET EXEMPLAIRE A BEAUCOUP VECU (année de publication) !

 

L’excellent GEORGES PEREC les nomme (on est en 1965, dans Les Choses, prix Renaudot, me semble-t-il) « études de motivations ». Dans ce bouquin mémorable, Jérôme et Sylvie participent à l’installation balbutiante dans le paysage social de ces lointains ancêtres des sinistres et obsédants SONDAGES (qui a tiré de son chapeau que 61 % de Français sont favorables au mariage homosexuel ? L'IFOP de madame LAURENCE PARISOT).

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IL FUMAIT BEAUCOUP TROP. IL EN EST MORT.

Mais à l’époque de BERNAYS (il publie Propaganda en 1928), comme je l’ai dit précédemment, la publicité balbutiait, se contentant de vanter les mérites pratiques, la fonctionnalité et l’adéquation du produit à l’usage auquel il était destiné. Elle parlait au côté rationnel des gens. Elle avait un côté terriblement objectif. Autrement dit : dépassé.

 

 

C’est en cela que le travail de BERNAYS est révolutionnaire : il a répondu à la grave question que tous les gouvernements du monde se posent : « Comment amener des masses de gens à se comporter comme le voudraient les dirigeants, sans transformer la société en caserne militaire ? ».

 

 

Son idée principale consiste à se fixer comme objectif de vendre à des masses de gens des masses de produits AVANT que les produits précédents aient cessé de fonctionner. Tiens c’est drôle : l’idée est à peu près contemporaine de l’invention du concept d’ « obsolescence programmée ». Comme dit quelqu’un : EDWARD BERNAYS a fait beaucoup pour que l’Amérique passe d’une « économie du besoin » à une « économie du désir ». Comme c’est bien dit.

 

 

Et pour donner envie aux gens d’acheter des choses dont ils n’ont aucun besoin (sinon dans un futur bien vague), il faut aller chercher en eux la source de leur envie. C’est ainsi que, selon GEORGES PEREC, toujours dans Les Choses, toujours en 1965, Jérôme et Sylvie sont déjà atteints de la maladie du désir, qui a désormais cancérisé la planète : « Dans le monde qui était le leur, il était presque de règle de désirer toujours plus qu’on ne pouvait acquérir ». Ah ! La maladie du désir ! Plus grave que la "maladie d'amour" que chante le désolant MICHEL SARDOU.

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Jérôme et Sylvie ont été contaminés (peut-être) par leur activité professionnelle. Il faut dire qu’ils passent leurs journées à poser des questions à des foules de gens : « Pourquoi les aspirateurs-balais se vendent-ils si mal ? Que pense-t-on, dans les milieux de modeste extraction, de la chicorée ? Aime-t-on la purée toute faite, et pourquoi ? Parce qu’elle est légère ? Parce qu’elle est onctueuse ? Parce qu’elle est si facile à faire : un geste et hop ? (…) ». La liste figure pages 29-30 (dans mon exemplaire, imprimé en 1965 !). Avouez qu’il y a de quoi se laisser gangrener.

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LE BOULOT DE JERÔME ET SYLVIE

GEORGES PEREC ADORE LA LISTE, L'ENUMERATION, L'ACCUMULATION, ... LA PARATAXE, QUOI

 

La maladie de tous les désirs qu’on n’a pas eu le temps de désirer. Voilà le monde qui nous a faits. Voilà le monde qui nous habite. Qui occupe indûment notre territoire intérieur, que nous le voulions ou non. Et nous en devons une bonne part au sinistre EDWARD BERNAYS.

 

 

Accessoirement, l'efficacité pratique des campagnes de propagande menées par EDWARD BERNAYS prouve l'effroyable justesse de sa théorie, exposée dès 1928 dans Propaganda. Et par voie de conséquence, l'incontestable VÉRITÉ manifestée dans la psychanalyse. La propagande comme preuve irréfutable que SIGMUND FREUD a tout vu juste, avouez que c'est drôle, comme retour de boomerang !

 

 

Et ça prouve aussi que tous ceux qui fouillent dans l'âme humaine (les sociologues, les psychologues, les ethnologues et tous les x...logues, je veux dire concernant les « Sciences » de l'Homme) ne se contentent pas d'établir de simples connaissances, qui s'avèreraient utiles, mais élaborent et fabriquent des instruments de domination dont tous les pouvoirs se servent allègrement pour s'établir et perdurer (= mentir et manipuler). En particulier un pouvoir que je n'ai pas cité ici : le « management » (faire adhérer tous les "collaborateurs" au "projet d'entreprise"), le fléau de la "gestion" des hommes selon le modèle envoyé par ... les Américains. 

 

 

Voilà ce que je dis, moi.

 

 

 

dimanche, 09 décembre 2012

L'HOMME QUI FIT FUMER LA FEMME

Pensée du jour : 

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QUAND UN AVEUGLE PREND DES PHOTOS, VOILA CE QUE CA DONNE

IL S'APPELLE EVGEN BAVCAR, IL EST NE EN SLOVENIE

(authentique, évidemment, et il sait visiblement ce que c'est, une femme nue !)

« Rien n'est plus étrange que la mer. Elle part, elle vient, repart, revient, elle se berce ; et elle fait des songes. Elle rêve des îles, des ports et des soleils couchants ; au sud, à l'horizon, elle rêve Alexandrie, mirage nacré, impalpable vapeur, jeu d'étincelles ; au nord, houleuse et couleur de hareng, elle rêve de grands clairs de lune, et les phares de la côte anglaise. Elle rêve les jonques et les lanternes vénitiennes, les éponges et les madrépores, elle rêve de tout, elle se nourrit de reflets et se nourrit de coquillages, des baleines mortes et des cadavres de marins ; elle enfante surtout les nuages, formes mouvantes commes les sculptures de Brancusi, qui s'entre-effacent et s'entre-engendrent à la façon des musiques de Mozart : la mer est un sculpteur abstrait ».

 

ALEXANDRE VIALATTE

 

 

Résumé de l’épisode précédent (d'avant-hier, en fait) : le petit EDWARD BERNAYS est devenu grand en écrivant Propaganda (1928), un livre de chevet pour GOEBBELS, HITLER, STALINE, et un « credo » pour tout publicitaire qui se respecte un peu. 

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SALE ENGEANCE : ÇA MEURT A 103 ANS !!!

Chargé de vendre la cigarette à toute la gent féminine (et pas « gente », qui est un adjectif qualificatif, comme l'ignorent les ignares), il « libère » la femme en établissant un lien entre la « Torch of Freedom » de la Statue de la Liberté et la cigarette allumée, que seront dès lors autorisées à arborer toutes les femmes américaines. 

 

 

Soit dit en passant, on ne m'enlèvera pas de l'idée que le BOUT DE SEIN joue pour l'imaginaire des hommes un rôle assez voisin de celui du GLAND (selon la psychanalyse) pour l'imaginaire des femmes, et que l'incandescence du bout de la cigarette a quelque chose à voir avec le BOUT DE SEIN, dans l'imaginaire masculin. On nage en plein érotisme, comme on le voit, par exemple avec la photo de la pin-up à poils (de moustache) ci-dessous.

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Ben oui, il suffit de donner à la chose désagréable le nom adéquat pour faire passer sans douleur la dite chose : appelez donc votre plan de licenciements massifs « Plan de Sauvegarde de l’Emploi », et soudain vous verrez, tout change. On appelle ça la magie de l'EUPHEMISME. photographie,art,france,société,culture,alexandre vialatte,littérature,humour,edward bernays,propagande,publicité,public relations,goebbels,hitler,staline,communication,statue de la liberté,sigmund freud,victor klemperer,lti,new york,mao tse toung,grammaire,langue françaiseVICTOR KLEMPERER a longuement étudié ça sous le règne d’HITLER (dans LTI, la langue du 3ème Reich, une lecture indispensable).

 

 

GEORGE ORWELL, avec sa "novlangue" (dans 1984),photographie,art,france,société,culture,alexandre vialatte,littérature,humour,edward bernays,propagande,publicité,public relations,goebbels,hitler,staline,communication,statue de la liberté,sigmund freud,victor klemperer,lti,new york,mao tse toung,grammaire,langue française a lui aussi bien cerné le problème ("l'esclavage, c'est la liberté"). C'est pourquoi on peut se demander si la théorie de SIGMUND FREUD n'a pas nourri indirectement le système hitlérien, à commencer par sa dimension de propagande ? Il y a de quoi se demander, non ? Mais pour revenir à la campagne publicitaire d'EDWARD BERNAYS, ça ne suffisait pas.

 

 

Pour que l’événement fasse date, pour que la campagne atteigne efficacement son objectif, il faut frapper les imaginations, il faut que toute la presse en parle, il faut que tout le pays en parle, il faut du spectaculaire et du scandaleux. Et c’est là que le savoir-faire d’EDWARD BERNAYS va faire merveille.

 

 

Chaque année, la ville de New York organise une « manifestation-spectacle ». « New York Easter Parade », ça s’appelle. Un événement annuel de portée nationale, qui a lieu depuis 1880. On va stipendier une cohorte d’accortes bougresses artistement vêtues, on va prévenir en douce les photographes et autres journalistes qu’il va se passer quelque chose et qu’ils doivent se tenir prêts.

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NEW YORK EASTER PARADE 2012 !!!!! ÇA CONTINUE !!!!

Et le jour du « Easter Sunday » 1929, quand la troupe des jolies femmes sort des sacs à main une cigarette, que chacune la porte à ses lèvres pulpeuses et, comble du culot, en allume l’extrémité, tout est prêt, EDWARD BERNAYS peut dire que sa campagne est un succès et qu’il a mérité son gros chèque. Les images scandaleuses s’étalent en « une » des journaux, de l’Atlantique au Pacifique.

 

 

Les femmes peuvent désormais se proclamer « libérées » par la grâce d’une magistrale campagne de publicité. On est en 1929. L’industrie du tabac peut se frotter les mains. « La moitié du ciel » (les femmes, selon MAO TSE TOUNG) va faire pleuvoir les pépètes, pésètes et autres picaillons dans son porte-monnaie largement ouvert sur les profondeurs abyssales des comptes en banque des actionnaires enchantés. Le « marché », en un clic, a tout simplement doublé de surface.

 

 

Bon, alors, le lecteur va me dire maintenant : « Mais qu’est-ce qui te permet, blogueur excessif, de considérer EDWARD BERNAYS comme un quasi-génie ? ». Bonne question. Qu’est-ce qu’elle prouve, la campagne pro-tabac de 1929 ? Qu’est-ce qui fait de son auteur un révolutionnaire ? Tiens, juste un avant-goût : le premier paragraphe de Propaganda.

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Au moins, on se dit qi'il ne prend pas de gants, EDWARD BERNAYS. Et ça n'est que le tout début de 110 pages qui décoiffent (je ne compte pas la préface). J'attire juste l'attention sur "gouvernement invisible".

 

Voilà ce que je dis, moi.

 

 

 

samedi, 08 décembre 2012

LA PESTE DE LA FÊTE DES LUMIERES

Pensée du jour :

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LA BEAUTE SELON CHRISTIAN VOGT

 

« Le désert engendre les dieux. "Jouez hautbois, résonnez musettes", c'est des sables de Palestine que nous viennent les chants des bergers ; c'est du ciel du désert qu'arrivent les anges en blanc qui sonnent dans des trompettes en or ; c'est sur les dunes de Jordanie ridées du vent, ourlées par lui, brodée comme un ouvrage de dames, que s'imptiment les pas des rois mages et que s'élève une odeur d'encens. Terre aride. On a dit que le soleil ni la mort ne peuvent se regarder en face. Et le désert, c'est le soleil et la mort. Une autre dimension de la terre. Le pur espace des géomètres. Et c'est ce sol qui ne produit rien qui donne les dieux. L'esprit souffle sur lui. L'esprit désincarné ».

 

ALEXANDRE VIALATTE

 

 

 

J’interromps momentanément ma série sur EDWARD BERNAYS, mais c’est pour une bonne cause : il y a urgence. Demain soir, il sera trop tard !  

 

 

Oui, ALERTE !!! Lyon est submergé depuis deux jours par des hordes (on parle de 2.000.000 sur quatre jours) de gens affairés qui, le nez dans un plan de la ville, cherchent avidement le lieu où se passe la "Fête des Lumières".

 

 

En tant que vieux Lyonnais dûment estampillé, je voudrais ouvrir leurs yeux et dénoncer l'imposture. Une partie de mon argent de contribuable s'évanouit dans des machines sophistiquées, qui projettent sur des façades illustres (Palais des Beaux Arts, Saint Nizier, ...) le produit lumineux, dégénéré et coûteux conçu dans l'esprit tordu de quelques "artistes" autoproclamés. Je m'insurge, je me gendarme et je crie au scandale.

 

 

Qu'on se le dise : Lyon est le lieu exclusif des

 

ILLUMINATIONS DU 8 DECEMBRE.

 

Et "illuminer" consiste essentiellement dans l'alignement, au soir de ce 8 décembre (et seulement ce soir-là), sur le rebord des fenêtres, de petits verres cannelés à l'intérieur desquels tremble la flamme d'un lumignon.

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Il faut avoir vu danser, sur le rebord de sa propre fenêtre, les huit ou douze rais de lumière échappés de la modeste chose modestement posée, soumise aux aléas de la brise, de la bise, de la neige et de la pluie. Qu'on est heureux, en rentrant de la Brasserie Georges où l'on a fini la promenade du soir, en constatant que les modestes flammes ont résisté.

 

 

Je plains tous ceux qui, se promenant sur les quais du Rhône et de la Saône, n’ont jamais été pris dans l’incroyable magie de milliers de flammes vacillantes, que les cannelures de verres spécialement dédiés à cette occasion démultiplient. De vraies rampes lumineuses qui traversaient la ville de part en part, voilà ce que c'était, les « Illuminations ».

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Pour savoir ce que sont les VRAIES, les AUTHENTIQUES « Illuminations » de Lyon le 8 décembre, j’en suis désolé pour les autres, il faut avoir été témoin du temps où la ville n’avait pas encore été transformée en gigantesque attrape-touriste, en colossal parc d’attraction à l’américaine, en monstrueux espace « spectaculaire-marchand » (GUY DEBORD), en gros mensonge infantile, technique et malfaisant.

 

 

Voilà ce que je dis, moi, à monsieur GERARD COLLOMB.

 

 

P.S. Voilà ce que ça doit donner, les vrais lampions du 8 décembre à Lyon (ceux-là sont particulièrement bien dotés : 14 rais de lumière, qu'il faut imaginer tout tremblants, dès le plus léger souffle d'air) :

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Et rien d'autre.

 

Voilà tout.  

 

 

 

samedi, 01 décembre 2012

MOI, SI J'ETAIS L'UMP

Pensée du jour :

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"MUR" N°16

« Quoi de plus beau qu'une rose, un papillon, ou la règle des participes ? Plus on vieillit, plus on aime les fleurs et la grammaire ».

 

ALEXANDRE VIALATTE

 

Moi qui ne suis pas politicien (je m’en voudrais !), je suggère aux cadres et militants de l’UMP catastrophés par la haine que se vouent COPÉ et FILLON, haine qui risque de faire couler le bateau, de faire comme les « socialistes » : appeler ces ceux-là ELEPHANTS. Ça, c’est pour commencer.

 

 

Ensuite, je proposerais, si j’étais dans le zoo UMP (à Dieu ne plaise !), d’adopter, pour résoudre le problème, la solution qu’a trouvée la direction du Noorder Animal Park (tiens, c’est drôle, ça se trouve en HOLLANDE !) pour éviter à ses éléphants de s’entretuer.

 

Je vous explique : Htoo Khin Aye est morte. A 31 ans, elle était présidente de l’UMP locale, chez les douze éléphants de ce zoo situé dans la riante cité d’Emmen, aux Pays-Bas. Que s’est-il passé alors ? Eh bien, ça a été la bagarre. Et chez les éléphants, ça ne rigole pas, je vous jure. Deux femelles briguaient le siège présidentiel : Mingalar-oo, la fille légitime de la défunte, a d’abord pris le pouvoir.

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PAUVRE GAMIN !!!!

Mais Htoo Yin Aye, la doyenne d'âge (pensez, 30 ans et toutes ses dents) ne l’entendait pas de cette oreille : elle les a agitées violemment. Elle a barri très fort. Et au Noorder Animal Park, où l’on n’avait jamais vu ça, ça a été la bousculade générale. Les douze membres de l’UMP éléphantesque locale en sont venus aux trompes, et ont été bien près de donner de la défense contre leurs congénères. La situation est devenue intenable, d’après WEBREN LANDMAN, la biologiste du Parc.

 

 

Eh bien vous savez ce qu’elle fait, la direction ? Elle DONNE les quatre dissidents à qui en voudra. Elle en FAIT CADEAU, de ses éléphants belliqueux. Alors je pose la question : pourquoi l’UMP française n’en ferait-elle pas autant ? Imaginez la petite annonce : « Parti politique d’opposition, très riche en adhérents, cède à qui en voudra, deux dirigeants méchants, GRATUITEMENT ». Je sens que ça va se bousculer au portillon. 

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Vous avez un peu de place dans un coin du salon ? Adoptez JEAN-FRANÇOIS COPÉ. Quelques granulés, une gamelle d’eau, une bonne litière : il n’en demande pas plus. Une sortie le matin, une sortie le soir pour les besoins. Apprenez-lui le caniveau, vous verrez qu’il sera très docile. Seule précaution : une bonne laisse et une muselière sont conseillées. 

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Vous avez une niche dans le jardin ? Votre Médor vient de claquer ? Adoptez FRANÇOIS FILLON. Là, plus de muselière : votre propriété est protégée efficacement contre toute tentative d’intrusion malveillante, et vos tableaux, tapis, bibelots précieux sont durablement en sécurité. Un peu d’affection, quelques caresses, quelques croquettes : il n’en demande pas plus.

 

 

Elle est pas belle, ma proposition ? Qu’enfin un homme politique devienne utile ! Qu’enfin, il serve à quelque chose ! L’avenir est à l’homme politique domestique. Adoptez un COPÉ !!! Adoptez un FILLON !!! Votre vie va changer !!!

 

 

Seul problème : je n'ai pas demandé à la SPA si les deux espèces ("espèces de ... !", évidemment) étaient dûment recueillies par eux, en cas de départ en vacances inopiné, ou si l'on se contentait de les faire piquer séance tenante, parce que trop encombrantes.

 

 

Voilà ce que je dis, moi.

 

 

 

mardi, 20 novembre 2012

L'EFFRAYABLE - ANDREAS BECKER

Pensée du jour :

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"IDEOGRAMME PIETON" N°12

« L'année tire sur sa fin, pourquoi ne pas le reconnaître ? Il serait injuste de ne pas le dire, elle a été mauvaise, mais elle tire sur sa fin ».

 

ALEXANDRE VIALATTE

 

 

Ce n’est pas pour me vanter, mais j’ai lu un premier roman. Parfaitement ! C'est vrai que ça n'arrive pas souvent. Et je ne le regrette pas. Je ne l’aurais sans doute pas lu si je n’avais pas fait la rencontre de l'auteur. A une terrasse de café, bien sûr. Le bonhomme est original et intéressant, je dirai peut-être en quoi, mais éventuellement, ça ne presse pas. Je ne dirai pas la page où je crois l’avoir vu dessiner son autoportrait. En attendant, ne parlons que du livre. Il ressemble à son auteur : original et intéressant.

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Le titre, d’abord : L’Effrayable (sic !), éditions de la Différence. L’auteur : ANDREAS BECKER. J’ai d’ailleurs été surpris de constater l’absence du mot dans une édition tout à fait récente du Grand Robert.

 

 

Mais le mot figure comme de juste dans le Nouveau Larousse Illustré de 1897-1904 (en 7 volumes), assorti de la définition suivante : « Qui est susceptible d’être effrayé, qui s’effraye aisément :"Certaines femmes affectent d’être plus EFFRAYABLES qu’elles ne le sont réellement" ». L’exemple retenu n’est-il pas délicieux ? Finalement, ANDREAS BECKER (né à Hambourg), ressuscite un terme parfaitement conforme à la belle morphologie de notre langue. Saluons. Et saluons les éditions de La Différence, grand éditeur de poésie devant l'éternel.

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Si je dis que je suis arrivé au bout du livre, je sens que ça va faire mauvaise impression. C’est pourtant la vérité, mais dans un sens positif. Je veux dire qu’ANDREAS BECKER ne donne pas, c’est le moins qu’on puisse dire, dans l’espèce de fluide lavasse et fadasse, qui coule tout seul, que des flagorneurs au goût émoussé ou dépravé, ou tout simplement stipendiés ou lâches, qualifient de « style », et qui sert de moyen d’expression à tant de nos écrivains actuels.

 

 

Pour les noms des crétins ou des margoulins qui se font prendre pour des écrivains, je renvoie à l’excellent et salutaire vitriol publié par  PIERRE JOURDE & ERIC NAULLEAU, Ed. Mots & Cie, en 2004, réédité chez Mango en 2008.

 

 

Le livre d'ANDREAS BECKER se mérite. Comme on dit dans le Guide Michelin : « Il est intéressant, (*), il mérite un détour (**) et il vaut le voyage (***) ». Simultanément et à la fois. C’est sûr que, quand on referme le bouquin, on se dit qu’il s’est passé quelque chose. Quelque chose de très fort. Quoi ? Pas facile à dire. Et pour être franc, ce n’est pas facile de parler de ce livre. Disons les choses franchement et simplement : pour commencer, l’obstacle du langage.

 

 

Car l’auteur passe son temps à triturer le vocabulaire (presque pas la syntaxe, si ça peut rassurer et encourager) en pratiquant ce qu’on appelle en bon français le procédé de la « resuffixation », bien connu des praticiens et connaisseurs de l’argot (« cinoche » pour « cinéma »).

 

 

Tenez, vous voulez un exemple ? Prenez les deux premières phrases : « Dans les temps j’ai eu-t-été une petite fille, une toute petite fillasse.

         Je m’appelassais Angélique ».

L’auteur joue carte sur table et annonce la couleur : ce sera comme ça et pas autrement, et ce sera comme ça tout le long.

 

 

Et ce n’est pas une promesse d’ivrogne : il tient parole ! Rien que sur la première page, ce n’est que : « m’inscrissais, jurassé-crachoté, je m’en fichassais, foutassais, faisassais, j’aimassais, je n’avassais jamaissu ce que cela voulait dire : aimasser ». J’arrête, sinon, ça va vous dégoûter. Et ça, je ne voudrais pas. Mais vraiment pas. Parce que, en vérité, je vous le dis : ce livre contient une matière très forte (comme on parle de certaines boissons fermentées, vous savez).

 

 

Comme si l’auteur avait voulu nous mettre, en travers de la vue, un arbre assez gros pour cacher toute une forêt. Mais c’en est au point que je me demande s’il n’a pas fait cette forêt lexicale, extrêmement visible et envahissante, qu’on a l’impression qu’il n’y a que ça à voir, pour cacher un seul arbre. De quelle essence, l’arbre ? C’est une autre paire de manches.

 

 

Toujours est-il qu’en usant et abusant de ses suffixes proliférants, l’auteur a ses raisons. Si je peux me permettre d’en avancer une : sans être le seul suffixe ajouté, le « -asse » est largement majoritaire, pour ne pas dire carrément obsessionnel. Or, en français, on le trouve dans « connasse,pétasse, grognasse, pouffiasse, radasse, chiasse, vinasse, blondasse, fadasse, bécasse, … ». J’arrête. On a compris. Il y aurait un peu de misogynie sous-jacente dans cette dévalorisation, je n’en serais pas autrement surpris.

 

 

Ce qui est sûr, c'est que, d’un bout à l’autre du livre, c’est une obsession du dégoût, de la saleté, de la laideur, de la déchéance et de la déréliction qui court. Le visqueux a une place de choix. Pour dire l’ambiance, la couleur des murs crades. Une ambiance parfaitement concertée et voulue, évidemment. L’auteur veut à tout prix que le lecteur se mette au boulot. Il est certain que, sur le fond, il n’a pas tort, tant l’écrivain français d’aujourd’hui flatte la paresse et le narcissisme du lecteur, dans le satanique esprit de lucre induit et produit par l’époque.

 

 

Mais passons sur le suffixe, qui n’est, tout compte fait, qu’un procédé. Et venons-en au sujet. C’est vrai, ça : de quoi il parle, ce bouquin ? Eh bien pour tout dire, sincèrement, je ne sais pas exactement. Si, bien sûr, je sais qu’on est dans l’Allemagne hitlérienne, avant la guerre et jusqu’à la fin de la guerre, mais aussi après, et même jusqu’à aujourd’hui. Et puis qu’on est aussi parfois en France.

 

 

Le livre s'ouvre sur une cellule : est-ce une prison ? Un asile ? La cave de WOLFGANG PRIKLOPIL, où fut détenue pendant 8 ans NATASCHA KAMPUSCH ? Une personne est enfermée là : est-ce un garçon ou une fille ? Quoi qu'il en soit, son corps sert de déversoir aux appétits d'une autorité (le « dicteur », véritable trouvaille), ou alors Karminol, ou alors un troisième larron. On ne sait pas. Et c'est comme ça jusqu'à la fin. Par ailleurs, la personne enfermée est enchaînée à l'écriture : mais là encore, qui écrit ? On ne sait pas.

 

 

Et je crois qu’il est là, le nerf du livre : l’action se passe partout, à toutes les époques, et tout le monde y passe. Je veux dire que tout le monde dit "JE". Et je crois que ce que veut exprimer ANDREAS BECKER (je ne suis pas dans sa tête), c’est une certaine permanence désespérée de l’existence humaine. Si "JE" est n'importe qui, c'est le chaos. Il n'y a plus de sujets parlants, il n'y a plus que des objets dont on se sert, et des calculs.

 

 

 

Si ANDREAS BECKER a voulu décrire l'état d'une humanité d'avant la civilisation (ou d'après, ce qui n'est pas tout à fait pareil), il a gagné son pari. On est évidemment (entre autres) dans une Allemagne marquée de façon indélébile par l'expérience nazie, par la brutalité inouïe des "libérateurs" russes, puis par la normalisation imposée par la marchandisation de tout. Pour dire (peut-être) que l'horreur nazie est l'aboutissement logique d'un système, et que s'être débarrassé de l'une laisse l'autre (le système qui est le nôtre) totalement intact.

 

 

Si les suffixes posent un problème à la lecture, c’est une autre chose qui pose un problème de compréhension de l’ouvrage. TOUT le livre se déroule sous la présidence du JE. Mais qui est JE ? Impossible de répondre. Je préviens le lecteur : le JE passe par TOUS les personnages, successivement et sans prévenir. C’est un gros travail à fournir, de la part du lecteur qui, à la limite, serait en droit de réclamer une commission sur les droits d’auteur.

 

 

Le "JE" est en effet systématique, mais renvoie systématiquement à un narrateur différent, qu’il faut identifier si l’on veut reconstituer la cohérence de l’action. J’avoue que je n’ai pas tenté de tout reconstituer. C'est un "JE" « éparpillé façon puzzle » (Tontons flingueurs). Qui parle ? Est-ce Angélique ? Ange ? Paul Antoine ? Joachim ? Karminol ? Marie-Mi ? Grospère ? Joju ? José ? Tout le monde est dans tout le monde. Le chaos, je vous dis.

 

 

 

Le roman d’ANDREAS BECKER diffuse et dilue le « moi ». Tout le monde est promu narrateur du monde. Et c’est exactement pour ça que plus personne ne comprend rien au monde tel qu’il est, dans la réalité qui est la nôtre. En cela, ce livre colle à la réalité actuelle du monde (« éparpillé façon puzzle », lui aussi) d'une façon capable de nous en faire saisir le caractère irréductiblement incompréhensible.

 

 

En plus, où se situe l’action ? « Partout » serait évidemment faux. Il y a Palebourg, Siegershaven, d’autres lieux. C’est sûr, le lieu change en fonction du narrateur, mais comme le narrateur change sans arrêt, difficile de s’y retrouver. Ce qui passe, c’est une sorte d’état de sidération, qui est celui de l’enfant confronté à l’horreur innommable et qui, survivant à cette horreur, conserve intact cet état de sidération, qui devient une composante à part entière de sa personnalité. Il y a du psychotique dans la fragmentation universelle qui est à l'oeuvre ici. Je le dis comme je le sens : parvenir à réaliser ce programme est un véritable TOUR DE FORCE littéraire.

 

 

Enfin, l’action. Que dire de l’action ? Et sait-on, à l’arrivée, ce qui s’est passé ? Moi je vais vous dire : au moment de mourir, chacun d’entre nous sait-il ce qui s’est passé ? Non. Cela signifie qu’on ne sait pas exactement la nature et la portée de notre propre existence. Ici c'est la même chose.

 

 

Il y a du viol, de l’écriture (souvent compulsive ou frénétique), de la guerre, du sang et du sperme, de l’enfermement, des portes qui s’ouvrent (un peu) et restent fermées (beaucoup), des orifices qui s’ouvrent dans les deux sens (subir l’intrusion, faire sortir, ingérer, excréter). Il y a de la souffrance qui n’est même pas vécue comme souffrance, mais comme un fait brut devant lequel l'être reste ahuri, abasourdi. C’est vrai ça, pourquoi en rajouter ?

 

 

Pour résumer, il y a des horreurs, des horreurs et des horreurs. On n’en sort pas. C’est tout juste si le lecteur capte le dernier mot du livre : « survivant », pourtant tellement juste. Et pour dire ça, je vais vous dire, il y a un SOUFFLE qui transporte le lecteur : lisez, pour vous en convaincre, le chapitre extraordinaire qui commence à la page 197.

 

 

Ce n’est plus liquide : c’est une sorte de lave croûteuse et brûlante qui pousse devant soi le sens de ce qu’elle déplace et véhicule, et qui dans le même temps le crée et le détruit. Comme une alternative à l'écroulement heurté et rocailleux des mots passés par la chirurgie esthétique, qui marque le récit, partout ailleurs.

 

 

La dilution des JE, l’osmose des OÙ, le chaos des QUOI, l’interchangeabilité des COMMENT et des QUI, tout ça nous pose en fin de compte l’infernale question du POURQUOI. Vous savez, ce sont les catégories pour école de journalisme : « QUIS ? QUID ?UBI ? QUIBUS AUXILIIS ? CUR ? QUOMODO ?  QUANDO ? ». Et à la question du pourquoi, le livre semble (je suis prudent) répondre : « Pour rien ».

 

 

J’arrête là. J'ai été long. Mais je le maintiens : s’il n’y avait pas le suffixe, comme procédé inflationniste et exagérément artificiel, comme « ultima ratio », comme obsession, j’oserais dire que L’Effrayable, d’ANDREAS BECKER, est un GRAND LIVRE. Et le remarquable hommage rendu par un Allemand à notre langue française. Merci, monsieur.

 

 

Voilà ce que je dis, moi.

 

 

samedi, 17 novembre 2012

BANDE DESSINEE : L'ÂGE D'OR ?

Pensée du jour :

GRILLE 6.jpg

"GRILLE" N°6

 

« Le bonheur date de la plus haute antiquité. (Il est quand même tout neuf, car il a peu servi) ».

 

ALEXANDRE VIALATTE

 

 

L’un de mes plus beaux souvenirs de bande dessinée n’est pas une image, c’est une phrase : « Ta médiocre beauté ne m’a déjà que trop gâché l’aube naissante ». Ça c’est du texte. CUVELIER 12.jpgEt du littéraire, s’il vous plaît. Pour l’éventuelle élite des amateurs authentiques, je le déclare : la phrase est tirée d’Epoxy, une Bande Dessinée de PAUL CUVELIER, où l’auteur s’en donne à cœur joie avec la mythologie grecque. Mais il s’en donne aussi à cœur joie avec le corps féminin, pour lequel il ne cache pas un penchant irrésistible qui mérite notre sympathie (purement esthétique, s’entend !).CUVELIER P.jpg

 

 

C’est Aphrodite en personne qui s’adresse à l’héroïne de PAUL CUVELIER, dans ce livre où l’action semble se dérouler sous les tropiques, vu la façon dont toutes les femmes sont habillées. Enfin, quand je dis « habillées », c’est une façon de parler. En réalité, c’est une belle œuvre qui offre au dessinateur le prétexte de déclarer son amour aux formes féminines, qu’il représentait, avec une tendresse visible, dans une sorte d’infini de variantes posturales, sans jamais donner prise à la plus légère once de vulgarité.

CUVELIER 3.jpg

EPOXY CHEZ LES AMAZONES, C'EST VIOLENT, MAIS PAS TOUT LE TEMPS 

 

Sans aller jusqu'aux coquineries d'un DANY, qui s'est fait une spécialité du dessin d'humour érotique, je citerai, dans le même genre d'amoureux du corps féminin, le dessinateur TAFFIN, en particulier un fascicule intitulé Fume...c'est du Taffin (Kesselring, 1976). Tout n'est pas très bon, c'est vrai, ça sent son côté gentillet des années 1970, flower power, peace and love (que GOTLIB, me semble-t-il, écrivait d'ailleurs "pisse and love", accompagné de "phoque and chite" dans un des premiers numéros de L'Echo des savanes).

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J'en retire cependant deux images : l'une est un dessin (ci-dessus), l'autre est une photo (ci-dessous). Le dessin semble caresser les contours du personnage. Quant à la photo, elle représente CAROLE LAURE (photographiée par DUSAN MAKAVEJEF) en train de prendre un délicieux bain de chocolat.

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Tout ça pour dire que j’ai été fan de Bande Dessinée. Cela m’a passé, mais pendant longtemps, je me suis shooté à l’hebdomadaire (Spirou, Tintin, plus tard Pilote, au temps de leur splendeur), et à l’album (quand il n’en paraissait pas plus de 150 par an, cela restait dans mes moyens). Tout ce qui sortait, ou à peu près. J’étais « accro », il me fallait ma piquouse sous peine de manque. Maintenant, il en paraît 1500 chaque année, comment voulez-vous ?

 

 

C’était quand la bande dessinée appartenait à la catégorie des « loisirs populaires » (expression à prononcer avec une nuance de mépris, si l’on veut être « à la page »). Le cas ressemble un peu à celui de l’opérette. Car il fut un temps où l’Opéra de Lyon était encore indemne du virus du snobisme culturel et de l’exaltation lyrique de « faire moderne ». 

 

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C’était avant que des « experts » et « spécialistes » de BD autoproclamés de tout poil ne posent leur patte sur ce qui était à leurs yeux un « marché prometteur » et un « créneau porteur » pour donner un petit air « moderne » à tout ça et « faire sortir la BD du ghetto enfantin ». C'était avant que la BD passe du plaisir du « loisir populaire » à la consommation du « loisir de masse ». Passage qu'on peut situer autour de 1980.

 

BDM 1983.jpgPour vous dire, c’était avant que, une fois que le « marché » eut tenu ses promesses, messieurs BERA, DENNI et MELLOT n’entreprennent (c’était en 1979) d’inventorier non seulement tout ce qui paraissait de BD année après année, mais aussi tout ce qui avait paru depuis les origines (1805, d’après eux, avec le Robinson Crusoëd’un certain DUMOULIN, mais je conteste – voir ma note d’hier).BDM 2009.jpg

 

Dans le milieu, tout le monde connaît désormais l’incontournable et indispensable BDM –  véritable bible baptisée « argus officiel » – qui paraît revu et corrigé tous les deux ans, et qui vous donne la « cote » d’absolument tout ce qui a été publié depuis 1805, c’est vous dire le sérieux de cette entreprise florissante.

 

 

Vous apprenez ainsi que si vous avez l’originale du Guêpier de DANIEL CEPPI (1977, Editions Sans Frontières), votre capital est de 30€. Mais il faut savoir que l'album a connu un curieux pic dans les années 1980, puisqu’il est bizarrement monté, pendant un temps, à 600 francs, avant non pas de s’abouser, mais de redevenir normal (voilà que je parle comme un vulgaire HOLLANDE, moi, il va falloir surveiller ça). C’est un exemple parmi des milliers d’autres.

 

 

Moi je m’en fiche, de toute façon : je ne suis pas collectionneur. Ainsi, pour vous dire combien je suis bête, j’avais acheté 150 francs, à la librairie Expérience, une petite échoppe de la rue du Petit David, tenue par ADRIENNE (l'adorable ADRIENNE KRIKORIAN), une édition en sérigraphie de Capitaine Cormorant, de l’immense HUGO PRATT, numérotée et tout, magnifiquement et grassement encrée. Dans le BDM ? Il cote 850€ ! 

PRATT CORMORANT.jpg 

Moi, je l’ai revendu (je ne vous dirai pas combien) pour acheter d’autres nouveautés. Pareil pour les deux Corto Maltese de chez Publicness (respectivement 3000 et 500€). J’étais trop curieux des nouveautés pour collectionner. Plutôt cigale que fourmi, si vous voyez. Le plaisir de découvrir plutôt que le souci de posséder pour accumuler.

 

 

Par-dessus le marché, pour être un bon collectionneur, il faut savoir ce qu’on veut, faire un choix, car il n’y a pas de cumul des mandats possible (vous voyez ce que je veux dire ?), et c’est un métier à plein temps (un « full time job », comme refusent de dire les hommes politiques français, si soucieux de rester pas trop nombreux pour se partager profitablement le gâteau des responsabilités).

 

 

Ce n’est donc jamais le « marché » qui m’a guidé. C’est pour dire combien je suis un être désintéressé. Pas un pur esprit, mais pour ainsi dire, quoi !

 

 

Voilà ce que je dis, moi.

 

 

 

mercredi, 14 novembre 2012

DES MONUMORTS HUMAINS

Pensée du jour :

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"RUPESTRE" N°20

 

(lettre à ANDRÉ R., le lendemain de l'incendie du Bazar de la Charité, le 4 mai 1897, où sont mortes plusieurs grosses pointures féminines de la toute haute société parisienne) : « J'espère, mon cher André, ne pas vous scandaliser en vous disant qu'à la lecture des premières nouvelles de cet événement épouvantable, j'ai eu la sensation nette et délicieuse d'un poids immense dont on aurait délivré mon coeur. Le petit nombre des victimes, il est vrai, limitait ma joie. Enfin, me disais-je tout de même, enfin ! ENFIN ! voilà donc un commencement de justice ».

 

LÉON BLOY

 

 

Résumé : je termine aujourd'hui, à l'occasion du 94ème anniversaire de la fin de la grande catastrophe de 14-18, dont l'Europe n'est pas près d'avoir fini de payer les intérêts, une petite évocation de ces constructions entreprises en 1920 dans les 36.000 communes de France, en l'honneur de leurs 1.700.000 morts.

 

 

Tout en persistant à penser que qualifier ces morts de « héros » est aussi absurde que la guerre qui les a engloutis. Il suffit, pour se rendre compte que c'est une Histoire sans héros (titre d'une BD de DANY), de lire DORGELÈS (Les Croix de bois), BARBUSSE (Le Feu), REMARQUE (A l'Ouest rien de nouveau), JÜNGER (Orages d'acier), augmentés de quelques Français et de quelques Allemands.

 

 

 

En tout cas, faire du 11 novembre une cérémonie militaire, c'est, de la part de la nation, un extraordinaire abandon de souveraineté : l'armée est au service de la nation, et non l'inverse. C'est faire preuve d'un aveuglement presque aussi coupable que, par exemple, le crime commis par le colonel DIDIER, le 8 octobre 1914, sur la personne de JEAN-JULIEN CHAPELANT, qu'il a fait fusiller ligoté à son brancard dressé debout contre un pommier, parce qu'il a eu la mauvaise idée d'échapper, grièvement blessé, aux Allemands.

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LE CHEF MITRAILLEUR CHAPELANT 

 

Le colonel DIDIER l'a fait exécuter pour l'exemple, tenez-vous bien, pour « capitulation en rase campagne ». Il ne faudrait pas confondre la nation avec sa composante armée, surtout depuis qu'elle n'est plus faite de conscrits, mais de professionnels. Qui jugera le colonel DIDIER ? JEAN-JULIEN CHAPELANT s'est montré certainement plus "héroïque" que ce salopard galonné. Qui a intérêt à réduire la nation à l'armée chargée de la défendre ?

 

 

 

J'en reviens aux monuments. Je montre en couverture d’un des albums ci-contre la photo de celui de Pléhédel (22). Cette femme couverte d’un ample capuchon n’a peut-être l’air de rien, mais elle tend le poing d’une façon qui a quelque chose à voir avec le célèbre geste ganté de noir de TOMMIE SMITH et JOHN CARLOS sur le podium du 200 mètres aux Jeux Olympiques de 1968. photographie,littérature,léon bloy,bazar de la charité,europe,france,monument aux morts,première guerre mondiale,guerre 14-18,roland dorgelès,les croix de bois,henri barbusse,le feu,erich maria remarque,à l'ouest rien de nouveau,ernst jünger,orages d'acier,français,allemands,11 novembre,armée française,pléhédel,tommie smith,john carlos,jeux olympiques 1968,picarde maudissant la guerre,paul auban,rené quillivic,bretagne,plouhinec,plozévet,carhaix,fouesnant,pirre fresnay,la grande illusion,boïeldieu,éric von stroheim,aristide maillol,ernest gabard,bande dessinée,dany,histoire sans héros

 

 

 

 

PLEHEDEL 22290.jpg 

 

PLEHEDEL 22

 

En Bretagne, RENÉ QUILLIVIC, né à Plouhinec, privilégia dans les monuments qu’on lui commanda, la figuration du deuil, en montrant un père (Plozévet), une mère (Carhaix), la sienne propre (Plouhinec, ci-dessous), une sœur (Bannalec), tous inconsolables de la perte subie. On lui doit également Fouesnant, Plouyé, Pont-Croix, Saint Pol de Léon, Loudéac, …

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RENÉ QUILLIVIC POUR PLOUHINEC 29

(sa propre mère, la tête inclinée vers - regardez la plaque - combien de noms d'une ville qui comptera environ 4.400 habitants en 1990 ?)

 

J’ai plus de mal à comprendre le choix de certaines communes ou paroisses (rares, heureusement, j’en ai collecté 9 !), dont le choix s’est porté sur un modèle (dont je n’ai pas identifié les promoteurs) qui fait du poilu un jeune homme du beau monde, les jambes noblement croisées, élégamment accoudé à la plaque portant les noms des morts. C’est sûr que celui-ci, comme Boïeldieu (PIERRE FRESNAY) dans La Grande illusion, devait blanchir ses gants avant de se lancer à l’assaut hors de la tranchée (rappelez-vous ce que dit ERIC VON STROHEIM à PIERRE FRESNAY en gants blancs, qui fait semblant de s'évader pour permettre à GABIN de le faire vraiment : « Che fais tirer, Boeldieu ! »). Et ce n’est pas l’ange qui le couronne de lauriers qui est fait pour arranger les choses.

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BEYRIES 40

 

Pour finir sur ce sujet (avant la prochaine fois), il faut quand même parler des quelques grands artistes, comme ARISTIDE MAILLOL, qui eurent parfois l’élégance de travailler gratuitement. MAILLOL poussa cette élégance jusqu'au raffinement généreux, en réalisant gracieusement, dans et pour sa région de naissance, les monuments de Céret, Elne, Port-Vendres et Banyuls.

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OEUVRE D'ARISTIDE MAILLIOL POUR CÉRET 66

 

 Et j’ai rendu hommage, en un autre temps, à ERNEST GABARD, plus récemment à DINTRAT (Montfaucon, 43). Ceux-là ne travaillèrent pas à la chaîne, et ce que nous voyons de leur travail reste – qu’on me passe cette confidence, si c’en est une – émouvant.

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OEUVRE D'ERNEST GABARD POUR JURANÇON 64

 

 

Voilà ce que je dis, moi.

 

 

 

mardi, 13 novembre 2012

L'INDUSTRIE DU MONUMENT AUX MORTS

Pensée du jour :

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"POURTRAIT" N°3

 

« Catastrophe inouïe de Messine [30 décembre 1908] entièrement détruite, il y a deux jours, fête des Saints Innocents, par un tremblement de terre, en même temps que Reggio et quelques autres villes ou villages. On évalue à deux cent mille le nombre des morts. Cela commence ».

 

LÉON BLOY

 

Résumé : après un petit tour, dans l’ « île du souvenir », au monument aux morts de Lyon, dans le parc de la Tête d’or, je commençais à évoquer le boom de l’industrie du monument aux morts au cours de la décennie 1920. Des sculpteurs conçurent et élaborèrent plusieurs modèles, que les industriels diffusèrent en plus ou moins grand nombre, en fonction de la demande.

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FOUILLOY 80

 

Au palmarès des modèles les plus demandés, figure le « Poilu au repos» (que j’avais appelé « sentinelle »), qui a été sculpté par ETIENNE CAMUS (né en 1867, impossible de trouver la date de son décès, j'en ai conclu logiquement qu'il est toujours vivant), de Toulouse, et qui figure au sommet, paraît-il, de plusieurs centaines de monuments français.

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COURRIERES 62

 

Au point que les fonderies ont dû s’y mettre à plusieurs pour satisfaire la demande : Tusey (Meuse), Guichard à Castelnaudary, Jacomet (Vaucluse), peut-être Val d’Osne à Paris. Mais on connaît d’autres « poilus » de la même veine, dont celui de CHARLES-HENRI POURQUET (1877-1943).

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SAINT SAUVEUR DE PEYRE 48 

Un autre modèle eut beaucoup de succès : le poilu brandissant une couronne de lauriers, œuvre du sculpteur EUGÈNE BENET. Fondu chez Durenne à Sommevoire (Haute-Marne), il fut peut-être diffusé à 900 exemplaires (« peut-être », le chiffre étant extrapolé à partir d’un nombre non précisé de mairies interrogées).

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CORDELLE 42

 

Le « poilu » qui se dresse fièrement en travers du chemin de l’ennemi, le fusil tenu de façon à lui barrer le chemin de la Patrie, est du déjà cité CHARLES-HENRI POURQUET, sculpture qu’on trouve une peu partout en France (j’en ai 56 dans ma besace). Le « poilu » qui se cabre, à l’arrivée de l’ennemi, en serrant convulsivement son drapeau sur son cœur, a été sculpté par CHARLES BRETON (j’en ai collecté une vingtaine au total).

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ARVILLERS 80

 

Des modèles, j’en citerai encore un autre : le « poilu » en personne, qui fait barrage de tout son corps, les bras en croix, que j’avais baptisé : « On ne passe pas !». C’est sûr que l’exaltation de l’héroïsme n’est pas vraiment ma tasse de thé, et la réflexion qui me vient, au sujet de ces trois modèles, c’est qu’il y eut dans la décennie 1920 une énorme opération de propagande patriotique.

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SAINT-JEURES 43

 

Dans ses travaux sur le monument aux morts de 14-18, ANTOINE PROST montre, entre bien d’autres choses, que le budget municipal fut loin d’être proportionnel à la dimension et à la beauté du monument, et que des communes relativement pauvres eurent à cœur d’ériger une œuvre qui fût à la hauteur de l’idée qu’elles se faisaient de l’hommage à rendre à leurs morts.

 

 

Ce véritable rouleau compresseur était sans doute destiné à faire taire les velléités révolutionnaires qui se faisaient jour dans le peuple en France et en Allemagne. Je rappelle que le mouvement Spartakus (avec les personnalités emblématiques de ROSA LUXEMBURG et KARL LIEBKNECHT) fut écrasé dans le sang en 1919.

 

 

Personnellement, je préfère les monuments aux morts qui mettent en scène (pour ceux qui portent une figure) ceux qui restent, ceux qui continuent à vivre avec la perte d’un ou plusieurs membres de la famille : les parents, les veuves, les enfants. Dans certaines communes, le monument affiche jusqu’à sept fois le même nom. Regardez Maniquerville (76) : trois cent quarante-huit habitants en 1990, douze noms, 2 DESPREZ, 3 LEMAITRE, 2 LEVARAY. Reste cinq.

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MANIQUERVILLE 76

 

La Vie et rien d'autre, on vous dit, avec BERTRAND TAVERNIER.

 

 

Voilà ce que je dis, moi.

 

 

 

lundi, 12 novembre 2012

MONUMORTS A LA CHAÎNE

Pensée du jour :

MUR 11.jpg

"MUR" N°11

 

« Je méprise profondément ceux qui aiment marcher en rang sur une musique : ce ne peut être que par erreur qu'ils ont reçu un cerveau ; une moelle épinière leur suffirait amplement ».

 

ALBERT EINSTEIN

 

 

Voyez comme le hasard fait bien les choses (en fait le hasard n’y est pas pour grand-chose) : hier je célèbre à ma façon le 11 novembre, en publiant une note sur le monument aux morts de la ville de LyonMONUMORT LYON COULEUR.jpg, dans la petite île du parc de la Tête d’or, et voilà-t-il pas que Le Progrès daté du même 11 novembre donne en pages locales (6ème arrondissement) des nouvelles de sa restauration.

 

 

Tiens, soit dit par parenthèse, c’est très "tendance" de mettre tout dans le même sac : après l'imposture du « mariage pour tous », voici la forfaiture de la « commémoration pour tous », depuis la loi qui fait du 11 novembre la date de commémoration de tous les « morts pour la France ».

 

 

Pourtant, est-ce qu’il est « mort pour la France », le soldat de métier qui tombe en Afghanistan, qui a choisi de risquer de mourir ? Quoi de commun avec le grand massacre de la paysannerie française en 14-18 ? Demandez à un juif s'il peut renoncer à proclamer le caractère UNIQUE de l'holocauste, et vous verrez. C'est du même ordre : la partie massacrée de la population en 14-18 était composée de civils.

 

 

Revenons au Progrès. Non seulement on est tenu au courant de l’avancement des travaux, mais on apprend des choses. D’abord, que la pierre de 1920 était du calcaire, que l’acidité des pluies a vite fait de défigurer, comme l’acné qu’un adolescent perturbé ne cesse de labourer à coups d’ongles.

 

 

Ensuite, que les nouvelles plaques (toujours au nombre de 76) sont en pierre de Hauteville, assez dure pour que les Américains aient eu l’idée de s’en servir pour construire l’Empire State Building. Croisons les doigts. Lyon, à l'époque, a sans doute reculé devant la dépense d'une pierre résistante.

 

 

On apprend aussi que le « temple » – je ne vois pas d’autre mot pour désigner l’ensemble de la construction, soubassement, plaques portant les noms, bas-reliefs, « crypte » à ciel ouvert (!), monument proprement dit – est l’œuvre de TONY GARNIER, qui est aussi l’auteur de la Halle qui porte son nom à Gerland (les anciens abattoirs, où je faisais des livraisons dans d'autres temps) et des "Gratte-Ciel" de Villeurbanne.

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ET MOI QUI DISAIS "QUASIMENT HAUTEUR D'HOMME" !

EN FAIT, C'EST LARGEMENT HAUTEUR D'HOMME

(état après restauration)

 

On apprend enfin que c’est DAVID PENALVA (MOF 1997) qui a été retenu pour graver les 10.600 noms (augmentés de ceux que les historiens ont rétablis dans leurs droits), à la micro-meuleuse, dans cette pierre très dure, à raison de 40 à 50 lettres romaines par jour, qu’il s’est attelé à la tâche pour une première tranche de 2004 à 2005, et que la seconde a débuté en 2007 (j’imagine que la municipalité n’a pas voulu tout engager d’un seul coup et voulait juger sur pièce), pour s’achever en 2014, juste à temps pour fêter le centenaire de la première grande boucherie industrielle de l’histoire.

 

 

Que l’on puisse de nouveau lire distinctement tous les noms des morts, voilà enfin, parmi plusieurs autres moins reluisants (quartier Grolée sinistré, Hôtel-Dieu bradé, …), monsieur le Maire GÉRARD COLLOMB (que j'ai croisé à la glorieuse époque de la "Salle 3"), un acte digne pour lequel les Lyonnais vous devront un minimum de reconnaissance.

 

 

J’en arrive à mon sujet du jour. Dans la décennie 1920, la France a érigé, dans ses moindres patelins, bleds paumés et trous perdus, 36.000 monuments aux morts. Enfin, pas tout à fait, car il faut retrancher les quelques communes qui, n’ayant envoyé au combat aucun de ses hommes ou nul n’y ayant perdu la vie, ont échappé à la règle générale.

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PALAZINGES, SA MAIRIE, SON EGLISE : POURQUOI MOURIR ? ON SE DEMANDE

 

Parmi elles, citons Palazinges (Corrèze, 115 habitants au recensement de 1990), et Les Plans (Hérault, 265 habitants en 1999). Cette dernière municipalité a la particularité de n’avoir eu aucun mort à déplorer, pas plus en 14-18 qu’en 1870 ou en 39-45. Il y en a sûrement d'autres, mais combien ?

 

 

Il a donc fallu que, dans 36.000 conseils municipaux, ait lieu une délibération au sujet du budget à consacrer à cette édification et de la façon dont on allait s’y prendre. Dans pas mal d’endroits bénéficiant de la présence d’un sculpteur (ou tailleur de pierre) local, les gens se sont arrangés pour que leur monument soit unique. La plupart du temps, ce fut vite vu, pour des raisons pécuniaires, et l’on se contenta d’un obélisque, souvent orné d’une palme, d’une croix de guerre ou d’un coq. C’est ce qu’on voit dans l’immense majorité des localités françaises.

 

 

Mais cette flambée d’érections sur la totalité du territoire suscita l’imagination et l’appétit d’un certain nombre d’entrepreneurs avisés, qui virent là un formidable marché potentiel. Se mettant au travail, ils furent rapidement en mesure de proposer un véritable catalogue aux 36.000 maires de la nation, au point qu’on peut vraiment parler d’une industrie du monument aux morts. 

 

 

Ce catalogue comportait différents modèles dus à des sculpteurs professionnels, et ils y étaient déclinés en plusieurs versions, de la fonte de fer ciselée et bronzée (« absolument inaltérable ») à la pierre reconstituée, que les communes choisissaient en fonction du budget alloué et du montant qu’avait rapporté la souscription municipale.

 

 

Et les affaires marchaient du tonnerre de Dieu : « L’âge d’or, mon cher ami, l’âge d’or. Jamais vu ça, depuis les Grecs, depuis les cathédrales.Même ceux qui ont une main de merde ont de la commande. Vous vous rendez compte ? Un monument par village. 35.000 communes pour 300 sculpteurs ! Tout le monde veut son poilu, sa veuve, sa pyramide, ses marbres. On ne fournit pas. La ronde-bosse, le bas-relief, la lettre, tout ça ronfle comme une usine. Mieux que la Renaissance, mon cher, la Résurrection. – Grâce à nos morts. – Ouais, grâce à nos morts, merci à eux ». C’est le sculpteur Mercadot qui dit ça à PHILIPPE NOIRET, dans le poignant La Vie et rien d’autre, de BERTRAND TAVERNIER (1989).

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Il faut avoir vu ce film, tout en lumières vaguement bleues ou grises, en clartés humides ou brumeuses, où NOIRET et SABINE AZEMA font merveille, et où TAVERNIER touche très juste.

 

 

Voilà ce que je dis, moi.


 

dimanche, 11 novembre 2012

UN TOUR DANS L'ÎLE DU SOUVENIR

Pensée du jour :

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"POURTRAIT" N°1

 

« L'homme se prouve par le chapeau mou, qui le distingue des autres primates. Mais, même prouvé par le chapeau mou, l'homme a beau être réellement homme, l'Italien l'est encore plus que lui. D'abord parce qu'il ajoute des plumes au chapeau mou, des plumes vertes qui font lyrique. Rien n'est plus beau que de le voir se marier dans cette parure ornithologique. En chantant Sole mio. On dirait l'oiseau-lyre. J'ai eu ce bonheur en Italie. C'est un tableau qu'on n'oublie pas ».

 

ALEXANDRE VIALATTE

 

 

Je ne peux pas laisser passer un 11 novembre sans ajouter mon petit gravier à l'édifice national commémoratif, n'est-ce pas ? J'invite d'abord le lecteur à faire un détour par les albums ci-contre, ne serait-ce que pour marquer le coup, en faisant observer que je me suis arrêté aux communes françaises dont le nom commence par la première lettre de l'alphabet, et que je n'ai inséré qu'une faible partie (139 photos) des 942 images dont je dispose. Je me suis permis d'ajouter un album des photos que j'ai prises au cours de mes pérégrinations en France et autour de Lyon.

 

 

 

GEORGES BRASSENS chante : « Un 22 septembre, au diable vous partîtes, Et depuis chaque année, à la date susdite, Je mouillais mon mouchoir en souvenir de vous, Mais nous y revoilà, et je reste de pierre, Pas une seule larme à me mettre aux paupières. Le 22 septembre, aujourd’hui, je m’en fous ». J’espère que nul Européen ne cédera à cette tentation du désamour, s’agissant du premier suicide de sa terre natale.

 

 

Car il s’agit bien de la guerre de 1914-1918, et la chanson de BRASSENS n’était qu’un prétexte pour parler à nouveau de la « Grande Guerre », de la « Der des Der », bref, de la Première Guerre Mondiale. Et cette guerre n’a jamais été Un long dimanche de fiançailles (JEAN-PIERRE JEUNET, 2004, avec AUDREY TAUTOU), non, elle fut le premier « long suicide européen ».

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JE N'INVENTE RIEN : JE TIRE CE TABLEAU DE LA REVUE BT2

(n°53, novembre 1973, revue du réseau CELESTIN FREINET)

 

Un suicide intrépidement poursuivi en 1939-1945 (avec une tendance à l’exportation), et probablement en train de se consommer aujourd’hui. L’ironie de l’Histoire est féroce : c’est au moment où elle croit qu’elle va parachever son édification (la « construction européenne ») que l’Europe a sans doute signé son propre permis d’inhumer, et commencé à creuser son propre trou de ses propres mains.

 

 

Et c’est épouvantablement normal : cette Europe-là est un mensonge qui remonte au coït inaugural de ses premiers parents, quand ils l'ont conçue comme un piédestal pour la Grande Privatisation du bien commun (qui portait en France le nom devenu dramatiquement ringard de "Service Public"). Passons.

 

 

Pour revenir à 14-18, nous commémorons aujourd’hui la fin du premier massacre industriel de l’histoire, une énorme broyeuse des enfants mâles de grands pays. Un massacre que GEORGES BRASSENS a célébré à sa manière dans une chanson plus connue que celle ci-dessus. 

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Le journal Le Progrès le fait – de façon assez digne, je dois dire – dans son numéro lyonnais du 9 novembre (dans les pages locales), en citant les noms de l’initiateur et du sculpteur auxquels le quartier de Montchat doit, selon lui, de posséder le premier monument aux morts (il porte 170 noms !). Vous avez dit « premier » ? Mais premier de quoi ? En France ? A Lyon ? Aucune idée. D’ailleurs, peu importe.

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PARC TÊTE D'OR : NOTRE "ÎLE DES MORTS" EST AU MILIEU DU LAC

 

L’important est d’y penser. Rien qu’un jour par an, ce n’est pas beaucoup. Et encore, un petit moment dans la journée. Le monument de Lyon a les dimensions d’un temple. Il fallait bien ça. Il a été élevé à partir de 1920. Il occupe l’intégralité de l’ « île du souvenir », au milieu du lac du Parc de la Tête d’or. Il est en forme de rectangle très allongé. On y accède par un tunnel qui passe sous le lac : il faut descendre des marches, remonter des marches (quand la grille n'est pas fermée, ou alors il y a la nage).

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On commence par faire le tour du « temple », pour prendre conscience - on en est effaré ! - du trou que la guerre a creusé dans la population mâle de la ville : tous les prénoms et les noms ont été gravés méticuleusement, l'un derrière l'autre, sur des plaques qui ceinturent l’espace du monument proprement dit.

 

Pour vous faire une idée, dites-vous, en regardant la photo ci-dessous, que toutes les parties rectilignes extérieures du quadrilatère sont couvertes de noms, quasiment à hauteur d'homme.  De quoi peupler une ville mieux que moyenne.

 

Au total, ce sont 10.600 noms qui figurent ici, et 76 plaques ont été nécessaires. Il faut penser à ces milliers de noms comme à des hommes encore debout. Je vais vous dire : ça ferait du monde aujourd'hui. Et l'histoire du "regroupement familial" ne serait qu'une mauvaise blague, absolument incompréhensible (la remarque s'adresse à ceux qui pensent qu'on peut refaire l'histoire).

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MERCI MALGRE TOUT A GOGOL

 

Je ne sais pas quelle est la pierre qui a servi à fabriquer les plaques, en tout cas, elle est assez friable pour avoir rendu nécessaire une restauration générale qui sera achevée (théoriquement) en 2013 : la plupart étaient devenus illisibles, au point que certains venaient compléter un nom ou un prénom au feutre noir, façon comme une autre, finalement, de rendre hommage à un mort. L'opération aura coûté 800.000 euros aux contribuables lyonnais, si le devis est respecté. La mémoire, ça se paie.

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Pour accéder au monument, il y a encore quelques marches à monter. L’esplanade est vaste. Le « saint des saints » (si l’on veut) du temple est situé dans la partie nord, et se compose de deux parties. Une sculpture représentant des hommes (six, je crois) portant sur leurs épaules un cercueil revêtu d’un long voile (un drapeau ?) qui semble flotter lourdement ; et puis une sorte de crypte : il faut descendre plusieurs marches pour se trouver face à un livre ouvert, protégé par des vitres. Je crois bien, sauf erreur (je ne le jure pas) que les pages portent elles aussi les noms des morts.

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A l’occasion du 11 novembre 2012, j’espère que vous ne m’en voulez pas trop d’avoir proposé cette petite visite dans « l’île du souvenir ».

 

 

Voilà ce que je dis, moi.

 

 

vendredi, 09 novembre 2012

VOUS AVEZ DIT LACAN ? (2)

Pensée du jour :

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"SILHOUETTE" N°7

 

« L'homme est un étrange animal. Ses activités sont charmantes. Les spécialistes voient en lui une espèce d'insecte sautillant. Il fonde des villes, il dans se jerk, il sonde les mers, il chante en choeur et il boit à la ronde, il se coiffe au caranaval de chapeaux en papier. De temps en temps, il détruit la Bastille pour construire des prisons moins belles mais plus nombreuses, il tue ses rois pour avoir un empereur et le remplacer par un monarque, il adore la Raison, il se repaît de chimères, il massacre ses prisonniers. En un mot, il est libre, égal et fraternel ».

 

ALEXANDRE VIALATTE

 

 

Résumé : on a compris, j’espère, qu’il y a une recette pour me faire monter la moutarde et pour que je prenne en grippe le coupable, c’est, comme on dit, de « ramener sa science ». Certains disent plus simplement : « Celui-là, il la ramène ». Ipso facto, on a compris que la prose de JACQUES LACAN n’est pas ma tasse de thé. C’est qu’avec le « vulgum pecus » auquel j’appartiens, le « maître »(que ROUDINESCO appelle parfois « Sa Majesté », du moins il me semble) sait faire preuve d’un dédain souverain.

 

 

Mais je crois, après lecture de la biographie d’ELISABETH ROUDINESCO, que LACAN a vite compris que ce dédain était un moyen de se poser en seigneur. En un mot, comme le dit l’auteur, LACAN est avant tout un SEDUCTEUR (de femmes, de disciples, …). Or le séducteur est celui qui a par-dessus tout besoin de s’ériger en objet de désir.

 

 

Il semble avoir adopté la maxime prêtée à CESAR : « Plutôt le premier dans mon village que le second à Rome », et la démarche induite par la logique du « tout seul », pourvu que ce soit « à la tête ». Ce qui l’a conduit à se couper de toutes les organisations et autorités professionnelles, pour fonder sa propre institution. Il est ainsi sûr de rester sans rival. Dans cet ordre d’idées, ajoutons sa hantise du plagiat : se considérant (sans doute à juste titre, bien qu’il ait « emprunté » quelques-unes de ses idées de départ) comme un inventeur, il redoutait d’être dépossédé de ce titre, au cas où des petits malins auraient eu l'idée d'un pillage en règle.

 

 

Toute sa virtuosité passe dans la tactique adoptée pour se faire désirer. Se faire désirer par qui ? LACAN, pour sa part, a réussi à mettre nombre de femmes dans son lit. Il n’est ni le premier, ni le dernier : un homme qui sait s’y prendre en fait autant, ou mieux. Et puis somme toute, ça le regarde, ainsi que les femmes qui ont bien voulu. Mais là où il a été très fort, et peut-être un génie, c’est qu’il a réussi à mettre nombre de disciples dans son séminaire. Et ça, c’est beaucoup plus impressionnant que les conquêtes féminines. Comment devient-on chef d'école ?

 

 

C’est aussi assez drôle, dans le livre, de suivre (de pas trop près) les trajectoires de frôlement, d’entrecroisement  et d’interaction de tous les poissons plus ou moins gros qui évoluent dans le bocal parisien de l’intelligentsia intellectuelle et artistique des années 1930. Sur la paranoïa, par exemple, il est probable que LACAN a reçu une part de ses idées de SALVADOR DALI.

 

 

Ce qui est sûr, c’est qu’il a fréquenté les surréalistes, et qu’il s’est lié d’amitié avec le peintre ANDRÉ MASSON, l’auteur (entre autres) de l’emblème de la revue Acéphale, de GEORGES BATAILLE, un antirationaliste passionné de pulsions et de passions primitives, dont la compagne (SYLVIA BATAILLE) devint celle de JACQUES LACAN.

 

 

Passons rapidement sur une coquille marrante qui figure à la page 271 de mon exemplaire : « … la toute-puissance de l’analyste, placé en position d’interprètre dans la relation transférentielle ». De là à la position dite « du missionnaire », il n’y a qu’un pas, que je me garderai de franchir, pour garder intacte la réputation de sérieux qui est celle de ce blog. Est-ce une facétie ? Un lapsus ?

 

 

Alors finalement, quel portrait de JACQUES LACAN trace l’ouvrage d’ELISABETH ROUDINESCO ? Elle ne fait à coup sûr pas partie des dévots de l’Eglise lacanienne (certains disent la secte), où certains sont tombés dans le culte de l'idole. Mais elle reconnaît tous les apports dont il a enrichi la doctrine freudienne, en n’hésitant pas à s’opposer frontalement à des institutions (on n’imagine pas le continent que ça représente) qui, à ses yeux, avaient tendance à figer, voire à momifier la pensée du fondateur de la psychanalyse.

 

 

Elle essaie de faire le départ entre les lumières et les ombres. Et le résultat est bon. Du côté de ces dernières, je compte évidemment le style, même si des gens très compétents en la matière m’ont affirmé que la pensée de LACAN repose avant tout sur un effort de précision et d’exactitude. Je veux bien.

 

 

Un style au vocabulaire, disons, courant (à part les concepts élaborés par lui), mais à la syntaxe inspirée du MALLARMÉ le plus alambiqué, voire le plus obscur. Pour ceux qui ne connaissent pas, ça donne des phrases qu’il faut relire plusieurs fois pour en discerner la construction grammaticale, les relations entre les parties, en un mot ce que ça peut bien vouloir dire. C’est un choix, évidemment.

 

 

L’obstacle de l’obscurité, devait-il se dire, est une condition de la naissance du désir de comprendre : à l’amateur de faire l’effort d’entrer dans son système de pensée (puisque système il y a, selon ROUDINESCO), pour comprendre le raffinement et la profondeur de l’agencement des concepts mis en place par le « maître ». On se dit qu’il y a du gourou chez cet homme. Eh bien, son obscurité pour initiés, qu'il la garde !

 

 

Voilà ce que je dis, moi.

 

 

Tant pis, je comptais finir ici, mais ce sera pour demain.