Ok

En poursuivant votre navigation sur ce site, vous acceptez l'utilisation de cookies. Ces derniers assurent le bon fonctionnement de nos services. En savoir plus.

dimanche, 23 février 2014

AUX CHIOTTES LES NORMES !

Résumé : après avoir remarqué que la théorie du « genre », qui a envahi le champ social, les médias et qui est partie à l’assaut de l’école pour promouvoir dans le monde entier le point de vue (la « grille de lecture », les « lunettes », pour parler comme Bourdieu à propos des journalistes) de la communauté homosexuelle, je m’interrogeais sur les raisons de son succès actuel, du moins si l’on en croit ceux qui sont habilités (payés) à « causer dans le poste ». Je pointais la résistance légitime aux persécutions.

 

Mais parmi les raisons que j’entrevois, il en est une autre, qui me semble venir des eaux les plus profondes sur lesquelles avance l’esquif nommé « civilisation ». Et cette raison tient à l’évolution des rapports que nos sociétés entretiennent avec la question des interdits, des normes et des critères.

 

Grosso modo et pour simplifier, à mesure que les sociétés ont évolué vers la consommation de marchandises, la jouissance immédiate et l’individualisme, les populations se sont mises à rejeter ce qu’elles considéraient de plus en plus comme des contraintes.

 

Les normes n'ont plus été vues comme un bien commun, comme ce qui unit les citoyens d'un même pays, ce qu'on persiste à tort à appeler un « corps social », mais comme un ensemble insupportable de diktats, à faire disparaître d'urgence. Il faut choisir : s'il n'y a plus que des individus, il n'y a plus de société. De même et à l'inverse, s'il n'y a plus que de la société, l'individu s'abolit, dissout dans l'entité collective : c'est le totalitarisme nazi, stalinien, khmer rouge, le Petit Livre Rouge de la Révolution Culturelle chinoise .... Ah c'est sûr que l'équilibre est difficile à trouver !

 

Tout le monde admet, moi le premier, que toutes les coutumes et les cultures de toutes les peuplades de la Terre ont des particularités : les anthropologues et ethnologues ont noirci des milliers de kilomètres de parchemins savantissimes pour les décrire jusque dans leurs moindres détails, parfois abracadabrantesques à nos yeux.

 

Tout le monde admet par conséquent que toutes les coutumes et les cultures de la Terre, du fait de ce particularisme, comportent à leur base une part incompressible d’arbitraire. Nos coutumes et cultures d’Occidentaux endurcis comme celles de tous les autres peuples.

 

Et dans le maelström de la globalisation à outrance découlée de la généralisation de la société marchande, ces particularismes, en même temps que leur caractère arbitraire, sont devenus totalement insupportables. La liberté dans le choix des marques et des produits a détrôné la noble « Liberté guidant le Peuple ». Il est exigé de chacun des sept milliards d’individus qui grouillent sur la planète de participer au gigantesque effort qui consiste à la détruire pour entretenir la machine de la consommation.

 

L’accès de tous à tout est devenu le « credo », le « gloria » et le « confiteor » de la nouvelle Eglise vers laquelle se pressent (ou rêvent de se presser) les masses de la planète entière, j’ai nommé sa majesté l’Hypermarché, augmenté de sa dernière extension en date, dans les travées de laquelle se rend à chaque instant un culte au dieu nommé Illimité : l’empereur Internet.

 

Dans ce contexte, où les corps individuels se dilatent à l’infini aux dépens du corps social, comment voulez-vous que survive la vile et vieille notion de norme ? Quand les bornes du corps individuel sont franchies, il n’y a plus de limite au désir, il n’y a surtout plus de limite aux « droits ». Car le désir de l'individu est devenu générateur automatique de droit.

 

Qu’il s’agisse de l’enfant (à tout prix), de se marier avec quelqu’un du même sexe ou de suicider l’oncle à héritage au motif qu’il est en soins palliatifs, les désirs créent désormais des droits. Chaque individu est appelé à concevoir la norme particulière qui correspond à l'essence de son être.

 

A charge pour lui de la trouver et de la définir, bien sûr. Ce n'est pas le plus aisé, on le sait. Mais toutes sortes de coaches de vie, de consultants et de marchands de services à la personne et de biens matériels sont là pour l'aider à s'y retrouver dans le fouillis de ses contradictions et de ses changements d'humeur.

 

L’individu étant sa propre norme (« je fais ce que je veux parce que je suis libre », ou plutôt « je suis libre, donc je fais ce que je veux »), il n’y a plus de norme. Moyennant quoi on se rend bientôt compte que le social a disparu. Le social, je veux dire le bien commun. Je veux dire, comme disent les ânes bâtés (qui se prennent pour l'aristocratie moderne) qui nous gouvernent, le « vivre-ensemble ». Dit par eux, c’est devenu une abjection et une ordure.

 

Je ne vais pas jouer au gourou psychanalyste qui dirait à ces masses aveuglées que tout ça manque d’un père castrateur, parce que je n’ai pas les diplômes qui m’y autorisent, mais je me doute qu’il y a là-dedans quelque chose de cet ordre. Car finalement, accepter la norme, qu'est-ce d'autre qu'admettre une limite de soi ? On ne m’ôtera pas de l’idée que l’individu aux désirs tout-puissants est en réalité resté un enfant déguisé en adulte. Idée bien résumée dans le slogan publicitaire :

 

« Parce que je le vaux bien ! ».

 

Il est aujourd’hui de plus en plus difficile de supporter la frustration d’un désir, étant donné que les marchands de marchandises se donnent un mal fou (= consacrent des sommes folles) pour connaître les motivations des gogos qui s’imaginent qu’ils combleront leur vide existentiel en achetant les merdes élaborées par des margoulins à partir de mille enquêtes de motivations fabriquées pour leur soutirer la formulation de quelque manque qu’ils attendent de combler, bouclant ainsi la boucle.

 

Faire croire aux gens que leurs désirs sont tout-puissants, ça confine à l’artistique. Sauf que c’est tout, sauf de l’art.

 

Voilà ce que je dis, moi.

 

 

 

dimanche, 23 septembre 2012

MARIAGE HOMO, MENAGE IDIOT ?

Pensée du jour : « Si tes amants t'ennuient, marie-toi, cela leur donnera du piquant ».

JEAN ANOUILH

 

L’homosexualité, quand – comme moi, par exemple – on ne se tient pas au courant des dernières tendances, est un univers à part, difficile à appréhender dans sa cohérence et son homogénéité. Si tant est que ce soit un milieu cohérent et homogène. Or, rien n'est moins sûr.

 

 

« Toutes choses égales par ailleurs » (formule énigmatique qu'on entend beaucoup dans la bouche des politiciens ; je l'emploie donc parce que personne ne sait ce qu'elle veut dire exactement), c’est un peu comme l’Islam. En France, de même qu'on dit "l'Islam" en parlant de tous les musulmans du monde, on parle de "la communauté gay". C'est mettre tout le monde un peu vite dans le même sac. Car il y a homosexuel et homosexuel.

 

 

L’Islam est une religion difficilement compréhensible au non-initié. LUTHER.jpgChez les protestants, au moins, c’est clair : tu choisis ta secte, personne n’ira te demander des comptes. Les autres sectes te foutent une paix royale, même si elles sont toutes plus ou moins en concurrence entre elles. C’est « chacun pour soi ». Ce n’est pas pour rien que l’individualisme a été inventé par les adeptes de la Réforme de MARTIN LUTHER.

 

 

 

 

 

 

Chez les musulmans, c’est plus compliqué. Beaucoup plus. Ils font mieux que le dialectique : « Un se divise en deux », du regretté Président MAO DZE DONG,MAO.jpg abondamment mis en application par les trotskistes au cours du 20ème siècle. Eh bien l’Islam fait encore plus fort : « Un se divise en trois » : sunnites, chiites, kharidjistes. Et encore ne cité-je que les trois branches principales, chacune d’elles ayant à cœur de se subdiviser à son tour on ne sait pas combien de fois. A croire que MAO s’est inspiré de l’Islam.

 

 

Chez les homosexuels, cercle que j’ai approché tangentiellement, moi qui ne suis pas spécialiste, j’ai cru pouvoir distinguer deux grandes tendances, dont je me hasarde ici à proposer la modeste description. Description est d’ailleurs un bien grand mot. N’ayant à ma disposition ni le fonds documentaire, ni la méthodologie de l’entomologiste, je ne saurais pas plus entrer dans le menu du détail que dans le détail du menu. Brossons de l'extérieur, si vous le voulez bien, deux silhouettes, à gros traits. Avec une marge d'erreur généreuse, on le comprendra.

 

 

Dans la partie gauche de la photo, l’homosexuel qui choisit délibérément de vivre en rupture avec l'ordre normal. De rejeter les codes sociaux touchant les moeurs. Il opte en toute conscience pour la fracture, pour l’affirmation de soi, pour la proclamation de sa « différence ». Les conventions en vigueur parmi les adeptes de la normalité ? Très peu pour lui.

 

 

Ainsi, DANIEL, le serveur de la brasserie X, affichait-il l’altérité de son style en toute décontraction, avec une touche de malice et d'insolence. D’autres que lui,  certes, tiennent à la respectabilité de la façade, et ne tombent le masque que lorsque le contexte s’y prête, ce qui les oblige parfois à mener, tant bien que mal, une double vie.

 

 

Cet homosexuel, donc, ostensiblement (ostentatoirement ?) ou secrètement contre, revendique la transgression de l’ordre moral. Il ne négocie pas. Au sein de la « communauté », il reste un individu individuel. Un individualiste. Peut-être un aventurier. Un insoumis avide d'expériences inédites que la normalité horrifiée réprouve. Il est, éventuellement, assidu aux soirées intitulées « no limit », ainsi que D. nous le narrait en petit comité. Il est différent de la majorité ? Eh bien il assume, et voilà tout. Abattre le mur qui le sépare des gens normaux ? Pas question.

 

 

Appelons-le Barbe-Noire.jean anouilh,littérature,politique,société,homosexualité,moeurs,morale,sexualité,communauté gay,islam,protestantisme,protestant,martin luther,mao tse toung,trotskiste,sunnite,chiite,fhar,mariage homo,adoption homo,marcel proust,le temps retrouvé Son symbole : un sabre d’abordage ou un drapeau noir habillé d’un crâne. Que cela se voie ou non, il n’aime pas qu’on l’embête avec le Code Civil. Il veut vivre comme il l'entend. Il n'a peur de rien. Même hors-la-loi ne lui fait pas peur. Non-conformiste, sa façon de faire indique une remarquable cohérence, en même temps qu'un certain courage.

 

 

Dans la partie droite de la même photo, on aperçoit maintenant l’homosexuel « méchant ». C'est un théoricien offensif qui pense globalement. Il est porteur de doctrine sociale et politique (inscription de l'individu dans le collectif, et tout le bataclan). Il descend peut-être du F.H.A.R.,jean anouilh,littérature,politique,société,homosexualité,moeurs,morale,sexualité,communauté gay,islam,protestantisme,protestant,martin luther,mao tse toung,trotskiste,sunnite,chiite,fhar,mariage homo,adoption homo,marcel proust,le temps retrouvé l’antique Front Homosexuel d’Action Révolutionnaire (voir ci-contre). C'est peut-être cet élan révolutionnaire qui fait du mariage homo une revendication « de gauche ». Drôle d'idée, si on y réfléchit.

 

 

Cette politisation de l'homosexualité résonne bizarrement, d'ailleurs, et interroge.  Franchement, l'idée n'est pas évidente : qu'y a-t-il de gauche, plutôt que de droite, dans la pédérastie et dans le lesbianisme ? J'ai du mal à voir du politique dans le sexuel. Et qu'on ne me ressorte pas, pour me prouver le contraire, les théories sociologiques de l'organisation et de l'administration de la sexualité par la structure sociale. Et qu'on ne me ressorte pas WILHELM REICH et compagnie.

 

 

Si être homo faisait voter à gauche, c'est plus de 90 % de voix pour la droite qu'il devrait y avoir aux élections.  

 

 

Voilà ce que je dis, moi.

 

 

A suivre.

dimanche, 09 septembre 2012

ULTRALIBERAL ? MAIS JUSQU'OU ?

Pensée du jour : « Quand ne sera-t-il plus besoin de rappeler que les antialcooliques sont des malades en proie à ce poison, l'eau, si dissolvant et corrosif qu'on l'a choisi entre toutes substances pour les ablutions et lessives, et qu'une goutte versée dans un liquide pur, l'absinthe par exemple, le trouble ? ».

ALFRED JARRY

 

JARRY FEE MUR PEINT GRAND LEMPS.jpg

ALFRED JARRY SUR UN MUR DU GRAND LEMPS (38)

EN COMPAGNIE DE L'ABSINTHE ET DU PEINTRE PIERRE BONNARD

 

C’est ainsi que, dans un premier temps, monsieur DEGAUCHE dépénalise l’homosexualité. Comme depuis un bon moment, le délit ne saute plus aux yeux de beaucoup de gens, monsieur DEDROITE ne moufte pas. Mais cela ne suffit pas. Ainsi, les curetons (rien que des DEDROITE), en 1984, n'ont-ils pas fait plier ALAIN SAVARY et FRANÇOIS MITTERRAND au sujet de l’enseignement catholique, en brandissant le drapeau de la « liberté » (après un beau hold up sur la dite liberté) ?

 

 

Eh bien monsieur DEGAUCHE leur emboîte le pas. A ceci près que, en dehors de l'extravagante "Gay Pride", il n'aura pas à manifester par millions dans les rues. Il ne voit donc aucun inconvénient à inscrire dans le marbre de la loi le mariage homosexuel et l’adoption d’enfants par des couples homosexuels. Au nom de l’ « égalité », cette fois. Mieux : pour lutter contre l’ « inégalité des droits ».

 

 

Monsieur DEDROITE, et parfois l’homme de la rue (une variante primitive d’homo sapiens), a du mal à comprendre cette spécification de la notion d'égalité, qui semble, pour l’occasion, curieusement détournée de son sens.

 

 

En fin de compte, si monsieur DEGAUCHE a admis l’ordre capitaliste des choses (comment ça, il a retourné sa veste ? Mais comment osez-vous ?), en revanche, dans le domaine "culturel" (ou "sociétal", comme on voudra), il a gardé intacte sa volonté de mettre à bas l’arbitraire qui établit des différences (rebaptisées « inégalités »), fondées sur des critères de jugement. Juger, se dit-il, c’est mal. Il est interdit de juger. Aussi importe-t-il de rendre tout jugement impossible. Et donc de brouiller les repères le plus savamment possible. Le grand tout, c'est de « décloisonner » à tout va. Abattre les frontières entre les « genres ».

 

 

Curieusement, cependant, monsieur DEGAUCHE s’arrête en chemin. On ne sait quelle vergogne le saisit au moment de franchir un autre Rubicon. Peut-être sent-il vaguement que « la société » n’est pas prête ? Toujours est-il que, alors même que toutes les forces du commerce et de la marchandise, toutes les forces des médias en général et de la télévision en particulier, concourent à élire la PETITE FILLE en icône féminine (et même sexuelle, voyez LOLITA), digne de tous les soins de peau, de tous les maquillages et de toutes les modes vestimentaires les plus « modernes », monsieur DEGAUCHE retrouve le sens du sacré. Je veux dire qu'il recule devant le risque d’accusation de pédophilie. Ici, on perçoit une légère contradiction entre commerce et morale ? Qu'allez-vous chercher ?

 

 

Alors, LGBT tant que vous voudrez, mais ne touchez pas à l’enfant. LGBT, c’est pour « Lesbienne, Gay, Bi et Trans ». Le message implicite de LGBT, c’est : « Tout est permis ». Eh bien non : on ne sait quelle pudeur saisit soudain l’homme de gauche à l’orée de la forêt enfantine.

 

 

 

Car monsieur DEGAUCHE, qui n’en est pas à une contradiction près, revient très fermement au répressif (qui, pour tout le reste, lui fait horreur), persistant à appeler « malade » une personne attirée sexuellement par un enfant, et à lui ordonner, dans ses cours de justice, des « obligations de soins ». Exactement l'accusation qui visait les homosexuels il n'y a pas si longtemps. Etrange, ne trouvez-vous pas ?

 

 

Un mystérieux mur invisible l’empêche de réaliser dans ce domaine la trilogie qu'il a menée à bien dans les autres : 1 - dépénaliser (abolir le délit), 2 -  légaliser (accorder la respectabilité, en punissant au besoin l' « homophobie »), 3 - légiférer (accorder aux homosexuels le mariage et l'adoption d'enfants).

 

 

Ce qu’il a fait en faveur des LGBT, il ne le ferait pour rien au monde à l'égard de ces immondes pédophiles, la honte de l’humanité. Fi donc ! Jarnidieu ! La peste soit du fat ! Jusqu’à ce que peut-être, un jour futur, ceux-ci s’étant à leur tour organisés en associations "de défense" criant à la "stigmatisation" et à la "persécution", forment des groupes de pressions, s'introduisent en réseaux influents parmi les cercles du pouvoir, pour finir par faire modifier la loi en leur faveur, et établir une bonne fois le délit de « pédophilophobie ».

 

 

Monsieur DEGAUCHE pourra alors se dire en toute bonne conscience que « la société est prête ». Que « les mentalités ont évolué ». Qu’à tant faire que de « faire tomber des tabous », au fond, pourquoi pas celui-là ? 

 

 

Mais on oublie trop souvent que parmi ce qu’il est convenu d’appeler les « minorités sexuelles » avides de faire reconnaître officiellement leur « orientation sexuelle », leur « choix de genre » et leurs « préférences sexuelles », il n’y a pas que les LGBT, loin de là. Certains pourraient même les accuser d’accaparer égoïstement toute l’attention, au détriment de beaucoup d'autres. Il faut voir plus loin, plus large et, si j'ose dire, plus profond.

 

 

Car, si monsieur DEGAUCHE était vraiment progressiste, il devrait, en plus des pédophiles, exempter des foudres de la loi les zoophiles (à quand le mariage entre gent humaine et gent canidée (mais à quel doigt passer l'anneau ?) ?), les coprophiles et autres scatophiles, les sadiques, les masochistes (le baron de Charlus dans Le Temps retrouvé), les exhibitionnistes, les masturbateurs, les gérontophiles, les nécrophiles, les fétichistes (à quand l’adoption de chaussures à talon haut, reconnue par la loi, par les couples fétichistes ?).

 

 

Bref, puisque la notion de « limite » fait horreur à monsieur DEGAUCHE, la liste est longue des « droits » à réclamer, à ouvrir et à inscrire dans le métal de la loi ; des « barrières » à faire tomber ; des « tabous » à abolir. Pour conclure, je finirai sur une allusion au marquis DE SADE : gens de la gauche morale, « encore un effort pour devenir … », quoi, au fait ? On trouve en effet, inséré au milieu de la débauchée Philosophie dans le boudoir, une sorte de traité révolutionnaire : Français, encore un effort si vous voulez être républicains.

 

 

Bon, si vous voulez, retranchons « républicains » à la formule du marquis. Et reprenons en chœur : « gens de gauche, encore un effort pour devenir ». Un point c’est tout. Monsieur DEDROITE n’a plus qu’à fermer sa gueule, à ruminer et à regarder passer les trains des « réformes ». Monsieur DEGAUCHE, de son côté, n'a plus qu'à devenir un point. C'est tout.

 

 

Alors, mes bien chers frères, vous voulez savoir quoi ? DEVENONS. C'est le fond de l'affaire.

 

 

Voilà ce que je dis, moi.

 

 

samedi, 08 septembre 2012

ULTRALIBERAL DE GAUCHE ?

Pensée du jour : « L'âme est un tic ».

 

ALFRED JARRY

 

 

Je disais donc qu’aux Etats-Unis, les libertariens travaillent à la disparition de l’Etat. Leur slogan : « L’Etat n’est pas la solution, c’est le problème ». Dès qu’on leur parle de redistribution des richesses, ils crient à la dictature communiste. Mais s’ils sont ultralibéraux en politique et en économie, ils restent cohérents quand il s’agit des rapports sociaux et des mœurs : ils sont, entre autres et par exemple, favorables au mariage homosexuel et à l’adoption d’enfants par des couples homosexuels. Ils vont au bout de leur logique.

 

 

En France, on n’en est pas là. A droite comme à gauche, on reste timoré, pusillanime, pour ne pas dire effarouchable, dès qu’il s’agit d’être logique. Tous deux cultivent leurs contradictions amoureusement, comme un bout de jardin où poussent quelques légumes qui leur servent de fonds de commerce. Chez l’un, la tomate du dirigisme social voisine impunément avec l’aubergine du libéralisme économique. Chez l’autre, le poivron du dirigisme économique côtoie fièrement la courgette du libéralisme social. Et tout ça fait une excellente ratatouille, à condition d'oignons et aulx à suffisance.

 

 

Mais on va voir qu’ils poussent le fétichisme de la contradiction encore plus loin, jusque dans le domaine des mœurs. C’est ainsi que monsieur DEDROITE a dressé un piédestal sur lequel il a juché, entre autres valeurs sûres, la famille, le mariage, les bonnes manières. Au nom de la tradition, d’une part, mais d’autre part parce qu’il faut bien fonder la vie commune sur quelques vérités bien senties.

 

 

La famille découle de l’union, si possible consacrée en présence de Notre-Seigneur, entre un homme et une femme. L’union est évidemment définitive, et monsieur DEDROITE sentirait ses cheveux se hérisser sur son crâne, rien que d’imaginer qu’il pût en être autrement. La respectabilité avant tout. Cela fait partie des valeurs sûres et éprouvées. Et le respect des enfants pour leurs parents est une simple base de départ, évidente. Quasiment une condition.

 

 

Monsieur DEGAUCHE, de ce côté, il faut bien l’avouer, fait beaucoup plus débraillé. La famille ? Il faut être tolérant. Elle est à géométrie variable ? Il faut être compréhensif. Avec des rejetons ouverts aux possibles ? Il faut être tolérant. A peine sortis du berceau, les enfants sont considérés comme des personnes. A ce titre, ils sont dignes de respect : c’est à eux de choisir. La conception de l’enseignement est à l’avenant : c’est à l’enfant lui-même de « construire son savoir ».

 

 

Dans La Grande bouffe, MICHEL PICCOLI, avant d’entrer dans la villa de Neuilly pour y mourir d’occlusion intestinale, laisse sa fille lui présenter un grand noir dont le principal talent est de danser comme un dieu. PICCOLI est sûrement DEGAUCHE. Tout ça, apparemment, ne porte guère à conséquence.

 

 

Le mariage ? Qu’est-ce que c’est, cette institution désuète ? Il fait partie des structures d’une société honnie. Car monsieur DEGAUCHE déteste en général tout ce qui vient de la société capitaliste, et en particulier, tout ce qui en fait l’armature morale, dont il a bien l’intention de se débarrasser quand il aura changé la société dans son ensemble.

 

 

La manière de s’habiller ? JACK LANG, ministre de la Culture, la première fois qu’il voulut aller s’asseoir sur les bancs des ministres à la Chambre, se vit refuser l’accès par les appariteurs. Sûrement soudoyés par la droite réactionnaire : il voulait entrer, rendez-vous compte, en costume impeccable et impeccable pull blanc à col roulé ! Un attentat contre les institutions ! Disons-le : monsieur DEGAUCHE a inventé le « non-conformisme ». Le pull blanc à col roulé, au risque de renverser la république.

 

 

Car monsieur DEGAUCHE a accédé au pouvoir. Il y a planté les dents avec curiosité, l'a mâché avec intérêt, avalé avec délices. Ce faisant, il s’est dit : « Pourquoi pas moi ? ». C’est pourquoi en 1983, monsieur DEGAUCHE se convertit à l’économie de marché. C’est la seule concession qu’il consent à l’ordre établi. Pour le reste, il est intraitable : il faut être tolérant avec la canaille car, si l’on y regarde de près, c’est la société qui est responsable et en a fait des victimes. C’est en tout cas ce que proclame saint PIERRE BOURDIEU, de derrière ses lunettes teintées en vert-de-rose.

 

 

Il faut aussi se montrer tolérant avec tout ce qu’une société réactionnaire nomme « déviance » (à la rigueur « perversion »). Qu'on se le dise, rien que le fait de nommer déviance ou perversion des pratiques sexuelles statistiquement marginales, c'est porter un JUGEMENT. Et c'est intolérable à monsieur DEGAUCHE.

 

 

La « norme » est une convention établie de façon arbitraire par un ordre injuste, qui introduisait un clivage sans pitié entre les « normaux » et les « anormaux ». Ça, c’est saint MICHEL FOUCAULT qui l’a "déconstruit" de façon indubitable et définitive. C’en est fini des normes, du normal et de l’anormal. C'en est fini de juger. Monsieur DEGAUCHE a inventé l'interdiction des critères, des différences et des classements. Il a décidé que poser une limite est une atteinte aux droits fondamentaux. Tout est dans tout, voilà le credo.

 

 

C’est lui qui le dit.

 

 

A suivre.


 

vendredi, 28 octobre 2011

L'ENFANT ÜBER ALLES (1)

EPISODE 1 : la caisse du supermarché

 

 

Cette chronique n’abordant que les sujets les plus graves et les plus vastes, nous parlerons aujourd’hui de l’enfant (cette phrase se veut un petit hommage au grand ALEXANDRE VIALATTE). Et s’agissant de l’enfant, chacun conviendra qu’il n’y a rien de mieux que la caisse de supermarché pour l’observer « en action », dans la mission que lui a confiée le commerce industriel : vaincre la résistance de la ménagère, en général sa propre mère, ce qui en fait d'emblée un traître en puissance.    

 

 

Car si l’espace du supermarché, en soi, dévoile l’intention stratégique de son organisation (« coco, tu te débrouilles comme tu veux, mais à l’arrivée à la caisse, je veux que la longueur de la liste rédigée chez elle, sur un bout de papier et un coin de table, ait au moins triplé ! »), la caisse en est le couronnement. Cette cerise est bien vissée sur ce gâteau.

 

 

Vous savez sûrement que tout « bon musulman » doit impérativement accomplir au moins une fois dans sa vie le « hadj » (pèlerinage à La Mecque, dont le coût actuel, dans le bas de la fourchette haute, se monte à environ 5.000 euros par personne, je le sais de première main, c'est KHALED qui me l'a dit).

 

 

Le « hadj » du consommateur, c’est moins cher, mais c’est toutes les semaines, si possible le même jour de la semaine, pour garder les points de fidélité, de repère et de comparaison, et si possible le samedi matin, pour bien se souvenir que les autres ont une existence concrète, principalement au moment de faire la queue à la caisse. Ce voyage dans la Mecque de la consommation permet de révéler, à travers une petite scène du quotidien, le plus élaboré de tous les protocoles du commerce industriel, le plus prévisible, mais aux péripéties concrètes indéfiniment renouvelées : l’arrivée de la petite famille à la caisse.

 

 

Car la caisse est le piège, le cul-de-sac, la nasse, l’impasse, comme sont tous les péages. Arrêt obligatoire et patience vivement conseillée. Il faut l’avoir vue se dérouler, la scène : la maman (en général, c’est elle, mais on voit parfois un papa) pousse le chariot, qu’elle vide sur le tapis de caisse, après l’avoir rempli et avant de le remplir à nouveau pour le vider dans le coffre de la voiture (on ne s’en lasse pas, que ça devrait être considéré comme un loisir), et ce n’est pas fini. On ne le dit pas assez : le consommateur-en-supermarché est un manutentionnaire qui, non seulement travaille pour les beaux yeux de la princesse, mais en plus qui achète le droit de travailler.

 

 

Maintenant, mettez un gamin dans le siège du chariot (tout est prévu). Le gamin, son métier, c’est de regarder autour de lui. Et qu’est-ce qu’il voit, posé devant ses yeux, à portée de sa charmante et innocente  menotte potelée quand le chariot arrive à la caisse ? Evidemment bien sûr : LE TEST. Grandeur nature. Juste à la bonne hauteur. Bien en évidence dans des présentoirs avenants.

 

 

Donc des boîtes d’épinards ou de fayots, ça ne risque pas. Rien que des saloperies délicieuses, ou bien des cochonneries sucrées, ou alors des pacotilles suaves, et même des camelotes exquises, bref, des merdailles au goût délectable. Rien que des trucs défendus par le coran (euh non, aux dernières nouvelles, je me trompe ; sûrement un oubli du prophète, ce qui prouve d’ailleurs l'amateurisme de ceux qui se fient à lui). Rien que des trucs défendus par le docteur – mais celui-là je l’aime pas parce qu’il fait les piqûres.

 

 

Rien que des trucs défendus par papa et maman quand on les a pas encore trop épuisés, mais on va les avoir à l’usure, on n’est qu’au début de l’échauffement, ils vont voir à qui ils ont à faire.  « Rien que des trucs défendus », on a compris que ça veut dire : « Rien que des trucs éminemment désirables ». Dans « désirables », comprenez : « A saisir coûte que coûte ».

 

 

Poussant son chariot, la femme sait. Depuis l’entrée du magasin, elle tremble, car elle sait ce qui l’attend. Elle sait que le magasin « l’attend à la sortie », comme on dit. Autant dire qu’elle s’approche à regret de ce moment inéluctable de la corvée, de cette épreuve terrible et décisive pour les nerfs et l’autorité. Elle se prépare à résister : aujourd’hui je ne céderai pas, je ne céderai pas, je ne céderai pas.

 

 

Elle doit donc s’armer de fermeté pour résister à la coalition conclue entre son angelot et le magasin. Mais certains loupiots, même tout seuls, ils ont un pouvoir terrifiant. Il y en a qui ont un coffre, on ne se douterait pas à les voir. Le chérubin, quand il vient au supermarché, il vient armé. Et son arme, presque imparable, quand la mère affiche fermement sa décision de fermeté, c’est le DECIBEL.

 

 

Ça n’a l’air de rien, un décibel, comme ça, quand il est tout seul. « Quand il y en a un, ça va. C’est quand il y en a beaucoup que ça ne va plus. » Je cite monsieur BRICE HORTEFEUX, un homme très bien, malgré qu’il ait le teint rouge. Le décibel isolé, il a tellement peu de poids, autant dire qu’il n’existe pas. Mais attention, quand il vole en escadrille, c’est l’arme fatale. Et certains mioches ont un pont d’envol  particulièrement large, et ils arrivent à faire décoller cent ou cent dix décibels en même temps. Pas le seuil de douleur, mais pas loin.

 

 

J’en ai vu un, une fois, on l’aurait mesuré, je suis sûr qu’il était à cent douze ou cent seize. Virgule cinq. Essayez, pour voir : insoutenable. Le truc imparable du bourreau qui a derrière lui deux siècles d’expérience. Le blondinet qui découvre la puissance dévastatrice de son missile sonore embarqué, cette arme de destruction massive, il peut tout demander, ou presque. Il met la machine en route et, après un galop d’échauffement, envoie le projectile. Si le parent tient bon, c’est soit qu’il est héroïque, soit qu’il est un robot, soit qu’il est sourd. Disons-le, la plupart du temps, c’est la victoire en rase campagne, avant même qu’il ait envoyé ses mégatonnes.  

 

 

Mais il faut le comprendre, le lardon. Il sait que le magasin est de son côté. Il le lui a assez répété à la télévision : « Je suis ton ami, mon petit. Je fais tout pour te rendre heureux. Pas comme ces égoïstes de parents qui n’ont qu’une idée en tête : te restreindre, t’imposer des limites. Regarde toutes ces bonnes choses. Vas-y à fond, tu verras, c’est nous, toi et moi, qui sommes les plus forts ». Le merdeux, il n’aime pas ça, les limites. Pourquoi ça, des limites ? Ce qu’il déteste dans ses parents, ce sont les limites qu'ils lui imposent.

 

 

Alors, se dit le mouflet, toutes ces petites boîtes colorées, ces petits sachets amicaux, « toutes ces délicieuses petites choses en vente dans cette salle » (c’est ce qu’on entendait à l’entracte au cinéma, à l’époque des « bonbons, glaçons, chocolats » vendus par les accortes ouvreuses), toutes ces promesses de délices, tout ça, c’est exclusivement pour lui que c’est fabriqué.

 

 

On a compris que la bataille qui se présente est foncièrement inégale. La mère part battue d’avance. C’est vrai que le moutard n’a pas toujours le dessus, pour finir. Mais en général, c’est le chiard qui gagne, que dis-je, qui triomphe, et il n’a jamais le triomphe modeste. La preuve, c’est que les présentoirs sont toujours là.

 

 

Maintenant que j’ai vu la scène (dans les manuels de polémologie, on appelle ça une « guerre-éclair »), je peux ranger le carnet, replier l’observatoire, remballer les cannes à pêche, placer la sangle de ma musette sur l’épaule avec les poissons dedans. Je me lève pesamment, je m’ébroue et m’achemine vers la sortie. Je suis content. Je suis venu. J’ai vu. J’ai vu qui a vaincu.  Pas  César, mais presque.

 

 

Moralité de l’histoire : pour venir à bout de la ménagère aventurée sur le terrain hostile de la grande consommation, il n’y a pas d’arme plus efficace que le sale gosse envoyé en mission. Un suspense comme dans Les Infiltrés.

 

 

A suivre ...