vendredi, 09 juin 2017
PREMIÈRE SALOPERIE DE MACRON
Visiblement, les Français n'aiment plus le drapeau tricolore. Ils ont oublié le premier mot de leur devise nationale. Qui oserait aujourd'hui entonner « Liberté, liberté chérie, combats avec tes défenseurs. Sous nos drapeaux, que la victoire accoure à tes mâles accents ! Que tes ennemis expirants voient ton triomphe et notre gloire ! » ? Les Français ont honte de leur hymne national.
Quel Henri Béraud oserait écrire, dans notre régime démocratique ce qu'il écrivait dans un journal en 1942, sous le nez des troupes d'occupation : « Français, tiens-toi droit ! » ? Non, le Français, aujourd'hui, baisse les yeux devant le terroriste. Le Français a besoin d'être "protégé", "rassuré", "consolé", suite à tous les crimes commis sur notre sol par des bandits qui voudraient bien que nous-mêmes marchions sur "nos valeurs". Les bandits sont en train de gagner. Ce que veut le Français, ce n'est plus la liberté, c'est la sécurité. Le Français est un animal craintif aux abois. Il crie "au secours" en direction du président.
Et le président, magnanime, prête une oreille favorable à ce cri de désespoir. Lui qui voulait il y a peu, "sortir de l'état d'urgence", va, au contraire, faire entrer l'état d'urgence dans le droit commun, en faisant une loi sécuritaire, une de plus, qui déshabille l'autorité judiciaire pour habiller les autorités administratives. La France est en train de dire adieu à l'état de droit. La France s'engage la fleur au fusil dans la voie du régime d'exception permanent. Pour un homme qui peut à bon droit se dire "d'Etat" (il est légitime, puisque élu), voilà un drôle de chef. La question que je me pose : combien de semblables saloperies vont suivre ? En la circonstance présente, j'éprouve, qu'on me pardonne, une grande honte. J'aimerais bien ne pas être le seul.
La liberté, ce n'est pas moi qui en parle :
« Le loup déjà se forge une félicité
Qui le fait pleurer de tendresse.
Chemin faisant, il vit le col du chien pelé.
"Qu'est-ce là ? lui dit-il - Rien. - Quoi, rien ? - Peu de chose.
- Mais encor ? - Le collier dont je suis attaché
De ce que vous voyez est peut-être la cause. -
Attaché ! dit le loup : vous ne courez donc pas
Où vous voulez ? - Pas toujours ; mais qu'importe ? -
Il importe si bien, que de tous vos repas
Je ne veux en aucune sorte,
Et ne voudrais pas même à ce prix un trésor."
Cela dit, maître loup s'enfuit, et court encor ».
Le Français, trop plein de son confort, trop conscient de ce qu'il a à perdre, n'est plus un loup, s'il l'a jamais été. Il est gavé de démocratie. Qui prendrait, aujourd'hui, le parti du loup ?
samedi, 03 juin 2017
JOURNALISTES MAL AIMÉS
Titre - de taille démesurée : toute la moitié supérieure de la page !! Le Monde a les moyens de gâcher du papier. - de l'article de Michel Dalloni, paru dans le supplément "l'époque" du Monde des 7/8 mai 2017. On notera le choix "vintage", pour l'illustrer, du Brownie flash de Kodak. Comme dirait Brigitte Fontaine : "J'fais un genre".
Non, monsieur Dalloni, je ne hais pas les journalistes. Et je ne suis pas d'accord non plus avec le "chapeau" de votre article : « Sale temps pour les journalistes. Accusés d'être les suppôts du système, conspués par les politiques, délaissés par les lecteurs, ils ne font plus rêver. Mais pourquoi tant de haine ? ». J'avoue que "ils ne font plus rêver" m'a fait bondir.
Car si la profession fait rêver des lycéens qui ambitionnent de l'exercer (ce qui est votre cas, puisque vous commencez par cette confidence : « Toute ma vie j'ai rêvé d'être un reporter. »), je vous apprends que je n'achète pas Le Monde pour rêver mais exclusivement pour m'informer, et j'espère n'être pas le dernier dinosaure à considérer ainsi le rôle de la presse. L'insupportablement futile M, le magazine que Le Monde vend avec le numéro du samedi (j'imagine que la raison de son existence est purement financière, vu la place de la publicité), donne à craindre que nous autres dinosaures avons du souci à nous faire pour notre pitance. Je n'en reviens toujours pas de ce qu'un "journal de référence", puisse envoyer des journalistes pour rendre compte des défilés de mode ou des événements sportifs : comment peut-on tomber si bas ? Je sais, je ne suis pas "mainstream".
A la rigueur, parfois, j'apprécie une analyse, et même, pourquoi pas, une page "débats", un commentaire, à la condition que l'information reste première. J'estime aussi tout à fait regrettable l'invasion des pages du Monde par les illustrations (photos ou autre), qui ne font que flatter la paresse. Alors, ne nous trompons pas de débat. Individuellement, les journalistes font le boulot qu'on leur demande de faire, en général plutôt bien, même si, comme partout, il y a des "brebis galeuses".
Non, si je dis souvent du mal de la presse, des journaux que je lis et de ceux qui y écrivent, ce n'est pas aux individus que j'en ai. Si j'avais à m'en prendre à quelqu'un, ce ne serait pas à une personne en particulier, mais plutôt à une entité forcément plus abstraite : celle qui fabrique les conditions d'exercice de la profession. En termes plus connotés Karl Marx : à l'infrastructure plutôt qu'à la superstructure.
A mesure qu'on gravit les étages de l'édifice qui organise la profession journalistique, les questions se font de plus en plus pressantes et fondamentales. Qui est chef de service ? Qui directeur de la rédaction ? Qui éditorialiste ? Qu'est-ce qui les fait nommer à leur poste ? Qui propriétaire ? Quels rapports entre la société des rédacteurs et celui-ci, je veux dire le degré d'assujettissement des contenus à la stratégie de celui-ci (disons pêle-mêle : Bolloré, Bergé, Lagardère, Drahi, bref, tous ceux qui ont de l'argent et voudraient bien influencer) ? Qui décide des sujets ? Qui donne le dernier feu vert à la publication des articles ? Ceux-ci sont-ils retouchés par le rédac-chef ? A quelles conditions grimpe-t-on dans la hiérarchie ? Je n'oublie pas que je figure aussi parmi les payeurs, puisque l'oxygène de l'argent de l'Etat maintient plusieurs titres en état de survie artificielle, au nom du pluralisme et de la "liberté d'expression" qui, en l'occurrence, a bon dos. Je dirais plutôt qu'il faut à tout prix maintenir l'apparence (le mythe) de la pluralité : nous vivons dans un régime fictif de "liberté de la presse".
Encore deux questions, indiscrètes celles-là : 1 - Par qui sont financés les instituts de formation des futurs journalistes ? 2 - Quels professeurs forment les futurs journalistes ? Je ne connais que le CFJ, et encore : par le biais du livre Les Petits soldats du journalisme, de François Rufin, qui avait peut-être quelques comptes à régler, mais dont la charge était étayée par des faits convaincants. Si j'en crois l'auteur, les apprentis apprennent surtout à servir la soupe. Rufin l'a d'ailleurs payé d'un long ostracisme, et ce n'est que depuis peu que sa conception du "vrai" journalisme s'est vue récompensée (succès de son film "Merci patron"). C'est donc l'ensemble de ces conditions, et non pas les seuls individus qui sont envoyés au charbon, qui doit faire l'objet des jugements les plus sévères.
Contrairement à ce qu'écrit Michel Dalloni, ce que je reproche aux journalistes n'est pas qu'ils soient des « suppôts du système » : j'aurais plutôt tendance à les plaindre, puisque, s'ils veulent gagner leur croûte, ils sont obligés de se soumettre aux ordres de la hiérarchie. Pour être édifié là dessus, il suffit de lire "Journal d'un JRI" de Gilles Balbastre, publié dans Journalistes au quotidien, d'Alain Accardo (le JRI ou journaliste reporter d'image, est le pauvre gars qu'on envoie filmer l'inondation, l'incendie, le lieu du crime, enfin bref toutes les images, si possible spectaculaires, à même de faire grimper l'audience : il me faut du saignant, coco).
Ce qu'il faut reprocher au journalisme tel qu'il est pratiqué, c'est donc d'abord le cadre professionnel dans lequel il évolue. Mais il y a plus rédhibitoire : la presse est aujourd'hui pieds et poings liés entre les griffes de la logique ultralibérale, qui guide la marche du monde aujourd'hui. Je sais bien que l'argent est le nerf de la guerre, mais je crois qu'une véritable presse d'information n'a pas à se demander comment satisfaire les "attentes des lecteurs". En tant que lecteur, la seule façon de me satisfaire, c'est de m'informer de ce qui se passe en France, en Europe et dans le monde. Que les choix d'une rédaction se fassent en fonction de ce que les rédacteurs pensent être les goûts des lecteurs me semble une erreur grossière. Une déviance.
Plus avilissant encore pour la profession, ce sont les images des invraisemblables grappes de journalistes, photographes, cameramen et preneurs de sons qui courent s'agglutiner autour de l'événement et des personnes qui le font : Sarkozy paradant à cheval devant le bétail journalistique entassé sur une charrette tirée par un tracteur, lors d'un déplacement en Camargue, reste à cet égard un sommet de ridicule (et d'humiliant).
C'est la concurrence féroce que se livrent les organes de presse (écrit, audio, télé, web) qui produit ce ridicule, dont les limites sont même pulvérisées par les chaînes d'info en continu, avec des envoyés qui moulinent du vent en attendant que se passe la chose attendue.
Non, je ne hais pas les journalistes. Mais j'estime qu'on ne peut pas, à la fois, m'informer et me vendre un produit. Si j'ai de la haine, c'est à l'égard de ce qu'il faut bien appeler le "système" marchand dans lequel ils sont pris.
Mais là, on est dans l'insoluble. Un système condamné. Personne ne reculera. La logique de système est plus forte que tous les efforts des individus qui y sont pris.
09:00 Publié dans DANS LES JOURNAUX | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : journaux, lournalistes, journal le monde, presse quotidienne, michel dalloni, brownie flash kodak, information, vincent bolloré, pierre bergé, arnaud lagardère, patrick drahi, françois rufin, revue fakir, cfj, centre de formation des journalistes, les petits soldats du journalisme, film merci patron, alain accardo, journalistes au quotidien, gilles balbastre, journal d'un jri, nicolas sarkozy
jeudi, 01 juin 2017
ALERTE
On a raison, en général, de ne plus lire Le Monde, cette soupe qui donne trop souvent envie de cracher dedans, depuis que le journalisme de commentaire (autrement dit un prétendu journalisme d'expertise, puisqu'on sait que les journalistes spécialisés sont souvent des ratés de leur "spécialité") a pris le pas sur le journalisme d'information.
Il y a cependant des exceptions. Qui tiennent, en général, à la fois à la personne et à la fonction de la personne qui "écrit dans le journal". Par exemple, il m'est tombé sous les yeux, mardi 30, la chronique de Stéphane Foucart, spécialiste de la rubrique "Planète" (ça veut dire "environnement"). Il est question des insectes, de leur avenir, du nôtre et du monde. La plume du monsieur me semble pertinente et mesurée.
L'histoire, qui commence comme un canular, est racontée dans la revue Science par un entomologiste de grande réputation, du nom de Scott Black, directeur de la Xerces Society for Invertebrate Conservation. Il possédait une Ford Mustang dans son jeune temps, et quand il roulait, il fallait s'arrêter régulièrement pour nettoyer le pare-brise, souillé par la myriade d'insectes qui s'y écrasaient. Aujourd'hui, le pare-brise du Range Rover, « à l'aérodynamique de réfrigérateur », sur quelque route de campagne qu'il roule, reste impeccablement transparent. Scott Black conclut : « J'ai tendance à ne me fier qu'aux données scientifiques, mais quand vous réalisez que vous ne voyez plus tout ce bazar, ça vous prend aux tripes ».
Par intuition, on se dit en effet qu'il s'est passé quelque chose. Je me souviens que, quand j'accompagnais tout gamin mon oncle Pierre qui allait pêcher la truite dans l'Azergue, en longeant la rivière, il me demandait de lui procurer, régulièrement, des sauterelles. Et, comme nous traversions des prés non encore fauchés, je n'avais pas à me baisser, vu ma taille, pour prendre tout ce que je voulais : à chaque pas, nous les faisions partir en grand nombre. Aujourd'hui, ce n'est plus envisageable. De toute façon, y a-t-il encore des truites dans l'eau de l'Azergue, malmenée par le progrès ? Et je ne parle pas des papillons, qui pullulaient dans les campagnes dans les années 1950. Bon, on en voit quelques-uns de temps en temps. Allons, tout ne va pas si mal.
Reste que la vie des insectes est menacée. Mais ça reste un raisonnement intuitif. Et Stéphane Foucart dit très justement que les scientifiques ont le plus grand mal à quantifier le désastre, faute d'une documentation sérieuse sur le phénomène. Il l'écrit : « Probablement parce que l'intérêt scientifique était jugé faible, nul ne pouvant imaginer que ce vaste monde grouillant et bourdonnant puisse un jour connaître un effondrement aussi radical et rapide que celui observé aujourd'hui, sur tous les continents ». Par conséquent, les données dont on dispose sont bien maigres.
Bien obligé de se rabattre sur celles dont on dispose, on a, pour obtenir une comparaison un peu fiable, répété en 2013 une opération remontant à 1989. On a posé un piège dans une réserve naturelle allemande. Le résultat est spectaculaire, mais aussi affolant : en vingt-quatre ans, la « biomasse d'insectes piégés » a été réduite de 80%, soit une disparition des quatre cinquièmes. Résultat confirmé l'année suivante, car les scientifiques, n'en croyant pas leurs yeux, voulaient être sûrs de leur fait.
Pour trouver le coupable, les regards se tournent évidemment vers les insecticides (ils ne font que le boulot qu'on leur demande), en particulier à cette classe particulière que sont les néonicotinoïdes (découverts par un Japonais, et mis sur le marché en 1991), dont on enrobe les semences avant usage, et dont le succès planétaire a été tellement fulgurant au cours des années 1990 qu'ils se retrouvent « sur des millions d'hectares de grandes cultures ». On en a beaucoup parlé à propos de la disparition des abeilles, mais elles ne sont pas les seules concernées, ni les seules à être des "insectes pollinisateurs".
Aux industriels, dont l'argument principal est invariablement : "Il faut nourrir l'humanité", Foucart répond par l'étude menée en Finlande sur les rendements obtenus par les cultivateurs de navette, oléagineux proche du tournesol : depuis 1993 (soit après l'irruption des "néonics"), ils sont tombés de 1,7 à 1,2 tonne à l'hectare. Eh oui, messieurs les industriels, certaines cultures sont étroitement dépendantes des "insectes pollinisateurs" ! Si vous les faites disparaître, il n'y aura pas que les apiculteurs à être plongés dans le marasme.
Stéphane Foucart a sollicité deux chercheurs (CNRS et INRA) à propos de ces résultats, mais ils le « préviennent qu'ils ne sont que corrélatifs : ils n'apportent pas la preuve définitive de la causalité ». Une telle réponse, juste et désespérante, nous fait mieux comprendre pourquoi les lobbies des industriels qui pullulent à Bruxelles arborent une telle mine réjouie avant que les instances européennes prennent une décision au sujet des "perturbateurs endocriniens" ou des néonicotinoïdes : les malfrats courent loin devant les flics, flics qui, sur ordre, attendent l'arme au pied que la "causalité" soit "prouvée".
Dans le fond, on a bien raison de ne pas trop s'en faire : attendons, pour qualifier les industriels d'affameurs et pour les traiter de criminels contre l'humanité, que les rendements aient baissé jusqu'à provoquer des famines catastrophiques. On aura toujours la possibilité de vendre aux populations survivantes des plaquettes de "Soleil vert" (titre du terrible film de Richard Fleischer (1973), où l'on recyclait en aliment les cadavres de tous les euthanasiés volontaires, qui attendaient en file indienne pour se faire piquer).
Dormez en paix, braves gens : d'autres scientifiques viendront pratiquer sur vos cadavres des autopsies pour faire l'inventaire "post mortem" des traces de délectables perturbateurs endocriniens, de néonicotinoïdes amicaux, d'amiante convivial et autres substances charmantes que l'industrie chimique vous aura inoculées dans le silence des autorités de régulation, et grâce au temps que leur aura laissé la prudence merveilleuse des chercheurs.
Je me dis que le barouf entretenu en ce moment autour de Trump et de son éventuelle dénonciation de l'accord de Paris (COP 21 : aux dernières nouvelles, c'est fait) est proprement incroyable. Ben oui, quoi : il n'y a pas qu'au sujet du réchauffement climatique qu'il y a urgence. Je ne nie pas l'importance du sujet, mais le réchauffement climatique se comporte comme Donald Trump : il bouscule tout le monde pour être seul à occuper la scène. Et l'on en oublie toutes les autres urgences. La disparition des insectes pollinisateurs en est pourtant une belle, d'urgence, is'nt it ?
09:00 Publié dans DANS LES JOURNAUX | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : journal le monde, stéphane foucart, écologie, néonicotinoïdes, entomologie, rivière azergue, bayer cropscience
mardi, 30 mai 2017
IL EST INTERDIT DE NOMMER
Je devrais me raisonner, penser à autre chose, me détendre, me divertir comme tout le monde, mais je n'arrive pas à m'y faire. Il y en a assez de ces discours qui, sous prétexte qu'on milite, les uns contre le racisme ou la xénophobie, les autres pour la tolérance ou le "droit à la différence", d'autres encore contre le sexisme ou l'homophobie (j'arrête là l'énumération des "causes à défendre"), répandent entre les individus le venin du soupçon généralisé, en même temps qu'ils font régner une sorte à la fois dure et molle de terreur intellectuelle à l'encontre de ceux qui ont le très grand tort de ne pas croire dans cette nouvelle religion punitive, de ne pas se lancer dans le même combat ou de ne pas défendre la seule cause qui vaille : celle des policiers de la pensée. Il est interdit de commenter le comportement et les discours des "minorités".
Pendant que se poursuivent tranquillement, méthodiquement, les destructions de toutes sortes, sous les coups de l'industrie, de la chimie, de l'économie financiarisée, de la compétition technologique forcenée, de la robotisation, de la privatisation de tout (en ce moment, c'est Véolia qui met la main sur la plage "familiale" de La Baule), etc. ; les mêmes bonnes âmes, qui ont forcément tout compris, qui savent donc forcément poser les questions essentielles et les problèmes cruciaux, et qui tiennent le haut du pavé médiatique (autrement dit qui tiennent solidement la machine à mouliner la propagande et l'air du temps), braquent leurs regards, surtout pas sur les causes des malheurs du monde, mais sur leurs seuls effets dans la société, je veux dire l'adorable nombril sociétal du "vivre-ensemble" et des "valeurs qui sont les nôtres" : elles sont donc à l'affût des moindres pets de travers et des plus petites infractions au Dogme, pour sceller la bouche de leurs méchants adversaires.
Car il est bien entendu qu'ils sont les Bons, qu'ils se tiennent sur l'Axe du Bien, et que, comme disait George W. Bush en son temps : « Ceux qui ne sont pas avec nous sont contre nous ». Tous les autres ont interdiction de dire quoi que ce soit : ils sont l'Axe du Mal, contre lequel ils sont partis en croisade (mais, contrairement à celui provoqué par Bush, le chaos qu'ils installent est dans les esprits, ce qui n'est pas mieux), et tous les moyens sont bons pour les faire taire. Le Code Pénal fourmille d'ailleurs, aujourd'hui, de tels moyens ad hoc, grâce à l'action de longue haleine d'une foule de gens discrets et adroits auprès de ceux qui font les lois, qui pensent acheter ainsi leur réélection.
Beaucoup de ces gens "bien intentionnés", qui ont, à les en croire, le cœur sur la main, ressortent, à la moindre occasion, cette phrase d'Albert Camus : « Mal nommer les choses, c'est ajouter aux malheurs du monde ». Mais ce sont les mêmes grandes âmes qui s'empressent de poser les scellés des interdits sur les mots, et sous peine de correctionnelle, dès qu'il s'agit de leur sacré à eux.
Ma mauvaise humeur (c'est un euphémisme !) est motivée cette fois par un nouvelle preuve qui vient d'être donnée qu'il est interdit de toucher à certains tabous : une pétition a obtenu 20.000 signatures en peu de temps, par toutes les personnes qui ont quelque chose à voir ou à faire dans le quartier de La Chapelle à Paris (18°). Origine de l'affaire : les femmes et les filles qui passent dans le quartier en ont eu ras-le-bol des commentaires, des insultes, voire des gestes dont elles sont l'objet. Ce sont bien sûr presque exclusivement des hommes qui peuplent la rue. Je devrais dire : qui y stationnent.
Pour quelle raison, ces commentaires, insultes, etc. ? La tenue vestimentaire de la gent féminine passant à portée du regard des mâles présents. Les seules femmes qui ne risquent rien sont évidemment les plus couvertes, et si possible de la tête aux pieds. Quant aux autres, inutile de dire que plus elles donnent à voir de leur surface de peau, plus elles doivent s'attendre au pire. L'une d'entre elles raconte même, par temps de forte chaleur, que, pour être tranquille, elle préfère passer là vêtue d'un vaste pull en laine. Cela se passe dans le nord-est de Paris, capitale de la France.
Qui sont ces hommes ? Chut, il est interdit de le dire : les sentinelles vous écoutent. Car il est interdit de "stigmatiser" toute une "communauté". Bon, on a compris quand même. Au fait, comment s'appelle-t-il, l'auteur du livre Les Territoires perdus de la république, au point que des gens très sérieux en sont venus à parler de véritable "sécession" de toute cette partie de la population ? Quelque chose en France semble s'être définitivement rompu. Mais ce quelque chose, il est interdit de le nommer. Disons-le malgré tout : la mentalité et la culture arabo-musulmanes sont profondément sexistes, homophobes (voir la Tchétchénie ces derniers temps) et antisémites.
On se souvient de la Saint-Sylvestre 2016 sur la place de la gare de Cologne. L'étonnant de l'affaire avait été que les premières à se scandaliser de ce qui s'était passé étaient, presque naturellement, les féministes, mais bientôt combattues par les antiracistes, qui voyaient dans cette dénonciation une intolérable atteinte aux droits de l'homme. Je n'aurais pas voulu être dans la peau et dans le dilemme de celles qui étaient à la fois féministes et antiracistes.
On se souvient aussi du désormais défunt "ABCD de l'égalité" promu par la Sinistre de l'Education, qui devait apprendre à tous les enfants que les garçons doivent respecter les filles et ne pas se sentir supérieurs. A tous indistinctement, y compris à ceux qui en sont déjà convaincus du fait de l'éducation reçue, et quelle que soit leur origine sociale et culturelle. Inutile d'ajouter à quelle partie spécifique de la population était censé s'adresser ce message. La Sinistre de l'Education en question, c'est celle qui fut capable de clore une interview en lançant au journaliste un « inch Allah » décomplexé.
Ce tabou qui scelle les bouches (sous peine de) sème et signifie la mort de quelque chose. Quoi exactement ? Difficile de mettre des mots là-dessus. En tout cas, c'est quelque chose d'important, et même de vital pour la vie en collectivité. « Mal nommer les choses, c'est ajouter au malheur du monde ». C'est bien vrai, Albert. Mais que dirais-tu, aujourd'hui, du refus de nommer les choses pour ce qu'elles sont ? Et de ceux qui interdisent de les appeler par leur nom ?
09:00 Publié dans DANS LES JOURNAUX | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : police de la pensée, islam, musulmans, la chapelle paris, george w. bush, axe du mal, homophobie, najat vallaud-belkacem, abcd de l'égalité, inch allah, éducation nationale, coran, tchétchénie
mercredi, 17 mai 2017
UN ESPOIR ?
Il est un peu tôt pour se prononcer sur ce que peut donner la présidence Macron, et je me laisse peut-être bercer dans l'écume des apparences, mais enfin, je crois percevoir à la surface de l'actualité comme le friselis d'une brise pas trop malodorante. Ce n'est pas encore de l'optimisme, mais. J'ai envie, à tort ou à raison, de me dire que quelque chose est peut-être en train, je ne dis pas de changer : au moins de bouger un peu. Et je l'avoue, j'ai eu tort de traiter le jeune énarque de "baudruche". Certes, les vieilles forces qui ont congelé la vie politique française depuis bientôt quarante ans n'ont pas dit leur dernier mot. Les fossiles de "droite" et de "gauche" n'ont aucune envie d'être collés au musée de paléontologie : ils se cramponnent de toutes leurs griffes au terrain. Est-ce que le frisson qui semble remuer le rideau de fer sera suffisant pour que le sang politique de la France recommence à circuler dans ses artères ? Ce serait déjà énorme. Il faut attendre le deuxième tour des législatives : combien de vieux crocodiles se retrouveront au Palais Bourbon ? On verra.
De toute façon, même si le système politique français reprend vie sous l'indéniable impulsion donnée par le petit Macron, restera son programme économique, et là, nous ne sommes pas au bout de nos peines. Et je ne parle pas du réformisme sociétal ("progressiste", évidemment) qui anime le nouveau président.
En attendant les éventuels jours meilleurs, merci de ne pas me réveiller.
09:00 Publié dans DANS LES JOURNAUX | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : france, politique, société, élection présidentielle, emmanuel macron, édouard philippe, palais bourbon, chambre des députés, élections législatives
mercredi, 10 mai 2017
L’HÉRITIER ?
EMMANUEL HOLLANDE OU FRANÇOIS MACRON ?
Photo de une du Progrès du 9 mai 2017.
Je ne sais pas si je délire ou non, mais je trouve cette photo tout à fait extraordinaire, à cause de la drôle de réflexion qu'elle m'inspire. Elle me donne l'impression qu'un masque tombe : celui de la brouille irrémédiable. On y voit en effet l'ancien et le nouveau se regardant et se souriant, en train d'éprouver un contentement qui m'a semblé authentique. Ce regard et ce sourire m'ont sauté aux yeux à cause de cet air de complète satisfaction mutuelle que j'y ai vu (à tort ou à raison). Si j'avais à imaginer une légende à cette photo (AFP), ce serait un dialogue du genre : « Tu vois, papa, j'y suis arrivé. Je l'ai fait ! - Bravo, fiston, ça a marché. Je savais que je pouvais compter sur toi ! ». Ils sont visiblement satisfaits l'un de l'autre, et pas seulement parce qu'ils commémorent la capitulation allemande en 1945.
Si je n'ai pas les pieds à côté de mes pompes, cela signifie que le capitaine de pédalo, se sentant définitivement (et à raison) grillé, à décidé de faire ce qu'il considère comme un "beau geste", et de transmettre la fonction à un héritier jugé à même de la faire fructifier et prospérer. Mais surtout, si tel était vraiment le cas, cela voudrait dire que les deux compères ont joué devant toute la France un chef d'œuvre de scénario de dissimulation. Alors, comédie, la "trahison" du poulain du président bombardé ministre ? Comédie, l'émotion du président annonçant en décembre qu'il ne se présenterait pas à l'élection ? Si ce n'est pas pure hallucination, alors là, je dis : bien joué ! Et chapeau, les artistes ! Et merci au photographe de l'AFP.
Merci de me dire si je me trompe.
09:00 Publié dans DANS LES JOURNAUX | Lien permanent | Commentaires (1) | Tags : élection présidentielle, emmanuel macron, france, politique, société, élections législatives, journal le progrès, lyon, françois hollande, photos de presse, journalistes, agence afp, parti socialiste
lundi, 08 mai 2017
ALORS QUOI, MAINTENANT ?
Ben oui, c'est Macron. Et alors ? C'est bien ce qui était attendu, non ?
Le merveilleux dans l'histoire, c'est que certains osent considérer ce choix comme une victoire, alors même que les électeurs français n'ont jamais autant voté CONTRE. Une VICTOIRE, vraiment, battre Marine Le Pen ? Allons donc. Admettons que bien des gens puissent se sentir aujourd'hui soulagés et rassurés. Mais une victoire ? Franchement, qu'est-ce qui a changé ? En tout cas, sûrement pas la situation, je veux dire l'état général du pays, avec sa masse de pauvres et ses régions désindustrialisées. Ce qui n'a pas changé, ce sont donc en effet tous les facteurs qui ont favorisé la montée du Front National. Marine Le Pen n'a pas eu tort, hier soir, de se féliciter de son résultat : elle a cinq ans devant elle pour préparer son accès au pouvoir. Si la Machine à fabriquer le Front National continue sur sa lancée, on peut déjà prévoir l'issue de 2022. On se souviendra alors de Soumission, le roman de Michel Houellebecq paru en 2015.
Je veux bien croire qu'Emmanuel Macron est plein de bonne volonté. J'espère qu'il a l'intention de changer quelque chose aux causes qui ont produit Le Pen au second tour, mais d'abord, dans quelle direction ? Et puis surtout, le pourra-t-il ? Avec qui va-t-il travailler ? S'il le fait avec les vieux crocodiles qui peuplent le marigot français depuis quarante ans, on peut déjà dire que les jeux sont faits. Il y a une chance, du côté du nouveau président, s'il arrive à faire élire des députés en nombre suffisant qui ne traînent pas le lourd passé des Fillon, Mélenchon, Valls, Le Drian, Lemaire et compagnie. S'il arrive à constituer une Chambre entièrement neuve. Et ça, c'est loin d'être gagné : les grandes manœuvres ont déjà commencé pour circonvenir et circonscrire le petit nouveau. Les résistances sont déjà en place, et bien enracinées dans le paysage. Les vieux crocodiles et autres grands prédateurs politiques ne vont pas se laisser tanner le cuir sans réagir : ils ont encore des crocs. Ce qu'il reste du Parti Socialiste et de l'ex-UMP (je ne digère pas "les républicains") a encore des structures et des réseaux. Et ça, ça ne s'efface pas d'un coup d'éponge.
Attendons de voir ce dont est capable ce petit jeune, brillant pianiste paraît-il. Je suis prêt à tout, y compris à être DÉÇU EN BIEN. Ce sera le cas s'il parvient à mettre en panne la Machine à fabriquer Le Pen, et si, grâce à lui, s'ouvre une perspective d'avenir un peu désirable. S'il y arrive, ce sera un véritable grand exploit sportif, que je serai tout prêt à saluer très très bas.
Sans préjuger de l'avenir et du possible, je souhaite à Emmanuel Macron bien du courage, de l'énergie, de la justesse dans le jugement et du pouvoir de persuasion.
09:00 Publié dans DANS LES JOURNAUX | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : france, politique, société, élection présidentielle, emmanuel macron, marine le pen, macron en marche, front national, françois hollande, parti socialiste, françois fillon, jean-luc mélenchon, manuel valls, le drian, bruno lemaire, michel houellebecq, houellebecq soumission
mardi, 02 mai 2017
LE PEN PHOTOCOPILLEUSE
Montage désopilant et formidable sur France Culture ce matin aux informations de 8h. La Le Pen reprend mot pour mot un discours de Fillon. Les techniciens de France Culture (ou de Ridicule TV, qui a sorti le lapin du chapeau) ont superposé les deux bandes-son de Fillon et Le Pen. Le résultat est aussi saisissant que farcesque. Bravo et merci France Culture.
09:14 Publié dans DANS LES JOURNAUX | Lien permanent | Commentaires (1) | Tags : france culture, marine le pen, front national, françois fillon
dimanche, 23 avril 2017
REFLUX DE VOTE
Aujourd'hui 23 avril, je reste chez moi. Je suis occupé : j'ai de la lecture.
******************************************
PAYSAGE
Photographie Frédéric Chambe.
Ceci est mon bulletin de vote.
Et bonne fête à tous les Georges. Et un très joyeux anniversaire à tous ceux qui sont nés un 23 avril, date indubitablement appelée à un avenir brillant, vu les circonstances politiques présentes, pour ce qui concerne la France, la Française, le Français et autres animaux étranges.
09:00 Publié dans DANS LES JOURNAUX, PAS PHOTOGRAPHE MAIS | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : élection présidentielle, abstention, antoine buéno, michel onfray, buéno no vote, manifeste pour l'abstention, éditions autrement, politique, société, photographie
vendredi, 14 avril 2017
TOUS DERRIÈRE FRANÇOIS
On peut ne pas aimer le style du dessinateur Lefred-Thouron, mais je dois dire que là, sa trouvaille m'a bien amusé. C'est dans le dernier numéro du Canard enchaîné.
Très bien vu : si tous ceux qui ne l'aiment pas le suivaient en effet, sûr qu'il serait élu au premier tour, avec une majorité écrasante.
Soit dit en passant, tous ces guignols, politiciens, politologues, journalistes, après nous avoir gavé de sondages, après nous avoir avoué qu'ils avaient eu grand tort, sont repartis comme en quarante : tous nous serinent de nouveau le refrain des "enquêtes d'opinion", qu'il ne faut, ils ne cessent de le dire, considérer que comme des "photographies prises à l'instant t", mais qu'il ne faut pas les jeter à la poubelle a priori.
Tout ce petit monde moutonnier se comporte et parle comme s'il croyait dur comme fer que ce sont autant de vérités incontestables. Quant aux candidats, il considèrent les sondages comme une vaste fumisterie, sauf quand les résultats leur sont favorables. Remarquez que j'ai aussi entendu Brice Teinturier (sondeur en chef chez Ipsos) soutenir mordicus que les sondages ont annoncé l'hypothèse de l'élection de Donald Trump, alors ... Bon, on le comprend, il ne va pas cracher dans sa propre soupe.
Je ne sais pas quel nom on pourrait donner à cette inconséquence. Je retiens une leçon : ils se foutent de la gueule des électeurs. Mais aussi qu'ils ne savent plus à quelle branche ils peuvent se raccrocher qui ne soit pas pourrie. Tous paumés. Comptons sur eux, d'ici le 23 avril, pour monter la mayonnaise de la peur : je crois que tout ce petit monde pète de trouille, et qu'il ne voit qu'un moyen de se rassurer : la communiquer à tout le monde.
Il est vrai que, si l'on prend au sérieux la faiblesse des écarts entre les quatre "grands" candidats, il y a tout lieu de craindre que cet écart constitue la marge même de l'erreur que l'industrie des sondages se consent à elle-même. Dans ce cas, tout est possible en effet. S'il en est ainsi, il y a effectivement du mouron à se faire.
09:00 Publié dans DANS LES JOURNAUX | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : france, politique, société, élection présidentielle, françois fillon, le canard enchaîné, politiciens, politologues, journalistes, sondages d'opinion, enquêtes d'opinion, ifop, ipsos, cevipof, stéphane rozès, brice teinturier, roland cayrol, donald trump
dimanche, 26 mars 2017
FRAPADINGUE ET VEGAN ...
... SONT DES MOTS QUI VONT TRÈS BIEN ENSEMBLE.
(Pardon aux Beatles).
« Lait = viol », « Stop souffrance »,
« Lait = meurtre », « Stop, go vegan ».
Toutes ces belles inscriptions sont signées ALF. Il paraît que le sigle signifie (en anglais) Animal Liberation Front. En français : Front de Libération des Animaux. La fromagerie ainsi décorée se trouve à Lyon, dans le quartier Saint-Georges. Trois autres fromageries (on disait "crèmeries" - ou crémeries - dans les autrefois) lyonnaises ont subi le même sort, autour du 19 mars. On trouve l'information en divers lieux, entre autres dans Le Progrès du 24 mars.
Je ne m'attarderai pas outre-mesure à commenter la chose. Je me dis quand même que la santé mentale fait rage, et que, parallèlement à la montée du Front National, d'autres pathologies progressent jour après jour, aussi irrésistiblement, quoiqu'avec une moindre publicité. Ce qui est sûr, c'est que je ne suis pas près de consommer le fromage (rien à voir avec notre « cervelle de canut » lyonnaise : fromage blanc, crème, échalote, oignon, persil, ciboulette, ail, huile d'olive) qui tient lieu de cerveau à des zozos qui, comme tout djihadiste qui se respecte, érigent leur monomanie en vérité universelle, en dogme absolu, en doctrine obligatoire, sous peine de. Leur objectif est celui des djihadistes : convertir l'humanité entière à leur religion. Car ils savent de source sûre ce qui est bon pour les autres, dont ils ont décidé de prendre le destin en main et d'assurer le salut, y compris dans l'au-delà. Et y compris contre leur gré (cf. les anti-corridas). Du genre "démoulé à chaud", comme on ne dit peut-être plus.
J'ai un peu honte de poster un tel billet le jour même du cent-quatre-vingt-dixième anniversaire de la mort du grand Ludwig van. Puissent ses mânes avoir la mansuétude de me le pardonner. En pénitence et en guise de prière, je me réciterai à genoux tout l'adagio de l'opus 106 (Hammerklavier, 1819), avec son miraculeux "la-do" initial ajouté in extremis, au grand dam de l'éditeur, qui a fini par trouver ça génial (noires pointées, la croche à 92), et ses prodigieuses et récurrentes remontées vers la lumière, depuis le fond des catacombes du piano (à la main gauche, évidemment). Puissé-je être encore vivant quand on sonnera le bicentenaire ! Qu'est-ce, après tout, que dix ans ?
09:00 Publié dans DANS LES JOURNAUX | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : animal liberation front, front de libération des animaux, vegan, lyon, journal le progrès, front national, ludwig van beethoven, sonate opus 106, adagio sonate op 106, sonate hammerklavier, musique, cervelle de canut lyon, canuts, bouchons lyonnais, alf
vendredi, 24 mars 2017
FAIRE BARRAGE AU F.N.
Il m’est impossible de comprendre pourquoi dix millions de Français ont passé la soirée de lundi 20 mars devant leur télé. Comme s'il pouvait sortir quoi que ce soit de nouveau d'un spectacle aussi lamentable. Cet appétit dévorant qui pousse une telle masse de gens à se jeter sur un tel plat de nouilles flasques me paraît proprement ahurissant. Vraiment, voilà les gens que les citoyens osent consentir à croire dignes de gouverner la France ? Eh bien franchement, le tableau n’est pas joli-joli et laisse entrevoir un avenir qui est tout sauf rassurant, quel que soit l’élu. Une population vautrée devant ce paysage de ruine, franchement, de quoi avons-nous l'air ?
Je sais bien que la perspective de voir la Le Pen accéder au trône présidentiel est très inquiétante. Mais soyons sérieux : comment en est-on arrivé là ? Au lieu de beugler « Au secours ! » devant la menace et d’appeler à « faire barrage au Front National », comment ne voit-on pas que si la Le Pen n’a jamais été aussi près du pouvoir, c’est que les politiciens des deux bords, droite et gauche réunies, l’ont bien voulu. Non, disons carrément qu'ils ont tout fait pour arriver à ce moment, parce qu'ils ont perdu de vue le sens de l’Etat à mesure qu’ils prenaient goût à l’exercice du pouvoir.
Comment ne voit-on pas que le succès de ce parti (qui n'est pas, en fin de compte, un parti politique, mais une petite entreprise qui n'aspire qu'à grossir), sur lequel la même famille règne depuis le début, a été fabriqué de toutes pièces par la veulerie, l’incompétence, et parfois la vilenie des deux forces qui se partagent le pouvoir depuis quarante ans. Si le Front National semble (je dis "semble") à même aujourd’hui de l’emporter, cela découle logiquement, presque mécaniquement de cette longue pratique. Au pays des Lilliputiens politiques, les nains sont rois. La décomposition à l’œuvre dans le fumier de la vie politique française produit nécessairement la pestilence Le Pen.
Plutôt que d’appeler au secours (qui répondrait à cet appel ?), c’est un cri de colère qui aurait dû s’élever à l’encontre des cinq "débatteurs" de lundi 20, et de toute cette classe politique devenue, au fil du temps, une caste, pour ne pas dire une mafia, avec ses conventions tacites, ses us et coutumes, ses adoubements, ses calculs, ses marchandages. Les membres de la confrérie ont eu le temps de tisser des relations avec tous ceux qu’ils estimaient en mesure de favoriser leur réélection, hommes d’affaires, hommes d’influence, hommes des médias, professionnels de la communication, etc.
Qu’appelle-t-on un « système », ce mot tant prisé de tous les candidats qui se proclament en dehors ? Je le définirais comme un réseau d’interdépendances si serrées que toutes les pièces de la machine fonctionnent solidairement, puisque chacune a un besoin vital de toutes les autres pour que l'ensemble fonctionne : l'existence lubrifiée de chacune conditionne la pérennité de toutes les autres. C'est ça, un « système ». On dit que toutes les pièces « se tiennent ». Les individus n’y peuvent rien : c’est une structure. Si les individus ne le sont pas tous, c'est la structure qui est pourrie.
C’est précisément le tableau que nous avons sous les yeux, institutions comprises, dont chacun a appris à respirer l’air et à mettre en œuvre à son profit les leviers qu’elles offrent. A cet égard, tous les candidats sont partie intégrante du « système » qu’ils se plaisent à dénoncer, même Poutou et Arthaud, dont le but est avant tout de fidéliser leur clientèle, maigre par nature, voire étique, pour ne pas dire cachectique (prononcer "kakektik").
A cet égard, tout le monde a bien raison de dénoncer le « système », mais on se garde en général comme de la peste d’en formuler les conséquences logiques. C’est tout le « système » qu’il faudrait mettre à bas. La colère et le dégoût que devrait inspirer le paysage politique français ne s’adressent donc pas aux individus, même si certains d’entre eux ont des comportements particulièrement répugnants.
Colère et dégoût ne devraient pas non plus, si l’on était un peu lucide, mettre la Le Pen en position d’être choisie : ce n’est pas d’elle que peut venir le renouvellement, tant elle a d’impatience de chausser les pantoufles du « système », pour le faire fonctionner à son profit et à celui de ses amis, quitte à ruiner le pays que celui-ci structure (comme le promet son programme). La colère et la haine, disait le cardinal de Retz, ne doivent pas étouffer la réflexion ni l'intelligence. Mais « les peuples » (comme dit Retz), en sont-ils capables ?
Alors quoi ? Fonder la « sixième République » ? Mais la République dont les révolutionnaires de 1792 ont accouché était ardemment désirée par tout un peuple. En 2017, où est le peuple ? Quelles sont ses attentes ? Comment se porte-t-il, moralement et intellectuellement ? On me dit que les sondages accordent toujours à Fillon un socle incassable de 18-20% d’électeurs qui lui restent fidèles malgré tout ce qu’on sait du personnage. C’est ça, le peuple français, vraiment ?
Après l’affaire OM-VA (1993), on a bien vu Jacques Mellick réélu à Valenciennes, comme s’il n’avait rien fait de mal. Et ne parlons pas de Levallois-Perret et des réélections constantes de Balkany, ou de Corbeil-Essonnes et de Serge Dassault, deux adeptes du clientélisme à l’état aigu, et du ver corrupteur dans le fruit national. Un peuple qui se laisse acheter en échange de quelques babioles ne mérite-t-il pas son sort ? Que veut aujourd’hui le peuple français, pour autant qu’il existe ? Le sait-il lui-même ? Comme on le voit, il n’y a pas que la perspective Le Pen qui m’inquiète : le "peuple français" (que plus personne de sérieux n'ose invoquer) n'est guère rassurant non plus.
Qui, aujourd’hui, a la moindre idée des ressorts sur lesquels il faudrait agir pour sortir de cette énorme pataugeoire ? Qui, aujourd’hui, est à la dimension du problème ? Sans parler de susciter l’unanimité, sans en appeler à je ne sais quel improbable "homme providentiel", autour de quelle « idée de la France » un homme avisé aurait l’intelligence, l'envergure, la force et l’audace de fédérer ne serait-ce qu’une majorité de Français autour de sa vision ? Ce qu'on appelait en d'autres temps un caractère ? Je veux dire un homme d'une trempe à se faire des ennemis de haute qualité, non des roquets de caniveau mordeurs de mollets ? Larrouturou ? Asselineau ? Cheminade ? Dupont-Aignan ? Soyons sérieux. Quant aux cinq du « débat » du lundi 20, je n’ai aucune envie d’épiloguer.
« Il n’est pas de sauveur suprême / Ni dieu, ni césar, ni tribun », dit un vieux tube de la chanson populaire, que les chœurs ouvriers entonnaient autrefois à la fin des banquets copieusement arrosés de rouge (liquide ou claquant au vent) et des grandes cérémonies. Mais on ne saurait se passer de ce que j’appellerai faute de mieux « volonté collective » (laissons de côté J.-J. Rousseau et sa "volonté générale").
Je me demande d’ailleurs si elle n’est pas là, la cause première du mal dont souffre la France. Un pays où triomphe la lutte de toutes sortes de « minorités » pour la « reconnaissance de leurs droits » (je ne refais pas la liste des auteurs de la grande fragmentation, qui sont les méchants), un pays où trop de monde a perdu de vue le principe national, seul socle assez homogène et rassembleur, disons-le : un pays où règne une telle discorde est pris entre tant de forces centrifuges que je ne vois pas comment qui que ce soit pourrait le faire sortir de la nasse.
"Faire barrage au Front National" n'est aujourd'hui que le minable refrain chanté par le minable comportement de toute une caste de complices, qui se sont de longue date partagé le pouvoir et les places. Le constat effrayant d'une longue imposture. Comme disait ma voisine Mme L. quand on avait bénéficié d'un très beau temps pendant plusieurs jours d'affilée : « On va l'payer ! ».
Mais sans doute ne suis-je qu'un innommable décliniste, un défaitiste odieux, un fataliste cloacal.
Voilà ce que je dis, moi.
Note : ainsi Fillon se lance dans la surenchère. Son but : attiser le feu de la haine. Voilà qu'il accuse Hollande d'entretenir un "cabinet noir". Il s'appuie, pour l'affirmer péremptoirement, sur Bienvenue place Beauvau, un livre écrit par trois auteurs, journalistes, dont deux du Canard enchaîné. L'un de ces deux, Didier Hassoux, vient de démentir catégoriquement. Il a déclaré publiquement qu'il est impossible, dans ce livre, de trouver la moindre trace du moindre complot ou du moindre "cabinet noir", et que si celui-ci existe, c'est exclusivement dans le moindre cerveau de François Fillon.
Flagrant délit de mensonge, donc ! François Fillon est un menteur ! Dieu sait pourtant que je n'aime pas François Hollande, mais il faut comprendre que l'accusation de Fillon est une pure et simple stratégie de la destruction, sans doute inspirée par l'expérience acquise sous Sarkozy, qui était spécialiste en matière de clivage et d'hostilité entre les groupes sociaux. Cela sert autant à enfumer qu'à galvaniser les troupes avant l'assaut. La logique de cette stratégie, si elle est poussée jusqu'à son terme, ce n'est rien d'autre que la guerre civile. Bravo, le présidentiable.
A ma connaissance, il existe dans le monde un seul "cabinet noir" : celui de monsieur Jean-Henri, dans La Rubrique-à-Brac de Gotlib.
On ne sait pas assez que le vieux Gepetto, avant sa marionnette chérie Pinocchio, avait fait un premier essai, mis sous le boisseau par Carlo Collodi, mais heureusement revenu au jour suite aux recherches de Gotlib, réussi pour ce qui est du façonnage du bois, mais complètement raté sur le plan moral. Voilà où finira l'infect garnement : dans le cabinet noir de M. Jean-Henri. Jean-Henri Fabre (1823-1915) est un célèbre entomologiste. Avis à tous les infects garnements ! Ils finiront dans le "cabinet noir" de Monsieur Jean-Henri, bouffés par une colonie de "termites du Sénégal septentrional" (Gotlib, au sujet de ces termites, semble être allé jusqu'à trouver des sources dans la littérature scientifique produite par un certain Lepage).
09:00 Publié dans DANS LES JOURNAUX | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : débat tf1 lundi 20 mars, france, politique, société, télévision, marine le pen, barrage au front national, fn, front national, affaire om-va, jacques mellick-bernard tapie, patrick balkany, maire levallois-perret, maire corbeil-essonnes, serge dassault, peuple français, jean-luc mélenchon, françois fillon, benoît hamon, emmanuel macron, gotlib, bande dessinée, rubrique-à-brac, gotlib rubrique-à-brac la marionnette infernale, pinocchio, carlo collodi
vendredi, 10 mars 2017
LA LAITIÈRE ET LE POT AU LAIT
Bon, disons le, Penelope n'a pas grand-chose à voir avec la robuste Hollandaise de Vermeer qui verse le lait.
Dessin de Delambre (c'est en haut de la page que ça se passe) paru dans Le Canard enchaîné du 8 mars 2017.
On sait comment ça finit :
Penelope « là-dessus saute aussi, transportée.
Le lait tombe : adieu, veau, vache, cochon, couvée ;
La dame de ces biens, quittant d'un œil marri
Sa fortune ainsi répandue,
Va s'excuser à son mari
En grand danger d'être battue.
Le récit en farce en fut fait :
On l'appela le Pot au lait ».
(Pardon pour le vers faux, la faute à la quatrième syllabe.)
J'en connais un qui est en grand danger d'être battu, mais ce ne sera pas par sa femme. Les électeurs se chargeront, je l'espère, de lui administrer la fessée qu'il mérite. Espérons qu'il ne se vengera pas sur elle de la déconvenue promise. Elle n'a rien fait de mal, puisque, tout compte fait, elle n'a rien fait.
09:00 Publié dans DANS LES JOURNAUX | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : journaux, presse, journalistes, hebdomadaire satirique, le canard enchaîné, françois fillon, penelope fillon, vermeer, la laitière
lundi, 27 février 2017
QUELLE POLICE ?
Contrôle au faciès, bavures, tutoiement systématique, brutalité ordinaire : il y a quelque chose de pourri dans la police française. Les délits d’ « outrage et rébellion », multipliés par cinq depuis les années 1990, sont devenus une commodité, presque une banalité, si ce n’est même un mode de vie, tant il est souvent dégainé : la moindre remarque d’un passant lors d’une intervention est susceptible d’être requalifiée aussitôt en « outrage », et s'il proteste, il aggrave son cas, qui devient « rébellion » dans la foulée.
Quant à ce qui se passe dans les « banlieues difficiles », c'est une caricature de tout ce qu’il ne faut pas faire. Et c’est en grande partie dû aux destructions massives commises par Nicolas Sarkozy quand il était déjà malade et ministre de l’Intérieur, instaurant la priorité à la répression sur la prévention, instaurant la « politique du chiffre » destinée à impressionner l'opinion sur l'action des forces de l'ordre en fabriquant des statistiques spectaculaires et victorieuses sur l'insécurité, réduisant les effectifs à coups de RGPP (réduction qui, entre autres effets, a produit les récentes et stupéfiantes grèves de policiers), assassinant la « police de proximité », puis la police de terrain (les Renseignements Généraux n’avaient pas bonne réputation, il est vrai, mais). On a vu l'éclatant résultat de ces « orientations » autant dans les banlieues qu’en matière de sécurité intérieure (Mohamed Mehra, etc.). Avant de remercier Hollande pour ce qu’il n’a pas construit, la France peut remercier Sarkozy pour ce qu’il a détruit.
La dernière affaire en date interpelle : Théo, un homme jeune à peau noire, a été hospitalisé avec une déchirure de 10 cm à l’anus, à cause d'une matraque à tendance sodomique. On pourrait supposer que, aux yeux du policier, le cul du monsieur ressemblait furieusement à son faciès (et le coup a été porté « à l’horizontale » !!!). Il semblerait que le responsable du geste soit connu : surnommé « Barbe-Rousse » par les jeunes du quartier, il serait coutumier. Moi qui ne descendrais pas dans la rue pour manifester en criant « Justice pour Théo », je mêlerais volontiers ma voix à ceux qui exigeraient des policiers un comportement correct. Est-ce une simple « brebis galeuse » qui fait tache dans un corps de police qui serait irréprochable ? Ou peut-on dire de ce corps que son « mal vient de plus loin » ?
J’ai malheureusement peur que la deuxième question soit la plus pertinente. Pour s’en assurer, il faut comparer les rapports que la police entretient avec la population en France et ailleurs. Sans aller jusqu’à évoquer les flics mexicains tels qu’ils apparaissent dans l’actualité, ni les milices (des bandits en uniforme, en fait) croisées à un arrêt de bus par le Consul Geoffrey Firmin, dans Au-dessous du Volcan (Malcolm Lowry), on peut émettre des critiques, tout en restant dans le comparable et l’environnement proche.
Je me rappelle l’aimable mais énergique tranchant de la main qu’une jolie policière m’avait envoyé dans l’estomac, au motif qu’elle dégageait le chemin du chien qui reniflait la piste d’une vieille dame Alzheimer dont on était sans nouvelles. Je ne doute pas de l’importance de la mission de la policière et du chien, mais pour moi, c’est l’un des « signaux faibles » qui nous disent que quelque chose cloche dans les pratiques coutumières de la police française.
En Allemagne, en Suisse, en Grande-Bretagne, les policiers, en passant dans leur école, ont appris qu’il fallait veiller à entretenir de bons rapports avec la population. Pour cela, on leur enseigne à ne pas considérer d’emblée les gens comme des suspects, et à marquer un peu de respect là où ils interviennent. On a l'impression que ce n'est pas grand-chose : juste une question de langage, de ton, de gestes et de comportement. Mais c'est plus facile à dire qu'à faire.
Car ce n’est apparemment pas au programme des formations policières chez nous. On a l’impression (j'aimerais avoir tort) que la consigne prioritaire, en France, est d’instaurer dès l’abord un rapport de force : s’il y a respect à montrer, il est à sens unique. Si la police française était vraiment républicaine, chacun de ses membres serait au contraire imprégné de la conviction que son action serait beaucoup plus efficace et admise s’il pouvait se déplacer dans la population comme un poisson dans l’eau.
S’il se préoccupait de susciter l’adhésion plutôt que la crainte. Cela n'est pas complètement hors de portée : n’a-t-on pas vu bien des gens sauter au cou des policiers après les attentats ? Cela signifie que la population, en général, ne demande pas mieux que d’aimer la police. Encore faut-il que la police fasse quelque chose pour se faire aimer, et que des policiers cessent de nous rejouer inlassablement la grande scène des cow-boys au Far-West.
Malheureusement, on n’en prend pas le chemin, comme on l’a vu lors des manifestations contre la « loi travail ». Comme on l’a vu quand Valls a reculé, à propos du contrôle d’identité, sur le récépissé obligatoire qu'il prévoyait d'instaurer. Et comme on le voit quand ça chauffe à Aulnay-sous-Bois ou ailleurs, avec le déploiement d’escouades de Robocops envoyées au front comme s’il y avait une guerre. Et comme on le voit avec l'alignement récent de l'usage des armes par les policiers sur les règles en vigueur dans la gendarmerie. Ce n’est pas en militarisant la police, en cédant à toutes ses revendications corporatistes ou en lui laissant la bride sur le cou que les gouvernants amélioreront ses résultats ou l’état de ses relations avec les Français.
Tant qu’un gouvernement n’aura pas la volonté d'apprendre aux policiers les "bonnes manières", et que la hiérarchie ne sera pas convaincue qu’une amélioration est nécessaire (l'IGPN refuse la qualification de viol dans l'affaire Théo : dans la police, on a "l'esprit de corps", et en attaquer un, même avec une bonne raison, c'est les attaquer tous), une sale mentalité régnera dans la profession. Et la population pourra continuer à craindre la police. Et les « jeunes des banlieues » pourront continuer à guerroyer. Accessoirement (pure imagination, bien sûr), on peut se demander, face à des rapports cataclysmiques entre ces jeunes et la police, si celle-ci ne travaille pas en réalité pour les imams radicaux et pour le recrutement des futurs djihadistes de Daech et consort.
Allez, pour conclure, j'ose en référer au marquis de Sade (bien que sa dissertation s'immisce dans un lieu où l'on se dénude beaucoup plus et dans des discours et des actes beaucoup plus osés que cet obscur blog n'en offre l'occasion et le spectacle, je veux parler, bien sûr, de La Philosophie dans le boudoir) : « Policiers français, encore un effort si vous voulez être [vraiment] républicains ».
Voilà ce que je dis, moi.
09:00 Publié dans DANS LES JOURNAUX | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : france, société, politique, police, forces de l'ordre, flics, outrage et rébellion, contrôle au faciès, bavures policières, nicolas sarkozy, françois hollande, police de proximité, renseignements généraux, théo, consul geoffrey firmin, malcolm lowry, au-dessous du volcan, police de terrain, maladie d'alzheimer
mardi, 21 février 2017
QUEL PRÉSIDENT ?
Qui sera le prochain président de la République française ? Sera-ce une présidente ? Les politologues se perdent en conjectures ? Un brouillard épais bouche l’horizon du paysage politique de la France ? Il faut bien reconnaître que tout ce qui structurait le paysage jusqu’à maintenant a atteint les limites de la décomposition cadavérique : les mouches et les vers s’en donnent à cœur-joie et s’empiffrent à qui mieux-mieux (« Les mouches bourdonnaient sur ce ventre putride,/ D'où sortaient de noirs bataillons/ De larves, qui coulaient comme un épais liquide/ Le long de ces vivants haillons », Une charogne, Charles B.). Il y aurait lieu de s’en réjouir, si les conséquences ne risquaient pas d’être aussi néfastes pour le pays.
Non, il n’y a pas lieu de se réjouir de l’infâme merdier dans lequel patauge la politique en France depuis quarante ans. Ce qu’on peut dire, c’est que le merdier actuel marque le dernier stade d’un processus qui n’a pas cessé. Parmi les ferments qui l’ont provoqué, je citerai en premier lieu l’homogénéité sans cesse plus grande du personnel politique : peu à peu il s’est composé de gens conformes à un seul et unique modèle, à cause (soit dit pour simplifier) de la prégnance de l’ENA dans leur formation intellectuelle, qui en fait moins des politiques que des directeurs d’administration. Car l'ENA forme exclusivement des gens en vue de la "préparation à la décision". L'ENA, à la base, ne forme pas des décideurs.
Car un homme politique n’est pas un gestionnaire : il laisse ce soin à des techniciens de la chose. Le premier métier du politique n’est pas de faire des budgets prévisionnels, des bilans ou des inventaires des moyens à disposition : le comptable et le technicien feront ça très bien. Son premier métier est de porter un regard sur son pays, d'imaginer comment améliorer sa situation, et avoir une idée de la place qu’il peut ou doit occuper dans le monde. L'homme politique, au sens le plus noble, doit être un inventeur, un bâtisseur, un architecte, en aucun cas un administrateur de l'existant. En un mot, il se fixe un objectif, puis il s’efforce de convaincre tout le monde que c’est là qu’il faut aller. La présidence Hollande est une illustration parfaite de tout ce que n'est pas un chef politique.
A cet égard, on peut dire que le cancer qui ronge la vie politique française s’appelle l’ENA (et équivalents), qui sert de marchepied à un nombre invraisemblable de nos actuels politiciens qui, très logiquement, sont imprégnés de la même façon de voir les choses et d’aborder les problèmes : une façon administrative. L'ENA instaure et perpétue une conception purement bureaucratique et technocratique de la politique. C’est moins la volonté, le caractère et la personnalité qui fait l’homme politique aujourd’hui, que la compétence (réelle ou supposée) apportée dans le traitement bureaucratique de dossiers. Le politicien d'aujourd'hui semble devoir être obligatoirement un intello (je n'ai pas dit "intellectuel") capable de pondre des "synthèses" (suivez mon regard). A noter que ce n'est pas parce qu'on se proclame anti-intello que les choses vont mieux (Sarkozy).
S’ajoute à cela que le recrutement du personnel politique s’opère de plus en plus en circuit fermé, selon une trajectoire de plus en plus uniformément balisée, qui fait de la France une république, non de gens qui l'aiment et qui ont envie de la servir, mais une république de premiers-de-la-classe, où les plus anciens, au fur et à mesure qu’ils s’élèvent, recrutent et adoubent de plus jeunes désireux de se lancer dans la carrière, jugés dignes de leur succéder parce qu’ils sont aptes, dociles et qu’ils ont fait allégeance et prêté serment de loyauté.
Et toutes les troupes de ce petit monde trouvent depuis quarante ans dans le Front National l'épouvantail magique qui a servi jusqu'à maintenant à légitimer leurs petits manèges et leurs petits calculs. Tous ces beaux messieurs de la droite et de la gauche (républicaines) se sont mis d'accord pour brandir l'étendard de la « lutte contre le Front National », pour étendre le beau rideau de fumée qui leur a évité de faire diminuer la taille de leurs fromages (cumul des mandats, indemnités diverses, petits honneurs, renvois d'ascenseurs, services rendus, ...). Ils tirent de leur statut très particulier un incroyable privilège, car il leur confère une aura voisine de celle qui nimbait les nobles d'Ancien régime. Pas un pour cracher dans la soupe.
Le Front National ne vaut pas tripette. Son succès apparent est un succès par défaut : c'est la médiocrité de tous les autres qui l'a en quelque sorte fabriqué tel qu'il est aujourd'hui. Donnez-moi des hommes politiques dignes et efficaces, et vous verrez le Front National rentrer dans son trou de souris. Les bonnes âmes qui prêchent la croisade contre le Front National ne me font même pas rire : ils me mettent en rage, car ils sonnent une charge contre un moulin à vent qui constitue en réalité une excellente manœuvre de diversion et qui fait oublier les véritables responsabilités.
Cette pratique quasi-féodale de la politique ne risque pas de laisser émerger des personnalités nouvelles, voire originales, ni un sang neuf irriguer les artères de la France. Ce système de recrutement des élites a littéralement stérilisé le terrain des possibles. Il suffit de regarder ce qui se trouve actuellement sur la ligne de départ dans le championnat présidentiel d’avril-mai. Je fais abstraction de tous les 0,5% incompressibles qui s'alignent à chaque fois.
A l’extrême-gauche (faisons semblant d’admettre l’appellation), avec La France insoumise de Jean-Luc Mélenchon, charrette sur laquelle les derniers survivants du PCF ont été obligés de monter, on a un bon tribun qui aime la boursouflure oratoire (il cite Victor Hugo sans s'attirer de tomates), mais un vieux cheval de retour qui, entré au PS en 1976, essaie de nous faire croire qu’il peut tout régénérer. Un histrion, quoi. Un olibrius si vous préférez.
A gauche (là encore, faisons semblant), Benoît Hamon, freluquet émané pur sucre du PS (pour Pédalo Socialiste), est le seul à présenter une idée nouvelle dans le paysage : le désormais célèbre « revenu universel », énorme fumisterie à la viabilité de laquelle lui-même fait semblant de croire, et dont seuls des gogos peuvent acheter le produit miracle vendu par ce camelot. Et ce n'est pas la rescousse écolo venue de Yannick Jadot (alias Jadot-lapin, à cause des carottes bio) et de son groupuscule gonflé à l'hélium qui convaincra les foules.
A droite, François Fillon l’ultralibéral doctrinaire, l'incarnation même de notre système politique agonisant, choisi triomphalement par son camp pour en porter les couleurs, a réussi à le couvrir d'immondices, compromettant ses chances d’élection, mais compte sur le temps qui passe pour que le dégoût s’affaiblisse et disparaisse, et que la raison calculatrice finisse par lui permettre, malgré tout, de l’emporter.
A l’extrême droite (républicaine, dit-on), Marine Le Pen actionne le vieux levier des fantasmes idéologiques légués par son papa (retour au franc, halte à l’immigration, …), dans l’espoir de faire passer au second plan la folie proprement délirante de son programme économique : baisse de plusieurs impôts, des tarifs de l’énergie, des droits de succession, et augmentation des effectifs de la police, de la gendarmerie, de l’armée, des salaires des fonctionnaires, des allocations, des pensions. Bref, d’un côté elle veut assécher les ressources de l’Etat, et de l’autre accroître démesurément ses dépenses. Autrement dit, Mme Le Pen nous refait le vieux coup du "demain on rase gratis". C’est la recette exacte de quelqu’un qui proposerait aux Français de faire faillite le plus tôt possible. Un suicide.
N’ai-je pas oublié quelqu’un ? Ma foi, si vous y tenez. C’est quoi, Emmanuel Macron ? Franchement, vous y croyez ? Ce n’est pas sérieux. Véritable auberge espagnole de la politique, il a inscrit sur son enseigne : "On peut apporter son manger". Il n’a ni main gauche ni main droite : il ne se situe nulle part (sens exact du mot « utopie »). Lui, il est carrément « au-dessus des nuées », comme dit Baudelaire. Il n’est pas en communication, il est en communion. Là, il « se meut avec agilité » (du même Baudelaire). Capable de dire au public de ses meetings : « Je vous aime », cet ancien banquier très propre sur lui ose un jour parler de « mystique » en politique, et le lendemain manier le « crime contre l’humanité », quand il s’agit de draguer l’électorat issu de l’immigration. Voilà, Macron n’est rien d’autre qu’un vulgaire dragueur : il veut plaire, il veut séduire, tous les moyens sont bons. Il dit à tout le monde : « Voulez-vous coucher avec moi ce soir ? ». Je dis juste : non merci, sans façon. En résumé : c'est une baudruche.
Qu’est-ce qui ressort de ce panorama ? Un diagnostic pas brillant du tout. Pour la première fois, le Front National a une petite chance d’arriver au pouvoir. Si cela advient, gare au cataclysme. Mais ce ne serait que le résultat mécanique du dépérissement de la vie politique française, asphyxiée, étouffée, étranglée par la détention exclusive des pouvoirs par deux mafias complices pour arracher les places et les centres de décision à la délibération démocratique. Deux mafias tout aussi impuissantes l’une que l’autre à modifier un réel qui se dégrade inexorablement pour un nombre sans cesse grossissant de pauvres (c'est ce mécanisme qui a porté Trump au pouvoir aux USA).
La « colère de la population à l’égard des élites » (refrain aimablement colporté par les élites elles-mêmes, qui ont plus d’un tour dans leur sac pour embrouiller, voir dans Le Figaro l’éditorial du jeudi 10 novembre 2016, signé Alexis Brézet, et intitulé « La colère des peuples », suite à l’élection de Donald Trump) est principalement due à cette confiscation des voies d’accès démocratiques à la décision politique.
Si Marine Le Pen l’emporte à la présidentielle, les Français le devront à l’institutionnalisation d’une forme de pourriture morale qui touche structurellement l’ensemble du personnel politique, qui fait de chaque responsable et de chaque élu un pourri par fonction, quelle que soit par ailleurs l’authenticité de son intégrité personnelle, et un complice forcé de la décrépitude, car ce n’est pas la probité individuelle des individus qui empêche la décomposition d’un système qui tourne principalement dans l’intérêt de sa propre conservation.
Oui, je suis en colère contre tous les postulants aux suffrages et aux places : je vois comme tout le monde le délitement à l’œuvre. Simplement, si j’étais un Américain, je n’aurais pas voté Trump, malgré tout le dégoût que pouvait m’inspirer la défunte Hillary. Je suis un Français. Je ne me vois pas reporter mon choix électoral sur Marine Le Pen, qui préfère nous proposer un suicide national rapide, de préférence à une lente agonie (peut-être pas si lente que ça, après tout).
Voilà le choix qui nous sera prochainement offert : un vieux poisson boursouflé de soi-même qui sent la marée du siècle dernier, un freluquet dont le seul avantage est de faire semblant de sortir de l’ombre, un cacique d’ancien régime qui avoue la priorité de son amour de l’argent sur tout autre idéal, un paltoquet qui a ouvert sa doctrine à tous les vents dans l’espoir de les voir se rassembler pour gonfler ses voiles, une fille à papa addict au poker et au bluff, qui a misé gros sur le pourrissement général, dans l’intention de tirer les marrons du feu. Plus personne de sensé ne peut y croire un instant.
Dans ces conditions, faut-il voter pour le « moins pire » ? Faut-il voter ? En l’état, je m’y refuse. Je ne ferai pas le déplacement. Arrive ce qui arrive, ce n’est pas mon dérisoire 44 millionième de voix qui changera quoi que ce soit au résultat. Ils n’avaient qu’à être à la hauteur. Je me dis même qu’il faudrait 44 millions d’abstentionnistes.
Et pourquoi pas un appel à la grève générale des électeurs ? Vous imaginez, zéro bulletin dans l'urne ?
Voilà ce que je dis, moi.
09:00 Publié dans DANS LES JOURNAUX | Lien permanent | Commentaires (2) | Tags : france, politique, société, électionprésidentielle, république française, politologue, ena, école nationale d'administration, nicolas sarkozy, françois hollande, jean-luc mélenchon, la france insoumise, pcf, benoît hamon, parti socialiste, ps, revenu universel, françois fillon, penelope fillon, penelopegate, extrême-droite, marine le pen, front national, emmanuel macron, en marche, baudelaire, donald trump, journal le figaro, alexis brézet
vendredi, 17 février 2017
POURRITURE JOURNALISTIQUE
Guillaume Erner avait invité dans son émission des « Matins » de France Culture, jeudi 16 février, un certain Henri Maler, fondateur de l’Acrimed (Action Critique Medias). Il a eu la malheureuse idée d’inviter, pour lui donner la réplique en deuxième partie, Laurent Joffrin, directeur de la rédaction de Libération. Je me rappelle une émission « Répliques » où Alain Finkielkraut avait invité Laurent Obertone, auteur de La France Big Brother, et le même Laurent Joffrin.
Le comportement de ce dernier pendant ce qui aurait dû rester un débat avait été absolument infect : c’est bien simple, Obertone n’avait pas pu prononcer une seule phrase entière, tellement Joffrin parlait en même temps que lui, l’interrompant et ne cessant de lancer des « piques » contre ses propos, si bien que l’auditeur n’avait pu entendre que des bribes de son discours, que le directeur de Libé avait soigneusement cisaillé et découpé en morceaux minuscules, les rendant impropres à la consommation.
De nouveau invité sur un plateau de France Culture, face à Henri Maler cette fois, Laurent Joffrin a réédité son opération de pilonnage permanent de l’adversaire. Il en a fait une méthode. Mais c’est une méthode de forban et de minable fripouille médiatique. Henri Maler a eu bien raison, entre deux tirs, de répéter qu'il n'y avait pas de débat.
Invité pour parler des problématiques tournant autour de l’exercice du journalisme aujourd’hui, Joffrin a commencé par éjecter la question générale pour la réduire au cas spécifique de Libération et de sa propre fonction au sein de cette rédaction-là, au prétexte qu’il ne pouvait parler que de ce qu’il connaissait (mon œil !). Ce qui ne l’a pas empêché d’ajouter un peu plus tard qu’il a occupé des postes au sein de neuf rédactions successives. Moyennant quoi, bien qu'ayant exercé des responsabilités et passé toute sa carrière dans le milieu, il n’a aucune idée globale sur l’exercice de la profession !!! Il a réussi à abaisser ce débat tant soit peu général à une toute médiocre querelle de personnes, ce dont l'autre invité Henri Maler n'avait strictement rien à faire. Joffrin ne supporte pas l’altitude, qu’on se le dise : il ne se déplace que le plus près possible du sol, le nez dans la bouse. Joffrin ne supporte pas qu'on lui mette le nez dans l'odeur produite par sa conception des métiers de la presse.
C’est le meilleur moyen pour empêcher la question principale d’être seulement formulée en termes intelligibles : peut-on émettre un discours critique sur la façon dont la profession du journalisme est pratiquée ? Dont elle est organisée et encadrée ? Dont elle est enseignée ? Une profession au sein de laquelle un tout petit nombre de gens détient l’autorité sur les rédactions (Henri Maler en compte une soixantaine, il y a trente mille journalistes en France). Une autorité qui les autorise à pondre des papiers qu’on appelle « éditoriaux ».
Ce sont les « éditorialistes ». Ils forment ce qu’Henri Maler appelle « l’éditocratie », vous savez, les seigneurs qui mangent à toutes les tables, et pissent dans la nuit la copie qui paraîtra le lendemain. Curieusement, l'exercice qu'on appelle en France la « revue de presse » ne consiste pas, en général, à faire une collecte d'articles (enquêtes, reportages, ...) particulièrement intéressants, mais à faire écho à ce qui est sorti de la plume des éditorialistes. Or qu'est-ce qui sort de leur plume ? Des informations ? Que nenni ! Non, il sort du commentaire. Et ça ronronne, ça tourne rond, ça tourne en rond.
Car ce commentaire, bien qu'il soit signé d'un nom, s'inspire plus ou moins des propos tenus à table hier au soir par divers convives : député, sénateur, chef d'entreprise, etc. On appelle « dîner en ville » cette habitude du journalisme mondain. C'est la raison pour laquelle tous les éditoriaux, sous leurs différences cosmétiques, se ressemblent, se miment les uns les autres, moulinent une seule et même matière, étant en réalité puisés à la même source. La dite source est située "en haut". D'où la jamais formulée prétention des éditorialistes à "faire l’opinion" : c’est aussi faux (voir le résultat de leur appel unanime au "oui" au référendum de 2005) qu’il est néanmoins vrai qu’ils exercent un pouvoir. Au moins occupent-ils le terrain, ce qui n'est pas un mince avantage (ne serait-ce que pécuniaire).
On me dira que c’est un pouvoir en vase clos, qui ne saurait donc étendre son emprise au-delà des parois du bocal. Certes, rétorqué-je, mais regardez les vieux poissons qui reviennent sur les écrans des aquariums télévisuels : Franz-Olivier Giesbert, Laurent Joffrin, Philippe Val, etc. Toujours les mêmes. Combien de ces vieux poissons dans le bocal, finalement ? Aussi vieux dans le métier que les politiciens qu'ils aiment à côtoyer. Et je pose la question : qu’est-ce qui les légitime, à la place d’où ils s’adressent au peuple, pour distribuer la bonne parole ? Réponse : rien. C’est le principe même du vase clos.
Parmi toutes ces têtes à se faire appliquer des tartes à la crème sur la figure, parmi toutes ces têtes à gifles ou à poing dans la gueule, parmi tous ces roitelets à jabot gonflable, Laurent Joffrin mérite une sorte de palme. Car il quintessencie en sa personne tout ce que mérite d’épluchures et d’œufs pourris l’élite journalistique régnante : l’arrogance, le cynisme, la mauvaise foi, le mépris de l’interlocuteur.
Laurent Joffrin est une belle figure de la bassesse professionnelle. Un concentré de tout ce qui a déconsidéré moralement le métier de journaliste. Certes, Balzac n'était déjà pas tendre à l’égard de celui-ci dans Illusions perdues, mais quelques plumes au 20ème siècle avaient pu faire croire à l'ennoblissement du métier par le sens de l’honneur dans son exercice (Albert Londres, Henri Béraud (si !), Joseph Kessel, Albert Camus, François Mauriac, …). Laurent Joffrin revient aux fondamentaux : il rend au caniveau la dignité et le rang d’auge à journalistes, où Lousteau (l'"ami" de Rubempré) se déplaçait avec son aisance de seigneur décavé.
Laurent Joffrin fait partie de la caste de ces mini-vizirs Iznogoud qui, avec leur redoutable douceur de Raminagrobis et sans vouloir devenir califes à la place du calife, font régner une mini-Terreur dans les rangs des subordonnés et sont passés maîtres dans l’art d’empêcher toute critique venue de l’extérieur, comme il l'a montré par deux fois sur France Culture, face à ses interlocuteurs. Pour ce qui est de l'intérieur du métier, l'omerta est aussi impérieuse dans le journalisme français que dans le peloton du Tour de France à propos du dopage. Ceux qui entrent dans le métier ont tellement peur de la précarité qu’ils passent sous toutes les fourches caudines qui se présentent. D’une certaine manière, on les comprend. Mais il est permis de le déplorer.
Il reste que, dans l’émission france-culturelle de Guillaume Erner du 16 février, la présence de Laurent Joffrin permet de comprendre pourquoi, si en soi la profession ne mérite aucun opprobre de principe, la façon dont elle est organisée et pratiquée par ses élites dirigeantes est un objet de mépris. Monsieur Guillaume Erner, pourquoi infliger une nuisance à l'auditeur ?
Et en observant l’espèce de complicité objective entre les élites politiques, les élites économiques et les élites journalistiques, je me dis qu’il n’y a pas de hasard si la presse quotidienne nationale (PQN) "jouit" d’un tel désamour du lectorat, puisqu’elle ne survit que grâce à des injections massives d’argent public, et pour véhiculer principalement la « parole d’en haut ». L'élite journalistique est aussi complètement déconnectée de la réalité populaire que l'élite politique et que l'élite économique : tant que l'argent rentre et que la situation est assurée, le mot d'ordre est : fi du petit peuple ! Diantre ! Palsambleu !
Comme le dit un proverbe bantou (chinois ?) : « Quand le poisson pourrit, ça commence par la tête ».
Voilà ce que je dis, moi.
09:00 Publié dans DANS LES JOURNAUX | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : journalisme, journalistes, presse écrite, presse quotidienne nationale, pqn, henri maler, france culture, acrimed, action critique médias, alain finkielkraut, répliques finkielkraut, laurent obertone, la france big brother, laurent joffrin, journal libération, éditorialistes, journalisme de commentaire, franz-olivier giesbert, ma petite entreprise connaît pas la crise, référendum 2005, albert londres, henri béraud, joseph kessel, albert camus, françois mauriac, balzac illusions perdues, rubempré lousteau, vizir iznogoud, guillaume erner, entartage le gloupier, noël godin, france, politique, société, françois ruffin, journal fakir
samedi, 11 février 2017
LES "COUPS" DU PÈRE FRANÇOIS
Lettre ouverte à tous ceux qui nous font honte d'être Français.
Les coups de projecteur sur les activités de François Fillon, et sur la réalité des inactivités grassement rémunérées de son épouse Penelope et de ses enfants Marie et Charles, ont mis en pleine lumière une bonne part de ce qui rend l'ensemble du personnel politique français vomitif et haïssable aux Français, et surréaliste aux yeux du monde, qui regarde notre pays avec effarement.
Mais si le cas Fillon suscite un tel dégoût, ce n'est pas seulement parce qu'il révèle une pourriture particulière. Car si Fillon (et beaucoup d'autres) a pu prospérer à ce point et si longtemps, c'est que tout le système politique fonctionne de façon à autoriser de telles pratiques, et quand je dis "autoriser", c'est peut-être "favoriser", voire "organiser" qu'il faut entendre. C’est tout le fruit qui est véreux jusqu’au cœur.
Le pire dans cette affaire est que le cas particulier Fillon n'est que la caricature de mœurs très communément partagées, qui font des députés, sénateurs et ministres cette odieuse caste de privilégiés, sans parler de tous les rats mis « en réserve » (= recasés tant bien que mal pour "services rendus") dans des sinécures plus ou moins fromagères : siège dans une "Haute Autorité", au CSA, au Parlement européen, au Conseil économique et social (véritable malle au trésor réservée à tous les récompensés des "petits services"), Institut du monde arabe (pour Jack Lang), direction d'un des très nombreux "Observatoires" lucratifs mis en place depuis des décennies, et un nombre indéterminé de planques moins voyantes. La pourriture est dans les "usages", les "habitudes" et les "coutumes" en vigueur parmi les élites politiques, un pli qui a été pris avec la professionnalisation des fonctions politiques.
Les ministres suédois, quant à eux, mangent à la cantine, et les députés se déplacent à vélo et voyagent en train : de quoi tomber de sa chaise quand on compare. De quoi être écœuré jusqu'à la nausée par ce que se permet un homme qui trait les contribuables comme une vache à lait, et qui ose se présenter à leurs suffrages pour diriger le pays.
C'est le statut actuel des hommes politiques qui doit être rayé de la carte. Le "sortez les sortants" est une poudre aux yeux. Le "dégagisme" vociféré par le vieux poisson Mélenchon est totalement illusoire s'il ne s'accompagne pas de la décision de jeter à bas la structure entière du mode de désignation des "élites" politiques. Il est frappant de constater que Mélenchon, Hamon, Valls, Fillon, sauf erreur, n’ont jamais vécu ailleurs que dans le petit monde des politiciens professionnels. Marine Le Pen est juste une fille-à-papa. Quant à Macron, candidat de la banque (au fait, d'où tire-t-il les ressources qui lui permettent de faire campagne en grand ?), qui peut voir un instant, en cet immature paltoquet (Le Robert : « homme insignifiant et prétentieux »), un chef de l’Etat ?
Pour moraliser la vie politique française, il y a un excellent et efficace moyen : cesser de doter les mandats électifs d'avantages matériels (financiers et autres) si consistants qu'ils ne peuvent que susciter concurrences et rages de convoitise. Cesser de rendre ces postes éminemment désirables pour les ramener à leur fonction originaire : servir le pays en faisant les lois. Cela redonnerait à la fonction parlementaire la signification noble et respectable que des pratiques complaisantes ont avilie et dévoyée. Sans aller jusqu'à assécher complètement le fleuve Pactole, il faudrait en enserrer le débit entre des digues sûres.
Pour commencer, on pourrait revoir à la baisse le nombre des parlementaires, cesser de les rémunérer avec l’argent public comme s’ils étaient des patrons de PME florissantes (plus de 12.000€ (indemnité + frais de mandat), sans compter les crédits pour payer des collaborateurs : on voit avec Fillon où peut aller cet argent), les obliger à abandonner leur fauteuil de maire s’ils veulent être députés ou sénateurs, leur interdire d'occuper plus d'un poste (Gérard Collomb, qui vient de rejoindre Macron, est à la fois maire, sénateur et président de la Métropole de Lyon : vous trouvez ça normal ?), d’assurer plus de deux mandats d’affilée, les faire retourner à la vie civile après avoir joué leur rôle, sanctionner la moindre absence aux débats, bref, les obliger à descendre de leur piédestal confortable et de mettre pied à terre, et tout faire pour empêcher qu’ils puissent se considérer autrement que comme des personnes ordinaires.
Car le plus choquant dans l’histoire Fillon (après d’autres) est l’impression qu’il a produite de se sentir dans son bon droit, invulnérable, immunisé contre la réalité commune (nous faire le coup de l’indignation, franchement, il nous prend pour qui ?). La césure entre la caste des politiciens (avec tous ceux qui gravitent autour, en profitent et filtrent ce qui leur arrive de la réalité) et la population française ne sera comblée qu’à ce prix. Malheureusement, mon sentiment intime est qu'elle n'est pas près d'être comblée.
Encore plus choquant : je m’étais senti humilié en tant que Français par la bassesse arrogante d’un Nicolas Sarkozy allant mendier des stylos de luxe dans les rencontres internationales ; je me suis senti humilié en tant que Français par l’indécision pathologique d’un François Hollande, obsédé de faire la « synthèse » et de ne se mettre mal avec personne ; aujourd’hui je me sens humilié en tant que Français par le cynisme impavide d’un François Fillon capable, comme tant d'autres, de laisser la France ridiculisée dans la presse internationale pour les mœurs corrompues de son personnel politique, et indifférent au discrédit moral dont le pays tout entier est l'objet.
François Fillon, comme les autres, nous fait perdre le sens de la dignité et de l’honneur. François Fillon, qui se prétend homme d’Etat, n’hésite pas à laisser fouler aux pieds l’honneur de la France, qu’il aspire à diriger.
Honte sur lui. Et honte sur nous tous Français, s’il venait à être élu.
Voilà ce que je dis, moi.
09:00 Publié dans DANS LES JOURNAUX | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : france, politique, société, chambre des députés, palais bourbon, palais du luxembourg, sénat, françois fillon, penelope fillon, corruption, haute autorité, csa, parlement européen, benoît hamon, jean-luc mélenchon, manuel valls, emmanuel macron, dictionnaire le robert, marnie le pen, gérard collomb, lyon, métropole de lyon, nicolas sarkozy, françois hollande, conseil économique et social, institut du monde arabe, jack lang
samedi, 04 février 2017
HÉROÏQUE FILLON
On avait déjà entendu le refrain : « Je reste droit dans mes bottes. Je ne me laisserai pas abattre. Ce sont des calomnies. Ami entends-tu le vol noir des "officines" sur la plaine ? ». François Fillon fait front. Il est courageux. Il n'a surtout pas envie de voir lui échapper le fromage qu'il a dans le bec. Et ce ne sont pas les renards qui complotent en secret et fomentent un "coup d'Etat institutionnel" (il faut être très gonflé) qui l'en feront démordre.
Il est curieux dans cette affaire que beaucoup d'intervenants médiatiques reprennent en chœur le terme "accusations" que Fillon a prononcé dès ses premières réactions. Jusqu'à plus ample informé, Le Canard enchaîné n'a publié que des informations et des témoignages directs. Il ne faut pas confondre.
Encore plus curieux : Fillon, s'il dénonce des "calomnies", n'a pas porté plainte en diffamation contre Le Canard enchaîné. La conclusion à tirer ? Tout est vrai.
Autre réaction entendue : il n'a rien fait de mal, tout est parfaitement légal, d'ailleurs il n'est pas le seul parlementaire à avoir "embauché" un ou plusieurs membres de sa famille. C'est légal ? Faut voir : Penelope a elle-même déclaré à des journalistes anglais qu'elle n'a jamais travaillé pour son mari et ne s'est jamais mêlée de politique. Un aveu par anticipation : l'épouse avait déjà cafté. Le boulot était bel et bien fictif.
Et puis le million d'€ (Le Canard de mercredi dernier) dans la caisse familiale, c'est bien de l'argent du contribuable. C'est bien du détournement. Et ne parlons pas du suppléant Marc Joulaud, qui s'est proprement fait essorer par le clan : l'indemnité parlementaire était même inférieure au montant que Penelope a touché en "travaillant" pour lui.
Moralité ? Monsieur Propre n'était qu'un vil combinard.
Maintenant, qui a balancé le dossier au Canard ? Probable que quelqu'un de la famille (politique) bien placé au Parlement et à Bercy s'est fait un malin plaisir (pourquoi pas un "ami" envoyé par Sarkozy ? Les sarkozystes étaient paraît-il écroulés de rire en voyant la pitoyable ligne de défense de Fillon à la télé). Seigneur, protégez-moi de mes amis : mes ennemis, je m'en charge !
Le pire, dans tout ça, c'est que, s'il parvient à ne pas quitter la scène couvert d'épluchures de pommes de terre, il garde une (petite) chance d'être élu.
Les Français, quel peuple admirable !
09:00 Publié dans DANS LES JOURNAUX | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : france, politique, société, françois fillon, corruption, penelope fillon, marc joulaud, nicolas sarkozy, emploi fictif, le canard enchaîné
lundi, 30 janvier 2017
POLITIQUE : PAYSAGE DE RUINE
Il faut regarder les choses en face : le système politique en vigueur en France n'est plus à bout de souffle : il est moribond, même s'il ne le sait pas, même s'il ne veut rien en savoir.
Du côté droit, on a un beau dénégateur de l'évidence, qui ne prêche que les convaincus en espérant faire croire que les infâmes accusations (il confond avec "informations") parues à propos des rémunérations dont a bénéficié sa femme Penelope (à l'anglaise, sans accent), c'est que des menteries indignes d'une vraie démocratie, en même temps qu'une honteuse campagne de dénigrement sexiste et misogyne. S'il vous plaît, soyez des gentlemen, ne vous en prenez pas à une faible femme !
Ce faisant, et premier point, Fillon fait montre d'un culot colossal et désopilant. Je lui réponds : fallait pas commencer par la mettre dans la même casserole que toi, espèce de ceci-cela ! Comme Plick et Plock l'apprennent à leurs dépens : "il faut réfléchir avant d'agir". Comme je pense que tout cela était mûrement réfléchi, va pas te plaindre de la méchanceté du monde !
Deuxième point : le monsieur oublie de répondre aux informations (il confond avec "accusations") du Canard enchaîné. Il ne prend même pas la peine de dire que c'est faux. Je fais observer finement ce qu'aucun journaliste ne semble avoir remarqué : François Fillon a soigneusement évité d'annoncer urbi et orbi qu'il allait porter plainte pour diffamation. La première réponse, quand on est l'objet d'une "dénonciation calomnieuse", est en effet - au moins - de porter plainte en diffamation.
Or dans toutes ses réactions, Fillon s'est bien gardé de répondre sur le fond, il a préféré se draper dans la dignité supposée de l'innocent injustement accusé et de l'époux défendant l'honneur de l'épouse outragée. Cette réaction théâtrale, qui n'est faite que pour galvaniser le camp des adeptes, sonne comme la reconnaissance de l'impeccable véracité des éléments avancés dans l'hebdomadaire. C'est même une preuve que tout est vrai, puisque rien n'est contesté.
Troisième point : j'ai lu et relu le dossier du dernier Canard enchaîné pour être bien sûr que j'avais compris ce qu'il y avait à comprendre. Conclusion : un vrai travail de vrais journalistes, solide, documenté, étayé, irréprochable, de quoi me réconcilier avec la profession, c'est dire. Une enquête signée d'un trio : Isabelle Barré, Hervé Liffran et Christophe Nobili, qui occupe trois quarts de la page 3.
L'atout de l'enquête du palmipède satirique, c'est d'abord les éléments matériels qui établissent dûment les faits : les fiches de paie de Penelope, où figurent les chiffres ahurissants de ses rémunérations. C'en est au point que la quasi-totalité de l'enveloppe de Marc Joulaud (successeur de Fillon au Parlement) est touchée par l'épouse-modèle, au détriment des deux collaborateurs officiels : Igor Mitrofanoff et Jeanne Robinson-Behre. Cette dernière n'a jamais rencontré Penelope dans le cadre de son travail. Il faut relever au passage que les gens cités dans l'enquête témoignent à visage découvert. C'est un atout supplémentaire à porter au crédit du Canard. Et ils sont tous d'accord pour se déclarer surpris d'apprendre que madame Fillon exerçait une activité rémunérée !
Passons sur les prestations "littéraires" de madame Fillon : Michel Crépu, alors directeur de la Revue des deux mondes a, en tout et pour tout, aperçu deux ou trois notes de lectures, au total une page et demie, en tout cas pas de quoi justifier un salaire de 5000 euros par mois pendant deux ans. Et je ne parle pas de ce que François Fillon a, paraît-il, comme plusieurs de ses collègues, traficoté avec les enveloppes reçues quand il était au Sénat (affaire soulevée par Mediapart).
A gauche maintenant. A entendre le cri du cœur presque unanime sorti hier soir au QG de Benoît Hamon, "la gauche a relevé la tête". M'enfin (comme dirait Gaston), vous n'êtes pas sérieux, les gars ! Hamon ? Il s'est converti assez récemment à l'écologie politique, il propose le revenu universel, il est prêt à des "accommodements raisonnables" avec les populations musulmanes (pour le burkini, quid de la burka et du niqab ?, etc.), il est favorable aux réformes sociétales "émancipatrices" : bref, il a fait la liste des courses en fonction des publics qu'il compte inviter à sa table. On pourrait aussi dire qu'il a conçu la carte du menu de façon à attirer telles et telles catégories d'appétits. Tout ça pue à plein nez la clientèle électorale.
Quant à l'idée du revenu universel, si elle part d'un constat juste (le travail parti ne reviendra pas), elle aboutit à un mirage qui tient de la fantasmagorie. Au lieu de vouloir payer les gens à ne rien faire, Benoît Hamon aurait mieux fait de proposer de travailler à l'instauration d'un système fiscal plus redistributif et d'un système économique moins inégalitaire (ce qui aurait au moins le mérite de procurer à l'Etat les ressources qui lui font défaut).
Au mois de mai, les électeurs auront le choix entre un certain nombre de miasmes. Quelle mauvaise odeur préférez-vous ? La pourriture de droite ou la fumée de gauche ? Qu'est-ce qui vous plaît le mieux, le nauséabond de droite ou l'écœurant de gauche ?
A moins que vous ne voyiez dans le petit qui n'est "ni à droite ni à gauche" un "homme nouveau" ? Et qu'à force d'aimanter les ralliements de divers côtés, celui-ci ne parvienne à faire croire qu'il a et la carrure et un programme crédible ? On verra. Je ne mentionne que pour mémoire les deux égarés situés aux deux bouts de l'hémicycle.
Il paraît que le prochain président de la France figure dans le casting de ce tout petit monde. Avis aux nez sensibles : préparez les masques à gaz ! Ça n'a pas fini de cocotter.
Voilà ce que je dis, moi.
09:00 Publié dans DANS LES JOURNAUX | Lien permanent | Commentaires (2) | Tags : france, politique, société, primaire de gauche, belle alliance populaire, benoît hamon, manuel valls, jean-christophe cambadélis, françois fillon, penelope fillon, canard enchaîné, isabelle barré, hervé liffran, christophe nobili, marc joulaud, igor mitrofanoff, jeanne robinson-behre, parlement, chambre des députés, sénat, palais du luxembourg, michel crépu, revue des deux mondes, mediapart, élection présidentielle, christophe georges colomb, les malices de plick et plock christophe
mercredi, 25 janvier 2017
L'ÉCOLE "PRIMAIRE"
Ça m'a traversé l'esprit. Pas longtemps, certes. Disons un instant. Je voulais déposer mon petit commentaire sur le catafalque de la déconfiture exhibée fièrement par le Parti "Socialiste" à l'occasion de la primaire de la gauche. Saura-t-on un jour la vérité sur le nombre définitif des votants ? Et puis j'ai relativisé quand quelques vers de Baudelaire me sont revenus :
« Au-dessus des étangs, au-dessus des vallées,
Des montagnes, des bois, des nuages, des mers,
Par delà le soleil, par delà les éthers,
Par delà les confins des sphères étoilées,
Mon esprit, tu te meus avec agilité, ...»
À ces hauteurs célestes, du cloaque où barbotent des sales gosses, plus aucun miasme ne parvient. Allons, tout cela ne vaut pas un iota de notre attention.
06:46 Publié dans DANS LES JOURNAUX | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : baudelaire, poésie, les fleurs du mal, parti socialiste, manuel valls, benoît hamon, primaire de la gauche, belle alliance populaire
lundi, 23 janvier 2017
ESCLAVES, C'ÉTAIT AUTREFOIS
Rue Calas.
Photographie Frédéric Chambe.
Comment ? Toujours pas terminés, les travaux ?
***************************************************
Titre vu dans Le Monde (des livres), 20 janvier 2017.
Recension du roman No Home de Yaa Gyasi, citoyenne "ghanéenne-américaine" (comme on dit chez les bien-pensants États-Unis), sous la plume de Gladys Marivat.
Qu'on se le dise une fois de plus :
1 - l'esclavage étant aujourd'hui un "lieu de mémoire", il faut dire que c'était dans les anciens temps, donc que cet âge obscurantiste est à jamais révolu, mais que néanmoins le crime est à jamais ineffaçable sur l'ardoise de ceux qui l'ont commis. Tant que nous y sommes, ajoutons-y tous leurs descendants, jusqu'à la soixante-dix-septième génération.
2 - les méchants étaient les blancs, les victimes sont toujours et encore les noirs.
3 - les bons noirs n'ont pas fini de rappeler aux méchants blancs, seuls coupables, qu'ils ne sont pas près d'en finir avec « les mémoires » de l'esclavage. Les méchants blancs n'auront jamais fini de payer.
Moralité, seule la traite négrière transatlantique est vénérable, il n'y a eu d'esclaves qu'aux Amériques en général, et aux Etats-Unis en particulier, et les ancêtres des Européens sont leurs complices.
Qu'on se le dise une fois de plus :
4 - les Africains à peau noire n'ont jamais vendu à d'autres Africains à peau noire et aux méchants blancs des hommes et des femmes à peau noire.
5 - les Arabes n'ont jamais traversé le Sahara pour aller en Afrique noire pour s'approvisionner en hommes et en femmes à peau noire.
6 - mais le plus important est qu'il n'y a plus un seul esclave aujourd'hui, au Niger, en Mauritanie, dans la péninsule arabique, ailleurs.
Remarque subsidiaire : si par le plus grand des hasards il y en avait ici ou là, ils auraient intérêt à la boucler, et l'on attendrait quelques siècles pour faire cesser les traitements inhumains et dégradants, pour raconter leur histoire et pour en faire des romans. En attendant, ne nous laissons pas leurrer par les colporteurs de rumeurs forcément malveillantes.
09:00 Publié dans DANS LES JOURNAUX, PAS PHOTOGRAPHE MAIS | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : photographie, lyon, croix-rousse, esclavage, esclavage des noirs, traite négrière transatlantique, afrique noire, yaa gyasi no home, journal le monde
vendredi, 02 décembre 2016
UN BIEN CURIEUX PAYSAGE
J'ai trouvé ce dessin aquarellé (papier Canson, 264 x 196 mm.) dans un livre acheté naguère chez un bouquiniste du quai de la Pêcherie : j'aime bien ce genre de surprise. Un paysage qui se veut onirique, où l'on trouve quelques détails qui colorent vaguement l'ambiance en naïvo-surréaliste, de leur petit attirail d'objets intrus (cochon en premier plan, flèche dans le plongeoir). Est-on en plein jour ou sous la pleine lune ? C'est un gentil dessin, plutôt bien exécuté : les contours sont précis, l'herbe (blanche autour de la piscine) et le miroitement de l'eau sont rendus avec soin. Je dirais même avec application.
Voilà la signature qu'on trouve en bas à droite.
*****************************
*****************************
Il était beau, le refrain de 1998 : « Et un, et deux, et trois-zéro ». Là, ça se passe à table. D'abord Sarkozy, l'infâme kloug aux marrons (Le Père Noël est une ordure, l982), qui refoule salement du goulot et qui fait fuir une bonne partie des convives. Ensuite Juppé, la plante en pot que la maîtresse de maison a habilement posée au milieu pour dissimuler les convives d'en face. Enfin Hollande, le dessert tremblotant qu'Andréa Ferréol apporte à Philippe Noiret, à la fin de La Grande bouffe (1973).
Trois quilles avec trois boules : le rendement est plutôt faible. Il faut faire comme Juppé : "continuer le combat", comme il a osé dire après le premier tour. Même s'ils ne sont pas nuls, on les a bien assez vus. C'est pourquoi je propose d'entonner le refrain : "Et un ! Et deux ! Et trois ZÉROS !" Les trois premiers zéros à tomber. Il y en a quelques autres.
09:00 Publié dans DANS LES JOURNAUX | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : nicolas sarkozy, alain juppé, françois hollande, le père noël est une ordure, la grande bouffe, philippe noiret, et un et deux et trois zéro
vendredi, 11 novembre 2016
DE QUOI DONALD TRUMP EST-IL LE SIGNE ?
De quoi l’élection de Donald Trump est-elle le symptôme ? Je n’ai aucune qualification spéciale pour répondre à cette question. Je m’informe, et je tâche, vaille que vaille, de mettre un peu de cohérence dans tout ce que j’engrange en mettant bout à bout les éléments hétéroclites que je picore à droite et à gauche. En un mot : je bricole. Certains appelleraient ça « la quête du sens ». Pourquoi pas ?
Alors Trump ? Alors le « populisme » ? De quoi ce mot est-il le nom ? J’émets une hypothèse : je regarde la situation dans laquelle l’économie et la politique ultralibérales ont plongé une large classe moyenne aux Etats-Unis. Des chiffres hallucinants : cent vingt millions d’Américains sont pauvres. Gabriel Zucman (La Richesse cachée des nations) écrit dans je ne sais plus quel journal qu’en cinq ou dix ans le 1% le plus riche de la population américaine a capté 85% de la hausse du niveau de vie. Etonnez-vous ensuite que ça produise des effets indésirables !
Qu’est-ce qui a produit une telle situation ? Pourquoi les inégalités ont-elles à ce point explosé ? Pour moi, la réponse est claire : le système économique, aveuglément libéralisé et financiarisé, qui règne aujourd’hui sans partage, conduit très logiquement à l’appauvrissement et à la précarisation de la plus grande partie de la population. C’est le refus de voir cette terrible réalité, de la part de tous les gens installés (les politiciens, sondeurs, économistes, journalistes, etc., bref, tous ceux qui ont intérêt à ce qu’un tel système perdure parce qu’ils croquent dans le fromage), qui a produit en toute logique le vote Trump.
Moralité : le populisme ne naît pas (ou pas seulement) tout armé « sponte sua et ex nihilo » du cerveau dérangé de quelque dictateur au petit pied (Kaczinsky en Pologne, Orban en Hongrie, Chavez au Venezuela, ...). Le populisme est le produit logique, quasiment nécessaire, du système tel qu'il fonctionne. Le populisme est une opportunité qui a été rendue possible et électoralement efficace par un système économique qui ravage la planète, et plonge des populations entières dans la précarité, la misère et le désespoir. Trump est une conséquence logique. Une drôle de conséquence quand même : c'est la première fois que le simple fait d'être un milliardaire sert d'argument pour se faire élire. Tout un symbole. Pauvres pauvres qui ont voté pour lui. Ils ne vont pas tarder à déchanter. Pardonnez-leur, parce qu'ils ne savaient pas ce qu'ils faisaient. S'ils avaient su ce qui les attend à présent ...
Trump, on peut en penser ce qu’on veut, qu’il est vulgaire, sexiste, ignare, raciste, arrogant, antipathique, et tout et tout. Une caricature de clown. Certes, mais il est avant tout le symptôme de l’état pathologique dans lequel l’économisme déchaîné a mis le monde. L'invraisemblable succès de cette invraisemblable personnalité est proportionnel à l'exaspération de beaucoup d'Américains face à la montée des injustices dans la société.
Son succès a une autre explication : la faiblesse morale de son adversaire. Hillary Clinton, largement déconsidérée, incarne à la perfection la pourriture politique dans laquelle baigne l’élite des élus, et les compromis et compromissions dont ils se rendent coupables avec les géants de la finance et de l’économie, dont ils apparaissent les complices. Elle symbolise, aux yeux des gens que 2008 a plongés dans la précarité (subprimes), toutes les causes de leurs problèmes.
Une autre explication encore : 59 millions d'électeurs ont voté pour lui. Si Clinton bénéficie à peu près du même nombre de suffrages (1 million de plus), ça fait à peu près 120 millions de votants. Or il y a 231 millions d'électeurs aux Etats-Unis. Cela fait une grosse moitié de la population qui s'est déplacée. Trump a été élu avec 25,8% des voix. Cela signifie que ce que représentent les deux principaux candidats est pour quelque chose dans la répugnance des gens à aller voter (quoique l'abstention soit une maladie chronique aux Etats-Unis).
C'est un peu la même chose en France, où le Front National ne doit son émergence et sa progression qu'à la médiocrité toujours plus répugnante du personnel politique en place et à la désertion des bureaux de vote par les électeurs que cette médiocrité a provoquée. La médiocrité explique l'abstentionnisme massif, et accessoirement la disqualification de la démocratie représentative. Quand je dis "médiocrité", je veux dire l'absence totale dans le personnel politique de "sens de l'Etat" : tous ces gens ne pensent qu'à leur petite carrière.
Accessoirement, on peut se gausser de la pertinence des « instituts de sondage » en général et américains en particulier, avec leurs statisticiens, leurs questions, leurs calculs de probabilités et leurs « doigts mouillés » (il paraît cependant que les sondages publiés par le Los Angeles Times sont les seuls à avoir donné régulièrement Trump gagnant). Quand ils n’avaient pas vu venir le « Brexit », les journaux s'étaient empressés de faire amende honorable le lendemain, sur l’air de : « Il faut faire preuve d’humilité. Nous ne le ferons plus. Plus jamais ça ». Mon Dieu, que de bonnes intentions les lendemains de plantage ! Et que de rechutes à la première occasion !
L’élection américaine a balayé l’humilité. Les sondeurs, relevant le front et retrouvant leur arrogance de pseudo-scientifiques, ont foncé comme s’il ne s’était rien passé en Angleterre. Résultat, ce matin (jeudi 10), j’entendais aux informations des phrases du genre : « Les sondeurs, les journalistes, les médias ont déclaré qu’il était urgent de procéder à un examen de conscience ». Examen de conscience ! On aura tout entendu ! Gageons que tout ce petit monde, à la prochaine échéance, aura eu le temps de "prendre de bonnes résolutions", avant, le moment venu, de revenir aux méthodes favorites. Dame ! Il faut bien vivre !
Quant aux sondeurs français de 2017, parions qu’ils auront pris bonne note des errements de leurs confrères anglais et américains, et qu'ils auront à cœur de les imiter en tout point. Sondeurs, journalistes, politiciens, politologues, directeurs de journaux, éditorialistes et tutti quanti regardent le monde avec les mêmes lunettes. Ils se sont fabriqué une grille de lecture unique, qu’ils plaquent sur toutes les situations et les réalités qui se présentent, et en tirent infailliblement, après des analyses savantes, des significations, des explications, des conclusions péremptoires, jusqu’au démenti que leur infligeront les dites situations et réalités.
Le principe du sondage (avec la foutaise affabulatrice de ses « échantillons représentatifs » démesurément extrapolés ensuite à la population entière : « Vous êtes 34,3% à penser que … ») est de la même nature que n’importe quels autres arts divinatoires, de la chiromancie à l'oniromancie, en passant par la cartomancie, la rabdomancie, l'ornithomancie et la nécromancie, sans oublier la bonimentomancie et la crapulomancie. Sarkozy lui-même n'a-t-il pas déclaré qu'il ne faut pas leur accorder trop d'attention. Ce disant, il ne voit pas le grotesque de la chose, quand on se souvient de la frénésie sondagière qui avait saisi l'Elysée pendant toute la durée de son mandat.
Je suis toujours effaré de la légèreté avec laquelle des journalistes, qui se disent pourtant sérieux et professionnels par ailleurs, se réfèrent avec le plus grand sérieux apparent à des chiffres obtenus de façon en général fantaisiste, en faisant semblant de citer des données du réel. La vérité sur les sondages est que la grille de lecture qu'ils utilisent ne mesure que le déjà vu, le dûment enregistré. En gros, c'est le passé qui guide les sondages, du fait que la conception des protocoles méthodologiques se fait à partir d'un donné dûment établi. Il est donc tout à fait logique qu'ils soient démunis quand il s'agit de phénomènes radicalement nouveaux.
L’élection de Trump à la présidence américaine révèle de façon hurlante la réalité misérable de l’état matériel, intellectuel et moral dans lequel le système économique et politique des Etats-Unis a plongé une bonne partie des gens ordinaires. La dénégation de ce réel-là par les gens en place (je n'énumère pas les catégories, voir plus haut) a fait le reste. L'élection de Trump est le symptôme des pathologies dont souffre l'Amérique. Le problème, avec les USA, c'est qu'ils ont amplement prouvé par le passé qu'ils avaient le pouvoir d'exporter leurs pathologies et, à eux seuls, de détruire de fragiles équilibres politiques, et de mettre le monde dans une belle panade. Le monde a donc bien raison de s'inquiéter de l'élection de Donald Trump.
L'élection de Trump est un signe inquiétant, un sombre présage, c’est certain. Mais ce n’est pas tant Trump qui me fait peur, que l’état dans lequel est un monde où l'élection d'un tel batteur d'estrade a été rendue possible.
Voilà ce que je dis, moi.
09:00 Publié dans DANS LES JOURNAUX | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : donald trump, états-unis, élection présidentielle, gabriel zucman, la richesse cachée des nations, seuil de pauvreté, jaroslaw kaczinsky, orban hongrie, hugo chavez, pologne, hongrie, vénézuela, populisme, américains, hillary clinton, crise des subprimes, los angeles times, brexit, sondages d'opinion, politique, nicolas sarkozy, politologues
mardi, 11 octobre 2016
DÉTAIL
Je ne sais pas si l’information est fondée. Des journalistes soutiennent que l’équipe de policiers qu’une bande de jeunes à attaquée au cocktail Molotov était là pour éviter qu’une caméra de surveillance ne soit détruite. Si c’est vrai, ça veut dire que la police était là pour surveiller la caméra de surveillance. J'aime beaucoup cette idée. D'autant plus que, depuis l’attaque, huit cars de CRS ont été envoyés à La Grande Borne, si j’ai bien compris, pour surveiller la voiture de patrouille qui surveille la caméra de surveillance. C’est logique, d’un certain point de vue. On peut d’ailleurs imaginer comment une telle logique est appelée à se développer. Pourquoi pas jusqu’à l’infini, après tout ?
Ça mérite l'appellation : "On vit une époque formidable !" (paternité : Reiser).
Voilà ce que je dis, moi.
08:55 Publié dans DANS LES JOURNAUX | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : police, la grande borne, cars crs, cocktail molotov, on vit une époque formidable, reiser
jeudi, 29 septembre 2016
UN FANTÔME
Voici l'avis de décès que j'ai piqué dans Le Progrès daté du 27 septembre.
Jacques Goudet a fini par avaler son extrait de naissance. Cet homme, qui fut en son temps, un personnage important au sein de l'université lyonnaise, a eu le temps et l'avantage d'être oublié par la rumeur publique. Il se trouve que j'ai un peu croisé sa route en des temps incertains, dans le "ciel de traîne" (comme disent les météorologues) qui a suivi l'orage de mai 1968. Pour tout dire, non seulement je n'étais pas un de ses familiers, mais je l'ai connu à travers une minuscule circonstance étroitement liée à l'époque. Le seul souvenir que le nom de Jacques Goudet m'évoque est en effet celui de l'escouade de gauchistes, probablement maoïstes (trotskistes ?), qui avait fait escorte à ce professeur de langue et civilisation italienne, qui restait impavide, en scandant, le bras tendu à la nazi : « Goudet fasciste ! Goudet fasciste ! ». Tout ça parce que, selon la rumeur, le monsieur avait le tort d'être en relation avec des gens peu recommandables du fascisme italien, comme un certain Pozzo di Borgo. Il se rasait soigneusement le crâne. Il travaillait, disait-on, à la création du réseau d'une internationale fasciste. C'est après tout possible. Je n'en sais rien. On disait aussi, à l'époque, qu'il était père d'une famille de onze enfants, faits ou adoptés avec une épouse asiatique, peut-être annamite. Sous-entendu : catho jusqu'au bout des ongles des doigts de pied. La personne fut sûrement un tout petit peu plus complexe que le schéma que voici. C'est juste une drôle de période qui m'est revenue en mémoire à cette occasion.
Sans nostalgie aucune, qu'on veuille bien le croire.
Voilà ce que je dis, moi.
09:00 Publié dans DANS LES JOURNAUX | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : jacques goudet, lyon, université de lyon, mai 68