lundi, 13 février 2012
LOI DU NOMBRE ET DEMOCRATIE
Je pose aujourd’hui une question puissante, attention les yeux, ça va décoiffer : qu’est-ce que la démocratie ? Je vous préviens, on n’est pas à Sciences-Po. Je pars du ras des pâquerettes, et j’y resterai peut-être, allez savoir. La démocratie ? Jusque-là, rien à dire, ça reste assez simple : l’expression de la « volonté générale ». A partir de là, vous allez voir, la volonté « générale », elle n’arrête pas de vous serrer le kiki et la ceinture.
Parce que là où ça se complique, c’est quand on demande : c’est quoi, la « volonté générale » ? Naïvement, je réponds, déjà embarrassé : c’est la volonté de tous, du peuple, de tout le peuple, je veux dire de chacun des membres du peuple, que sais-je ? C’est le « peuple souverain », bien connu de sa concierge.
Oui, mais comment vous allez savoir ce que c’est, la volonté de chacun ? La réponse est tout bonnement impossible. En 1789, la France comptait 27.600.000 habitants, « en comptant les femmes et les petits enfants » (FRANÇOIS RABELAIS). Comment veux-tu faire ? Le NOMBRE est en soi un obstacle à la démocratie. Je ne parle pas ici de délégation et de représentation, notez bien, juste du NOMBRE.
Parenthèse sur « La démocratie culinaire » (inspiré par Les Petits plats dans les grands, « La méthode illustrée par l’exemple », HENRI-PIERRE D’ACREMANT, Firmin-Didot éd., 1884, beau frontispice en couleur, plusieurs chromolithographies hors-texte, nombreuses gravures in-texte, jamais réédité).
Suppose que c’est toi qui es dans la cuisine. Mettons qu’autour de la table, ils ne sont pas trop nombreux, disons vingt. Le problème, c’est que chacun est venu avec son menu à lui. Vingt menus complètement différents : vingt entrées, vingt plats, vingt desserts. Comment tu fais, toi, devant ton piano et tes gamelles ? Le problème de la démocratie, il n’est pas ailleurs, il est là.
Alors on simplifie. Tiens, regarde les repas que tu fais entre collègues, en fin d’année ou à l’occasion d’un départ ou d’une retraite, comment ça se passe. Ça dépend du restaurant, mais ça m’étonnerait qu’on aille au-delà de trois propositions de menus. Ça fait trois entrées, trois plats, trois desserts. Ce n’est pas beaucoup, mais les gens considèrent que ce n’est déjà pas mal. Chacun, donc, avant même d’être à table, a déjà intériorisé l’idée qu’il va falloir qu’il restreigne ses désirs. Fermeture de la parenthèse.
La démocratie, c’est exactement ça : comme on est trop nombreux, la cuisine ne peut plus suivre. On est obligé de réduire le choix. La démocratie, c’est d’abord une restriction de chacun à des dimensions plus modestes que son individu individuel. Le serrage de ceinture, il commence là : plus on est nombreux, moins chacun a de surface démocratique individuelle.
Plus on est nombreux, moins on compte, et moins on existe. C’est mathématique et inversement proportionnel : ta part de vie dans le nombre décroît quand le nombre croît. Comme au loto : plus il y a de combinaisons possibles, plus les chances de gagner diminuent.
D’un point de vue démocratique, un Chinois, en comptant un milliard d’inscrits (en supposant que …), existe à peu près vingt-cinq fois moins qu’un Français (quarante millions). Moralité : plus tu es nombreux, plus la démocratie t’écrase, toi, individu ! Qu’est-ce que c’est, finalement, un individu ?
Oui, nous sommes trop nombreux pour que chacun de nous ait une véritable existence politique. Et c'est d'autant plus vrai depuis que la montée en puissance de l'Europe aux dépens des nations a rendu encore plus évanescent le pouvoir de chaque individu sur la marche des choses.
Alors la démocratie ? Tiens, comment ils ont fait, en 1789 ? Ils ont fait comme pour la pyramide : plus tu montes, plus c’est étroit, et moins il reste de place pour toi. Appelons ça la réduction de l’individu (façon réducteurs de tête). Au départ, soyons franc, tu as l’impression que tout est possible. La base s’exprime. Tout le monde frétille de la queue (ou du croupion, c’est selon). A l’arrivée, même pas un atome de croupion.
Il arrive la même chose aux molécules en homéopathie, vous savez, les CH (« centésimale hahnemannienne »), la mémoire de l’eau (les tribulations « scientifiques » de JACQUES BENVENISTE) et tout le tremblement : au départ, une molécule en pleine possession de ses moyens, bien vaillante et prête à l’emploi.
A l’arrivée, qu’est-ce qui reste, sinon rien ? Car 9 CH, c’est un centième répété neuf fois, je vous laisse calculer tous les 0 que ça fait après la virgule, pour ce qui reste d’actif dans le tube à essais. Mais je ne voudrais pas déclencher une polémique.
Pour un phénomène analogue d’évanouissement de la réalité dans sa quintessence abstraite et virtuelle, on pourra préférer la page 441 de l’intégrale de la Rubrique-à-Brac de GOTLIB, où l’escargot disparaît carrément par le fond de sa coquille, et où le cher professeur Burp se lamente : « Escargot mon ami, qu’as-tu fait de ta vie ? ».
N'AYANT PAS TROUVE L'ESCARGOT, JE VOUS PRESENTE
LE PROFESSEUR BURP EN COMPAGNIE DE L'HYENE
(si si, c'est comme ça qu'on dit et qu'on écrit)
La loi du nombre, appelons ça le point extrême de la dilution. Je vais vous donner un exemple. J’ai vu construire une « pyramide » en 2003 dans l’Education Nationale : tous les « partenaires » de la « communauté éducative » se réunissent en différentes commissions, dont chacune rédige un document résumant les idées émises. Cela fait une dizaine de commissions dans chacun des 11375 établissements (public + privé) du second degré. Je vous laisse calculer le nombre de documents.
Puis ces synthèses sont rassemblées par le chef, qui les envoie au rectorat. Les fonctionnaires rectoraux rédigent une synthèse académique et l’envoient à Paris. Là, des fonctionnaires ministériels élaborent, à destination du ministre, un document qui synthétise l’ensemble.
La « Commission THELOT », ça s’appelait. « Quelle école pour demain ? », ça demandait. Résultat, la bouche du ministre de l’époque a laissé tomber face aux caméras une bouse de vache, et tout est retombé dans le silence. Comme dit la sagesse populaire, c’est la montagne qui accouche d’une bouse de vache. Ce qu’on pourrait appeler une synthèse de synthèse de synthèse de synthèse de synthèse de synthèse de synthèse … « Mammouth mon ami, qu’as-tu fait de ta vie ? », se lamente le professeur CLAUDE ALL… euh, non, le professeur Burp.
Et, bonne pomme, je n’ai même pas tenu compte du fait que les conclusions étaient déjà toutes prêtes et connues du ministre avant l’élaboration de la montagne pondeuse de bouses de vache par ministre interposé. J’ai fait comme si tout ça n’était pas un simple cinéma à grand spectacle pour dire au bon peuple spectateur qu’on a les dossiers bien en main. Au moins, personne ne pourra dire que le système n’est pas démocratique. Les personnels ont été consultés, on leur a demandé leur avis, c’est sûr. Qu’on s’asseye dessus ensuite, tout le monde s’en fiche.
Dans la loi du nombre, elle est là, la mort démocratique. L’individu infinitésimal, molécule vivante diluée des millions de fois dans le tube à essais électoral, qu’il dise quelque chose ou qu’il ne dise rien, cela revient au même. Pesé grain de sable après grain de sable sur les balances de précision de la machine statistique, l’individu infinitésimal n’existe plus. On aura beau me seriner que l’individu est la pierre angulaire de l’édifice démocratique, je persisterai à me gausser.
« Tu te rends compte, si tout le monde faisait comme toi ? » Oui, je me rends compte. Et alors ? Beaucoup de gens font d’ores et déjà comme moi. Ils s’abstiennent de voter. Ils ont peut-être pris conscience de la fiction que leur existence politique constitue, va savoir. Le char d'assaut médiatique a beau leur rouler sur les neurones avec ses obus chargés de devoirs civiques, ils ont cessé d'y croire, à cette histoire : « Chaque voix compte, la tienne est aussi importante que toutes les autres, tu ne vas pas nous faire ça ».
Et puis il faut aussi comprendre une chose : quelle existence politique ont eue, après 2007, les 17.000.000 d'électeurs qui ont voté SEGOLENE ? Rien, que dalle ! Qu'est-ce que c'est, aussi, ce système où une quasi-moitié du corps électoral est écrasée purement et simplement ? Qu'est-ce que c'est, la loi de la majorité ? Un moyen de faire taire la minorité. « Vous n'avez qu'à être majoritaires », entend-on. Mais j'y reviendrai, sur le scandale majoritaire.
Qu’est-ce qui leur manque, à ceux qui votent avec leurs pieds aux élections ? Il leur manque l’impression toute simple d'exister politiquement, de peser, d’être pour quelque chose dans la marche des choses, de voir leur volonté (pas leur opinion) prise en compte dans les décisions. Ce n’est pas avec des « débats participatifs » à la SEGOLENE, avec des « comités de quartier » qu’on arrivera à leur donner cette impression. C’est en leur donnant un pouvoir de décision, un vrai. Comment ? Ah, je l’ai dit au début : on n’est pas à Sciences-Po. Vous n'avez qu'à demander aux experts. Ils savent tout.
Voilà ce que je dis, moi.
APRES-PROPOS : l'actualité nous montre une curieuse parenté qui s'installe entre deux pays pourtant à des années-lumières l'un de l'autre. Pendant que la « communauté internationale » élève la voix contre le meurtre collectif d'Etat commis par le régime syrien contre son propre peuple et fait quelques efforts pour l'empêcher, la « communauté européenne » abat la griffe de son autorité sur le pouvoir grec pour obliger celui-ci à réduire son propre peuple à la misère. C'est la logique droit-de-l'hommiste contre la logique financière. Devinez qui va gagner. Les deux, mon général. JANUS BIFRONS aura encore frappé.
LA GUERRE OU LA GUERRE ?
PILE JE GAGNE, FACE TU PERDS
09:00 Publié dans DANS LES JOURNAUX | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : démocratie, société, politique, élection présidentielle, nicolas sarkozy, françois hollande, candidats, électeur, droit de vote, france, europe, population, françois rabelais, homéopathie, mémoire de l'eau, jacques benvéniste, gotlib, rubrique-à-brac, éducation nationale, ségolène royal, grèce, syrie, bachar al assad
mercredi, 23 novembre 2011
PROGRES TECHNIQUE ET BATEAU IVRE
J'inscris cette note dans l'aura de l'auréole de SAINT ARTHUR RIMBAUD, comme le laisse suppposer le titre ci-dessus. N'est-il pas, en effet, le poète par excellence de l'ère technique ? De l'enthousiasme industriel ? De la créativité concrète ? Quand VERLAINE lui écrit de Paris : « On vous attend, on vous espère ! », n'est-ce pas parce qu'il a la certitude intime de s'adresser à ce messie technologique rêvé par tout le dix-neuvième siècle, comme le pressent PHILIPPE MURAY dans son XIXème siècle à travers les âges ?
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Résumé de l’épisode précédent : la technique vient de flanquer une gifle à l’humanité. La situation est tendue.
Face à la gifle, il y a deux réactions. Soit tu tends la joue gauche, si tu es européen, donc chrétien, soit tu lui envoies un bon uppercut dans la figure, ce qui implique que tu es resté un « primitif ». A cet égard, les Chinois, les Egyptiens, les Grecs, les Romains, les Mayas, ils sont tous des « primitifs ». Quand l’animal technique se rebiffe et regimbe contre le maître qui le nourrit, le « primitif » commence par bien l’assaisonner à coups de trique, et surtout, il le tient à la niche, avec une laisse courte.
Alors l’animal technique, empêché de folâtrer à son plaisir et de poser la truffe sur toutes les odeurs prometteuses qui se présentent pour en tirer on ne sait quelle invention, il cesse d’avancer, il se couche au pied de son maître plus fort que lui, et il attend.
C’est à ce moment-là que la société « primitive » peut prendre toute son ampleur, et exister à fond, avec toute la force et la plénitude des lois qui la font fonctionner. C’est la Chine ancienne et l’incroyable raffinement de ses « lettrés » et de ses porcelaines. C’est les Mayas et l’incroyable raffinement de leur astronomie. C’est le royaume Ashanti et l’incroyable raffinement de son artisanat d’or.
Cet animal technique rendra les services pour lesquels il a été conçu et fabriqué : point barre ! Et il a pas intérêt à se montrer trop gourmand ou trop curieux, l’animal technique ! Gare à lui s’il lui prend l’envie de pointer l’oreille. Et l’animal technique, là, il se tient coi. Sans doute pour la raison qu’il y a beaucoup de sacré qui flotte dans l’air. La force n’est pas de son côté. Eh oui, il y a le sacré !
En effet, dans le combat que se livrent le prêtre et l’ingénieur, c’est l’ingénieur qui, chez les « primitifs », baisse le nez, courbe le front et s’incline devant le maître des forces obscures de l’univers. Une sainte horreur saisit l’animal technique quand le sourcil du prêtre s’arque furieusement avant que s’abatte la colère du dieu. L’ingénieur reste un humble serviteur de l’ordre. Tout le monde craint la fin du monde. Et tout le monde a raison.
Car il faut parler d’ordre, et même d’ordre du monde : tout cela se passe dans un monde – ça nous paraît inimaginable aujourd’hui – HOMOGÈNE, un monde qui A DU SENS. Le monde du « c’est comme ça ». Un monde où personne ne parle d’individu, d’égalité entre les hommes, de liberté humaine. Un monde où chacun a sa place, même le lépreux ; où chacun est à sa place et a intérêt à y rester. Un monde où seule la Nature (ou le Cosmos) est éternelle. Où les hommes admettent qu’ils ne font que passer.
Dans un monde comme ça, on préfère la permanence à l’innovation. On sait ce qu’on perd, on ne sait pas ce qu’on gagne, dirait le brave Sancho Pança, qui parle par proverbes. La gifle « innovation », c’est même diabolique. Pour une raison très simple : ça modifie les relations entre les gens, ça perturbe le lien social, donc ça fait vaciller l’ordre du monde. Rien de moins. Tout ce qui est inconnu est redouté, parce que redoutable pour tout le monde.
Il suffit de voir comment les tribus « primitives » se sont elles-mêmes détruites au simple contact des conquistadors, cette nouveauté radicale pour elles, cette gifle. Entre la guerre et la déliquescence interne, leurs chances de sauvegarder leur être organisé sont dès le départ bien minces. N’était-ce pas chez les Sioux Oglalas qu’il suffisait de toucher l’ennemi du bout de je ne sais quel bâton pour que celui-ci soit considéré comme hors de combat ? Bizarrement, les Blancs, avec leurs pétoires ô combien modernes, sont restés imperméables à cette symbolique « primitive ».
Tout ce qui est nouveau est maudit, parce que ça rompt l’harmonie. C’est pour ça qu’ici et là, les hommes qui considéraient que leur harmonie personnelle était rompue pouvaient se suicider sans sourciller, ce qui effraie et horrifie tant nos sensibilités occidentales. Tout ce qui appartient à cette mentalité est rigoureusement hors de notre compréhension. Une sorte d’ « Alien », quoi. C’est pour ça que l’occidental qui vire bouddhiste ou « primitif » me fait bien marrer. Même RENÉ GUÉNON ou JÉROMINE PASTEUR. L’occidental illuminé par la lumière orientale ou « primitive » n’a aucune chance.
Dans ce « primitif »-là, qui peut donc être très savant, raffiné et subtil, tout ce qui est nouveau est donc porteur d’une malédiction. Pour tous les peuples du monde, depuis le début. Il faut les comprendre : quelle société peut survivre au chamboulement permanent des points de repère ? N'y a-t-il pas quelque sagesse à concevoir le changement comme une désintégration ? L'innovation comme un cancer ?
A cet égard, que penser de ce slogan dont on nous rebat les oreilles, dont on nous transperce les tympans, qu'on nous serine à longueur de pages de journaux, dont les émissions de radio et de télévision sont bourrées à craquer ? CHANGEZ ! BOUGEZ ! DEVENEZ ! REMETTEZ-VOUS EN QUESTION ! Et tout ça au prétexte fallacieux que, quand on ne bouge pas, c'est qu'on est mort !
A suivre vaille que vaille ...
09:00 Publié dans LITTERATURE, UNE EPOQUE FORMIDABLE | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : arthur rimbaud, bateau ivre, verlaine, philippe muray, technique, progrès technique, innovation, chine, égypte, grèce, rome, mayas, primitifs, conquistadors, rené guénon, jéromine pasteur, occident, occidental, europe, alchimie
lundi, 21 novembre 2011
PROGRES TECHNIQUE ET NEF DES FOUS
Avant de commencer, je précise que l'expression "nef des fous" m'est bien entendu inspirée par maître Sebastian Brant (1458-1521) et de son chef d'oeuvre La Nef des fous, qui est un peu le pendant de cet autre chef d'oeuvre : Eloge de la folie, de maître Erasme, un peu à la même époque. Ceci pour dire en préambule qu'il y a peut-être de la folie à avoir ainsi laissé la bride sur le cou à la technique, notre sujet du jour. Il est temps d'entrer en matière.
1 - Alors là, attention, on attaque du béton lourd et compact. Bon, comme d’habe, je vais me décarcasser pour faire simple. Aujourd’hui, sans un minimum d’éthique et de déontologie, on n’arrive même plus à se payer une Rolex à quarante neuf ans et demi. Mais on ne sait jamais. Il va peut-être falloir que je m’efforce. Heureusement, je n’éternue pas comme Gaston Lagaffe, chaque fois que le docteur prononce en sa présence le mot « effort ». Même que ça amuse le docteur, et qu’il fait exprès.
Si ça devient trop abstrait, vous m’arrêtez. Parce que je supporte mal l’abstrait. Quand ça prend de l’altitude, je respire moins bien. Et à l’altitude marquée « intello », celle des gens bien nés, beaux parleurs et bien conditionnés, je suffoque, c’est vite vu. Bon, je vais garder ma Ventoline à portée de main. Comme j’ai dit, on ne sait jamais.
Et puis pas loin, j’ai mes deux balises, Argos et Arva. Je les déclenche en même temps quand il se produit une avalanche de poudreuse en pleins 40èmes rugissants. Je tiens à vérifier moi-même que les secours sont sur le qui-vive. Ça leur fait un exercice inopiné. Excellent pour les réflexes. Après, je me fais une verveine, je peux rajuster mon bonnet de nuit et me rendormir. On ne sait jamais.
Donc, dans un précédent article, je soutiens (« jusques au feu exclusivement », selon la formule déposée par François Rabelais en personne à l’INPI en 1534, j’ai vérifié, inutile de vous donner la peine) que l’Europe est le berceau universel du progrès technique. Personnellement, je suis assez content de l’expression « berceau universel ». Qu’en pensez-vous ? Promis, j’arrête de déparler, comme on dit chez moi, entre Saône et Beaujolais.
Si je me souviens bien de ce que je me rappelle (vous demandiez un moyen mnémotechnique, en voilà un, à condition de mettre « souviens » en tête), j’allusais même que si, dans la course, l’Europe a littéralement semé sur place tous les peuples du monde qui ont assisté médusés au fulgurant départ de son échappée, c’est qu’elle s’est donné un chef, un parrain, une idole incontestable, indestructible, indéboulonnable : la technique. Personne au monde avant elle n’y avait pensé.
Parce que, avec les humains, on ne sait jamais : ça se succède, ça s’envie, ça se vole, ça vote mal, ça se tue de temps en temps. L'humain, c’est instable, soupçonnable, pour ne pas dire suspect, voire méchant. Bref : on ne peut pas compter dessus. Tandis que la technique, tranquille : comme ça a l’air inerte, comme c’est inoffensif tant que tu ne t’en sers pas, tu accumules les savoir-faire, tu collectionnes les acquis, tu mets bout à bout les expériences. Rien de plus sûr.
Pour les bases, le socle si tu préfères, ça a dû se passer entre 1000 et 1400, je n’étais pas là. Ce qu’on appelle bêtement le « moyen âge », juste pour déprécier. A vrai dire, personne n’était là, que les vivants de l’époque qui, de toute façon, n’ont rien vu venir. Tiens, regarde : tu es sur le port d’Aigues-Mortes. Pourquoi Aigues-Mortes ? Mais parce que c’est joli et pas encore ensablé ! C’est qu’il fait beau, en ce 18 juin 1080. On en est au pastis. Tu vois Marius le charpentier qui retape un rafiot.
Tout d’un coup, il a l’idée, le gars, de fixer le gouvernail à la structure. Toi, tu te dis : « Tiens, c’est pas bête ». Avant, il fallait que le barreur se démène comme un diable pour que tout reste dans l’axe et suive le cap. A la rigueur, il godillait. Comment tu veux deviner que le gars a eu une idée géniale, qui facilitera désormais le boulot de tous les skippers du monde ? Quoi, ça s’appelle pas « skipper » à l’époque ? Eh bien mettons, tiens, « cybernète ». Oui, ça veut dire « pilote », en savant. C’est ce qui a donné « gouverner ». Juré, craché.
Le rigolo de l’histoire, c’est que Joseph Ressel, en 1829, aura l’idée de l’hélice, invention révolutionnaire, en regardant faire un matelot en train de godiller, c’est-à-dire de guider son bateau sans gouvernail fixe, en faisant simplement tourner savamment sa rame. Comme quoi, heureusement que ça ne s’est pas perdu en route.
Le progrès technique, personne le voit démarrer. Et surtout, personne sait que c’est ça, le progrès. Trop lent. Trop dispersé. C’est un sournois. Il ne veut pas attirer l’attention sur lui. Un gouvernail fixe par ici, une horloge mécanique par là, des lentilles optiques composées en 1270, un rouet en 1298, une poulie à Nuremberg, une première anatomie scientifique à Bologne. Impossible de synthétiser. Ce n’est qu’à l’arrivée qu’on voit le résultat. Franchement, comment veux-tu deviner ce qui est en train de se passer ? Tu auras beau envoyer Sherlock Holmes, Herlock Sholmes ou Isidore Bautrelet, cet Arsène Lupin-là filera toujours entre les doigts.
Mais parlons du télescope. Galilée fait ses premières observations astronomiques en 1609. Lui, il est convaincu de la nouveauté absolue de sa découverte (ce n’est pas moi qui dis ça, c'est la dame ci-dessous). Mais qui d’autre ? Gregory, Newton, Herschel perfectionnent l’engin. Mais est-ce que tous ces gugusses se rendent compte de la rupture qu’introduit le télescope dans la représentation humaine du monde ? Ça, c’est une idée de Hannah Arendt, qui n’est pas la première venue.
Bon, je ne vais pas vous bassiner avec les détails de son analyse. En gros et pour résumer, le télescope nous fait voir les planètes autres que la Terre, mais surtout, nous oblige à admettre que la Terre est une planète parmi d’autres. Tout le truc est là. L’homme se met à voir son monde comme s’il l’observait de l’extérieur.
On a du mal à se rendre compte aujourd’hui qu’il s’agit là d’une rupture radicale. C’est dans Condition de l’homme moderne. Hannah Arendt renvoie à cette occasion à la parole d’Archimède : « Donnez-moi un point fixe, et je soulève l’univers ». Le télescope, c’est ça, ou peu s’en faut. « Nous sommes les premiers à vivre dans un monde (…) dans lequel on applique à la nature terrestre (…) un savoir acquis en choisissant un point de référence hors de la Terre », comme dit la dame. Il fallait quand même que je cite cette phrase, même élaguée.
Ajoutez à ça le premier globe terrestre, réalisé en 1492 par Martin Belhaim, on est bien obligé d’admettre que l’homme, à partir de là, voit les choses autrement, même s’il ne s’en rend pas compte sur-le-champ. Ajoutez à ça la carte géographique (la vraie), tout est prêt pour « faire entrer l’univers dans les salons », comme dit Hannah Arendt. Nous, on est nés dans ce bain-là : c’est devenu si « naturel » qu’on l’apprend à l’école primaire. Mais sur le moment, c’est comme une gifle donnée par la technique à l’humanité.
A suivre ...
09:00 Publié dans LITTERATURE, UNE EPOQUE FORMIDABLE | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : gaston lagaffe, rolex, déontologie, docteur, balise argos, balise arva, rabelais, inpi, progrès technique, europe, aigues-mortes, gouvenail, hélice, sherlock holmes, arsène lupin, galilée, hannah arendt, newton, archimède, condition de l'homme moderne
jeudi, 17 novembre 2011
L'EUROPE EST UNE SAINTE (fin)
4 - NOTRE EUROPE A INVENTÉ CE MONDE
Avant de passer au sujet du jour, je reviens juste un moment sur un point que j'abordais hier : toutes les sociétés du monde et de l'histoire ont toujours maintenu un contrôle étroit des machines dont elles se servaient, empêchant ainsi la technique en tant que telle de prendre son essor.
L'Europe est le seul ensemble humain qui ait laissé se développer les machines dans un mouvement autonome, et sans doute non contrôlé. Cela s'est produit malgré les résistances religieuses, et malgré l'opposition parfois violente des ouvriers (exemple des luddites, en 1812) reprochant aux machines de les priver de travail, qui n'hésitaient pas à les briser.
La question qui se pose est la suivante : si la société garde la main, dans le premier cas, est-ce qu'elle ne perd pas la main, dans le second ? N'y a-t-il pas abandon de souveraineté de la part du groupe sur une activité qui la modifie en permanence (et de plus en plus vite, comme on le voit aujourd'hui) ? N'y a-t-il pas, dès le moment où la technique s'autonomise, tendance à la dissolution du tissu social ? A la destruction du lien communautaire ? Ben oui, quoi, on se pose des questions, ou alors c'est pas la peine ! Je ferme la parenthèse. J'y reviendrai sans doute.
Je vais être franc : je voulais intituler cet article EUROPE ÜBER ALLES. A cause de la musique composée par JOSEPH HAYDN en 1797, pour l'hymne autrichien "Gott erhalte Franz der Kaiser". On retrouve cette musique dans son quatuor opus 76, n°3, plus précisément dans le 2ème mouvement, marqué "poco adagio cantabile". Le poète FALLERSLEBEN plaça sur cette musique les paroles d'un poème commençant par la phrase bien connue, et désormais interdite en Allemagne : « Deutschland, Deutschland über alles » (Allemagne, Allemagne au-dessus de tout) ! Le titre exact était : Das Lied der Deutschen.
Et puis je me suis dit que ça frisait la provocation. L'idée, ce n'était pas de dire que l'Europe se comporte en maître du monde. L'idée, c'était plutôt de montrer que le monde, tel qu'il fonctionne aujourd'hui, est devenu européen. Que c'est l'esprit européen qui anime l'espèce humaine aujourd'hui. Rien de moins. En effet, l'Europe est présente en sous-main dans tout ce que le monde actuel manifeste, dans le meilleur, comme dans le pire.
C'est vrai que j'en ai assez d’assister à la destruction méthodique et concertée de notre lopin de terre européen par le côté obscur de diverses forces financières et politiques. J’ai donc décidé d’en faire l’éloge. Eloge dont le présent billet constituera le quatrième et dernier pan (« de mur jaune », ça c’est pour rendre hommage au pape MARCEL, le MARCEL du PROUST qui va avec, évidemment, chacun ses automatismes). Le troisième pan portait témérairement en conclusion une haute affirmation : « L’Europe a inventé le monde ».
Il faut être culotté, non ? C’est vrai que c’est un peu « gros », je le concède. Je veux bien substituer le démonstratif à l’article, comme le montre le titre ci-dessus. Mais je conserve « a inventé ». Hier, j’ai tenté de montrer que c’est en Europe et nulle part ailleurs qu’ont vu le jour la plupart des grandes inventions qui servent maintenant de base au monde que nous connaissons.
LEONARD DE VINCI est la figure même de l’inventeur génial, qui a moins réalisé concrètement des inventions qu’il n’a imaginé et dessiné des principes : son char d’assaut était en bois, si je me rappelle bien ! Mais peut-être que les boulets faisaient moins de dégâts : c’est PIERRE CHODERLOS DE LACLOS qui a inventé le boulet creux, oui, l’auteur des Liaisons dangereuses. Encore une invention, on n’en sort pas. C’est sûr, quand tu es en Europe, tu peux pas faire trois pas sans tomber sur une invention.
C’est l’Europe qui a donné à la technique la place dominante qu’elle occupe aujourd’hui. A la technique qui, jusque-là, était un MOYEN entre les mains des hommes et qui, à partir de là, est devenue une FIN, un but, la condition et le moteur de la civilisation, le principe organisateur des activités humaines.
Ben oui : jusqu’à la locomotive, jusqu’à l’automobile, dis-toi bien que le bonhomme, il allait à la vitesse de son pas. Inimaginable. A la rigueur celle du cheval au galop, s’il avait les moyens de se payer un galop, euh non, un cheval. Vous arrivez à vous représenter ça ? Moi pas. Vous vous rendez compte de ce que ça implique ? Sans le bus du ramassage scolaire, pas question d’aller à l’école, parce que la plus proche est à vingt kilomètres, quatre heures à pied en marchant bien.
En 1850, on en était là. Hier, quoi. Quatre ou cinq générations, pas plus. A quoi ça pouvait ressembler, dans la tête, le temps dont on disposait ? Comment ça se passait, quand on ne pouvait pas passer, par simple décision administrative, de l’heure d’été à l’heure d’hiver, et inversement ? Accessoirement, on peut noter que l’école n’a vraiment pris son essor qu’en même temps que la machine à vapeur. Quoique ceci demande vérification. Je ne voudrais pas enduire d’erreur quelque lecteur que ce soit. On a son orgueil, tudiable!
Qu’est-ce qui lui a pris, à l’Européen ? C’est dans le fond assez simple. L’Européen avait un gros défaut : la CURIOSITÉ. Quand on y pense, c’est quelque chose d’absolument énorme et nouveau, la curiosité. Allez, dites-moi un peu, pour voir, quel peuple poussa la curiosité aussi loin que les Européens. Quel peuple eut plus que les Européens l’envie de savoir ? De dépasser les bornes des connaissances acquises pour en ajouter à l’infini ?
Il y eut, au départ de l’Europe, dans ses fondements, LE VERTIGE DE LA CURIOSITÉ. C’est sans doute une maladie grave. Dès que tu n’imites plus seulement ceux qui t’ont précédé, que tu as appris tout ce qu’ils savaient, mais que tu y ajoutes quelque chose de nouveau, c’est que tu veux faire mieux. Ce que tu as dans l’idée, c’est de progresser, d’aller plus loin.
A une époque, on a appelé ça la « Querelle des Anciens et des Modernes ». Et puis sans qu’on y pense, c’est entré dans les mœurs et dans les esprits, cette idée d’aller plus loin que ses propres parents. Tu te mets à y penser, au progrès. Tiens, par exemple, c’est quoi, la différence entre le style roman et le style gothique ? Réponse : la croisée d’ogives. Quand tu passes de la voûte en plein cintre à la voûte d’ogive. Non, c’est rien que ça ?
Presque. Bon, c’est vrai, il y a encore quelques fioritures à droite et à gauche, comme l’extraordinaire « clé pendante ». Mais même ça, c’est rien qu’une prouesse, l’essentiel n’est pas là. L’essentiel, c’est de dominer le poids de la matière, pour faire grimper des cailloux à des hauteurs jamais vues, et pour les faire tenir. Le reste n’est qu’une question de style et de savoir-faire.
Ensuite, évidemment, il y a les habituels petits rigolos qui croient être plus forts. Tiens, va voir à Beauvais, par exemple. La cathédrale. Des clampins, qui tenaient absolument à montrer leurs muscles, et qui ont essayé de monter plus haut que tout le monde. J’ai eu beau leur dire « Babel » et compagnie, tu parles ! Ils y sont allés quand même. Du coup, ils ont enfreint la loi, ils ont voulu bâtir le chœur le plus haut du monde, et ça s’est écroulé.
Maintenant, va voir l’état dans lequel elle est, la pauvre cathédrale de Beauvais, toute branlante. Et pas finie ! Ah ça, c’est vrai, si ça avait tenu, ça serait la plus haute, et peut-être la plus belle. Mais voilà : faut pas exagérer d’exagérer, ou ça te retombe sur le coin de la figure. Quelle idée aussi, de vouloir monter cette flèche à cent cinquante mètres ! Forcé qu’elle s’écroule. Aujourd’hui, on conçoit ce que ça aurait été, Beauvais, si les gars étaient restés raisonnables. Ça fait peine, monsieur.
Revenons à la CURIOSITÉ. A l’accumulation indéfinie des savoirs. A la jouissance de ça. Au vertige et à la fascination de ça. Mais pas une accumulation n’importe comment. On imagine encore le moyen âge comme une période obscure, vaguement barbare. C’est très injuste. Car l’accumulation de savoir, la frénésie de classement des savoirs, le goût de la controverse (les discours « pro » et « contra » des bacheliers), tout ça, ça finit par structurer l’esprit d’une certaine manière.
On a appelé ça le moyen âge par mépris et par ignorance, quand la mode était au flamboiement romantique de l’esprit. Mais mine de rien et en douce, ça prépare le terrain des ERASME, GUILLAUME BUDÉ et autres MARSILE FICIN. Les humanistes, quoi. Tout est logique. Ça s’enchaîne.
Face au vertige de l’infini du savoir, l’esprit européen devient, en quelques siècles, absolument INSATIABLE. Comme les bâtisseurs de Beauvais. Comment lui est venue cette « folie curieuse » du « toujours plus » ? C’est forcément programmé quelque part, mais va savoir où. Quoi qu’il en soit, FRANÇOIS DE CLOSETS, en intitulant Toujours plus son best seller à la noix de 1982, il ne risquait pas de se tromper, il enfilait des pantoufles confortables : c’est le mot d’ordre depuis cinq ou six siècles ! Je dis cinq ou six, parce que « révolution industrielle », c’est du flan. Si on a eu la machine à vapeur et tout le toutim, c’est que TOUT ETAIT PRÊT.
Et comme tout est logique et que tout s’enchaîne, le Blanc d’action va enchaîner. Le savoir qui passe dans la réalité, ça s’appelle donc la technique. Ça permet d’agir sur elle ? Impeccable. Il adopte illico la technique, parce qu’il comprend qu’avec ça, il va pouvoir conquérir. C’est la trilogie Savoir – Avoir – Pouvoir.
Le gars blanc, il ne va pas se gêner. Le ver du « toujours plus » est dans le fruit « européen », parce que la larve a été déposée avant le fruit, dans la fleur. Exactement comme fait le balanin des noisettes, vous pouvez vérifier. Sauf que le ver du balanin, il se contentera de bouffer la noisette dans laquelle il a été posé. Et puis de vivre la courte vie qui lui reste.
Avant même que l’Europe fût européenne, le ver du « toujours plus » travaillait déjà dans ses gènes. Alors maintenant, que ça comporte des tas de choses antipathiques, bien sûr. Mais franchement, qu’est-ce que j’aurais pu y faire ? La colonisation ? Evidemment. Le pillage des ressources ? Mais comment donc. Tous les moyens sont bons ? Assurément. Y compris les pires ? Sans aucun doute. Y a de l’abus ? Mais je me tue à vous le dire.
Il n’empêche qu’au passage, cette Europe qui est à l’origine du monde tel qu’on le voit aujourd’hui, elle a fait pas mal de beaux cadeaux, et sur lesquels personne ne conçoit seulement de revenir. Certes, elle n’a pas inventé la boussole, mais elle a su quoi en faire. C’est vrai, ça, finalement, c’est l’Europe qui a donné le Nord au monde. Les Chinois connaissaient la boussole magnétique en 1160 avant J. C. ? Et alors ? Qu’est-ce qu’ils en ont fait ?
Ce n’est pas eux qui, grâce à elle, ont parcouru les mers, découvrant d’autres terres, dressant des portulans, puis des cartes, puis des planisphères de plus en plus précis et rigoureux. Le visage du monde, je n’y peux rien, c’est l’Europe qui l’a dessiné. Comme dit je ne sais plus qui, l’Europe a fait entrer le globe terrestre dans les salons. Qui est venu remplacer l’archaïque « sphère armillaire », vous savez, celle qui mettait la Terre au centre de l’univers.
Rends-toi compte de ça : debout sur la planète, tu as l’impression que c’est plat. Enfin, grosso modo. Tu as l’impression que c’est infini. Et voilà que, tout par un coup (comme on dit chez moi, dans le théâtre de Chignol et Gnafron), tu peux regarder à loisir, au coin du feu, à quoi ça ressemble ? Et tu ne serais pas saisi d’une ivresse de puissance ? La géographie du monde, y a pas à barguigner, c’est l’Europe. Et après l’espace, le temps.
L’horloge ? La mesure du temps ? Mais évidemment bien sûr, Arthur, que c’est l’Europe. Enfoncée, la clepsydre ! L’horloge mécanique est peut-être née un peu avant l’an mille. Elle se répand au 14ème siècle. C’est que les monastères en avaient grand besoin ! Et ce n’est pas l’Arabie saoudite, qui a planté à bonne hauteur, sur un énorme support, quatre cadrans de trente mètres de haut censés donner l’heure islamique, qui y changera quoi que ce soit.
Les arts ? Mais allons-y ! Ce n’est pas pour rien qu’un Japonais a passé dix ans au musée Unterlinden à Colmar, à copier méticuleusement le chef d’œuvre de MATHIAS GRÜNEWALD, qu’on appelle le Retable d’Issenheim. Quand on voit Issenheim aujourd’hui, on a d’ailleurs de la peine à croire que le patelin ait pu abriter un pareil monument. Quant à la peinture, je suis désolé, mais est-ce de l’arrogance, de dire que le monde, de deux choses l'une, fait soit de l’ethnique, soit du succédané d’Européen (ou d’Américain) ? Pour les autres arts, on peut ajuster et nuancer tout ce qu'on veut, c'est le même tabac.
La domination du monde, c’est encore l’Europe. Et vous pouvez y aller, lui faire tous les procès aujourd’hui, mais c’est trop tard. Le ver du « toujours plus » était contagieux, qu’on se le dise. Et ceux qui détruiront la planète à force de la bouffer, comme l’Europe et l’Amérique avaient commencé à le faire, eh bien ils le feront « A L’EUROPEENNE ». Il faut que ça se sache.
Voilà ce que je dis, moi !
POSTE SCRIPTHOMME AVEC LARME : nous sommes le 16 novembre. Cet article est programmé pour le 17. Vous m'excuserez si par hasard, ici, il n'y a rien de nouveau le 18. C'est brutal. PATRICK est mort. C'est un accident. Comme tous les accidents, on se dit que c'est terriblement bête. Il faisait la tournée d'inspection d'un refuge de haute montagne, avant réception des travaux. Une chute de 500 mètres, même sous les yeux de toute l'équipe, ça ne pardonne pas. Je n'aimerais pas avoir vu ça pour alimenter mes pires cauchemars. C'était le père d'AMANDINE, la promise de PHILÉMON. Le mari de DOMINIQUE. Il y a aussi LAURE et FLORIAN. Je n'ai pas de mots. Vous m'excuserez. A bientôt. PATRICK, adieu.
09:00 Publié dans LITTERATURE | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : joseph haydn, fallersleben, marcel proust, europe, politique, progrès technique, léonard de vinci, choderlos de laclos, querelle des anciens et des modernes, cathédrale de beauvais, érasme, guillaume budé, marsile ficin, françois de closets, balanin des noisettes, mathias grünewald
mercredi, 16 novembre 2011
L'EUROPE EST UNE SAINTE (3)
3 – L’ORIGINE DE CE MONDE
Non, je ne parle pas de ce tableau scandaleux que JACQUES LACAN avait acquis à grands frais, et qu’il dissimulait, dans son bureau, sous un panneau mobile, pour ne le montrer qu’à quelques élus. Tout le monde a reconnu L’Origine du monde de GUSTAVE COURBET, où l’artiste a représenté l’entrecuisse fendu, charnu et fortement velu d’un humain de sexe féminin, et qui fit jaser dans les salons bourgeois. Tiens, à propos, vous connaissez cette contrepèterie : « FRANÇOIS HOLLANDE a lâché le Congrès » ? Glissons.
Non, je n’ai pas changé de cheval : c’est toujours l’Europe, le destrier dont je chante les louanges. Le grand LEWIS MUMFORD, esprit original et fécond, fait, à la fin de son ouvrage formidable Technique et civilisation (Seuil, 1950), la liste des inventions humaines et leur époque approximative. Cette liste est très fastidieuse, à cause de la longue énumération des trouvailles et de la succession sèche des dates. Mais elle est en même temps tout à fait PRODIGIEUSE.
D’abord par le nombre, pour ne pas dire la masse des inventions techniques qui interviennent, à partir du 10ème siècle, dans tous les domaines de la vie concrète. On constate ensuite qu’au cours du temps, la liste s’allonge, c’est-à-dire que l’homme invente de plus en plus, et de plus en plus vite.
Au 10ème siècle, MUMFORD relève : l’horloge hydraulique, le moulin à eau, le harnachement efficace des chevaux, le joug bovin multiple, l’horloge mécanique (donnée comme probable) et les vitraux colorés en Angleterre. En gros une vraie innovation tous les 20 ans. Mais au 14ème, cela monte à une tous les cinq ans. Et je ne parle pas du 19ème (une tous les six mois).
Enfin, cette liste est prodigieuse par la concentration de plus en plus nette de la frénésie inventive dans le foyer brûlant de la créativité humaine : en EUROPE, évidemment, et nulle part ailleurs. C’est là que l’innovation technique a littéralement explosé. On peut affirmer que l’Europe est la mère de la technique. Ce n’est pas un cri de victoire. C’est un constat.
Certes, d’autres peuples du monde ont turbiné dans leur coin, et ont connu avant les Européens la boussole, la poudre à canon et le papier. LEWIS MUMFORD le dit : « Tous les instruments critiques de la technologie moderne : la pendule, la presse à imprimer, la roue hydraulique, le compas magnétique, le métier à tisser, le tour, la poudre à canon, le papier, (…) existaient dans d’autres cultures ».
Mais c’est en Europe occidentale que toutes ces inventions éparses (et surtout indépendantes les unes des autres) se sont coalisées, ont été mises en relation les unes avec les autres, jusqu’à former SYSTÈME. LEWIS MUMFORD ajoute d’ailleurs, à propos des « autres cultures » : « Ils avaient des machines, mais ils ne développèrent pas "la machine" ». Cela veut dire que chaque machine particulière fonctionnait à la satisfaction de tous, mais qu’elle restait « dans son coin ». Et surtout qu'elle restait en l'état, comme empêchée d'évoluer. Là, c’est la société qui est la plus forte et qui dicte ses conditions.
En Europe, c’est le contraire : l’organisation sociale et les modes de pensée intègrent la machine dans leur mode même de fonctionnement. La machine s’introduit dans le travail de l’esprit, et devient un objet privilégié, un but. Le domaine de la machine non seulement s’agrandit sans cesse, mais s’autonomise, devenant l’espace d’expansion de l’activité humaine. Si l’on veut, c’est la machine qui est la plus forte. C’est la machine qui, de plus en plus, va dicter ses conditions à la société.
Ce qui est sûr, c’est que, quand je regarde les informations à la télé (voix off : « C’est même pas vrai, il a même pas la télé ! »), je constate qu’à l’égard des techniques, le monde est aujourd’hui européen. Où qu’on aille sur la planète, on reste en Europe. A l’égard des façons de penser, il y a encore des poches de résistance, mais globalement, quand on voit comment la technique a envahi le Brésil, la Russie, l’Inde, la Chine, et l’Afrique du sud (pour ne parler que des BRICS, comme disent les économistes), je me dis que les mentalités du monde entier sont désormais façonnées (et fascinées), par la vision américaine, donc, à travers elle, européenne.
Quelqu’un m’objecte, au fond de la salle à gauche, oui vous, madame, en imperméable orange, que ce sont les Etats-Unis qui sont pour l’essentiel à l’origine de cette « conquête » du monde, et j’en suis évidemment d’accord. Mais je vous répondrai d’abord que l’orange vous va très bien, ensuite que les Etats-Unis ne sont une puissance que depuis le début du 20ème siècle, et que la technique ne les a pas attendus pour triompher. D’ailleurs, n'est-ce pas pour avoir des fusées que les Américains ont kidnappé l’Européen WERNHER VON BRAUN en 1945 ?
Et puis après tout, on peut aussi s’interroger : sans les Européens, y aurait-il seulement des Etats-Unis d’Amérique ? Finalement, les Etats-uniens sont pour une large part des Européens trop avides, trop protestants, trop catholiques ou trop pauvres pour rester sur le territoire ancestral. Les Etats-uniens sont une variante d’Européens, certes, pas toujours sympathique, mais c’est à la façon dont, dans les familles, on est obligé de reconnaître la parenté avec des cousins dévoyés, et de les tolérer dans les grandes réunions familiales. A cet égard, la grande réunion familiale porte aujourd’hui un nom pas facile à assumer : OCCIDENT.
Et il est parfaitement normal que le monde entier fasse aujourd’hui un gros pied de nez à la famille occidentale puisqu’il en a accepté tout l’héritage. Maintenant que le monde est devenu occidental en général, et peu ou prou européen, fût-ce à travers la variante américaine, il peut bien en remontrer au maître qui lui a tout appris. Faire des tours plus hautes, des TGV plus rapides, et tout et tout. Chercher la performance. « Citius, altius, fortius ». Elle est française, la devise du Français COUBERTIN. Qui dit : « C’est bien, les enfants, continuez comme ça ». Ça s'appelle la transmission, il paraît.
MORALITÉ :
L’EUROPE A INVENTÉ LE MONDE.
Voilà ce que je dis, moi.
A suivre ...
09:00 Publié dans BOURRAGE DE CRÂNE, LITTERATURE | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : l'origine du monde, courbet, jacques lacan, françois hollande, lewis mumford, techniques et civilisation, europe, brics, wernher von braun, occident, pierre de coubertin
lundi, 14 novembre 2011
L'EUROPE EST UNE SAINTE (1)
Bon, alors on a compris que l’Europe est devenue une prostituée mise sur le trottoir par son maquereau. Eh oui, ce qu’on appelle complaisamment la classe politique, avec un nombre impressionnant d’hommes de premier plan, qui ont voulu à toute force « construire l’Europe ». Avec un coup de pied dans les fesses de la pute, au son de la CONCURRENCE LIBRE ET NON FAUSSEE.
Sans entrer dans le détail du complot, au centre duquel figure la « monnaie unique », disons que la prostituée va devoir cracher le maximum, au nom de cette trouvaille géniale : « concurrence libre et non faussée ». Pourtant, la pauvre Europe, elle n’a pas mérité les tombereaux d’avanies et d’ordures que le monde déverse depuis quelque temps sur son pauvre corps mis à mal. Comme dit GEORGES BRASSENS : « C’est pas tous les jours qu’elles rigolent, parole, parole ! ».
C'est entendu, je ne parlerai pas des avanies financières que des traders et des spéculateurs à tendance nazi font pleuvoir sur l'Europe tant qu'elle n'a pas été réduite à quia. Je ne parlerai que de ces vieux remugles d'arrière-boutiques, de ces causes qu'affectionnent les mauvais avocats tiers-mondistes en mal de thune et de publicité, tel cet ahuri qui demandait récemment aux tribunaux belges d'interdire définitivement un odieux pamphlet raciste, un insupportable brûlot colonialiste : Tintin en Afrique.
Je ne parlerai que des reproches adressés aux Européens en général, et aux Français en particulier.
1 – LA REPENTANCE
Et d'abord, ils sont combien à lui demander des comptes ? Et sur le mode sévère ! Pauvre Europe. La repentance ! En chemise et la corde au cou ! Comme les bourgeois de Calais ! Eh bien parlons-en, de la repentance ! Encore une belle imposture que certains enfoncent à plaisir dans le gosier des Européens, et que le gosier de certains avale sans sourciller comme vérité d’évangile.
Tiens, l’Algérien. Comment il s'appelle, déjà ? ABDELAZIZ BOUTEFLIKA. Pour lui, la France doit se repentir. C’est la condition d’une « réconciliation », mais seulement si lui l’Algérien veut bien consentir à solder l’affaire. A mon avis, l’Algérien n’est pas près de décréter la France libre de dette : on ne lâche pas si facilement le « pigeon » et le « fromage » quand on tient bien en main une telle vache à lait qu’on peut traire à volonté. Monsieur BOUTEFLIKA (ou plutôt les généraux qui tiennent les fils de sa marionnette) ne se « réconciliera » vraiment avec la France que lorsqu’il lui aura fait cracher au bassinet plus que le maximum.
Car c’est entendu, le colonisateur, c’est le méchant. Le colonisé, de son côté, il est devenu un icône, il est béatifié, angélifié, statufié, vertuifié. En tout cas du côté du BIEN inoxydable. On est maintenant estampillé « colonisé » ad vitam aeternam. Y compris quand le colonisateur a déguerpi depuis un demi-siècle. Tout est dans l’étiquette. Et celle-ci accorde, à tous ceux qui ont ainsi été nommés chevaliers de l’ordre du colonisé, un droit définitif sur le colonisateur. Pourquoi s’en priver ?
Moyennant quoi, ça va faire cinquante ans qu’il n’y a plus de colonisés en Algérie, et que le peuple algérien se fait royalement plumer par la clique algérien au pouvoir, qui lui maintient la nuque sous la botte, tout en fermant les yeux sur le sport national, le « trabendo ». Le « trabendo » algérien, c’est ce qui s’appelle chez nous « système D ». Appelez ça, si vous voulez, travail au noir. Autrement dit, tous les petits trafics qui aident les petites gens à survivre.
Pareil pour les autres pays que la France a colonisés : Afrique Occidentale Française, Afrique Equatoriale Française, comme on disait, avec quelques confettis maritimes à droite et à gauche. Mais c’est en Afrique que c’est le plus visible. En haut, une élite achetée qui a conclu un pacte avec le colonisateur qui s’en va, promis, juré. En bas la piétaille, le petit peuple, les gens de rien du tout. C’est pas beau, l’INDEPENDANCE ? C’est merveilleux, quand on y pense. Pour l’Algérie, c’est 1962. L’élite algérienne s’appelle, en gros, l’Etat-Major des armées. A lui le gros du trafic. A la piétaille le trabendo.
D'autant plus que, c’est bien connu, l’Algérien n’a jamais, avant 1830, envoyé ses bateaux pirates en Méditerranée, n’a jamais pratiqué l’enlèvement crapuleux d’Européens et, pour tout dire, de chrétiens, pour en obtenir des rançons substantielles. L’Algérien que le Petit Satan français a réduit en servitude à partir de 1830, a toujours été plus innocent que l’agneau qui vient de naître, et surtout, il n’a jamais commis aucune violence. Ben voyons ! Je poserai simplement la question : qui a réduit au silence, en 1962, la résistance FLN dite de l'intérieur ? Et cette autre question : et les harkis ?
Finalement, il doit faire marrer les vrais connaisseurs de la situation, BOUTEFLIKA, avec ses remontrances et ses chantages à l’ancien colonisateur ! « Que la France fasse repentance pour les crimes commis ! ». Vas-y Toto ! Lui et ses copains n’ont bien sûr aucun sang sur les mains ! Comme on dit, c’est l’hôpital qui se fout de la charité. Ou encore, c’est l’histoire de la paille et de la poutre. Cela ne veut évidemment pas dire que la France était dans son bon droit en occupant l’Algérie.
Il y a aussi, naturellement, les Noirs. Pas n’importe quels Noirs : TOUS les Noirs de la planète. C’est curieux, on dirait parfois qu’il suffit de cette couleur de peau pour hériter le statut d’esclave. La "négritude" chère à SENGHOR. Comme si être Noir portait brevet de descendant d’esclaves ! Pour eux, il s’agit de poser un pied triomphant sur le grand fauve désormais à terre : « chacun son tour », déclarait une personne qui m’est très chère ! Quelle erreur ! Quel aveuglement ! Quel mensonge, si c'était dit par quelqu’un bien au fait de la vérité !
Les Algériens ne se doutent pas de la chance qu’ils n’ont pas eue : avoir des ancêtres esclaves. Ils devraient être jaloux. Mais l'histoire ne repasse pas les plats. Esclave ? Mais oui ! Ça te fait une carte de visite pour les quatre siècles à venir. Que dis-je : un passeport, un droit d’entrée, la facture de la revanche que tu présentes au coupable, qui baisse aussitôt la tête et se frappe la poitrine.
Prononce-le, ce mot : ESCLAVAGE. Tous les Blancs de la planète s’arrachent les cheveux, se griffent le visage, se couvrent de cendre, se prosternent. Bref : ils demandent pardon. Enfin, pas tous. OBAMA, il leur a fait le coup de la repentance, mais c'est pour avoir la paix. Car globalement, c'est la GRANDE REPENTANCE. Parce que les Blancs (les peuples, pas les Etats) sont convaincus qu’ils sont intrinsèquement mauvais. Enfin, leurs ancêtres.
Oublions bien vite, évidemment, que le premier esclavagiste de Noirs fut un Noir. Le second fut un Arabe. Le Blanc ne monte que sur la troisième marche du podium. Yapafoto, comme on entend dire aujourd’hui. Je ne mentionne pas ici les fourchettes d’estimations établies par les historiens : une fourchette qui varie du simple au double, il vaut mieux s’en passer. Mais ils ne contestent pas, en général, l’ordre de préséance.
Disons simplement que les historiens, selon qu'ils sont Blancs ou Noirs, c'est-à-dire scientifiques ou militants (là j'exagère), parlent de 10.000.000 à 25.000.000 pour le commerce transatlantique. Ce faisant, ils oublient d'ailleurs le commerce intra-africain et le commerce trans-saharien, qui fut sans doute bien plus florissant, car étalé sur une durée bien plus longue.
Héritage solide et permanent des guerres de l’antiquité, le Noir vaincu de la guerre du jour devient le lendemain un travailleur gratuit pour le compte de son Noir vainqueur. Et en Afrique, c’est une tradition solidement établie, et si solidement qu’elle se perpétue de nos jours. Avec ce progrès que la guerre n’est plus nécessaire, même si ça aide bien. Il suffit que la tradition soit « établie ».
On peut s’en convaincre en lisant l’histoire de cette femme malienne, racontée il y a quelque temps dans Le Monde, qui déclare à sa fille qu’appartenant à une ethnie inférieure, il est normal qu’elles soient esclaves. Ami lecteur, va te balader aujourd’hui même au Mali, au Niger, et autres pays à haut potentiel touristique, et sors du circuit mitonné et acheté en agence. Va voir le « pays réel ». C’est là que tu découvres le Noir esclavagiste du Noir. Et c’est aujourd’hui ! Du coup, c'est l'Européen qui devient le Bon, dans l'histoire.
Oublions aussi, pendant que nous y sommes, l’esclavage transsaharien. Ben oui, quoi, l’Egypte, l’Arabie, tout le Proche Orient, où allaient-ils chercher leurs travailleurs ? J’ai parlé des Ottomans qui sont allés ratiboiser les villages chrétiens de l’Europe orientale de leurs garçons chrétiens, pour faire des plus costauds d'entre eux des Janissaires bons musulmans. Et ça a duré des siècles. Ben oui quoi, le coran dit qu'un musulman n'a pas le droit de rendre esclave un autre musulman, mais il ne dit rien de tous les autres.
Les Arabes (qui ne sont pas des Turcs) ? Ils ne sont pas en reste : ils sont allés puiser leur main d’œuvre en Afrique noire. A travers le désert. Il fallait vraiment un appât du gain à l’épreuve du sable et de la soif. C’était un temps où certains hommes étaient des valeurs d’échange. Et depuis le huitième siècle ! Aujourd’hui, leurs bateaux jettent leurs filets dans les eaux des Philippines et lieux circonvoisins pour ramener leur main d’œuvre servile. En respectant si possible les formes extérieures du contrat de travail (?).
Voilà ce que je dis, moi.
A suivre ...
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samedi, 12 novembre 2011
L'EUROPE EST UNE SALOPE (2)
Le titre ci-dessus est peut-être mal choisi, pour une Europe qui n'a pas été voulue et construite par les peuples, mais par des bureaucrates, des hommes de dossier, c'est-à-dire des hommes de papier, des hommes à l'existence virtuelle, mais qui imposent dans le réel des concepts élaborés, non dans les cerveaux désirants des individus qui existent et qui vivent, mais dans les machines d'abstraction qui leur servent à penser.
Les grands généraux qui conduisent les armées européennes se sont comportés comme des maquereaux, qui ont mis l'idée de l'Europe sur le trottoir, qui en attendent des dividendes, et qui passeront tous les soirs "relever les compteurs". Ils ont fait de l'Europe une prostituée. Une prostituée qui n'a pas choisi son métier. Et qui attend qu'une bonne âme la rachète à son maquereau.
Je reviens à la façon dont l'Europe s'est construite. Je crois avoir fait précédemment preuve d’une assez grande objectivité. La vitesse, à partir d’une année donnée, est indispensable. Passer de six à douze pays, ça a pris du temps. Mais une fois que le pli est pris, ensuite, ça peut aller très vite : de douze à quinze pays, ça tient quasiment de la formalité, puis à dix-sept dans la foulée, pour finir avec un gros paquet de dix, qu’on ne s’est même rendus compte de rien, et c’était fait. Un matin, on se réveille à vingt-sept dans le lit. C’est ma femme qui était dépaysée, je vous jure ! Elle n'a pas supporté. Depuis, elle se repose, ne la dérangez pas.
Et la Turquie, me direz-vous ? Soyons net : ce n’est pas parce qu’elle a gardé un petit orteil sur le continent qu’elle en fait partie, même si elle y a laissé quelques monuments et quelques empreintes de pieds ethniques ou linguistiques. En Europe, la Turquie subsiste à l’état de trace. C'est la même chose que sur mon paquet de biscottes bio : « Traces de fruits à coque, de lait, d’œufs, de sésame et de soja ». Je trouve que, comme traces, c’est déjà bien assez.
L’orteil turc, à Lyon, est situé face au Parc de la Tête d’Or. L'adresse est dans l'annuaire. J’eus l’honneur, il y a bien longtemps, d’être invité à piétiner cet orteil, à l’occasion de la fête nationale de ce pays, par Monsieur OZCAN DAVAZ, alors consul de Turquie, en tant que répétiteur de ses deux charmants fils, par ailleurs cancres parfaits et accomplis, dont j’ai oublié les prénoms. Vu le nombre de photos prises de ma trombine, sous tous les angles, par l’homme chargé de la sécurité, un garçon très musclé et très souriant, nul doute que l’album de famille est depuis lors richement doté.
Je n’ai donc rien contre les Turcs. Encore que l’Europe serait fondée à leur intenter des procès sans fin, pas pour Lépante, n’exagérons pas (la victoire en fut chrétienne, sous la houlette de DON JUAN D’AUTRICHE), mais pour les innombrables rapts de jeunes garçons chrétiens ordonnés par la « Sublime Porte » (ou mieux : « La Porte ») en Europe pendant des siècles, pour grossir les rangs du fameux corps des Janissaires.
Les mieux bâtis des jeunes garçons enlevés étaient convertis de force et dressés militairement à renier et agresser leurs propres origines ethniques et religieuses. Il faut dire qu'un musulman n'avait pas le droit de réduire un musulman en esclavage. « Rendez-nous nos chrétiens, avant de faire entrer l'Islam dans les institutions européennes ». Cela pourrait être un chantage, non ?
Ben oui, quoi, puisque l’heure est à la repentance, allons-y. Bon, c’est vrai, vu comme les Turcs aimeraient mieux se faire arracher toutes les dents du bas sans anesthésie plutôt que de se repentir du massacre des Arméniens, je vois l’affaire un peu mal engagée.
4 – LE BOCAL BRUXELLOIS
Il faut tenir compte d’un détail : quand l’Europe s’attaque à un problème, elle mandate des « experts » qui se réunissent, discutent, et finissent par faire des recommandations, qui deviendront des réglementations sous la gouverne de la Commission européenne.
Pour donner quelques exemples qui commencent à être connus : ce sont des « experts » (c’est curieux, je ne peux pas écrire le mot sans ses guillemets, c’est comme « genre ») qui ont fixé les normes régissant la courbure maximale des concombres ou la taille des préservatifs (une enquête statistique a été diligentée, qui a conclu à une taille moyenne de la bite en érection de 14 à 15 centimètres), et autres joyeusetés. C’est à ce genre de détail qu’on se rend compte que ça rigole pas. Je ne parle pas du prix qu’a coûté le détail.
Mais il y a autre chose que je crois avoir compris : le quartier européen de Bruxelles. La comparaison de ce quartier avec un gros bocal me semble tout à fait appropriée. Un gros aquarium, si vous préférez. Mais les poissons sont très correctement nourris, rassurez-vous. C’est un petit monde de quelques milliers de personnes qui vivent en vase clos. Où les jeunes poissons qui y entrent ne comptent pas s’éterniser.
Y entrer, c’est une chance, y rester serait une erreur. Aussi la plupart viennent passer trois à cinq ans dans la capitale belge et européenne. Ensuite, youpi et vogue la galère, la carrière peut vraiment démarrer. Car je vais vous dire, un séjour à Bruxelles, quand vous mettez ça sur un C. V., vous êtes sûr que celui-ci reste sur le dessus de la pile. On appellera ça « un bon départ dans la vie ».
Je ne parlerai pas d’un problème qui est pourtant crucial, et qui est étroitement lié au bocal bruxellois : l’influence. Bruxelles, à cet égard, est éminemment centripète. Tous les groupes de pression s’y précipitent. Tous ont pignon sur rue. Et tous grenouillent à qui mieux-mieux. Si vous ne me croyez pas, demandez à MARTIN PIGEON (sur internet), qui a beaucoup étudié les mœurs de la faune bruxelloise.
Un exemple : le projet R. E. A. C. H. devait soumettre à analyse, contrôle et à autorisation ou refus d’autorisation de commercialisation, les cent mille (100.000) molécules des industries chimiques actuellement en circulation, à des fins de santé publique. Comme par hasard, à l’arrivée, les cent mille molécules sont devenues trente mille (30.000). Il en reste soixante dix mille (70.000), que l’on espère inoffensives, sans trop y croire.
Pour résumer, l’Europe s’est voulue avant moi, ça, ça peut se comprendre. Elle s’est faite sans moi, et ça, c’est déjà moins aimable. Et plus ça a été, plus ça s’est fait CONTRE moi. Et ça, je n’aime pas du tout.
5 – CONCLUSION
Vous voulez savoir ce qui s’est fait contre moi ? Il y a un point qui, selon moi, a tué l’Europe avant même qu’elle ait commencé à vagir dans son berceau. Un point qui a tué le « service public à la française », vous savez, cette nostalgie hypocrite de certains dirigeants français. Oui, qui a détruit les « Postes et Télécommunications », la « Société Nationale des Chemins de Fer Français », « Gaz de France », « Electricité de France ». Un principe qui est en train d’achever l’Hôpital Public et l’Instruction Publique (qu’on appelle malheureusement « Education Nationale »).
Ce point et ce principe, c’est une formule sacramentelle, dont tous les textes européens sont étroitement tissés. Cette formule, c’est
CONCURRENCE LIBRE ET NON FAUSSEE
Voilà : TOUT l’édifice européen est construit exclusivement avec des briques gravées de cette formule magique. Cela veut dire que TOUTE l’institution européenne vomit à la base ce qu’on appelait le BIEN COMMUN. L'Europe expume de toute la force de ses spasmes allergiques tout ce qui ressemble à un SERVICE PUBLIC. L'idée géniale, ç'a été de rebaptiser "service public" (connotation trop positive) en "monopole". Pour l’Europe telle qu’elle s’est faite, rien ne doit échapper à l’échange marchand. Tout, y compris l'éducation et la santé, doit devenir une MARCHANDISE. Tout ce qui a fait la France que nous avons connue, c’est exactement à la destruction de ça que les MONNET, DELORS, MITTERRAND et consort ont travaillé.
Pour cette Europe-là, une seule solution : LES FLAMMES. Il semble bien qu’à l’heure actuelle, nous ne soyons plus très éloignés du brasier.
Qui vengera les Européens des malfaiteurs qui ont « fait » cette Europe-là ?
Voilà ce que je dis, moi.
POSTE SCRIPTHOMME : Je signale le tout petit et tout intéressant bouquin d'un monsieur important, et qui a écrit des livres importants : HANS MAGNUS ENZENSBERGER. Celui-ci, publié dernièrement chez Gallimard, s'intitule Le Doux monstre de Bruxelles, ou L'Europe sous tutelle. Le texte va de la page 9 à la page 81.
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jeudi, 10 novembre 2011
L'EUROPE EST UNE SALOPE (1)
0 – L’EUROPE TELLE QU’ON LA RÊVAIT
ARTHUR RIMBAUD cite deux fois l’Europe dans un poème que j’ai su par cœur, il fut un temps (oui, les vingt-cinq strophes, parfaitement !) :
« Moi qui tremblais, sentant geindre à cinquante lieues
Le rut des Béhémots et les Maelstroms épais,
Fileur éternel des immobilités bleues,
Je regrette l’Europe aux anciens parapets ! »
(vers 81 à 84)
« Si je désire une eau d’Europe, c’est la flache
Noire et froide où vers le crépuscule embaumé
Un enfant accroupi plein de tristesse, lâche
Un bateau frêle comme un papillon de mai. »
(vers 93 à 96)
Mesdames et Messieurs, avant de poursuivre notre cahotant chemin, nous allons observer une minute de silence et nous incliner avec immense respect et profonde affection devant l’évocation de ce chef d’œuvre.
La pendule compte jusqu’à soixante.
A présent, reprenons.
1 – L’EUROPE, MAIS PAS LES PEUPLES
Jusqu’où il faut remonter pour y être, à la source des saloperies qu’on nous déverse dessus depuis quelque temps ? A la fin de la guerre ? Au Traité de Rome ? Au couple HELMUT KOHL / FRANÇOIS MITTERRAND ? Est-ce que c’est le bon, le digne, le traître JACQUES DELORS qu’il faut couvrir de nos excréments les plus frais ? Est-ce que c’est toute la bureaucratie bruxelloise qu’il faut brûler ? Ceux qu’on appelle les « eurocrates » ?
Pour crier dans les rues : « MITTERRAND salaud ! Le peuple aura ta peau ! », c’est trop tard, toute la peau est déjà partie. Ce n’est pas un mal d’ailleurs, même si je sais que ça me viendra aussi, les vers, et que je ne trouve pas ça désopilant. Pourquoi ai-je voté oui à Maastricht, aussi ? C’est là qu’on aurait pu faire quelque chose, peut-être ? Même ça, ce n’est pas sûr. Mais Maastricht, c’est malgré tout un bon point de repère.
Déjà et d’une, c’est Maastricht qui nous a fait la monnaie unique. Si j’ai bien compris, hein ! Parce que pour comprendre le sac de nœuds, on a intérêt à se lever avant le jour et à faire provision d’aspirine. Et même là, il faudrait un traducteur.
Tiens, regardez ça ! Oui, oui, je l’ai gardé mon exemplaire. Je ne l’ai pas jeté dans la cheminée. Bon, c’est vrai, je n’ai pas de cheminée. Mais à la limite, c’est dommage : ça m’aurait peut-être fait plaisir de le voir brûler. Quoi ? Mais le « Traité », voyons : Traité établissant une Constitution de l’Europe, exactement. Pendant un mois avant le vote, je m’étais baladé avec le rectangle en plastique rouge d’ATTAC au revers de ma veste. Pour ce que ça a servi, de voter non.
Les Irlandais, ils ont été obligés de manger leur chapeau électoral. Il faut les comprendre : vous vous voyez aller au bureau de vote tous les dimanches quand il fait grand soleil et que les poissons vous attendent dans le petit étang sympa de Saint Quentin ? Autant vous en débarrasser une bonne fois. Et les Danois, combien de fois ils avaient voté, avant de… de quoi, au fait ? N’est-ce pas trois fois, qu’on les avait obligés ?
Vous voyez, on oublie même les fois où on nous a demandé notre avis. Ça veut sans doute dire une chose : mon avis, il a autant de valeur que la queue de ce vairon perdu dans la friture que Jeannot vient de me servir. Vas-y, Jeannot, comme disait GUY BEDOS ! La preuve, c'est que NICOLAS SARKOZY ne s'est pas gêné pour passer par-dessus le NON au référendum et l'avis de la majorité des Français et faire adopter Lisbonne aux béni-oui-oui de la chambre des députés. Je me dis que la démocratie représentative en est une autre, de belle saloperie.
2 – LE CHAR D’ASSAUT DES TEXTES
Donc le « Traité constitutionnel », vous vous souvenez ? Cent quatre-vingt-onze pages sur papier bible. Quatre-vingt-sept, rien que pour le Traité proprement dit. Quatre cent quarante-huit articles musclés, en pleine forme, surentraînés, pleins de jus, et prêts à vous expédier au tapis au début du premier round, l’arrêt de l’arbitre faisant foi.
Et des articles que je peux comprendre au premier coup d’œil, il n’y en a pas beaucoup. Par exemple : « Le présent traité est conclu pour une durée illimitée » (c’est l’article IV – 446). Ça, ça va. Il y en a quelques autres, mais à vue de nez, ça fait 0,5 % du total. Pour les 99,5 % restants, vous avez bien un petit meuble à caler, non ?
Parce que moi, pour citer l’académicien, le si élégant et mondain JEAN D’ORMESSON : « Ce patagon, j’y entrave que pouic ! ». J’aime bien citer JEAN D’ORMESSON. Ce que j’aime avec lui c’est qu’on est bien servi et qu’on est sûr de la qualité de la viande … euh non, de la langue. Toujours cette maudite langue qui fourche !
Quoi qu’il en soit, une langue riche en saveurs populaires, si proche des gens, si pure de toute sophistication maniérée, si éloignée de toute afféterie salonnarde, si dénuée de tout gongorisme mignard, si châtiée de tout byzantinisme esthétisant, que c’en est un vach’te plaisir.
Pour revenir au « Traité », prenez l’article II – 68, qui traite de la « protection des données à caractère personnel ».
1. Toute personne a droit à la protection des données à caractère personnel le concernant.
2. Ces données doivent être traitées loyalement, à des fins déterminées et sur la base du consentement de la personne concernée ou en vertu d’un autre fondement légitime prévu par la loi. Toute personne a le droit d’accéder aux données collectées le concernant et d’en obtenir la rectification.
3. Le respect de ces règles est soumis au contrôle d’une autorité indépendante.
Eh bien me voilà rassuré, n’est-ce pas ? Mais moi je ne veux pas de « rectification ». Je veux l’effacement pur et simple. Mais bon, on ne va pas chipoter sur des détails. Je me demande seulement ce que ça veut dire, juridiquement, « loyalement ».
Pareillement, je me demande ce que ça peut bien recouvrir, « autorité indépendante ». Est-ce qu’on demande au C. S. A. d’être indépendant ? Ce qui serait drôle, c’est que la loi qui l’a créé soit respectée ! Et je n’ai pris qu’un article pratiquement pas subdivisé. Est-ce que vous connaissez le III – 282 ? Le III – 404 ? Bref, pas la peine d’insister, je pense.
En tout cas, l’Europe, c’est bien avant ce « Traité » que tout le monde aurait dû dire STOP. Le premier jour où on a commencé à NE PAS COMPRENDRE ce qui se passait. Le grand tort des six premiers peuples de l’Europe communautaire, c’est qu’ils ont laissé faire. Quelle que soit l’occasion, il faut REFUSER de ne pas comprendre.
Dès que les peuples, dans les premiers grands cols, ont été lâchés par le peloton de tête (les crânes d’œuf des « concepteurs » de l’Europe), ils auraient dû se mettre en travers de la route, et crier : « STOP ! On veut comprendre. On bougera pas de là avant que vous ayez tout bien expliqué ! ». FRANÇOIS MITTERRAND a bien roulé le « peuple français » dans la farine, avec son Maastricht ! Personne n’y a rien compris, à Maastricht, excepté le quarteron de sournois qui avait son projet bien ficelé dans la tête.
3 – LE CHAR D’ASSAUT EN ACTION
Ce que j’en ai compris, je vais essayer de l’expliquer. En gros, ce projet, je le résumerai de la façon suivante : « Aller le plus vite possible, le plus loin possible de la comprenette des peuples, pour aboutir au « machin » le plus compliqué possible, pour qu’il ne soit précisément plus possible, d’une part, de revenir en arrière, et d’autre part, d’y comprendre quoi que ce soit ».
Suite et fin après-demain à 9 heures.
Parce que demain, c'est le onze novembre, jour férié.
Demain, ça s'appellera "hymne à la politique". A la fin, je donnerai rendez-vous, à tous ceux qui penseront comme moi à l'auto-génocide européen de 1914-1918, devant les monuments aux morts de la Grande Guerre. Avec un aiguillage vers mon blog de 2007 KONTREPWAZON, et clic, dans la colonne de gauche, sur la catégorie "Monuments aux morts". Merci pour eux.
09:00 Publié dans BOURRAGE DE CRÂNE, UNE EPOQUE FORMIDABLE | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : europe, commission européenne, arthur rimbaud, le bateau ivre, helmut kohl, françois mitterrand, jacques delors, maastricht, attac, traité constitutionnel, jean d'ormesson
vendredi, 01 juillet 2011
OUI, NOUS NOUS REPENTONS ! (suite)
Alors la REPENTANCE, maintenant. Qu’est-ce que c’est, l’histoire ? Non : L’HISTOIRE ? Grossièrement, c’est l’ensemble des faits humains qui se sont produits depuis qu’on a les outils pour la raconter (et même plus avec l’archéo- et la paléontologie). Je pense qu’on sera d’accord : ce sont beaucoup de guerres, de famines, de crimes, de trahisons, de cruautés, et autres interminables joyeusetés. Voyez la vie de Caligula ou Néron chez Suétone. Pour faire passer son semblable de vie à trépas, l’ingéniosité de l’humain confine au génie inépuisable.
La colonisation fut une saloperie. L’Eglise catholique a fait des saloperies. Les soldats français en Indochine et en Algérie ont fait des saloperies. Les planteurs blancs du sud des Etats-Unis ont fait des saloperies, y compris une guerre à leurs frères nordistes qui voulaient les embêter à propos de « l’esclavage des nègres ». Vous cherchez des saloperies ? Mais l’histoire en surabonde, en regorge, elle en dégorge encore des cargaisons aujourd’hui. Pour ce qui s’est passé en Europe au 20ème siècle, on a l’embarras du choix.
En 1987 eut lieu le procès de KLAUS BARBIE, le nazi de Lyon (entre autres, l’arrestation de JEAN MOULIN, c’est lui). Eh bien BERTRAND POIROT-DELPECH a pu écrire un petit volume intitulé Monsieur Barbie n’a rien à dire, titre inspiré d’une phrase de l’avocat JACQUES VERGÈS. Le titre en dit long : vous avez dit « REPENTANCE » ? C’est quoi, ça ? Pas dans mon vocabulaire !
C’est simple, l’acte de repentance est une invention très récente (1994), même si le mot est ancien (« regret douloureux de ses péchés et de ses fautes » ; en 1077, l’empereur Henri IV, excommunié, passa trois jours en chemise de bure, dans la neige, avant que le pape Grégoire VII accepte de le recevoir : on a appelé ça « aller à Canossa » ; mais il faut dire que l’empereur avait fait des misères au pape, et continua ensuite).
Alors voici ce que je propose : on va faire la liste COMPLETE des saloperies commises depuis le début de l’histoire humaine, on va nommer le coupable de chacune, et l’on va sommer tous ses descendants de FAIRE REPENTANCE, publiquement et la corde au cou. Par exemple, on va exiger des descendants du consul romain CRASSUS de faire repentance pour les milliers de croix qui ont conclu la répression de la révolte de SPARTACUS, en – 71. Ce n’est qu’une menue proposition. Et ce n’est qu’un commencement.
Qu’on se le dise : toutes les atrocités de l’histoire ont été commises ! Et par des humains, s’il-vous-plaît ! Donc, à chaque saloperie, son coupable ! A chaque coupable, sa repentance ! Y a pas de raison ! Et ça va faire du monde, je vous garantis ! Ce serait gonflé, si on trouvait, parmi les six milliards actuels d’humains, un seul dont un ancêtre n’aurait pas commis une seule saloperie ! On va tous y passer !
Les avocats et les procureurs ont du boulot garanti pour quelques milliers d’années. Rendez-vous compte : six milliards de procès, et six milliards de repentances ! Il y a là un gisement sans fond. Mieux que le tonneau des Danaïdes, car celui-là, on a l’éternité devant nous avant qu’il soit, non pas rempli, mais vidé. Mieux : comme on est sûr qu’il se remplit au fur et à mesure qu’on le vide, c’est une éternité au carré !
Il y aura un bureau, avec des fonctionnaires payés pour ça. On pourra s’inscrire. Car si chaque saloperie est commise, ça veut dire qu’il y a un bourreau. S’il y a un bourreau, il y a une victime. Vous me suivez ? Ce serait bien le diable, en remontant parmi vos ancêtres, si vous ne trouviez pas une belle victime en état de marche, bien présentable.
Entre ancêtres et descendants de bourreaux, puis (il ne faut pas confondre) entre ancêtres et descendants de victimes, avec les six milliards d'humains, on devrait trouver (mais je ne suis pas bon en maths) douze millards au total. Ce serait salutaire, ne trouvez-vous pas ?
Mais si, cherchez bien ! Faites comme les inventeurs de la « psychogénéalogie » qui trouvent à tous les coups pourquoi vous n’allez pas bien : c’est parce que votre arrière-arrière-grand-père a violé votre arrière-grand-mère quand elle avait dix ans (authentique, pas le fait, mais la trouvaille ; elle a été faite par ANNE ANCELIN-SCHÜTZENBERGER, je la recommande).
08:57 Publié dans BOURRAGE DE CRÂNE, DANS LES JOURNAUX, UNE EPOQUE FORMIDABLE | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : repentance, colonisation, église catholique, esclavage, histoire, esclavage des nègres, europe, klaus barbie, nazi