jeudi, 28 janvier 2021
LES POÈTES DE MA VIE (11)
GUILLAUME APOLLINAIRE
*
FÊTE
A André Rouveyre.
Feu d’artifice en acier
Qu’il est charmant cet éclairage
Artifice d’artificier
Mêler quelque grâce au courage
Deux fusants
Rose éclatement
Comme deux seins que l’on dégrafe
Tendent leurs bouts insolemment
IL SUT AIMER
quelle épitaphe
Un poète dans la forêt
Regarde avec indifférence
Son revolver au cran d’arrêt
Des roses mourir d’espérance
Il songe aux roses de Saadi
Et soudain sa tête se penche
Car une rose lui redit
La molle courbe d’nue hanche
L’air est plein d’un terrible alcool
Filtré des étoiles mi-closes
Les obus caressent le mol
Parfum nocturne où tu reposes
Mortification des roses
*
GUILLAUME APOLLINAIRE
Calligrammes.
09:00 Publié dans POESIE | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : poésie, guillaume apollinaire, calligrammes, guerre 14-18
samedi, 25 février 2012
DU TEMPS QUE L'EUROPE SE SUICIDAIT
DU POILU DANS SES DIVERS ETATS
(Les joyeux suicides du continent européen)
Je ne suis certes pas historien, mais ce n’est pas une raison pour ne pas se forger quelques idées pour son propre compte. Sur l’histoire, par exemple, il y en a quelques-unes qui prennent du temps pour sortir de la forge. Par exemple, j’ai commencé, quand j’étais tout gosse, par éprouver des frissons au son de la sonnerie « aux morts », tous les 11 novembre.
ARVIEUX - 05350
Et puis, un jour, j’ai commencé à lire les noms gravés sur un monument « aux morts ». J’ai aussi fait un « service militaire ». Ça finit par relativiser le sens de certains mots, comme « héros », « gloire », « patrie », et quelques autres.
J’ai vu des cimetières militaires : le tout « petit » de la Doua ; celui de Colleville-sur-Mer, avec son horizon de croix blanches américaines ; celui de Douaumont, avec sa haute marée de croix blanches – françaises, pense-t-on en général, mais comment déterminer la nationalité des os ?
Dans deux ans, c’est le centenaire d’un début, mais aussi le début d’un centenaire. Un centenaire qui devrait durer exactement d’août 2014 au 11 novembre 2018. Vous avez déjà compris qu’il s’agit de la « grande », de la « der des der », de « celle que je préfère » (GEORGES BRASSENS) : la Guerre de 1914-1918.
PLEURTUIT - 35730
Je voudrais ici, par avance, apporter ma petite pierre – oh, un minuscule gravier – au plantureux monument que ne manqueront pas d’édifier les sûrement grandioses cérémonies qui ne manqueront pas de marquer les quatre ans de l’anniversaire de ce jour mémorable où l’Europe, lasse de régner sans partage sur le monde connu, se résolut à laisser la place à d’autres et à procéder, sans plus attendre, à son suicide.
Je ne trouve guère d’autre mot que « suicide » pour désigner l’égorgement de masse sciemment commis par des élites fanatisées sur des jeunesses intoxiquées et embrigadées. Disons-nous bien que 1.400.000 Français sont morts de ce virus, cela fait 27 % des jeunes hommes âgés de 18 à 27 ans.
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Ce ne fut guère moins chez quelques nations amies et ennemies. FALKENHAYN, le concepteur de la bataille de Verdun en 1916, crut, jusque sur son lit de mort, que « sa » bataille avait « saigné » l’armée française et épargné l’allemande. On dira que c’est moins que la grippe espagnole de 1918, dont mourut le bon GUILLAUME APOLLINAIRE.
Ce suicide ne fut que le premier d’une longue série. Pour situer les choses, l’épisode de prospérité matérielle apparente et de réelle exténuation morale progressive, que les économistes appelèrent pompeusement les « Trente Glorieuses », se situe un peu après le deuxième suicide du continent européen.
Le suicide européen auquel nous assistons sans doute présentement, qui porte comme marques de fabrique, parmi bien d’autres, l’obsession de la REPENTANCE et le RENONCEMENT à exister, est peut-être le dernier. Mais va savoir à quels autres suicides futurs nous sommes promis, grâce à l’audacieux, ferme et total aveuglement de nos pilotes actuels.
Restons-en pour le moment à ce suicide « fondateur » que constitue cette guerre de quatre ans et quelque, et à la façon dont les vivants ont ensuite arrangé les choses. En particulier ce qu’on appelle aujourd’hui les « monuments aux morts », ces édifices de pierre devant lesquels, tous les 11 novembre, viennent s’incliner le maire, les enfants des écoles, quelques anciens combattants, un peu de population.
J’attends, quant à moi, que la cérémonie commémorative annuelle, d’une part, se démilitarise, et d’autre part, fasse la plus large place aux NOMS gravés. Pour moi, le 11 novembre devrait consister en ceci : lire à haute et intelligible voix, l’un après l’autre, les noms des citoyens de la commune qui ont disparu dans le massacre. Rendre ainsi aux morts leur nom parmi les hommes, je ne vois pas de plus bel hommage.
GRIGNAN - 26230
En particulier, je ne comprends pas que certains monuments portent fièrement des inscriptions du genre « Gloire à nos héros », par exemple celui de Caluire (69). Je préfère de loin, même s’ils semblent trop modestes, ceux qui parlent des « enfants » du lieu. « Morts pour la France », à la rigueur, même si on pourrait discuter.
CAMPAN - 65710
Autre aspect important de « l’art patriotico-tumulaire » (JEAN-MARIE DE BUSSCHER, chronique régulière et illustrée dans Charlie-Mensuel) : la représentation. L’essentiel des monuments français, disons-le, consistent en un simple obélisque, augmenté éventuellement d’une croix de guerre, d’une tête de coq, d’une palme ou autre.
Pour les monuments représentant des hommes, un certain nombre d’entreprises ont constitué de véritables catalogues, dans lesquels les conseils municipaux pouvaient choisir un modèle adapté à leur budget, le « poilu sentinelle » (diffusé à des centaines d’exemplaires) pouvant être livré en bronze, en pierre, en pierre reconstituée, en plâtre, etc.
Plus rares furent les communes qui firent appel à un sculpteur local, ce qui a donné des résultats variés, de l’art naïf au grand art. Je me suis efforcé, sur kontrepwazon, de rendre hommage à ces efforts municipaux, parfois maladroits, parfois bouleversants, le plus souvent simplement émouvants.
MONTFAUCON-EN-VELAY - 43290
Voilà ce que je dis, moi.
09:47 | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : guerre 14-18, monuments aux morts, art patriotico-tuymulaire, jean-marie de busscher, charlie-mensuel, commémoration, souvenir, guerre, douaumont, georges brassens, guillaume apollinaire, europe, montfaucon-en-velay, erquy, campan, grignan, pleurtuit, arvieux