Ok

En poursuivant votre navigation sur ce site, vous acceptez l'utilisation de cookies. Ces derniers assurent le bon fonctionnement de nos services. En savoir plus.

mercredi, 28 février 2018

L'ARCON A LA CROIX-ROUSSE

Vu à la Croix-Rousse.

Il y en a sûrement qui pensent que c'est de l'art.

NARDOU 7.JPG

"Blues for mama".

NARDOU 8.JPG

"Born to be wild".

NARDOU 9.JPG

"Bad girl".

NARDOU 10.JPG

"Let's dance" (sur une reproduction du Saint-Sébastien de Guido Reni qui sert, paraît-il, d'emblème à un groupe de pression porté par l'air du temps).

Ci-dessous, l'argumentaire censé justifier le travail de l'artiste.

NARDOU 2 ARGUMENTAIRE.JPG

En lisible : « L'exposition est une sélection de pièces de ma dernière série "BARBARIE", c'est un écho au féminin, une proposition décalée à la fois mélancolique, surannée, cruelle et déviante, une parenthèse féministe et poétique.

Mes travaux de broderie (depuis 2014) explore [sic !] le fil, dans un mélange parfois rétro mais résolument contemporain de broderie graphique, croisée, tissée, géométrique, typographique, sur des supports photographiques détournés (cartes postales, affiches vintages).

Mes dernières créations sont une palette de broderies typographiques décalées, ironiques et parfois abstraites. Une variation de broderies (à la main) sur des imageries obsolètes et rétro qui, en détournant leur sens virtuel premier, offre une lecture intime, étrange, violente et contemporaine ».

Je m'en voudrais de dire quoi que ce soit de l'usage de l'adjectif comme tapis de bombes, de commenter cette prose et de citer le nom de son auteur.

J'ai failli inscrire ce billet dans ma série "Des nouvelles de l'état du monde", et puis ...  

09:00 Publié dans L'ARCON | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : art contemporain, arcon

vendredi, 23 février 2018

UN PETIT TOUR SUR LES PENTES

VI/VI

De la Croix-Rousse, pour descendre à Lyon (c'est comme ça qu'on dit), une recette parmi bien d'autres. 

z3CELU.JPG

Descendre l'escalier de la rue Célu (Jeanne-Marie, 1780-1846, pas celle de Rimbaud – Les Mains de Jeanne-Marie –, mais la fabricante d'étoffes de soie : une de ces cibles honnies que visaient sans doute les canuts en 1831 et en 1834).

z6CELU.JPG

Rue Célu, jeter un œil en passant sur un peu de verdure jalousement protégée.

z9BODIN MOTTET DE GERANDO.JPG

Hésiter entre la rue Bodin (1788-1876, conseiller municipal, président du tribunal de commerce, administrateur des hospices, qui fut propriétaire du sol de la rue : comme les cimetières, les rues de nos cités sont pleines de noms de toutes sortes de gens indispensables) et la rue Mottet-de-Gérando (1771-1828, conseiller municipal et député, et trajet de la ligne 6).

z15BELLEVUE.JPG

S'arrêter un instant sur le balcon de la place Bellevue et jouir du coup d’œil.

z20BODIN GROGNARD.JPG

Rue Bodin, lever les yeux sur le haut de la rue Grognard (1748-1823, négociant et bienfaiteur du Musée, on ne le sait pas assez),

z21GROGNARD.JPG

puis sur le bas : la rue de Magneval (1751-1821, conseiller municipal et député, comme tout le monde) et, plus loin, la rue des Fantasques (nom d'origine inconnue, mais on trouve dans l'Almanach de 1745 cette intéressante mention : "On nomme ce chemin ainsi parce que c'est un endroit fort écarté, servant de promenoir à des gens d'un caractère particulier, qui veulent éviter la compagnie") et le Rhône.

z29COLBERT.JPG

Au bout de la rue Bodin, saluer les arbres de la place Colbert (ce monsieur n'a pas besoin d'être présenté).

z31ST SEB.JPG

Emprunter résolument la montée Saint-Sébastien (ce saint jeune homme, un peu masochiste si l'on en juge par les multiples photos des siècles passés, n'a nul besoin d'être présenté).

z32ST SEB COLBERT.JPG

Tourner un instant la tête à droite (la cour des Voraces, cet emblème touristique incontournable, n'est pas loin).

z36FANTASQUES.JPG

Quitter la montée Saint-Sébastien pour prendre le virage vers la rue des Fantasques.

z38COUR RECRE MICHEL SERVET.JPG

Se souvenir que ce long rectangle bitumé, en contrebas, fut une cour de récréation, à une époque où billes, agates et bigarreaux changeaient de poche avec fureur.

z43ADAMOLI.JPG

Ne pas s'attarder dans la rue Adamoli (1707-1769, conseiller du roi, maître des ports et passages de Lyon, il donna sa bibliothèque à l'Académie de Lyon).

z49DANS L'ESCALIER.JPG

Prendre l'escalier sans dénomination d'où l'on domine ce qui fut le préau des garçons de l'école de la place Michel-Servet (1511-1553, qui finit brûlé vif parce que sa façon de croire en Dieu défrisait les autorités de l'époque), préau d'où l'on apercevait, à travers un croisillon de bois losangé, ce qui fut la cour des filles, dans l'arrondi de laquelle (ici visible) les maîtresses faisaient tourner les punies (ça ne s'appelait sans doute pas la "tournante" : « Adélaïde, à la récréation, vous tournerez ! – Oui maicresse »).

z59DANS L'ESCALIER.JPG

Mesurer le changement d'altitude.

z66DANS L'ESCALIER.JPG

Se contenter de passer devant ce qui fut l'école des filles.

z71ESCALIER.JPG

Constater qu'on est arrivé en bas.

z78CROIX PAQUET.JPG

Ne pas s'attarder place Croix-Paquet (du nom du monsieur qui obtint en 1628 la permission – confirmée deux ans plus tard en Conseil d'Etat – de "restablir une croix en la place" qui avoisinait sa maison).

z79FEUILLANTS.JPG

Apercevoir la place Tolozan à travers la Grande rue des Feuillants (du nom d'un monastère disparu).

z84FEUILLANTS ROYALE.JPG

Se souvenir de la rue Royale, autrefois la rue des soyeux, où l'on pouvait même observer, à travers une vitrine, le travail de deux linotypistes assis devant leur clavier « elaoin sdrétu » (drôle de formule dont le grand Franquin avait fait, pour le "Petit Noël", une merveilleuse "machine à faire plaisir"), et le fonctionnement particulier de ces machines et de leur "volant" latéral, dont la forme intriguait au plus haut point les enfants qui passaient devant. 

z85PETITE FEUILLANTS.JPG

Se souvenir de la Petite rue des Feuillants où était sise, en plus de quelques entrées traboulantes, la boutique où l'on louait les skis pour le week-end.

Traverser le plus vite possible et sans trop regarder la pauvre "place Tolozan" (1726-1811, dernier prévôt des marchands, qui fit construire le bel immeuble du n°19) et gagner le nouveau pont Morand (dans lequel passe la ligne A du métro).

z86PANORAMA CROIX ROUSSE.JPG

Une fois sur la rive gauche, apprécier la vue sur les pentes est de la Croix-Rousse avant de poursuivre sa route.

****************************

Note : j'achève ici une série de six "bambanes" sur les pentes de la Croix-Rousse. A vrai dire, il en reste quelques-unes au programme. Mais ça suffit, je crois, pour se faire une idée assez précise de la physionomie de ce qu'on appelle "Les Pentes" (par opposition au "Plateau") de la "Colline qui travaille" (par opposition à la "Colline qui prie"). 

mercredi, 21 février 2018

UN PETIT TOUR SUR LES PENTES

V/VI

Descendre de la Croix-Rousse aux Terreaux, on a l'embarras du choix.

11PLANTEES.JPG

1 Un amical salut au 24 rue des Pierres Plantées, à la chambre haut perchée (ici au soleil) et au jardin à hauteur du premier étage, invisible derrière le mur clair (à gauche).

12JBSAY.JPG

2 Dans ce sens, la rue Jean-Baptiste Say descend. On ne jette pas un regard sur la montée de la Grande-Côte, devenue un grand boulevard.

lyon,croix-rousses,pentes de la croix-rousse,rue des pierres plantées,rue pouteau

3 On laisse aussi la rue De Sève, la place Colbert et la montée Saint-Sébastien.

15POUTEAU.JPG

4 On préfère passer par la rue Pouteau (à cause de la lumière).

516POUTEAU.JPG

18POUTEAU.JPG

6 Le bas du premier escalier.

24POUTEAU SOROKINE.JPG

7 Au bas du deuxième escalier, vécut autrefois Sorokine, peintre lituanien et vaguement clochard dont la dent unique et proéminente démeublait magnifiquement le sourire crachotant (« Comprénez-vous ? », avec un roulement d'r), dans ce qui était alors un gourbi encombré d'un invraisemblable fourbi de planches, de poussière et de poésie. La modernité a mis le holà à ce désordre.

28CHARDONNET.JPG

8 Un crochet par la place Chardonnet (je n'ai pas vérifié si la traboule entre la place – au n°2, en face – et la rue en dessous – Burdeau – est encore ouverte).

27CHARDONNET MERMET.JPG

9 Vue dominante sur le sombre passage Mermet.

35BURDEAU.JPG

10 L'immeuble était occupé par je ne sais quelle congrégation, aujourd'hui délogée ou éteinte, et possédait une entrée directe (méconnue mais palpitante) dans le haut de l'église Saint-Polycarpe.

39THIAFFAIT.JPG

11 Passage Thiaffait.

44THIAFFAIT.JPG

12 Ci-dessus et ci-dessous, le même vitrail demi-lune, vu du passage Thiaffait, puis de l'église (pourrait-on se douter qu'il y a là une église ?).

1366POLYCARPE.JPG

47THIAFFAIT.JPG

14 Le sombre passage Thiaffait, devenu pimpant jardin des modes.

1548THIAFFAIT.JPG

lyon,croix-rousses,pentes de la croix-rousse,rue des pierres plantées,rue pouteau

16 Dans l'église Saint-Polycarpe, trop « insérée dans le tissu urbain » (édifiée au XVII° siècle, il a fallu construire autour d'elle), la lumière concrète ne peut vraiment venir que d'en haut. Y a-t-il encore un musicien pour s'asseoir de temps en temps à la console de l'orgue Augustin Zeiger, "le plus ancien et le plus important de la ville de Lyon" ?

59MERMET.JPG

17 Le passage Mermet, vu de la rue René Leynaud (poète et journaliste, fusillé par les Allemands en juin 1944).

62MERMET.JPG

18 Je n'ai jamais vu ouverte cette porte latérale de l'église.

61MERMET.JPG

19 Ce qu'on voit du passage Mermet en tournant le dos à l'escalier.

55RLEYNAUD.JPG

20 Vers la rue des Capucins, par la voie officielle (ça traboule).

75STE MARIE TERREAUX.JPG

21 Rue Sainte-Marie-des-Terreaux, on tient le bon bout.

lundi, 19 février 2018

PAS PHOTOGRAPHE, MAIS ...

Mon art abstrait.

photographie

 

dimanche, 18 février 2018

UN PETIT TOUR SUR LES PENTES

IV/VI

Du plateau au plateau par la place de la Boucle.

On est de nouveau côté Rhône. La place a été rebaptisée Adrien Godien, et le splendide pont de la Boucle a été détruit, pour laisser place au pont Winston Churchill, banalement moderne. Je n'ai rien contre Adrien Godien, estimable peintre lyonnais, qui avait, je me rappelle, illustré une belle édition du Saint Julien l'Hospitalier de Flaubert. Un jour où je faisais la sieste en salle des ventes, j'ai laissé partir sous mon nez, pour des prix dérisoires (genre 40€), plusieurs tableaux fort présentables. Je m'en suis voulu.

509SOULARY.JPG

1 Rue Joséphin-Soulary.

512SOULARY.JPG

2 C'est ici que la rue devient une curiosité.

3517SOULARY.JPG

529SOULARY.JPG

 4 Le Rhône, en bas et au loin, et une vague apparition du lac de la Tête d'Or. On entrevoit aussi l'immeuble d'Interpol.

531SOULARY.JPG

5 Le "street-artist", pour excréter son art, n'a pas besoin d'une pissotière : il dépose ses matières à la vue de tous, là où il n'y a ni policier, ni caméra de surveillance, et en dehors des heures généralement ouvrables. Pudique, le "street artist" ne veut pas de témoin : c'est un timide. Pour la lumière, il a cependant besoin d'une aide extérieure.

6537SOULARY.JPG

7549SOULARY.JPG

547SOULARY.JPG

8 La maison (avec le buste en façade) de Joséphin Soulary, poète (1815-1891). J'ai un peu croisé la route de l'actuel propriétaire, mais nos atomes n'étaient pas crochus.

 

569PONS.JPG

9 Le bas de la rue Eugène Pons, juste avant de remonter.

BOUCLE 6.jpg

10 Il est pas beau, le pont de la Boucle ? Faut-il le démolir ?

579MASCRANY.JPG

11 On va remonter par la rue Mascrany, du nom d'une famille originaire des Grisons, installée à Lyon aux XVI° et XVII° siècles. Le précédent nom de Camille Jordan (homme politique important, paraît-il, du temps de Napoléon) fut attribué à une immense rue d'au moins un pâté de maison, entre les rues des Tables-Claudiennes et Imbert-Colomès.

592SAINT DIE.JPG

12 Rue Saint-Dié.

593SAINT DIE.JPG

13 Ce qu'on voit vers le nord, du haut de la rue Saint-Dié (ainsi nommée "à cause des combats en 1917").

samedi, 17 février 2018

UN PETIT TOUR SUR LES PENTES

III/VI

De Saint-Bruno à Saint-Bruno par le quai de Saône.

401ST BRUNO.JPG

Saint-Bruno vu du boulevard.

403HOCHE.JPG

404HOCHE.JPG

Aperçu sur un lacet des Esses (derrière le mur).

405HOCHE.JPG

En face, les tours de l'Observance, sur la colline de Loyasse.

407HOCHE.JPG

408HOCHE.JPG

420MUETTE.JPG

L'accès à la Muette, depuis le quai Saint-Vincent. Je connaissais très bien les gens qui occupaient tout le premier étage de l'immeuble à droite : Michel et François (leur chambre, balcon du premier étage) ne prêtaient plus depuis longtemps aucune attention aux péniches qui passaient sur la Saône, mais j'aimais bien venir, parce qu'ils étaient très outillés en Meccano, et qu'ils étaient abonnés à Tintin (moi, c'était Spirou, on se complétait).

421MUETTE.JPG

422MUETTE.JPG

423MUETTE.JPG

424MUETTE.JPG

425MUETTE.JPG

 

427MUETTE.JPG

428.JPG

429.JPG

430.JPG

432.JPG

Saint-Bruno vu de la rue Pierre-Dupont (célébrité poétique de la ville, Pierre Dupont, 1821-1870, qui avait l'estime de Baudelaire, est enterré au vieux cimetière Croix-Rousse).

vendredi, 16 février 2018

UN PETIT TOUR SUR LES PENTES

II/VI

Côté Saône.

z4ST FRANCOIS D'ASSISE.JPG

On va descendre par la rue de l'Alma (pas de zouave, ici, seulement un souvenir de Crimée, et encore).

z13ALMA.JPG

J'ai habité une chambre située au rez-de-chaussée face à ce paysage.

z15ALMA.JPG

Avec une bonne loupe, on aperçoit deux explorateurs de bouche en train de parfaire leur technique.

z22JARDIN DES PLANTES.JPG

Arrivée au "Jardin des Plantes" (appellation officielle).

24CONGREG ANNONCIADE.JPG

z32MONTEE CARMELITES.JPG

L'escalier des Carmélites.

z34IMPASSE FERNAND REY.JPG

Impasse Fernand Rey (ce conseiller municipal et adjoint au maire, bien connu de ses proches, mort en 1945, a aussi une (petite) rue et même une (toute petite) place).

z41RUE DE LA VIEILLE.JPG

La falaise au bout de la rue de la Vieille (qui fut aussi rue du Vieux-Loup, rue de la Monnaie, rue de la Monnaie Saint-Vincent – la paroisse et le quai ne sont pas loin – et rue de la Vieille Monnaie).

z47VUE DU JARDIN ST BENOÎT.JPG

La falaise au-dessus du jardin Saint-Benoît.

z51GONIN.JPG

On s'apprête à remonter par le passage Gonin (du nom d'un ancien propriétaire).

z57GONIN.JPG

Un jardin, avec quelques salades et quelques nichoirs.

z59GONIN.JPG

z63GONIN.JPG

z80VAUZELLES.JPG

Montée de Vauzelles (une famille de notables au XVI° siècle).

z88ALLOUCHE.JPG

Montée Lieutenant-Allouche (assassiné par les Allemands – je devrais dire "nazis", mais – en 1944 à Grenoble).

z90ALMA.JPG

Retour à la rue de l'Alma et au plateau.

jeudi, 15 février 2018

DRÔLES DE RUE DE LYON

"C'est pas seulement à Paris que ..." (c'est "L'Assassinat" de Georges Brassens qui commence comme ça).

RUES DE PARIS 1.jpgJ'allais dire : c'est pas seulement à Paris qu'il existe un dictionnaire desRUES DE PARIS 2.jpg rues, nous à Lyon aussi l'on a .... Mais ce n'est pas vrai. D'abord, à Paris, ils ont Jacques Hillairet, et personne ne pourra faire comme si : il existe un et un seul Jacques Hillairet. En plus, son extraordinaire ouvrage (deux volumes augmentés d'un supplément) s'intitule Dictionnaire historique des rues de Paris (Minuit), deuxième raison qui le rend incomparable.

RUES DE LYON MAYNARD.jpgTroisième raison : l'ouvrage de Louis Maynard ne se veut pas "Dictionnaire", encore moins "historique". Beaucoup plus modeste, il seRUES DE LYON VANARIO.jpg propose sous le titre Rues de Lyon (Jean Honoré, 1980), sans plus. Même l'ouvrage de Maurice Vanario, le continuateur de Maynard, ne s'est voulu ni "dictionnaire", ni "historique". Vanario, "Sous-Archiviste", « sous la direction de Henri Hours, Conservateur Municipal des Archives de la Ville de Lyon » a publié presque sous le même titre (Les Rues de Lyon à travers les siècles, LUGD, 1990), une sorte d'inventaire sérieux et complet de toutes les artères qui traversent, aèrent et desservent la cité (y compris les "voies privées").

Cela donne un livre de pas 300 pages in-octavo, dans lequel, hélas, revient comme une rengaine l'expression "origine inconnue", quand l'œuvre de Hillairet – trois volumes de grand format (on dit, paraît-il, "in-quarto"), dont deux très "robustes" (700 et quelques pages sur deux colonnes chacun) – va constamment tout au fond des choses. Si je prends au hasard la rue du Cardinal-Lemoine, voici comment s'annonce l'article : « V° arrondissement. Commence 17 quai de la Tournelle. Finit place de la Contrescarpe. Longueur 680 m. ; largeur 12 à 20 m. » (la rue de Vaugirard s'étale, elle, sur plus de 4km.). On ne saurait être plus précis.

Et l'auteur enchaîne sur un condensé de l'histoire de la voie, puis passe en revue tous les numéros dont il y a quelque chose à dire (parfois fort longuement, en fonction de). J'imagine volontiers que pour rédiger cette œuvre d'une vie, Jacques Hillairet a usé bien des pantalons sur des chaises de bibliothèques ou de salles d'archives. On le voit, le "cahier des charges" n'a rien à voir. Maynard puis Vanario se contentent d'un répertoire.

Il n'est d'ailleurs pas sûr que la capitale des Gaules mériterait que quelqu'un s'engageât dans une telle besogne, d'autant qu'aucun baron Haussmann n'est venu compliquer la tâche en bouleversant à ce point les traces du passé, et que le nombre des gens dignes de figurer dans l'histoire pour y avoir vécu reste d'une modestie provinciale, une fois jetés les noms de Louise Labé, Rabelais, Herriot, Henri Béraud ou Albert Londres. Inutile de nier le pouvoir d'attraction de la capitale. Il y a aussi des Rastignac en puissance chez les "bons gones", et même ches les "mamis que sont pas de cogne-mous" (voir il y a quelques jours).

573SOULARY.JPG

Nos rues, avenues, places, boulevards, quais, impasses, montées portent, comme partout ailleurs, des noms en général ordinaires (je veux dire préfet normal, philanthrope obscur, député honnête (!), martyr de la Résistance, aviateur lyonnais, fabricante d'étoffes de soie épouse de Jacques Ray, professeur de minéralogie et géologie, sixième adjoint au maire, imprésario bienfaiteur des œuvres laïques, maître imprimeur, navigateur et autres célébrités mémorables) avec, ici ou là, des curiosités bien propres à appâter l'amateur de couleur locale (rue du Manteau jaune, rue des Quatre chapeaux, rue du Plâtre, etc...).

Je suis cependant curieux d'apprendre s'il existe, dans une seule des 36.000 communes de France, une "Rue des Actionnaires". Oh, ce n'est vraiment pas grand-chose, cette rue : un pâté de maison, tout au nord de la Croix-Rousse, tout en bas des pentes, presque à la limite de Caluire. Bon, c'est vrai, c'est une église dotée de son jardin (Saint-Eucher), mais est-ce que ça justifie ? Et en face, on ne voit aucune entrée d'immeuble. Ça ne fait quand même pas beaucoup d'habitants au mètre linéaire. Je n'ai pas fait attention, mais il n'est pas impossible que la rue des Actionnaires ne comporte aucun numéro ! L'Histoire est une vieille dame cynique, quand on voit la place gargantuesque qu'ont prise les actionnaires (fonds de pension, fonds souverains, fonds spéculatifs, fonds vautours, etc.) dans la marche du monde actuel.

EGLISE SAINT-EUCHER.JPG

La voilà, la rue des Actionnaires.

Voici ce que nous indique Maurice Vanario à l'article "Actionnaires" (rue des, 4°) : « Tenant : rue Eugène Pons. Aboutissant : rue Mascrany. En souvenir de la compagnie financière constituée, sous la Restauration, pour créer le quartier Saint-Eucher. Attesté en 1849 (dél. C. M.). Devenue rue du Tribun en 1849 (dél. C. M. 17 janvier). Redevient rue des Actionnaires en 1852 ».

C'est un peu court, vieil homme,

On pouvait dire, oh dieu, bien des choses en somme.

Edmond Rostand (enfin presque).

Mais n'est pas Edmond Hillairet qui veut. 

mercredi, 14 février 2018

UN PETIT TOUR SUR LES PENTES

I/VI

Côté Rhône. 

610RATER BONAFOUS.JPG

Vu de la montée Rater.

629RATER.JPG

Un petit bout de la montée Bonafous.

642ARÊTES.JPG

Une des entrées, dit-on, vers les "arêtes de poisson".

637RATER.JPG

Ci-dessus / ci-dessous :

"Champ-contrechamp" montée Rater / cours d'Herbouville.

656RATER.JPG

 

664COQUILLAT.JPG

On retourne vers le plateau par la montée Coquillat : avouez que ça fait un peu "dégueuloir", et la falaise des Fantasques au bout, n'encourage pas, et la hauteur des marches a de quoi dissuader, et ....

674COQUILLAT.JPG

689DELORME.JPG

La toute petite rue Philibert Delorme.

691MAGNEVAL.JPG

Au bout de la rue de Magneval, l'escalier.

698MAGNEVAL.JPG

« Ô récompense après une montée

Qu'un long regard sur le calme des lieux. »

Paul Valéry (enfin presque).

dimanche, 11 février 2018

GUIGNOL

"Guignol" est un mot qui appartient à la famille des antonomases célèbres, et compte ainsi dans son cousinage par force des gens aussi estimables que le frigidaire, la poubelle ou le sandwich, substantifs en général issus des nobles lignées qui ont eu le génie de faire don de leur patronyme au Dictionnaire. Je ne vais pas réécrire son histoire : ce serait forcément moins bien que tous ceux qui se sont donné la peine de le célébrer.

Parmi ces gens d'un goût très sûr qui savent reconnaître le génie, on trouve Alfred Jarry, que le Père François (je veux dire le pape, qui me l'a dit en confidence la semaine dernière) s'apprête à canoniser en grandes pompes, à cause du culte sans faille que l'illustre écrivain a rendu à sa majesté l'Absinthe, au point de lui faire le sacrifice de son existence (même si l'hypothèse est controversée ; notez que Christophe Colomb lui-même n'a été recalé qu'à la suite d'un procès en canonisation en bonne et due forme, cf. La Harpe et l'ombre d'Alejo Carpentier). Gloire à Alfred Jarry, saint et martyr, qui a inclus dans ses Minutes de sable mémorial un mémorable Guignol qui prouve en l'instaurant la parenté indubitable de son Ubu avec notre marionnette lyonnaise.

1GUIGNOL1.jpg

Photos des marionnettes de Guignol (Chignol pour les intimes) et Gnafron, prises au musée de Gadagne dans les autrefois (années 1970). J'ignore comment elles se présentent, aujourd'hui que l'hôtel de Gadagne a été transformé de fond en comble. 

1GUIGNOL2GNAFRON.jpg

Ici, admirez juste la rusticité raffinée du travail du sculpteur et la magnifique teinte vermeille qui orne la trogne de ce misérable buvanvin* de Gnafron. C'en est au point qu'une maison de vin de chez nous avait fait de la marionnette un emblème renommé sous nos latitudes.

lyon,guignol,capitale des gaules,marionnettes de lyon,alfred jarry,guignol ubu,l'autoclète,minutes de sable mémorial,ubu roi,gnafron,musée de gadagne,laurent mourguet,théâtre lyonnais de guignol onofrio,jean-baptiste onofrio,mahomet le coran,société des amis de guignol,justin godart,mgr lavarenneernest neichthauser,le sarsifi petafiné,trouble every day,béatrice dalle,claire denis

Je me sens mauvais Lyonnais : je ne suis retourné à Gadagne que pour m'asseoir en été à une table des "jardins suspendus", au quatrième étage du musée (photo ci-dessous). Je recommande le lieu, on est à hauteur de toit, accroché à la colline, bien loin des rumeurs et des miasmes urbains. Une riche bonne idée ! Mauvais Lyonnais ? Je n'ai jamais été folkloriste, et ai renoncé à le devenir un jour : les folkloristes m'ennuient autant que les touristes revenus d'ailleurs pour une "soirée diapos".

Je ne suis pas davantage le militant de mes origines. Je laisse ce sale boulot à de pauvres excités insulaires même pas comiques, qui nous emboconnent l'atmosphère avec la singularité que leur confère leur insularité. Certaines "singularités collectives" ressemblent à des phénomènes de foire, vous savez, ces "hommes-trépied", "hommes-tronc", "femmes-serpent", frères siamois ou femmes à barbe, qui ne pouvaient gagner leur pain qu'au cirque. Et je ne suis pas non plus un collectionneur frénétique d'images et de "couleur locale". Je me contente de picorer à l'occasion dans le catalogue des fleurs qui un jour ont poussé sur ces terres.

GADAGNE.jpg

Pour parler franchement, les Lyonnais ne parlent plus le lyonnais depuis bien longtemps. Combien savent ce qu'était un trancanoir ? Qui parle encore d'équevilles ? Je ne suis même pas certain qu'ils connaissent un peu le théâtre de Guignol, annexé par les "actions culturelles à destination des enfants", alors que Laurent Mourguet destinait aux seuls adultes les dialogues de ses pièces dont, si je ne me trompe, il n'a pas laissé d'originaux. Remarquez, j'ai l'air de critiquer, comme ça, mais j'ai moi-même glissé les mains dans les gaines de quelques pantins en compagnie d'un oncle, très cher à ma mémoire quoiqu'il fût prêtre, pour distraire petits et moins petits, par quelque après-midi pluvieux (Le Déménagement, Les Embiernes, La Racine d'Amérique, ...). Mais c'était indéniablement lui qui prenait l'accent de par chez nous avec le plus d'authenticité (il n'avait pas son pareil pour glisser dans les conversations des lyonnaiseries : "comme un coq en plâtre", "en tapis noir", etc.).

1GUIGNOL3 PIECES.jpg

Le digne magistrat Jean-Baptiste Onofrio, qui assistait incognito aux représentations de Mourguet en a pieusement recueilli assez de bribes (y compris sur ses manchettes – on pense aux omoplates de chameaux de Mahomet pour le Coran) pour offrir un beau recueil de pièces (1865), imité beaucoup plus tard (1925, ci-dessus) par Les Amis de Guignol, Justin Godart, Mgr Lavarenne, Ernest Neichthauser (qui fabriquait les marionnettes) et d'autres.

Ce n'est pas sous la plume de l'auguste magistrat Onofrio qu'on trouve la pièce de Guignol, hélas méconnue, pochade intitulée Le Sarsifi petafiné, à ne pas mettre entre des mains inaverties. La justification du tirage (ou l'achevé d'imprimer) portait fièrement la phrase : « Cette pièce ne sera jamais réimprimée ». A la lecture, on comprend que les éditeurs étaient des gens d'une extrême pudeur. Le thème, bien qu'autrement formulé, s'en retrouve curieusement dans le film de Claire Denis Trouble every day (2001), avec une Béatrice Dalle pleine de dentition aiguisée et d'hémoglobine. Il est question d'un accident subi par Guignol sur une partie de lui-même à laquelle les messieurs tiennent en général beaucoup. Il serait malséant que j'en dise davantage. On devinera à partir de là le rôle des dents de Béatrice Dalle.

SARSIFI.jpg

Le dessinateur Berlion et son scénariste Corbeyran, dont j'ai évoqué les "Sales mioches" récemment, donnent un coup de chapeau à Guignol dans les pages de garde de leurs albums : bien maigre consolation, qui n'offre que le côté caricatural du folklore. Ci-dessous on voit le tandem infernal, avec sa mise en abyme pour faire le lien avec les "mioches". Notez que le cadre est sympathique : le castelet du parc de la Tête d'Or, sur fond de kiosque à fleur de la place Bellecour (je ne suis pas sûr de l'exactitude de ce détail, M. Berlion, d'autant que Guignol est dépourvu de la "tresse" que tout bon canut se devait de porter à l'époque de Mourguet).

BERLION SALES MIOCHES GARDE.jpg

Le vieux, le grand, le magnifique Gotlib avait donné une version autrement "moderne", décapante et "détrancanée" à souhait de la caricature. Mais Gotlib était un peu plus "voyou" dans son dessin, puisqu'il s'en passait de belles dans le castelet (Rubrique-à-brac tome I).

GOTLIB.jpg

La tradition des bons gones s'est vaille que vaille maintenue et soutenue jusqu'à la deuxième guerre, grâce à la vigilance active de la Société des Amis de Guignol. A partir de 1945, la France semble avoir brutalement rompu avec l'esprit de "Résistance", puisqu'elle a accueilli à bras ouvert le Grand Débarquement des Nouveautés venues par cargos entiers d'outre-Atlantique. C'est alors que la "culture américaine" (si ce n'est pas un oxymore) a supplanté la vieille Culture Française, à laquelle elle s'est contentée de dire, avec ses gros bras musclés : « Ôte-toi de là que je m'y mette ! ». Exit Guignol.

1GUIGNOL4 SOCIETE DES AMIS.jpg

C'est dans la publication annuelle de cette honorable société (Almanach des Amis de Guignol) qu'on trouve des récits bien canants, comme l'histoire du pari fait par le Glaudius et le Toni ou celle de la Commode de la cousine Stéphanie (Catherin Bugnard, de célèbre mémoire). Je grossis ci-dessous l'exposé des motifs de cet immortel réservoir de lyonnaiseries.

1GUIGNOL6 SOCIETE DES AMIS.jpg

Le cogne-mou, ça dit bien ce que ça veut dire, si l'on se représente le monsieur en bûcheron. Et pour 159 sous, il n'y a pas de raison de se priver.

Note : Voici la définition que Nizier du Puitspelu donne de "buvanvin" : « Ivrogne. Jean Brunier (prononcez Bruni), notre granger, était un brave homme, mais quelque peu buvanvin. Un dimanche, à trois heures, mon père le trouve le pouce sur le loquet du Bon Coin, à Saint-Irénée. – Eh, Jean, que faites-vous là ? – Monsu, j'allôve à vêpres. – Au moins, disait mon père, s'il n'avait pas eu le pouce sur le loquet ! ».

jeudi, 08 février 2018

C'EST QUOI, CORSE ?

Propos d'un Français ordinaire et endurci.

C'est quoi, au fait, Corse ?

Moi, je suis Lyonnais, je suis né là, j'y habite, et je dis et alors ? So what ? Je n'en fais pas un "brocciu" (nous, on a la "cervelle de canut").

Ils revendiquent leur minuscule identité ? Grand bien leur fasse. Ils viennent emmerder le monde à cheval sur cette identité pour en découdre ? Alors là, rien ne va plus.

300.000 insulaires arrivent à empuantir (de temps en temps) l'air médiatique que respirent 66.000.000 de Français ? Mais c'est quoi, cette blague ? J'attends qu'on m'explique pourquoi une nation de cette dimension devrait se laisser impressionner par une république de Lilliput. Et de structure clanique, qui plus est.

CORSE1.jpg

Uderzo.

Ils voudraient qu'il y ait deux langues officielles en France, le français et le corse ? Mais c'est quoi cette blague ? J'espère qu'on me demandera mon avis : le corse langue officielle de la France ? Et puis quoi, encore ? Elle aurait bonne mine, la France, dans le "concert des nations", à l'ONU, où les propos de l'ambassadeur seraient traduits du français et du corse.

D'abord, le corse est-il une langue ? Même pas. Allez, une variante, une cousine de l'italien, un dialecte groupusculaire, je veux bien, soyons bon prince. Mais une langue ? Le breton, le basque, à la rigueur, mais le corse ? C'est quoi, cette blague ?  Talamoni, vieux compagnon de route des cagoulés, président de la nouvelle entité, fait des discours en corse ? Très bien, mais qu'il ne compte pas sur moi pour faire le moindre effort pour l'écouter, l'entendre ou le comprendre. Il veut nous quitter ? Je dis : bon vent !

A comparer, il y a quelque temps, avec la conférence de presse du chef de la police de Barcelone, qui s'est levé de son siège et a quitté les lieux quand un journaliste lui a demandé pourquoi il s'était exprimé exclusivement en catalan. Je m'étais dit : pour qui se prend-il, le flic en chef ?

Là où je suis prêt à reconnaître un mérite exceptionnel aux Corses, c'est à propos de la préservation de leur littoral. Alors là, je dis : "Bravo!", et depuis bien avant la création du "Conservatoire du Littoral". Une mention aussi pour I Muvrini, A Filetta et autres formidables chœurs (Marcel Pérès et son Ensemble Organum, par exemple) qui donnent une belle idée de ce que sont les polyphonies corses.  Mais pour le reste (nationalisme, indépendantisme, régionalisme et tutti quanti), je dis : vas-y Macron ! 

CORSE2.jpg

Pétillon. L'Enquête corse (Albin Michel, 2000), excellente caricature.

Demande-leur, à Talamoni, à Siméoni et à leurs copains, s'ils en veulent, de la carte d'identité de la République Française. Êtes-vous français, monsieur Talamoni ? Ils n'en veulent pas ? Allez, donne-leur l'indépendance qu'ils réclament à cor, à cris et à pétards. Mais à charge exclusive pour eux de constituer une armée, une police, une administration, une monnaie, et tout ce qui fait les nations indépendantes : le beurre et l'argent du beurre, c'est fini ! Ils se disent Français quand il s'agit de "solidarité nationale", mais Corses pour tout le reste. Ah ça oui, quand il s'agit de faire rentrer l'argent du beurre, ils sont là.

Pour le moment, je vois des petits caïds de quartier qui veulent exploiter à leur profit le territoire d'un parrain puissant, qui a trop longtemps laissé les gamins jouer avec des grenades et des kalachnikovs dans le bac à sable, en faisant semblant de les considérer comme des égaux. 

Si le gouvernement de la République en finit avec la lâcheté, la duplicité (je pense à "l'étage des Corses", à la mairie de Paris, succursale d'un succédané de mafia, du temps d'un ancien maire devenu président et d'un ancien Corse devenu ministre de l'Intérieur) ou le laisser-faire, je dis au président : Bravo !

Et puis, Macron, si ça fait du chambard au-delà du raisonnable, fais donc un petit référendum sur tout le territoire français. Je parierais volontiers qu'une majorité de Français serait d'accord pour larguer la Corse, les Corses, leurs humeurs et leurs bombes, pour ne plus entendre parler de ça.

Bye-bye, va petit mousse, où le vent te pousse.


Un bon moyen de mettre à tous ces fanatiques le nez dans leur bouse.

************************************

Après-coup.

Il semblerait que le président affiche une "fermeté républicaine". Talamoni (le vieil ami des bandes armées qui donnaient, devant des journalistes convoqués, des conférences de presse nocturnes en plein maquis) est très déçu et amer. Il est "consterné". Il a boycotté le banquet républicain. Il annonce des problèmes et, qui sait, peut-être des morts. Des menaces, maintenant, monsieur Talamoni ? Et ce sont les Corses qui ont élu ce type-là président ? Honte à eux !

mercredi, 07 février 2018

DOCTEUR, COMMENT VA LE MONDE ?

Des nouvelles de l’état du monde (18).

Le monde va-t-il bien ? Le monde va-t-il mal ? Le débat fait rage (un de plus, dira-t-on, voir au 2 février). Les uns ne voient, selon les autres, que le côté heureux des choses, sont heureux du monde dans lequel ils vivent et disent du mal de Michel Houellebecq. Les autres souffrent, selon les uns, d’une sinistrose chronique aiguë, trouvent inquiétant tout ce qui arrive et sont allergiques à Michel Serres, le « ravi de la crèche ».

Bien entendu, « les uns » et « les autres » se toisent, s’affrontent, s’invectivent et ne peuvent supporter de voir applaudir leurs adversaires. Pour « les uns », « les autres » sont d’insupportables pessimistes, tandis que l’optimisme des premiers apparaît aux seconds comme d’indéfendables béatitudes. « Les uns » détiennent des richesses actives de créativité, « les autres » possèdent la sagesse imperturbable de la lucidité. Peut-être une version modernissime de la concurrence entre les partisans de l'"action" et le adeptes de la "connaissance" (vieilles catégories de la philo en classe de terminale) ? Une nouvelle mouture du combat des Voraces contre les Coriaces ? Comment savoir qui a raison ?

Je crois que c’est assez simple. Comme dans la médecine, il s’agit de mesurer assez objectivement une température ou une pression artérielle : plus la température augmente, plus la pression monte, plus il faut s’inquiéter, c’est proportionnel. On est à l'affût de la moindre anomalie ; on guette l'AVC, l'infarctus, la rupture d'anévrisme ; on scrute les appels à l’aide, on entend les cris des lanceurs d’alertes. On a l’œil sur les signaux, on note leur fréquence et leur intensité. Dès lors, on a une idée approximative de l’amélioration ou de l’aggravation de l’état du malade. Je propose de limiter notre étude à quatre symptômes.

1 – Le symptôme humanitaire.

Tout le monde a l'air de trouver normal qu'il existe aujourd'hui des organisations qui se sont donné pour but de sauver les humains auxquels il arrive des malheurs. J'en déduis que tout le monde trouve normal qu'il arrive des malheurs. Il faut pourtant le dire bien fort : il n'est pas normal qu'il y ait de l'humanitaire. L'existence même des organisations humanitaires, et surtout leur omniprésence sur toutes sortes de terrains et dans tous les canaux médiatiques est un très mauvais signe.

L’idée est simple : plus vous avez d’intervenants humanitaires, d’associations de bénévoles, d’ONG plus ou moins puissantes engagés sur le terrain, plus ça veut dire qu'il y a urgence : le nombre des sauveteurs permet de mesurer le malheur. Mais la taille des camps de réfugiés répartis sur la surface du globe et l’importance des populations contraintes ou désireuses de quitter leurs terres pour des ailleurs moins sombres sont également de bons indicateurs.

Prenez la Birmanie, charmant pays exotique bourré de bouddhisme et de bouddhistes qu’on nous présente en général comme des modèles de tolérance et de pacifisme. Résultat : 650.000 réfugiés dans des camps au Bangla Desh voisin. L’aimable junte birmane, incitée par une grande humaniste qui a eu le prix Nobel de la paix, leur promet qu’ils peuvent rentrer chez eux, à condition qu’ils puissent prouver leur identité et leur lieu d’habitation, étant entendu que les éléments de preuve et les lieux ont été soigneusement détruits au préalable, par le fer et par le feu.

Prenez le Yemen, charmant pays bourré d’islams divers et de corruptions variées qui s’opposent militairement, qu’on présentait il n’y a pas si longtemps comme un paradis pour touristes (il est vrai que certains étaient invités à prolonger leur séjour jusqu’à paiement d’une rançon). L’ambiance éminemment fraternelle qui règne aujourd’hui dans le pays a ouvert la porte à une société principalement fondée sur le choléra et, dans un avenir très proche, sur la famine.

Prenez le Kasaï, province congolaise, où se commettent allègrement découpages à la machette de fœtus extraits du ventre de leur mère, plantages d’objets tranchants ou contondants dans le vagin des femmes, dévorations et autres cruautés. On avait lu les mêmes choses en 2012 (cf. 30 novembre), quand le naïf docteur Mukwege (« l'homme qui répare les femmes ») avait installé une maternité dans le nord-Kivu, autre province congolaise, qui était très vite devenue, par la force des événements, un atelier de réparation des femmes torturées et violées. Il y a depuis 1999 des casques bleus de l’ONU en mission (MONUC, puis MONUSCO) quasi-humanitaire en RDC (17.000 actuellement). En pure perte : il y a trop d’appétits voraces sur ces terres et trop de coltan (ou d'or, ou de niobium, ou d'étain, ...) en dessous pour que la paix puisse régner. Il y a même des casques bleus qui paient cette paix-là de leur vie.

Prenez les camps ouverts au Tchad pour les plus de 200.000 réfugiés définitifs du Darfour (trois provinces à l’ouest du Soudan). Prenez les camps de Dadaab au nord du Kenya, où s’entassent 500.000 réfugiés définitifs venus de Somalie pour échapper à la guerre. Prenez les 2.000.000 de Palestiniens installés au Liban ou en Jordanie avec le statut de réfugiés définitifs. Prenez les îles de Nauru et Manu, qui servent au gouvernement australien de poubelles à migrants. Prenez la Turquie, la Syrie, l'Irak, l'Afghanistan, mais aussi la Jordanie, le Liban, la Libye, le Sinaï, le Sahel, la Somalie, … Prenez … Prenez … Prenez ...

Prenez, en France à présent, face à la foule de ceux qui n’ont pas assez d’argent pour manger tous les jours, se démener les foules caritatives et humanitaires du genre Banque alimentaire, Secours Populaire, Secours catholique et autres associations. Prenez les Restos du cœur, dont Coluche espérait, en les fondant, les voir disparaître un jour, et qui n’ont cessé de croître et embellir avec le temps, passant de 8,5 millions de repas distribués en 1985-1986, année de fondation, à 136 millions en 2016-2017.

J’hésite presque à parler de Calais, où les Anglais laissent la France, avec un flegme imperturbable, patauger dans l’innommable merdier qu’ils ont réussi à lui refiler (accords du Touquet, 2003, Chirac-Sarkozy), déclenchant au passage une petite guerre civile où s’affrontent les troupes humanitaires françaises et les troupes françaises du ministre de l’intérieur, pendant que s’affrontent à coups de feu passeurs érythréens et afghans. La France porte injustement le fardeau de ce merdier (ne pas confondre avec le "fardier de Cugnot") légué par l'Angleterre.

Je note que ce ne sont pas les bonnes volontés qui manquent pour intervenir sur le terrain, que ce soit en Europe (Grèce, Italie, Espagne, France), en Afrique, au Proche-Orient : plus le nombre des gens qui ont besoin qu’on leur porte secours augmente, plus la générosité populaire se manifeste (du moins on le souhaite). Plus s'allongent les colonnes de réfugiés, malheureux, démunis, misérables, SDF dans le monde, plus prospèrent les rangs des troupes humanitaires. Aussi est-ce moins cette générosité qui m’inquiète que les situations et événements qui l’ont rendue à ce point nécessaire : l'humanitaire n'est qu'un effet induit des situations et événements. Quel est le degré maximum d'urgence humanitaire que l'humanité est capable de supporter ?

Alors, docteur, comment va le malade ? Votre diagnostic sur le symptôme humanitaire ?

A suivre prochainement : les symptômes 2-planétaire, 3-inégalitaire, 4-mercenaire.

lundi, 05 février 2018

LI-BÉ-REZ ! LA-PA-ROLE !

La façon dont certaines expressions se mettent à courir d'une bouche à une oreille, et puis de proche en proche de toutes les bouches à toutes les oreilles, a quelque chose de mystérieux, d'imprévisible. Regardez ce qu'il est advenu de "la libération de la parole" : une drôle de trajectoire, quand on y pense.

Si je me souviens bien, la première floraison médiatique de l'expression remonte au si judicieux débat que Nicolas Sarkozy avait cru bon de lancer pour définir une fois pour toutes ce que c'est que "l'identité française", donc entre 2007 et 2012. Je me rappelle avoir entendu, dans la bouche du journaliste de service, forcément bien intentionné, dire que le lancement, par un président malavisé, de ce grand débat national, avait "libéré la parole raciste". Et que le débat avait agi comme un électrochoc sur les couches les plus "réactionnaires" de la population (c'est ensuite qu'on avait entendu, dans les meetings du Front National, scander ces vibrants « On est-chez-nous ! On est-chez-nous ! »).

Résurgence de l'expression sous François Hollande, quand ce tout petit monsieur nous avait fait "le coup du père François", armé de sa contondante et haineuse Christiane Taubira : la loi ouvrant tout grand les bras de l'antique institution du mariage à la clientèle homosexuelle (entre parenthèses, on traitait Sarkozy de "clivant", mais dans le même genre, Hollande-Taubira, ce monstre à deux têtes, avait montré qu'il était capable de cliver autant, si ce n'est davantage). Le journaliste habituel, toujours avide de ces formules appelées à un bel avenir de stéréotype, avait lancé la notion de "libération de la parole homophobe". 

Plus récemment, c'est un individu un peu plus louche (lié semble-t-il au ministère de l'intérieur) qui avait lancé une association intitulée "La parole libérée", censée regrouper tous les anciens enfants dont des prêtres catholiques étaient supposés avoir plus ou moins abusé dans des temps déjà un peu anciens. Sur la lancée de la dénonciation des agissements du père Preynat (ne pas confondre avec le "Père peinard"), un certain nombre d'anciennes victimes de prêtres pédophiles se sont manifestées, déposant des plaintes plus ou moins fondées, certaines carrément farfelues ou injurieuses (je pense à l'estimable père B., le même qui officiait à Saint-Denis à la Croix-Rousse). Le journaliste formaté avait longuement fait écho à "La Parole Libérée". 

Enfin, la petite dernière venue, mais pas le moins croustillant des membres des "Libérations-de-la-parole", cette famille de plus en plus nombreuse et bigarrée : la moitié de l'humanité. J'ai nommé "La Femme", du moins celle qui porte plainte contre "L'Homme" (ça réduit déjà le champ d'application), ce porc immonde qui a l'audace de désirer des personnes désirables, et qui se débrouille pour le leur faire savoir. A noter que les dites personnes ont préalablement abattu, librement et sans y être forcées, bien de la besogne pour se donner une apparence agréable et attirante.

Oui, ils sont patauds, importuns, lourdauds et tout ce qu'on veut. Ils sont primaires (« rustres, agrestes et grossiers », faisait dire Claudel à ceux qui allaient brûler Jeanne à Rouen) et manquent de la plus élémentaire subtilité quand ils s'efforcent d'approcher les innombrables Célimène qui passent dans leur champ de vision. Ceux qui dépassent les bornes sont-ils la monnaie la plus courante ? Pour parler franchement, j'ai du mal à le croire. Les pimbêches et les allumeuses méritent-elles qu'on leur coure après ? Qu'importe : l'histoire retiendra cette expression digne d'être gravée dans le marbre : La Libération de la Parole des Femmes. 

Drôle de parcours quand même pour une drôle de formule très vite devenue toute faite. Bientôt un néo-stéréotype qui se sera longuement baladé : des racistes aux femmes, en passant par les "homophobes" et les pédophiles. Ce serait drôle si ce n'était pas si moche. Mais un stéréotype comme neuf, comme James Bond après une vache bagarre : en pleine forme, costume et mise en plis impeccables et pas une égratignure. 

Bon courage aux linguistes du futur pour reconstituer la logique de l'enchaînement. Je note quand même que la formule est passée du camp du Mal au camp du Bien. La porte sur le Mal a été heureusement refermée. Et tout sera fait pour qu'elle le reste, soyons-en sûrs. Accessoirement, je note aussi que, des racistes et des "homophobes", autrement dit du camp des méchants et des coupables, la "parole libérée" a migré vers le camp des victimes. 

Ouf, on est rassuré : la morale est sauve. Justice est faite !

La seule question que je me pose est, à présent : « Où y a-t-il encore des paroles à libérer ? ». Dépêchez-vous, Paroles Prisonnières, de vous signaler : le créneau est porteur, mais pour combien de temps encore ? Il y a des marchés à prendre, mais cela durera-t-il ?

dimanche, 04 février 2018

VOIE DE GARAGE, OU GARE DE TRIAGE ?

Cela va de soi : faire un tri entre les humains, c'est très vilain. L'homme du vingt et unième siècle a trop à l'esprit l'arrivée de certains trains au terminus d'une voie située autour de la ville polonaise d'Oswiecim, plus connue sous son nom allemand, et l'envoi de certains bétails humains, en guise de descente du train, les uns vers l'esclavage du travail forcé non rémunéré, les autres directement vers des douches douteuses alimentées au Zyklon B. Cela se passait il y a un gros demi-siècle.

Il va sans dire que la notion de tri a d'autres bien fâcheuses connotations : on trie les animaux, en fonction de leur aspect, de leur conformation à un standard, de leur potentiel génétique, etc. On trie aussi, depuis déjà quelque temps, les déchets, paraît-il, bien que, nous assure-t-on, la France reste très en retard sur ses voisins européens, s'agissant de la récupération des plastiques.

On se met donc à la place des jeunes, qui renâclent à se laisser sélectionner à l'entrée dans l'enseignement supérieur : on n'est pas des bestiaux. Et le moins qu'on puisse dire, c'est qu'ils ne sont pas habitués. C'en est au point que le mot "sélection" est désormais interdit de vocabulaire officiel, et même que l'on traque la substance du vocable sous les déguisements lexicaux les plus divers. 

Cette phobie, qui s'ajoute à bien d'autres, s'explique aisément, mais n'en reste pas moins paradoxale. Le féroce égalitarisme soviétique que des idéologues bien placés dans les structures hiérarchiques du ministère de l'Education nationale ont instauré à tous les niveaux de la scolarité jusqu'au baccalauréat a habitué les enfants et adolescents à passer dans la classe supérieure quoi qu'il arrive, jusqu'à la terminale. Les autorités voulaient en finir une fois pour toutes avec les inégalités : louable intention. Résultat des courses : le système éducatif français est, nous dit-on, un des plus inégalitaires qui soit. Un des plus inefficaces aussi. Allez comprendre !

Les ministres successifs ont multiplié les "réformes" et les "trouvailles innovantes" : fin du cours magistral, du classement de fin d'année et de la distribution des prix (surtout ne pas récompenser les meilleurs, dont je n'ai jamais été, mais que j'ai enviés, et alors ?), instauration du collège unique (surtout ne plus rejeter les moins bons dans les filières techniques), abolition du redoublement, multiplication des activités connexes à l'école primaire (invasion de la classe par toutes sortes d'intervenants en musique, langue, sport, etc.), abolition des filières, classes "indifférenciées" du crack au débile léger, dévalorisation de tout l'enseignement technique, instauration des "notations formatives" pour ne plus "stigmatiser" les derniers de la classe, consignes impératives de "générosité" aux correcteurs des épreuves du bac, 80% d'une classe d'âge au bac, etc.

Il est donc normal que les élèves réagissent mal à l'idée de se voir brutalement opposer une fin de non-recevoir à leur désir d'entrer à l'université dans la filière de leur choix : le nouveau bachelier ne veut pas entendre parler de sélection et veut pouvoir entrer dans la formation de son choix, quels qu'en soient les débouchés sur le "marché du travail", et quelles que soient les capacités d'accueil des établissements : l'université n'a qu'à faire ce qu'il faut pour recevoir tous ceux qui le veulent, na ! Et le gouvernement n'a pas intérêt à sucrer nos APL, sinon il va voir !

Tout cela pour dire quoi ? Simple : qu'à toutes les étapes du parcours scolaire (formation initiale), règne un souverain négationnisme de la sélection, et que cela prépare magnifiquement les enfants, puis les jeunes à être accueillis à bras ouverts dans une société qui a aboli depuis longtemps l'idée de sélection. On le constate tous les jours, les patrons d'entreprises souriants et les DRH aimables répètent à tous les vents : « Laissez venir à moi les petits enfants ».

C'est bien connu, la société est accueillante, et le marché du travail est d'une magnanimité sans égale, se moquant éperdument de la qualité de la formation reçue par les candidats à l'emploi. C'est bien connu : quand il y a 200 postulants pour un seul poste offert, le premier qui oserait parler de "sélection" se fait bannir pour obscénité. C'est bien connu : quand un employé rouspète, mécontent de la façon dont on le fait travailler, le DRH ne l'invite jamais à prendre ses cliques et ses claques en lui laissant entendre que 200 remplaçants attendent impatiemment à la porte pour prendre sa place.

C'est bien connu : la société dans son ensemble ignore superbement toute idée de sélection. Et c'est si vrai qu'on a vu proliférer les émissions télévisées fondées sur la compétition. Qu'on parle de chanson, de cuisine, de sport et même de finance, c'est compétition à tous les étages, et dans le consentement général ! Allez comprendre ! On nous a toujours bercés et maternés, et voilà que tout d'un coup, on entend de furieux cris : « Honneur et gloire au vainqueur, malheur et honte au vaincu », nous dit tout le monde moderne ! Le monde moderne veut des agressifs, des gens qui aient la gnaque et n'hésitent pas à marcher sur les pieds des copains, des molosses prêts à se jeter sur les proies qui passent à portée de croc. Le monde moderne serine à l'oreille de chacun : c'est toi le meilleur ! Qu'attend-tu pour y aller ? Pour te jeter dans la bagarre ? Qui ne tente rien n'a rien. 

Dans cette société si égalitaire, on ne compte plus les sportifs avides de se trouver face à des "challenges" à la hauteur de leurs ambitions, qui ne rêvent que de "relever des défis", de "se dépasser", d'être "motivés à 200%". Et ce n'est qu'un exemple parmi cent autres. Curieux contraste, en vérité. 

Je crois qu'il est là, le cancer qui ronge le système éducatif français : l'angélisme perpétuel d'une idéologie de la bienveillance (n'est-ce pas, Yves Michaud ?), dont tout le déroulement postérieur de la vie sociale constitue un démenti formel et de touts les instants. Toute sa vie, le gamin va entendre retentir l'injonction d'avoir à donner le meilleur de lui-même. Le problème, c'est qu'on ne le lui aura jamais dit. L'affrontement pacifique avec les autres, cela s'appelle l'émulation. Mais l'égalitarisme soviétique a rayé l'émulation des moyens offerts aux individus pour progresser. Sauf dans la vraie vie, où la compétition, l'autre nom de l'émulation à l'état aigu, règne en maîtresse.

Je ne dis pas qu'il faut transformer la salle de classe en "arène sanglante", je dis juste que le rôle de l'école est de fournir les outils – et les armes, pourquoi pas ? – pour préparer chacun à entrer un jour dans la compétition, puisque compétition il y a. Et donc qu'il est d'une grande irresponsabilité de nier la dimension sélective d'un système éducatif, quel qu'il soit.

Quand on voit à tous les étages de la société la promotion fanatique de la seule idée de compétition, il est criminel de prêcher solennellement, tout au long de la scolarité, que 

« les hommes naissent libres et égaux en droit ».

Voilà ce que je dis, moi.

vendredi, 02 février 2018

LE DÉBAT FAIT RAGE

La France (non : la ville de Paris) doit-elle accepter que le "Bouquet of tulipes", cadeau fait par l'artiste Jeff Koons en mémoire des victimes des attentats du 13 novembre 2015 (?), soit installé entre le Musée d'Art Moderne et le Palais de Tokyo ?

LE DÉBAT FAIT RAGE;

  Faut-il rééditer Mein Kampf, d'Adolf Hitler ?

LE DÉBAT FAIT RAGE.

Faut-il autoriser ou non la "gestation pour autrui" pour les couples de lesbiennes ?

LE DEBAT FAIT RAGE.

Les hommes ont-ils le droit d'importuner les femmes dont ils apprécient la physionomie, l'allure, l'apparence ou la plastique ?

LE DÉBAT FAIT RAGE.

L'éditeur français qui possède le plus beau catalogue de littérature du vingtième siècle a-t-il le droit de rééditer Bagatelles pour un massacre, le gros pamphlet antisémite de Louis-Ferdinand Céline ?

LE DÉBAT FAIT RAGE.

Est-il légitime que l'on fasse figurer, dans le livre 2018 des commémorations nationales, les noms de Charles Maurras, antisémite notoire, et de Jacques Chardonne, collaborationniste notoire (ajoutons le Simon de Montfort de la croisade contre les Albigeois, 1208-1229) ?

LE DÉBAT FAIT RAGE.

Cette liste n'est pas limitative.

******************

D'une manière générale, les débats font rage en France.

Je propose, comme réponse à la question « Qu'est-ce que l'identité de la France ? »,

le hashtag

« #balancetondébatfaitrage ».

Cela donnera aux bouches des exaltés de tout bord une raison renforcée de lancer des flammes. Cela donnera à toutes sortes de phraseurs (espèce animale déjà surabondante et encore en voie de prolifération : le phraseur, espèce envahissante, invasive et irrespirable) – intellectuels venus de l'université et faisant autorité, ou militants moralisateurs d'associations menant tous les combats des "justes causes" – encore plus d'occasions et de raisons de graver dans le château de sable du bronze de la presse quotidienne, les grandes formules définitives de leurs convictions ardentes. 

******************

Un point commun unit tous ces "débatfaitrage" : lecteur perspicace, sauras-tu le retrouver dans le tableau ?