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mardi, 05 novembre 2024

L'INFECT DUDUCHE

Le 16 avril 1973, dans le n°126 de la revue, Cabu emmène Duduche, son double ou peu s'en faut, visiter un établissement de l'Assistance Publique Hôpitaux de Paris (APHP). Voici quelques-unes des idées qui passent alors par la tête du dessinateur de Charlie Hebdo. Duduche, accompagné ou pas de son copain, est un très sale gosse. C'est même à ça qu'on reconnaît Cabu.

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"Et les contacts avec le personnel hospitalier".

In illo tempore, beaucoup d'infirmières étaient des bonnes soeurs dans l'hôpital public (par exemple dans le défunt l'Hôtel-Dieu de Lyon).

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"Aider à se rencontrer ceux qui ont des crêtes de coq en organisant des petits combats"

« Hippocrate dit : oui c'est des crêtes de coq,
Et Galien répond : non c'est des gonocoques ! », chante Tonton Georges.

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"Et découvrir les escarres (les plus Paulette)"

Ici, j'aime beaucoup le mauvais jeu de mots.

***

On admire au passage le trait de Cabu, comme jeté d'un premier jet sur le papier.

Ceux que ça amuse peuvent aller voir mon billet du 20 juin 2015. Il verront que Cabu a montré très tôt (1959) son potentiel ravageur en montant avec quelques potes un énorme canular dans les rues de sa bonne ville de Châlons-sur-Marne, juste avant le passage des marcheurs du Strasbourg-Paris. 

lundi, 21 octobre 2024

LES FRÈRES KOUACHI TUENT ENCORE

C'était avant le 7 janvier 2015. Simon Fieschi gérait le site internet de Charlie Hebdo. Il a été le premier à prendre une balle de kalachnikov des frères Kouachi. Dans la colonne vertébrale, si je me souviens bien. Il avait au moins en partie, et tant bien que mal, contredit le diagnostic sévère des médecins, qui ne le voyaient pas marcher de nouveau.

Or il se trouve que, quand j'ai appris que le corps de Simon Fieschi avait été trouvé sans vie dans sa chambre, j'étais plongé dans la relecture, un demi-siècle après, de cette magnifique revue qui a marqué en profondeur son époque, en même temps que tous ceux qui portaient sur le monde un regard plein de lucidité, de réprobation, voire de dégoût.

Quand j'ai appris la nouvelle, j'ai reçu en pleine gueule le souvenir de l'événement qui, voilà bientôt dix ans, a effacé du nombre des vivants onze hommes et une femme formidables et plongé la nation française tout entière dans un deuil aussi vaste et abyssal qu'un océan. La disparition de Cabu et Wolinski m'avaient particulièrement atteint, qui étaient pour moi de vieux compagnons de voyage.

 Ainsi, Simon Fieschi n'est plus. Son nom s'ajoute à la liste macabre. Je pense à lui.

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Journal Le Progrès, 20 octobre 2024.

Et je pense aux autres.

Frédéric Boisseau, Agent d’entretien.

Franck Brinsolaro, Policier du Service De La Protection (SDLP).

Jean Cabut, Dessinateur.

Elsa Cayat, Psychanalyste et Chroniqueuse.

Stéphane Charbonnier, dit Charb, Dessinateur et Directeur de CH.

Philippe Honoré, Dessinateur.

Bernard Maris, Economiste et Journaliste.

Ahmed Merabet, Policier.

Mustapha Ourrad, Correcteur.

Michel Renaud, Organisateur d’une exposition à Clermont-Ferrand d’une exposition de dessins de Cabu, à qui il rapportait ses œuvres.

Bernard Verlhac, alias Tignous, Dessinateur.

Georges Wolinski, Dessinateur.

***

25 octobre 2024 : On est touché par les hommages offerts en nombre par toute l'équipe actuelle de Charlie Hebdo à Simon Fieschi dans le numéro du 23 septembre 2024.

Je recommande chaudement, en particulier, le magnifique et fraternel chant funèbre de Philippe Lançon à la mémoire de celui qu'on a retrouvé mort juste deux jours après le verdict qui condamnait Peter Chérif, le possible ou probable concepteur du projet du 7 janvier 2015.

Philippe Lançon, qui n'avait plus de mâchoire après la fusillade des Kouachi, a écrit Le Lambeau, terrible témoignage qui m'a laissé sur le flanc et à bout de souffle.

A saluer aussi : le petit mot adressé à l'équipe par Régis de Jorna, président de la cour d'assises spéciale lors du procès en 1ère instance des attentats de janvier 2015. Il y fait part de l'émotion qu'il a ressentie à l'annonce de la mort de Simon Fieschi.

samedi, 19 octobre 2024

ÇA FERAIT (PEUT-ÊTRE) RIGOLER REISER

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Voilà la (presque) couverture dessinée par Reiser pour le Charlie Hebdo du 13 novembre 1972. A l'époque, c'était Nixon. Mais à part cette petite fraude commise (presque) innocemment, pour le reste, (presque) rien n'a changé. On peut même dire que la situation a nettement empiré. 

dimanche, 13 octobre 2024

Y AVAIT PAS QUE L'ABBÉ PIERRE !

C'ÉTAIT TOUT LE SYSTÈME !

Je ne suis plus l'anticlérical forcené qui lançait des « Croâ ! Croâ ! » bien sonores dès qu'il apercevait une soutane. Même à cette époque désormais lointaine, je n'étais pas de ceux qui restaient sur le parvis de l'église lors de l'enterrement d'un camarade de travail dont la famille tenait à la cérémonie religieuse.

Mais qu'on se rassure : depuis que la superstition religieuse, dans sa variante catholique, est tombée de moi comme une peau morte (c'était précisément quand j'avais dix-sept ans, un bail), je suis, reste et demeure un mécréant pur et dur, quoiqu'aujourd'hui teinté d'un indifférent vaguement compatissant envers un corps social en voie de décomposition avancée (tiens, les pères maristes retraités ont quitté l'immense bâtiment du Grand Séminaire qu'ils occupaient à Sainte-Foy-lès-Lyon. Reste-t-il des séminaristes ?). 

C'est dire que j'ai suivi avec curiosité les justes accusations qui se sont abattues (un peu tard !) sur la mémoire de l'abbé Pierre lorsque quelques-unes des femmes que celui-ci avait approchées de trop près ont décidé de mettre sur la place publique les souillures dont le bon curé s'était rendu coupable à leur égard. 

A cette occasion, d'ailleurs, on en a appris de belles sur l'énorme silence complice dont l'institution entière a entouré les faits et gestes impudiques de monsieur Henri Grouès, après en avoir couvert bien d'autres au cours du temps et dans toutes sortes de régions du monde. Au fond, un simple mais puissant réflexe corporatiste que l'on connaît par cœur dans la police, la mafia et le monde du cyclisme (tiens, à propos, coucou Pogacar, tu peux dire comment tu fais pour tout gagner ?), pour ne prendre que quelques exemples. 

On sait maintenant pas mal de choses sur les débauches dans lesquelles le monde clérical a pataugé au cours des temps anciens : Rousseau raconte dans Les Confessions comment, jeune homme, il s'est fait draguer par un curé sur la place Bellecour à Lyon, et les Fabliaux du Moyen âge, de même que Les Contes de Canterbury (Chaucer) regorgent de grivoiseries, débauches et entorses au vœu de chasteté. Et plus près de nous, nul n'ignore l'ambiance très homosexuelle qui règne au Vatican (Frédéric Martel, Sodoma : Enquête au cœur du Vatican, Robert Laffont, 2019).

Il se trouve qu'en 1972, le dessinateur Reiser s'est intéressé pour le compte de notre cher Charlie Hebdo à un fait divers qui compromettait la réputation des Lazaristes, respectable congrégation religieuse. On trouve ce qui suit dans le n°92, paru le 21 août 1972.

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L'affaire se passe en Normandie. Un curé de par là-bas emmenait des fillettes dans la campagne, les déshabillait pour les photographier en leur faisant prendre des poses suggestives.

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Le curé finit en prison, et le commissaire, pour les besoins de son enquête, interroge le directeur des Lazaristes du coin. Reiser imagine à sa guise le contenu possible des échanges entre le policier et le prêtre.

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Et Reiser laisse libre cours au flux Hara Kiri qui coule dans ses veines : « Pourquoi l'abbé avait un appareil photo ? — Mais des crayons de couleurs, vous imaginez où il les lui aurait mis ? — Dans le cul ! — Vous avez vite deviné ! — Question de métier ! » répond le flic.

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Le commissaire montre alors des photos saisies dans la chambre du curé. Remarque du supérieur : « Y en a une où on voit pas bien. — Les mains sur la table ! », commande le policier, qui sort une petite culotte trouvée dans la même chambre.

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L'ecclésiastique renifle et, catégorique, affirme : « Bretonne, neuf ans et demi ! — Mais comment avez-vous pu ... ? — Question de métier ! », réplique tranquillement  le Lazariste satisfait au commissaire ahuri.

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Petit chef d'œuvre qui permet à Reiser de dépasser le cadre individuel et de mettre en question tout un ordre religieux et, à travers lui, l'ensemble de la gent soutanière. 

Je me régale quand j'ouvre un numéro de mon vieux Charlie Hebdo. (je n'ai plus, hélas, ma collection d'Hara Kiri Hebdo). Que ce soit dans les raisonnements souvent très élaborés construits par Wolinski dans ses pages 2 ou ses dialogues de "Monsieur" au bistrot ; les élucubrations poétiques, oniriques et parfois ésotériques de Gébé ; dans le formidable culot ricanant et jubilatoire de Reiser qui balaie sur son passage un tas de tabous ; dans les pages acérées de Delfeil de Ton ; dans les reportages précis et percutants de Cabu dans toutes sortes de milieux, de villes et de bobines qu'il saisit mieux que personne. J'avoue que j'apprécie moins la prose de Cavanna, que je trouve un tantinet bavarde, voire complaisante, mais je ne m'en vante pas.

Ce qui reste, c'est que l'idée Hara Kiri (puis Charlie) a regroupé ce qui se faisait de mieux au début des années 1970 en matière de talents graphiques, de regards pointus ou féroces portés sur l'époque et sur le monde, de dénonciations joyeuses.

Je ne dirai pas qu'ils étaient tous géniaux, mais qu'ils vivaient intensément, qu'ils avaient quelque chose de très fort à dire, et par-dessus tout qu'ils le faisaient avec une santé, une jovialité incomparables : ces mecs-là s'amusaient, rigolaient ensemble, braillaient, se disputaient. Ils ne se contentaient pas de s'insurger, de s'indigner, de se révolter. En un mot : ils VIVAIENT ! Et la revue leur ressemblait comme deux gouttes d'eau.

jeudi, 26 septembre 2024

C'ÉTAIT L'ESPRIT HARA KIRI

Je ne vais pas faire l'éloge du grand hebdomadaire fondé en 1969 par François Cavanna et Georges Bernier, alias "professeur Choron" (du nom de la rue où la revue siégeait), et assassiné par un certain Raymond Marcellin, ministre de l'Intérieur, en novembre 1970 pour crime de "lèse-Sa-Majesté-De-Gaulle" ("Bal tragique ..." etc.).

Je ne vais pas non plus me lancer dans une analyse savante des tenants et aboutissants de la rupture violente qu'a représentée l'entreprise dans le paysage de la presse d'alors, dont la doctrine était plutôt de ramer dans le même sens que les mouvements d'opinion que les divers organes voulaient servir.

"Bête et méchant", slogan revendiqué, "mauvais goût", "provocation" et autres qualificatifs désobligeants porté par ceux qui se pinçaient le nez face à l'objet, oui, c'était un esprit pour le moins clivant. Du mauvais esprit bravement décomplexé. 

Je veux juste ici donner à percevoir la façon dont la bande de joyeux drilles traitait événements et faits relevant de l'air du temps. Tout passait par la moulinette : les tabous, les stéréotypes, les conventions, le convenable, la pudeur. Rien n'échappait au jet de vitriol. Juste tout ce que les nouveaux stéréotypes, les actuels tabous cloueraient au pilori et assigneraient en correctionnelle. 

Je prendrai pour exemple un ancêtre de nos campagnes de défense de l'environnement, en l'occurrence celle guidée par le mot d'ordre édifiant « Un bébé, un arbre », dont on voit les traces dans ces quelques documents remontant à l'année 1971.

On voit ci-dessous la façon dont chaque membre du groupe pose son propre regard — singulier — sur le thème.

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A tout seigneur, tout honneur : la revue princeps prend au pied de la lettre l'expression "Le choc des photos" popularisée par un hebdo qui n'avait vraiment rien à voir, c'est le moins qu'on puisse dire. On peut voir dans cette image la patte du professeur Choron, provocateur en chef (Chenz était sans doute le photographe).

Et puis, dans l'ordre, le somme toute gentil Cabu (ici, car un des plus féroces en général), puis le sévère Gébé, révolté par les atrocités commises par les Américains au Vietnam, à coups de bombes et d'agent orange. En conclusion, le ricanement sardonique de l'impitoyable Reiser.

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Toutes ces gaudrioles sont à placer sous le signe de l'humour (noir, évidemment), je le rappelle. Et dois-je le dire, je regrette profondément qu'un tel esprit ait été chassé de l'ensemble du paysage médiatique actuel.

Aujourd'hui, où la France est dirigée, gérée, digérée par des charlots qui se foutent bien de l'avenir du pays, on éprouve la cruelle absence des Cabu, des Gébé, des Reiser, des Fournier, et même des Choron, tant il y a de gens, de groupes de gens, de groupes de pression, de "communautés" qui se prennent aujourd'hui très au sérieux, tant de cohortes vigilantes ou militantes qui veillent à ce que nul ne porte atteinte à leur "identité", une identité devenue sacrée, un de ces nouveaux tabous qui faisaient hurler de rire ou entrer en fureur la bande des voyous qui faisaient Hara Kiri.

Car ce n'est pas l'actuel Charlie Hebdo, sorte de pauvre ectoplasme végétatif et laid de son modèle, qui peut prétendre assumer l'héritage. Et je vais vous dire : c'est parce que ce Charlie Hebdo-là se prend trop au sérieux.

L'esprit Hara Kiri est mort et enterré, laissant orphelins des tas de gens atterrés devant le spectacle du monde tel qu'il va mal.

De profundis.

lundi, 23 septembre 2024

QUELLE TROISIÈME JAMBE ?

Le dessinateur Reiser, grand pilier du Charlie Hebdo de la grande époque, n'aimait pas trop le nucléaire. Voici comment il entrevoyait l'avenir humain parfumé aux effluves atomiques, dans le numéro du 25 avril 1975. J'espère que le dessin n'effarouche personne : nous sommes entre adultes.

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Mais la nature n'avait pas attendu la construction des centrales nucléaires pour aberrer à sa manière pour le moins originale. La preuve : la troisième jambe existe, Frank Lantini est même né avec (Martin Monestier, Les Monstres, éd. Le Cherche-Midi, 2017). Et pas celle à laquelle pensent les esprits mal tournés. 

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Mais sur le fond, Reiser ne se trompait pas, comme le montrent les photos prises par Paul Fusco dans les environs de Pripiat après la catastrophe de Tchernobyl qui, si elle n'a pas encore produit de "troisième jambe", à ce que je sache, a fabriqué de belles monstruosités à l'occasion. 

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Ci-dessous, ce n'est plus de jambe qu'il faut parler. 

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Il vaut mieux se taire.

mardi, 17 septembre 2024

L'ABBE PIERRE SAUVE L'HONNEUR ....

.... DE L'ÉGLISE CATHOLIQUE.

Nous apprenons de source sûre que l'abbé Pierre, en s'approchant tout près, voire tout contre les femmes qu'il rencontrait, accomplissait une mission secrète confiée par les plus hautes autorités du Vatican : contrer par ses actes, en prêchant d'exemple et en payant de sa personne, la vaste campagne de diffamation visant le clergé catholique et colportant des infamies sur le comportement des prêtres, laissant se répandre des rumeurs sur leur sexualité déviante. 

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On voit sur ce cliché pris par notre reporter Jean-Marc Reiser le désespoir et l'incontestable révolte d'Henri Grouès (= abbé Pierre) contre la décadence dont l'Eglise catholique se rendait coupable. Oui, il fallait réagir pour extirper jusqu'aux racines du Mal qui souillait la chrétienté dans ce qu'elle avait de plus sacré. Alors oui : joignons nous tous à l'appel unanime, et proclamons : « Vive l'abbé Pierre ! Merci, abbé Pierre, de vous être sacrifié pour redresser les torts d'une Eglise qui glissait sur la mauvaise pente ! Merci d'avoir par vos actes rétabli la vérité : les curés ont une sexualité tout à fait normale ! » 

On peut écouter Les Matins de France Culture (18 septembre 2024) pour en savoir plus sur l'esprit de charité qui guidait l'abbé Pierre, l'amenant à "faire don de sa personne" à tant de personnes de sexe féminin pour remplir la sainte mission à laquelle il s'est voué sa vie durant.

https://www.radiofrance.fr/franceculture/podcasts/france-culture-va-plus-loin-l-invite-e-des-matins/abbe-pierre-l-eglise-en-a-t-elle-fini-avec-l-omerta-6367232

lundi, 16 septembre 2024

MAIS OÙ EST LE MLF D'ANTAN ?

Ouais ! Où sont-ils passés, les hommes ?

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Wolinski, dans Charlie Hebdo n°37, 21 juin 1971.

 

lundi, 09 septembre 2024

jE RETOURNE A L'ABSTENTION ...

... MILITANTE.

Je n'ai pas voté aux dernières élections européennes. J'ai vu dans les résultats quelque chose qui m'a beaucoup déplu. Alors quand l'illuminé de l'Elysée a dissous l'Assemblée, j'ai décidé de retrouver ma carte d'électeur, soigneusement entretenue dans son immaculée virginité de Vestale depuis le référendum de 2005, vous savez, celui sur lequel Nicolas Sarkozy s'est assis pour faire passer en loucedé le Traité de Lisbonne, le copié-collé de la Constitution européenne rejetée par une nette majorité de citoyens français adultes et responsables.

Les 30 juin et 7 juillet derniers, oui, je l'avoue, j'ai voté. Mes motivations, j'en parsème les billets que je dépose ici, je n'y reviens donc pas. Résultat ? Je constate que l'avis des électeurs sert de fauteuil à un président qui veut rester maître du jeu, et qui assène sa Vérité comme si rien d'autre ne se passait. Je sais bien que la politique est l'art des possibles et qu'il faut tenir compte des situations créées. N'empêche que. Alors c'est décidé : je retourne à mon abstentionnisme militant, et sur des bases peut-être malsaines, mais.

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Couverture de Charlie Hebdo n°17, 15 mars 1971. J'attends qu'on me dise que ce n'est plus d'actualité.

lundi, 02 septembre 2024

C'EST LA RENTREE ...

... AU ZOO !

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Dessin de Pierre Fournier, Charlie Hebdo n°19, 29 mars 1971.

jeudi, 14 septembre 2023

MALI, BURKINA-FASO, NIGER, GABON, ...

... ET LA FRANCE !?!?!?

La réponse de Reiser en 1978 est directe et péremptoire.

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mercredi, 13 septembre 2023

USA : ON VA VOUS RE-TRUMPER !

TRUAND PRÉSIDENT !!!

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Dessin de Reiser en 1978. C'était Carter le président, et les Américains le trouvaient trop mou. Je me suis juste permis de simplifier le texte (très sommaire et daté au demeurant) de Reiser. 

vendredi, 09 septembre 2022

REINE D'ANGLETERRE ? MON C... !!!

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Reiser dessinait ainsi Elisabeth II en couverture de Charlie Hebdo, le 11 août 1977. J'espère qu'on me pardonnera : je me suis permis d'effacer l'élément circonstanciel de ce dessin qui limitait par trop la portée du geste auguste de la souveraine, pour lui donner la généralité que celle-ci mérite.

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Sa fesse cachée, vue par Gébé, en couverture de Charlie Hebdo, le 30 août 1979, sous le titre "La culotte blindée de la reine d'Angleterre".

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mercredi, 27 juillet 2022

ÉLISABETH BORNE DANS LE CANARD

Le seul refuge du dessin de presse en France s'appelle Le Canard enchaîné. Je ne parlerai pas du regretté Charlie Hebdo. Nul ne saura jamais comment Cabu, le Grand, l'Unique aurait traité le visage d'Élisabeth Borne. Tout ce que je peux faire, c'est d'additionner les portraits tirés pour le Canard par les dessinateurs qui fournissent le Palmipède, alias "Hebdomadaire Satirique paraissant le mercredi". A tort ou à raison, l'addition de ces dessins dégage tout l'esprit de ce qu'est, de ce que doit être le dessin de presse, du plus fouillé au plus elliptique et stylisé. 

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ADELINA

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DIEGO ARANEGA

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AUREL

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BOUZARD

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CHAPPATTE

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DELAMBRE

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DUTREIX
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KERLEROUX

(Le vieux de la vieille.)

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LINDINGRE

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MOUGEY

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POTUS

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SOPH'

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URBS

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dimanche, 10 avril 2022

TOUCHE PAS A MON CORAN !!!

Je suis tombé, en fouinant sur internet, sur cette photo prise place Bellecour à Lyon le 18 mai 1989 par Marcos Quinones.

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Notice de la Bibliothèque Municipale de Lyon. L'appel du préfet de police a bien été entendu. Et la manifestation anti Rushdie prévue le 18 mars 1989, place Bellecour, n'a pas eu lieu. Il faut dire que le dispositif policier était impressionnant. Seuls quelques petits groupes de manifestants ont tenté de braver l'interdiction. Ils ont été rapidement dispersés dans le calme. Les organisateurs du rassemblement ont indiqué qu'ils avaient dissuadé de venir de nombreux manifestants qui devaient arriver place Bellecour de plusieurs villes de France. Le vice-président de l'Union des jeunes musulmans du Rhône, association organisatrice de la manifestation de protestation contre le livre de Salman Rushdie "Les Versets Sataniques" a lu un communiqué place Bellecour avant d'appeler à la dispersion. "Mais nous allons redéposer une demande d'autorisation de manifestation dans une dizaine de jours" (...) "Contrairement à la Constitution qui nous donne des droits et des devoirs, la manifestation a été interdite par une décision arbitraire et infondée", a-t-il lancé aux quelques manifestants qui l'accompagnaient. Source : "Bellecour en état de siège" / F.P. [Frédéric Poignard] in Lyon Figaro, 20 mars 1989, p.25.

***

Qu'en termes euphémisés ces choses-là sont dites !!! Ce que ne dit pas la notice de la Bibliothèque Municipale de Lyon, c'est que le gars qui parle dans le mégaphone se proposait en quelque sorte (vous savez : sans-le-dire-tout-en-le-disant) de relayer l'appel au meurtre lancé par ce brave homme connu sous le nom d'imam Khomeiny.

Le pape ("guide suprême") des musulmans chiites, non content d'avoir chassé le shah et d'avoir été porté au pouvoir en 1979 par des foules en délire, avait lancé  une "fatwa de mort" contre un citoyen britannique d'origine pakistanaise, Salman Rushdie, fatwa demandant à tout musulman de tuer le "criminel" par tous les moyens à disposition. 

Tout ça parce que l'écrivain s'était permis d'interpoler dans le texte sacré du Coran quelques versets inspirés, disait-il, par Satan. Un texte auquel il est interdit de changer la moindre virgule depuis le XIème (IXème ?) siècle !!! Auquel nul n'a osé ajouter ou retrancher le moindre mot depuis que le calife Uthman a décidé qu'il était interdit d'y toucher sous peine de. Même qu'il a ordonné de brûler tout ce qui se prétendait Coran sans respecter mot à mot et lettre à lettre la version officielle.

Le livre de Salman Rushdie fait environ 500 pages. Les fameux "versets" incriminés par Khomeiny y occupent trois malheureux paragraphes dans la foisonnante histoire de deux amis-ennemis. Toute personne sensée convient donc que voilà un motif suffisant pour appeler la meute des poignards levés à s'abattre sur l'horrible coupable.

Le seul équivalent que je trouve à la situation dans laquelle se trouve encore de nos jours Salman Rushdie est celle de Roberto Saviano, condamné à mort par l'état-major de la N'dranghetta après la parution de Gomorra, où l'auteur dévoilait les turpitudes de la mafia campanienne. On me dira que c'est une mafia, et que ça n'a donc rien à voir. Mais en est-on si sûr que ça, que ceux qui règnent à Téhéran ne forment pas une sorte de mafia ?

La conclusion que je voulais tirer de la photo ci-dessus est celle-ci : dès 1989 (en réalité dès 1979), on savait que les hostilités étaient engagées entre l'Occident et le nouvel islam prôné par l'imam Khomeiny. Un islam compact dans l'intransigeance, dominateur dans ses façons de faire valoir son point de vue, mais aussi insatiable dans sa volonté de reconquête du prestige et de la puissance perdus.

Un islam qui brandit le Coran comme un étendard de guerre, comme on l'a vu à New York en 2001 (World Trade Center), à Toulouse en 2012 (Mohammed Merah), à Paris en janvier (Charlie Hebdo) puis novembre 2015 (Bataclan), et comme on le voit se manifester ici ou là, sporadiquement (affaire Mila, le père Hamel à Saint-Etienne-du-Rouvray, Samuel Paty, et tant d'autres horreurs commises sur notre sol par des musulmans). Un islam qui brandit la barbe des hommes (lèvre supérieure rasée pour les plus salafistes) et le voile des femmes comme armes de propagande. Un islam prompt à se draper dans la dignité offensée des victimes de l' « islamophobie ».

On me dira que tout ça vire à l'obsession, que je radote (voir mon billet du 26 mars dernier) et que je fais une fixation. Que cette question me rend barjot. J'aimerais tant que les faits me donnent tort. : il suffit d'énumérer pour se rendre compte dans quel sens unique fonctionne l'intolérance radicale.

Voilà ce que je dis, moi.

Note ajoutée le samedi 16 avril, lendemain de ce que les catholiques appellent le vendredi saint : je suis d'accord, à titre personnel, pour que l'on ne parle pas, dans les journaux, les radios ou les télés, de la fête religieuse de Pâques en général et du "vendredi saint" en particulier. Mais cette "règle" que les journalistes et autorités politiques appliquent volontiers, spontanément et sans état d'âme s'agissant de cette fête chrétienne, j'aimerais qu'ils s'efforcent de l'appliquer exactement de la même manière quand il s'agit de l'islam et des musulmans en général, et du ramadan en particulier. Or c'est bizarre : peut-être est-ce une impression fausse, mais il me semble qu'ils ont beaucoup moins de mal à évoquer le ramadan que le vendredi saint.

vendredi, 14 janvier 2022

ET C'EST AINSI QU'ALLAH ...

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Voici l'état dans lequel le capitaine Haddock se met face au "balloon dog" de Jeff Koons installé dans les ors et les stucs d'un salon de Versailles. On le comprend.

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DES NOUVELLES DE L'ARCON - 3.

« Malheureusement, moins la peinture est prise au sérieux par le peintre, plus il se prend lui-même au sérieux. Moins on sait la grammaire et plus on philosophe. Le peintre veut être un penseur. J'ai vu une exposition de jeunes génies où le programme tenait toute la place. Ils étaient "contre la morale". "Naturellement", ajoutaient-ils. C'était le premier point de ce programme. Ils y tenaient férocement. Mais qui leur faisait obstacle ? et qui ce détail intéresse-t-il ? Surtout en fait de peinture abstraite ! J'ai essayé de trouver leurs losanges immoraux et leurs circonférences coupables. Il ne m'en est pas venu de frisson d'art. Et leurs melons ! D'abord. Qu'est-ce qu'un melon immoral ?... C'est celui qui nourrira Hitler, Néron, Landru ? Le melon moral étant réservé à Pasteur, à Jeanne d'Arc, à saint Vincent de Paul ? Mais comment savoir à l'avance qui un melon va nourrir ? Il ne le dit à personne, et rien ne ressemble plus qu'un melon dévergondé à un melon plein de vertus chrétiennes. On voit par là qu'il est difficile en peinture de remplacer le talent par le vice ; surtout dans la représentation abstraite du hareng saur. Pourquoi, dès lors, vouloir tellement être immoral ? La morale n'a jamais vraiment gêné les peintres. Non plus d'ailleurs que les autres classes de la société. Alors ? Alors je m'y perds. Peut-être les peintres sont-ils las d'être jugés au nom de la morale ? Parce qu'ils trouvent la chose immorale ? Mais, s'ils sont contre la morale, pourquoi se plaignent-ils d'être jugés immoralement ? En agissant immoralement, on agit comme ils le désirent ! A moins que, semblables à tout le monde, ils n'admettent que pour eux le droit d'être immoraux ? C'est une position si banale, si courante, si universelle, qu'il est bien superflu de le crier sur les toits. Sauf si l'on a, évidemment, le besoin le plus grand et le plus naïf de déplacer le problème de la peinture. On change alors de champ de bataille. Battu d'avance à Sète, au moins craignant de l'être, on va se battre à Perpignan. Mais ce n'est jamais à Perpignan qu'on a gagné la bataille de Sète ».

***

Bon, d'accord, ce n'est pas ici le meilleur Vialatte, vous savez, le Vialatte jubilatoire dont la plume allègre, espiègle et guillerette avance « à sauts et à gambades ». Sans doute le souci de raisonner et d'argumenter alourdit le propos, qui frise l'argutie spécieuse. Je retiens quant à moi les trois premières lignes du paragraphe : " ... moins la peinture est prise au sérieux par le peintre, plus il se prend lui-même au sérieux. (...) Le peintre veut être un penseur". Et puis ceci : "... il est difficile en peinture de remplacer le talent par le vice".

Ce Vialatte-là est rejoint en 1977 par l'ami Reiser qui, dans Charlie Hebdo, après une visite à la Xème Biennale d'art contemporain de Paris, assaisonne son reportage de grands « N'IMPORTE QUOI » et parle de « L'ART RIGOLO », où l'artiste n'est plus sommé de maîtriser une technique, mais d' « AVOIR DES IDÉES ».

mardi, 21 décembre 2021

REISER VÉNÉRAIT NOËL

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1979

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1980

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1977

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1978

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1977

mercredi, 15 décembre 2021

MACRON : DÉCLARATION EXCLUSIVE

ENFIN LA VÉRITÉ !!!

Après quelques apéros pris au bar de l'Elysée, le président à livré en exclusivité cette confidence à notre revue :

1976 JE COMPRENDS PLUS RIEN.jpg

Croquis de Reiser en 1979.

lundi, 29 novembre 2021

ÉLISE ET LES NOUVEAUX PARTISANS ...

… par JACQUES TARDI ET DOMINIQUE GRANGE.

2

C'est après le rappel de ces deux épisodes ultra-violents que commence l'histoire d' « Elise » proprement dite. "Dix ans plus tard, dans le nord de Paris", on est au début des années 1970. Une chouette bande de chics copains met la dernière main à la confection d'honnêtes cocktails Molotov au dernier étage d'une tour. Hélas, le mélange est instable et explose à la gueule d'Elise. La bande s'échappe de justesse, Elise est gravement brûlée. C'est à peu près le même jour qu'un certain Pierre Overney, militant d'extrême-gauche, est tué d'une balle en plein cœur par un vigile des usines Renault, Jean-Antoine Tramoni, qui sera tué à son tour quatre ans plus tard. Tout ça dépeint assez bien une certaine figure d'une époque.

LES COCKTAILS.jpg 

Sur son lit de souffrance et couverte de pansements, Elise, tout en pensant à ses camarades, à Simon, son compagnon, fait alors défiler les images de sa vie : la fin de sa scolarité au lycée Edgar Quinet, sous la houlette d'une prof de philo (Jeannette Colombel, nous dit l'encyclopédie en ligne) dont l'enseignement est loin d'être neutre, d'un prof d'arabe (dont je pense que quelqu'un pourra me dire le nom) et plus globalement d'une prise de conscience du fait que le monde est injuste et mal fait, et qu'il attend qu'on agisse pour le faire un peu meilleur. 

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Toute à son combat contre un ordre public qu'elle juge injuste et violent, Elise a cependant une autre passion : la chanson et accessoirement le théâtre. Elle croise la route d'un certain nombre de futurs acteurs célèbres (je reconnais Jean Rochefort, Michaël Lonsdale, Philippe Noiret, etc...) et de chanteurs.

LES ACTEURS.jpg

Elle publie aussi quelques disques 45 tours de chansons qui, écrites par d'autres, lui déplaisent. Elle rencontre ensuite celui que je crois être Guy Béart (non nommé), avec qui elle travaille, jusqu'à sortir un disque de chansons personnelles produit par lui.

AVEC GUY BEART.jpg

Elise va trouver un moyen de marier la chanson et le combat social : la chanson engagée. Le fait que je ne supporte pas le genre n'a aucune importance : désolé, mais « La Goutte d'Or c'est son nom, C'est pas un beau quartier, Vu que ceux qui y habitent, C'est pas des PDG », ce n'est vraiment pas mon truc, même si je garde toujours quelque part "Larzac 73", un beau vinyle, comme quelques CD de Marc Ogeret ou Colette Magny, que je n'écoute jamais. Elle chante dans les usines, pour les ouvriers en grève : « Il était temps que j'écrive des chansons plus combatives ». N'en déplaise à la chronologie, on a droit au récit des manifs et des violences au Quartier Latin. Et puis arrivent l'été 1968, les vacances, le reflux des luttes, enfin pas pour tout le monde : « J'ai appelé mon producteur pour lui dire que j'arrête le métier. Je veux chanter pour ceux qui luttent, pas pour devenir une star du showbiz ». 

Je passe sur les aventures, mésaventures, coups et contusions. Je passe sur les chansons engagées (« Nous sommes les nouveaux partisans Francs-Tireurs de la guerre de classe, Le camp du peuple est notre camp, Nous sommes les nouveaux partisans », chante-t-elle le poing bravement levé) qui ne montrent à mon avis que les illusions que l'on peut nourrir quand on croit pouvoir changer l'ordre des choses par la magie des "luttes". Je passe sur la "clandestinité" dans laquelle il a fallu vivre pendant un temps. Je passe sur les six semaines de tôle qu'Elise passe à la Petite Roquette pour « violences, voies de fait et outrages envers des agents de la force publique ». Il faut conclure.

On aura compris que si je partage les analyses que propose Elise et les nouveaux partisans sur la façon dont la société est organisée, je trouve vaine, pour ne pas dire dérisoire, la croyance d'un noyau d'exaltés plus ou moins sectaires dans la possibilité de "transformer le monde". Le dérisoire me saute aux yeux quand j'apprends (c'était il y a quelques années) que des groupuscules d' « identitaires » se fournissent dans les mêmes boutiques de sapes que les groupuscules d' « antifa ».

Il y aurait également beaucoup à dire de l'usage du mot "PARTISAN" dans le titre et dans le texte : franchement, c'est quoi l'histoire qui trotte dans la tête de ceux qui se qualifient de "nouveaux partisans" ? Est-ce bien sérieux ? Pourquoi pas "Franc-Tireur", pendant qu'on y est ? Il suffit, pour redescendre du petit nuage romantique-révolutionnaire, de voir comment se sont achevées les aventures des adeptes de la lutte armée en Europe occidentale : Rote Armee Fraction (R.F.A.), Cellules Communistes Combattantes (Belgique), Action Directe (France), etc. Eux étaient certes de vrais illuminés, mais aussi de vrais partisans. Seulement, comme aurait dit ma grand-mère, ils avaient les yeux plus grands que le ventre et prenaient leur vessie pour une lanterne. Partisan, vraiment ? Des mots, des mots, des mots.

On aura compris aussi que presque toute la "chanson engagée" m'horripile au plus haut point. Je suis d'un effroyable — et sans doute coupable — pessimisme : oui, ce sont les hommes qui font l'histoire, mais ils ne savent rien de l'histoire qu'ils font. On me rétorquera, et on aura raison : seul compte le désir qui fait de la résistance.

Reste précisément le parcours heurté d'une résistante sans concession, d'une chanteuse engagée à ses risques et périls : un parcours passionnant au bout du compte. Reste aussi et surtout un ouvrage irremplaçable pour qui veut se faire une idée du morceau d'histoire que la France a traversé entre, mettons, l'arrivée de De Gaulle au pouvoir et la fin des "années Giscard". Il est intéressant en particulier de se rendre compte que l'usage de la police par le pouvoir contre toutes sortes d'opposants (manifestants contre les lois "retraite", gilets jaunes, etc.) n'a guère changé, à part la pèlerine, à laquelle les pandores préfèrent aujourd'hui la cuirasse de Robocop.

Reste enfin un ouvrage dont la puissance du dessin donne une dimension inattendue, presque extraordinaire, au bouillonnement d'idées, de débats et de combats dans lequel a baigné une génération entière. Jacques Tardi, qu'il le veuille ou non, magnifie l'époque et les personnes. Je ne dirai pas qu'il les héroïse, mais c'est tout juste : la vision du monde que propose le livre serait manichéenne que ça ne m'étonnerait pas. Heureusement, le récit ne tombe jamais dans le lyrisme. 

Je ne saurais achever ce petit compte rendu sans évoquer l'aventure vécue par "Elise" dans les toutes dernières pages du livre : son débarquement surprise en 1977 dans l'équipe joyeusement anarchiste qui se préparait à lancer B.D. L'hebdo de la BD.

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L' "ours" du n°2 de B.D. L'hebdo de la BD.

L'équipe de Charlie Hebdo, quoi ! Encore une idée du professeur Choron, aussi éphémère que bien d'autres des idées germées dans ce cerveau exalté, surchauffé, surtout après les copieuses libations dont il était coutumier.

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Je ne les reconnais pas tous : Gébé hilare, Elise-Dominique, le crâne de Choron, la barbe de Tardi, la moustache de Cavanna, au fond Wolinski et sans doute Reiser au premier plan. Je cherche Cabu sans vraiment le trouver (le grand benêt debout à gauche ?). Il n'y en a plus des masses de vivants. Merci Tardi pour la photo.

C'est dans cette équipe que la dite "Elise" va faire peut-être la plus belle rencontre de sa vie : un auteur de BD qui livre à la nouvelle revue les planches d'une adaptation de Griffu, un roman de Jean-Patrick Manchette, un bijou de roman noir dessiné. C'est évidemment Jacques Tardi, avec qui Elise-Dominique Grange va finir, sans rien abandonner de sa force de conviction révolutionnaire, par donner une stabilité à la fureur mouvementée de ce qui a précédé. On n'en saura pas plus, comme dans les contes de fées. Il ne s’agit pas d’un conte de fées. Un livre fort.

Voilà ce que je dis, moi.

dimanche, 28 novembre 2021

ÉLISE ET LES NOUVEAUX PARTISANS ...

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... par JACQUES TARDI ET DOMINIQUE GRANGE.

1

Je viens de lire le dernier livre de Jacques Tardi. Ce prodigieux dessinateur, d'Adèle Blanc-Sec (rien que le choix de ce nom !!!) à Brindavoine (ce nom !!!) et de la Commune de Paris (selon Vautrin) à la Guerre des Tranchées en passant par quelques adaptations de polars de Léo Malet ou Jean-Patrick Manchette, a trouvé un style, un trait capables, quand il lui prend l'idée de transposer des polars en B.D., de faire vivre intensément personnages, situations et actions de la façon la plus expressive tout en restant fidèle comme c'est pas permis aux contours et à la ligne définis par les auteurs (vous pouvez vérifier avec La Position du tireur couché par exemple).

Pour ma part, je lui sais particulièrement gré de la façon dont il fait apparaître, dans les nombreux volumes qu'il consacre à cette immense boucherie de la civilisation, la vie réelle des "poilus" de 14-18, du paysan devenu bidasse promis à l'abattoir jusqu'au général cynique (Berthier, je crois), qu'il fait déclarer sur toute une vignette que c'est tout à fait volontairement qu'il a fait tirer par l'artillerie française sur une tranchée française où les soldats rechignaient à partir à l'attaque. 

De mon côté, si j'ai commencé à collectionner les photos de monuments aux morts de la Grande Guerre, je ne le dois pas à Jacques Tardi : l'horreur s'est imposée d'elle-même quand je me suis mis à lire les noms gravés dans les villes et villages que je traversais. C'était une prise de conscience, cela se passait en 1976 dans la région des Causses : La Cavalerie, Creissels, Roquefort etc., dans des circonstances qui ont pris avec le temps une petite couleur "historique". C'est quand j'ai vu que certaines familles avaient perdu quatre, cinq (ou davantage) membres et que les poils de mes bras se sont hérissés que j'ai eu une idée presque physique de l'horreur de ce qui s'était passé entre 1914 et 1918.

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Jacques Tardi en 1988, photographié par Jean-Marie Huron lors de sa venue à Lyon pour une signature de 120, Rue de la gare, chez Adrienne Krikorian, fondatrice de la librairie Expérience, rue du Petit-David.

Cette guerre m'est apparue comme l'événement fondateur, comme l'éblouissant révélateur : le triomphe imbécile de la technique et de l'industrie capitaliste, avec pour conséquence l'écrasement de tout ce qu'il y a d'humain en l'homme, corps et âme, comme l'a montré toute la suite du XXème siècle (Auschwitz, Hiroshima, etc.). Toute ma vision du monde en a été affectée, et de façon définitive. Quelques lectures (avec Günther Anders pour chef-pilote) ont achevé de me faire tomber du côté de ceux qui refusent cette réalité où rayonnent les fausses promesses d'un progrès réduit à l'univers matériel et à l'émerveillement prosterné, infantile et fatal devant des "prouesses" techniques qui surpassent tout ce que peut réaliser le pauvre humain, et dont il devient de fait le serviteur quand ce n'est pas la victime.

La force des livres de Tardi sur la première guerre mondiale réside dans sa volonté de décaper le vernis qui tend à faire de simples ouvriers et paysans envoyés au front de magnifiques héros, et des anciens combattants en béret rouge, poitrails couverts de médailles et autres porte-drapeaux à cheveux blancs d'authentiques patriotes.  Selon moi, l'une des lignes de conduite qui sous-tend tout le travail de Jacques Tardi est de ne pas se payer de mots. Ça tombe bien : moi non plus. D'où peut-être sa parenté (fraternité ?) spontanée avec des auteurs de polars ou "noirs" comme Léo Malet ou Jean-Patrick Manchette, qui n'y vont pas avec le dos de la cuillère avec l'humanité grouillante. D'où, accessoirement, l'évidence de son beau geste quand il a refusé la Légion d'Honneur offerte par je ne sais plus qui.

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Le docteur Grange et sa fille. Tardi a-t-il travaillé d'après photo ?

Alors venons-en à ce bouquin, Elise et les nouveaux partisans (Claire Etcherelli a publié en 1967 une Elise ou la vraie vie qui eut son heure de gloire : y a-t-il un rapport ?).  Disons-le d'entrée : Elise, le personnage principal, n'est pas exactement la compagne de Tardi, mais sa trajectoire suit de très près celle de Dominique Grange, qui est, elle, son épouse (depuis 1983, encyclopédie en ligne). Elle est fille d'un grand médecin qui avait son sombre cabinet d'oculiste (on ne disait pas ophtalmo) Boulevard des Belges. C'est chez ce docteur charmant et compétent que mes parents m'envoyaient me faire examiner les yeux : c'était le confrère et ami de l'excellent docteur Paliard. J'avais donc quelques raisons.

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Ceci pour dire que Dominique Grange vient d'un milieu bourgeois, c'est-à-dire confortable. Mais qu'elle a très tôt pris les chemins de traverse, elle qui s'est trouvée en résonance profonde et décisive avec les propos alors subversifs de sa prof de philo (non nommée, mais on apprend par ailleurs qu'il s'agit de Jeannette Colombel, dont il m'est arrivé de croiser la route, en particulier à la fin de sa vie, à la terrasse de la Brasserie des Ecoles) au lycée Edgar Quinet : le temps de la guerre d'Algérie et des porteurs de valises du F.L.N., de La Question d'Henri Alleg, etc.

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Elle a même commencé à apprendre l'arabe, à Quinet, avec un prof originaire de Sétif, à quoi son père a mis fin parce que ce n'était « pas au programme du bac ». Le prof d'arabe non plus n'est pas nommé, mais je connais quelqu'un qui doit pouvoir combler cette lacune.

Le bouquin de Tardi est bâti sur le scénario écrit par Dominique Grange qui, en gros et dans les grandes lignes, raconte sa vie, qui fut mouvementée, inséparable de l'extrême-gauche agissante, et par là même violente, sans aller toutefois jusqu'à la lutte armée. Le livre s'ouvre d'ailleurs sur la violence que le préfet Maurice Papon fait s'abattre, le 17 mars 1961, sur les foules basanées qui envahissent le pavé parisien aux cris de « Algérie algérienne, F.L.N. vaincra, etc. ».

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Comme d'habitude, Tardi n'épargne rien au lecteur de la réalité physique de la violence et de ses effets sur les corps, non plus que celle qui, le 8 février 1962, sous les ordres du préfet Roger Frey cette fois, se déchaîne contre la manifestation convoquée par les syndicats et le P.C.F. et qui causa, au "métro Charonne", 9 morts et 250 blessés.

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Avait-il besoin de rappeler le sombre rôle du même Papon pendant l'Occupation ? Avait-il besoin d'appeler « flicards » les policiers lancés par lui sur une population finalement pacifique, dont le tort était de braver le couvre-feu en ces temps de guerre d'Algérie ? Ce qui est indéniable, c'est que le scénario de Dominique Grange se veut une action militante : qu'on n'attende pas d'elle la neutralité de l'historien. Le recul des années n'a rien refroidi des convictions brûlantes de l'ancienne guerrière de la Gauche Prolétarienne.

A SUIVRE

mardi, 30 mars 2021

FÉMINISME VAINCRA

Grâce à Reiser.

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1978

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1976. Notez que c'est (pas tout à fait) ce que pratiquait Béatrice Dalle dans le film Trouble every day (2001).

Mais il reste d'autres options : ci-dessous celle proposée par le professeur Choron dans Hara Kiri mensuel d'août 1976.

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Quelle longévité accorderiez-vous aujourd'hui à une revue qui publierait une telle couverture ? Autre façon de poser la même question : qui oserait aujourd'hui s'afficher comme bête et méchant ?

vendredi, 22 janvier 2021

CHARLIE HEBDO EN 1545

C'était le bon temps des guerres de religions.

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Regardez bien, cette tiare sacrée est un vulgaire pot de chambre aux yeux des luthériens. L'un est en pleine action d'excrétion des immondices du corps, l'autre se déculotte, attendant son tour. A propos de la tiare, qu'on a reconnue, j'espère : est-ce Paul VI qui en a abandonné le port dans les grandes occasions ? Jean XXIII ? Benoît XVI ? (C'est curieux, j'ai comme une vague impression d'en oublier en route.)

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Les parfumeurs du pape : voyez les nuages odorants qui leur sortent par en bas.

Où l'on constate que la caricature luthérienne, c'était quand même beaucoup "Pipi-Caca".

« Le Seigneur m’a frappé de graves douleurs en mon derrière ; mes excréments sont si durs que je pousse pour les expulser avec tant de force que j’en transpire ; et plus j’attends pour ce faire, plus ils durcissent. […] Mon cul est devenu mauvais ».

Ces mots sont de Martin Luther en personne, dans une lettre citée malicieusement par John Eliot Gardiner dans son livre magistral : Musique au château du ciel.

***

Et ça faisait aussi des morts.

***

Note : j'observe que Charlie Hebdo s'en est particulièrement pris, parmi ses tumultes anti-religieux, à la figure du pape mais, aussi loin que je me souvienne (l'époque géniale de l'équipe Cavanna-Choron-Cabu-Reiser-Gébé-Wolinski-etc.), il ne s'en est que rarement pris — sauf erreur — nommément aux sectes protestantes. Le pape ? Alors là pardon, qu'est-ce qu'il lui ont mis ! Et ne parlons pas de Jésus ! Bon, c'est sûr que les protestants n'ont pas de pape, eux. Il n'empêche que leur emprise ne cesse de s'étendre, alors que le rapace catholique a pris un air tout à fait flapi, depuis un certain nombre d'années.

L'Eglise catholique est sur la défensive, alors qu'au Brésil, en Afrique, en Asie, les petites fourmis des sectes évangélistes, pentecôtistes ou autres travaillent infatigablement. Leur prosélytisme (c'est-à-dire leur fanatisme, fût-il non-violent) est stupéfiant. L'Eglise catholique de France elle-même, prise en étau entre les accusation de pédophilie, la grande offensive musulmane et le militantisme opiniâtre des sectes protestantes, est dans une situation piteuse. Que fait Charlie Hebdo ?

mercredi, 09 septembre 2020

SIGOLÈNE VINSON

Le procès "Charlie Hebdo" rouvre une ancienne plaie.

***

Publié ici le 9 janvier 2015.

IN MEMORIAM

Frédéric Boisseau, Agent d’entretien.

Franck Brinsolaro, Policier du Service De La Protection (SDLP).

Jean Cabut, Dessinateur.

Elsa Cayat, Psychanalyste et Chroniqueuse.

Stéphane Charbonnier, dit Charb, Dessinateur et Directeur de CH.

Philippe Honoré, Dessinateur.

Bernard Maris, Economiste et Journaliste.

Ahmed Merabet, Policier.

Mustapha Ourrad, Correcteur.

Michel Renaud, Organisateur d’une exposition à Clermont-Ferrand d’une exposition de dessins de Cabu, à qui il rapportait ses œuvres.

Bernard Verlhac, alias Tignous, Dessinateur.

Georges Wolinski, Dessinateur.

 

**********

Billet d'abord publié le 14 janvier 2015.

Je pense encore à l'équipe de Charlie Hebdo, évidemment. A la mort irrémédiable d'un cousin, d'un frangin, d'un vieux frère nommé CABU. La grande bringue appelée Le Grand Duduche lui ressemblait. Quasiment "au naturel". Je n'en reviens pas, qu'il soit mort. Et qu'il soit mort comme ça.

J'y pense d'autant plus que j'ai appris des choses terribles sur les blessés, quatre en particulier.  

SIMON FIESCHI est le plus gravement blessé. Il était le webmaster du site. Apparemment, il a reçu une balle dans la colonne vertébrale.

LAURENT SOURISSEAU, alias Riss, dont le dessin me tape en général sur les nerfs, aurait reçu une balle dans l'épaule.

PHILIPPE LANÇON, je connais le critique littéraire de Libération, et j'aime beaucoup en général ce qu'il écrit. Qu'est-ce qu'il faisait là ? Je n'en sais rien. Toujours est-il qu'il aurait pris une balle terrible dans la mâchoire.

FABRICE NICOLINO, j'étais à mille lieues de lui imaginer des liens avec Charlie Hebdo. Je venais de lire son bouquin Un Empoisonnement universel, que je recommande vivement à ceux qui, en plus du terrorisme, ont la trouille du monde à venir tel qu'il s'annonce dans sa composante chimique. Lui aurait été très grièvement blessé aux jambes. Le médecin a déclaré : « Il a eu beaucoup de chance ».

Je ne connais pas la vitesse initiale (V0) du projectile des Kalachnikov. Je sais que le 5,56 NATO (5 mm et demi, autant dire rien du tout), avec ses 1300 m/s de V0, entre par un trou d'abeille, mais sort par un œil-de-bœuf. De quoi imaginer ce qui se passe dans la chair et dans les os.

Dans quel état sont-ils ? Dans quel état vont-ils sortir de là ? L'inquiétude reste vive.

Nous prendrons des nouvelles.

Voilà ce que je dis, moi.

************* 

Note : il faut absolument lire Le Monde daté du 14 janvier, pour ajuster les informations ci-dessus. Pas forcément tout. Juste les pages 10 et 11. Lisez d'abord et surtout l'article de Soren Seelow, la journaliste qui a recueilli le témoignage de Sigolène Vinson, qui était chroniqueuse judiciaire à Charlie Hebdo. Un témoignage à vous saisir aux tripes.

Sigolène Vinson raconte en particulier son face-à-face avec Saïd Kouachi, qui « avait de grands yeux noirs, un regard très doux ». Elle ajoute : « Je ne veux pas perdre son regard car Jean-Luc est sous la table ». Jean-Luc, c'est le maquettiste. Il doit sans doute la vie à ce désir de Sigolène Vinson d'aimanter les yeux de Saïd Kouachi. 

Sigolène Vinson dialogue avec lui, qui crie à plusieurs reprises : « On ne tue pas les femmes ! » à son frère Chérif. Trop tard, Elsa Cayat y est passée. Lisez ensuite l'article de Marion van Renterghem. Elle nous apprend quelque chose sur ce qui fait l'essence, l'esprit de Charlie Hebdo. Le mauvais goût assumé, revendiqué.

Pour le génie, c'est ceux qui n'y sont plus qui le faisaient.

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Je regrette de n'avoir pas été dans la salle de tribunal où Sigolène Vinson est venue livrer son témoignage.

mercredi, 17 juin 2020

ADIEU FRANCE INTER

« Si j'ai trahi les gros, les joufflus, les obèses, ...», chante Georges Brassens dans Le Bulletin de santé (pas besoin de citer la suite, j'espère). Moi, c'est à France Inter que j'ai fait depuis longtemps une infidélité massive. J'ai divorcé sans états d'âme. J'ai déjà esquissé ici même quelques raisons de ce désamour. Je suis revenu y déposer mes oreilles pendant le confinement, les autres radios nationales ayant été mises en panne. Et ça ne m'a pas fait changer d'avis, je vous assure.

1 – Publicité.

La première des raisons qui m'avaient fait rompre avec la grande chaîne publique – je ne parlerai même pas des radios marchandises RTL, RMC, Europe 1, ennemis publics et interdits de séjour chez moi – était l’invasion progressive du temps d'antenne par l'ogre publicitaire. Je conçois parfaitement que les responsables de Radio France cherchent des ressources financières pour compenser la scélérate diminution des dotations de l'Etat.

Mais ce n'est pas une raison suffisante pour que l'auditeur reste fidèle, d'autant que j'ai cru comprendre que les "animateurs" de belles émissions ont, comme sur France Culture, le statut d'intermittents du spectacle, et qu'ils bénéficient des indemnités chômage au moment de la mise en vacances d'été de toute l'antenne, crise ou non du coronavirus.

Pour moi le scandale est précisément dans l'abandon de la radio publique par les pouvoirs publics aux forces du marché (je ne parlerai surtout pas du retour du règne des comptables dans la "gestion" des hôpitaux parce que là). Et c’est une diarrhée de réclames pour des marchandises (MAF, MMA, Euromaster et autres fadaises crétinisantes)  qui vient polluer mon environnement sonore.

Par exemple, en ce moment sur France Inter, est diffusée une publicité apparemment grande et généreuse : tous les dimanches, Isabelle Autissier vient demander aux auditeurs de ne pas oublier le WWF au moment de rédiger leur testament (« Faites un legs ! »). Autissier vendue à la marchandise régnante ! C’est obscène, immonde et ordurier. Le WWF ne défend pas une cause : c'est une multinationale pratiquant le "greenwashing". J'exagère peut-être, mais.

J'en reste à cette forte maxime martelée en son temps par le grand Charlie Hebdo, attention, pas celui du petit Philippe Val [un temps directeur de France Inter sous Sarkozy], mais le vrai, le beau drageon d’Hara Kiri fait par une bande de vrais complices : « La publicité nous prend pour des cons, la publicité nous rend cons ». C'est une ligne rouge.

A cette occasion, je préviens France Culture que s'il prend aux dirigeants de la chaîne l'envie de truffer l'antenne de tels excréments, je n'hésiterai pas à fermer les écoutilles (mais je ne me fais pas d'illusions : je sais que je fais partie statistiquement des epsilon qui interviennent dans la courbe à partir du troisième zéro après la virgule).

2 – La deuxième des raisons qui m'ont fait quitter le navire France Inter est à la fois plus globale et plus fondamentale. Il y avait, il y a longtemps, des émissions qui retenaient mon attention pour une raison ou pour une autre (je ne détaille pas). Cela a changé. Je n'essaierai pas de reconstituer le fil de l'évolution : juste deux points de repère.

a – Course à l'audience.

D'abord la "course à l'audience". Pour être premier dans les statistiques d’Audimat, il est nécessaire de ratisser le plus large possible. « Ratisser large » ? Pas besoin d'être sorti de l'ENA pour comprendre : le point d'aboutissement, c'est la porcherie de "Loft Story" (1991), autrement nommée "Télé Réalité".

La course à l’audience, c’est ce qu'on appelle le nivellement par le bas : le Peuple de 1789, c'est l'éducation, l'élévation, la Déclaration des Droits de l'Homme, l'abolition des privilèges. La Populace de 1793, c'est la guillotine à plein régime, des droits et du pouvoir à la "canaille" et aux Sans-culottes aussi fiers de tutoyer "Capet" que d'étaler leur ignorance et leur arrogance.

En 2020, France Inter "se met à l'écoute" constante et complaisante des auditeurs, à coups de sondages et d'enquêtes marketing : pas un bulletin d’information sans un petit reportage « sur le terrain » pour recueillir un « son », du « vécu », une ambiance, un témoignage, des réactions « en direct » de « gens ordinaires ». On peut dire que le micro de France Inter, comme toute bonne gagneuse qui se respecte, « fait le trottoir ».

La place prise aujourd'hui par les interventions de tous les M. et Mme tout-le-monde (je parle surtout des tranches d'informations) est telle que l'information elle-même se trouve étouffée ou noyée. Je n'ai jamais appelé et n'appellerai jamais le standard du "Téléphone sonne", et je ne comprends pas l'empressement qui pousse tous ces gens à se bousculer pour "parler dans le poste". S'imaginent-ils ainsi participer au "Grand Débat" social ? Je sais l'epsilon que vaudrait ma voix à partir de l'antenne de France Inter : un simple prénom, un gravier qui fait "floc" en tombant dans la mare aux canards. De toute façon, qui cela peut-il intéresser de savoir que M. Untel regrette amèrement que la plage de Royan soit interdite d'accès pour cause de confinement ? 

Mais il paraît que « ça fait plus vrai ». Et ça donne quoi ? Les auditeurs plébiscitent par exemple "La Bande originale" de Nagui, Daniel Morin et consort, consternant, affligeant, déprimant moment de "divertissement" où les animateurs éclatent sans cesse en rires mécaniques parce qu'ils sont payés pour ça, et que ça booste - paraît-il - l’Audimat. Qui nous délivrera de ces "humoristes" ? Pour moi, accepter d'entendre ça sur une chaîne publique, c'est élire domicile dans une poubelle.

b – Le tronçonnement de la durée.

Ensuite, le découpage des tranches horaires en lamelles de plus en plus minces : pas le temps de s'installer dans un sujet que c'est déjà reparti dans une autre direction. Partant du principe que l’auditeur actionne la zappette dès qu’il sent l’ennui pointer le bout de l’oreille, les manitous de la programmation semblent gagnés par une fringale d’interventions extérieures, et multiplient à plaisir des « chroniques » dont le point commun à l’arrivée est qu’on a un mal fou à reconstituer le fil et le contenu : sitôt prononcées, sitôt oubliées. Essayez donc de vous souvenir du thème et du propos précis des chroniques ainsi entendues. Il ne reste rien : un clou chasse l’autre. On a suivi, l'intérêt étant constamment "renouvelé", mais à l'arrivée, plus rien.

3 – L'instrument de propagande gouvernementale.

Le confinement de la population a donc mis en panne bien des services de Radio France, en particulier France Culture, ne laissant émerger en pointe d’iceberg que l’antenne de France Inter (je ne supporte pas France Info pour la raison indiquée ci-dessus). Mais pendant cette période bizarre, il est admirable qu'au premier rang des invités, aient figuré systématiquement (je n’ai pas fait le compte mais) des ministres, des secrétaires d’Etat, des conseillers, des députés de la majorité présidentielle, pour que l’auditeur se rende bien compte que le gouvernement faisait tout ce qui était humainement possible pour « lutter contre la pandémie ». Oui, pendant le confinement, France Inter a bien été "La Voix de son Maître". On peut dire que, grâce à France Inter, la parole officielle a été correctement relayée, copieusement retransmise, abondamment répercutée. Ce débouché offert à la propagande gouvernementale m'a écœuré.

C'est pourquoi je redis aujourd'hui : « Adieu France Inter ! ».

Voilà ce que je dis, moi.

vendredi, 21 février 2020

LE GÉBÉ DE BERCK

Gébé (1929-2004, Georges Blondeaux à l'état-civil) est un génie, mais un génie difficile, un génie à part. Il le savait, mais il s'en foutait. La preuve, c'est qu'il a publié un volume intitulé "Il est trop intellectuel" (Editions du Square, 1972). Mais ce n'était pas un "intellectuel". C'était juste un artiste qui exposait en images ses inquiétudes métaphysiques. Personne plus que lui ne fut préoccupé du sens de la vie, et même, disons-le, du sens que nos sociétés marchandes et industrielles prétendent donner à nos vies. Non, Gébé n'était pas un intellectuel : par les images qu'il faisait naître, il savait donner un corps à ses interrogations.

C'est ainsi qu'il donne un jour naissance à une créature immonde, infiniment plastique et qui reste une énigme insondable quant à sa signification : BERCK. On peut se demander si le personnage n'est pas pour Gébé un simple moyen pour engendrer, grâce à un trait impeccable, des images fortes qui soient autant d'atteintes à notre réalité ordinaire : faire surgir, au cœur de la banalité quotidienne, une sorte de folie qui pose une vraie question au sujet de la façon dont nous vivons. Pour nous dire peut-être que, à côté de nos lassitudes et de nos routines, toutes sortes d'autres réalités sont possibles.

Pour l'auteur de L'An 01, à tout moment, il convient de s'attendre à tout, parce que, à tout moment, une autre réalité est possible.

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Notez la chèvre.

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Double page parue dans le mensuel Hara Kiri n°127, en avril 1972.