vendredi, 07 février 2025
APARTHEID, COUP D'ŒIL RÉTRO
Il ne fait plus très beau au-dessus des populations blanches d'Afrique du Sud, si l'on en croit ce titre du journal Le Monde daté 6 février 2025.
La rage de monsieur Musk est motivée par le projet du gouvernement sud-africain d'en finir avec la spoliation des terres opérée autrefois par les colons Afrikaners.
A comparer avec le titre historié de cette page tirée d'un Charlie Hebdo daté du 1 juillet 1976 et signé du maître ès-lettrines Willem.
Il faut se souvenir que Frederik de Klerk n'a libéré Nelson Mandela qu'en 1990, après 27 ans passés par ce dernier dans une prison, et que l'Afrique du Sud a élu ce héros noir ("Madiba") en 1994. Or la première phrase de Willem est la suivante : « En Afrique du Sud, la fin du règne des blancs n'est qu'une question de temps », et qu'il met celle-ci dans la bouche d'un blanc vaincu : « T'es fier de toi ? 21 millions de noirs contre 4 millions de blancs !? ».
En dehors du fait qu'on savait déjà vers quel bord politique extrême penche le cœur d'Elon Musk, c'est Willem qui avait raison.
Et si la première phrase de Willem annonçait la fin de quelque chose de plus vaste ?
09:00 Publié dans DANS LES JOURNAUX | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : journal le monde, charlie hebdo, apartheid, afrikaners, afrique du sud, nelson mandela, madiba, frederik de klerk, elon musk, colonialisme
samedi, 07 février 2015
ÇA C’EST UN HOMME
Non, ce titre ne renvoie pas à Manuel Valls. Car lui, l'homme au menton en avant, sa spécialité, c’est de jeter des pavés. Je veux dire « dans la mare ». Prenez le dernier épouvantail qu’il a brandi sous le nez des Français dans l’espoir de faire croire, dans les quartiers défavorisés, qu’il pense à eux. Nuit et jour. « Apartheid », qu’il dit.
Manuel Valls n'est qu'un fauteur de guerre : c’est sûrement le mot qu’il fallait prononcer pour développer la haine des habitants de ces quartiers contre l’Etat français et le reste de la population. Et il fait d’une pierre deux coups, avec le message contenu dans cette petite bombe verbale que je décrypte ainsi : « Honte sur vous, Français, de pratiquer chez vous aujourd’hui ce système que vous avez dénoncé violemment avant-hier quand il sévissait en Afrique du Sud ».
L’emploi du mot apartheid, en plus de s’apparenter à la fois à l’effet d’une flamme sur un baril de poudre et à une entreprise de culpabilisation de masse des Français, relève tout simplement du mensonge. Je connais un seul pays au monde qui pratique l'apartheid, depuis la libération de Madiba (surnom de Nelson Mandela en Afrique du Sud) par Frederik de Klerk : c’est Israël, qui pratique impunément, au quotidien, la négation du peuple palestinien.
En France, parlez d’inégalités criantes, de déni de justice ou autres chefs d’accusation, tant que vous voulez, mais d’apartheid, il n’y a point, monsieur Valls. L’usage que vous avez fait du terme est proprement indigne (de même que le mot « ghetto », que son abus ressassé a vidé de son sens). Et le pire, c’est que vous l’avez utilisé dans une pure opération de com’.
Excellente illustration de ce que sont devenus le discours, le personnel et l’action politiques aujourd’hui en France : de la camelote publicitaire. Dont les "éléments de langage" ressemblent furieusement à des coups de klaxon. Concert d'avertisseurs sonores : un résumé de la vie politique en France.
On pourrait à bon droit affubler Manuel Valls (avec ses collègues) du patronyme du célèbre OSS 117 : Bonnisseur de la Bath, un nom qui, traduit de l’argot, donne : « Vous nous la baillez belle, monsieur le premier sinistre ». Cette veulerie n’a rien à envier à celle d’un certain Nicolas S., de ministre mémoire (« Casse-toi pauvre…, Kärcher, les magistrats comme des boîtes de petits pois, etc. »).
Gageons qu’il ne lui viendrait pas à l’esprit de s'inspirer de l’attitude d’un homme qui mérite au superlatif le nom d'homme, et dont on ne parle pas assez. J’aime assez quelques livres de l’écrivain, sans toutefois les placer dans mon panthéon personnel. Mais ce que j’admire le plus, chez ce bonhomme, c’est son parcours, cahoteux et chaotique certes, mais noble dans la trajectoire. On y trouve une ascension de l'Everest, un passé de révolutionnaire, un passé d'ouvrier, une passion pour l'Ancien Testament, des livres, ... Il s’appelle Erri de Luca. C’est un Napolitain.
Je ne veux pas résumer sa vie : l’encyclopédie en ligne lui consacre une notice assez fournie. Juste évoquer les dernières péripéties en date de son existence. Quand on parle de Bure (déchets nucléaires), de Notre-Dame-des-Landes (aéroport), de Sivens (barrage), on a une idée du champ dans lequel elles se déroulent. On appelle ça les GPU (Grands Projets Inutiles).
Le GPU contre lequel s'est élevé Erri de Luca est à coup sûr le plus gros (prévision de 26 milliards d’euros d’argent public) : c’est le tunnel Lyon-Turin. Il a rejoint les contestataires du Val de Susa (côté italien) pour une raison précise, qui n’est pas la folie de la démesure du projet, qui pourtant se suffirait à elle-même.
La raison est scientifique et technique, et concerne la santé publique. Car ce que ne crient pas sur les toits les promoteurs du tunnel, c’est que la roche, côté italien, est composée, entre autres, de pechblende. Il faut savoir que c’est en analysant un fragment de pechblende que les Curie ont mérité le Nobel de chimie en 1903 : c’est de là que vient l’identification de quelques charmants éléments, comme polonium, radium, etc. Passons sur la poussière d’amiante crachée par les percements exploratoires. Pas besoin de longs discours : on a compris. Si l’on veut empoisonner le Val de Susa, et toute sa population avec, creusons !!
Le problème, c’est que la compagnie chargée du percement a eu connaissance de propos qu’Erri de Luca a tenus dans les médias : « Je reste persuadé que ce projet est une entreprise inutile et je continue à penser qu’il est juste de la saboter ». Plainte au pénal. Le procès se tient en ce moment à Turin, un tribunal qui ne rigole plus dès qu’il s’agit du tunnel.
En attendant son procès, Erri de Luca a pris le temps d’écrire un opuscule (La parole contraire). J’extrais quelques phrases : « Si j’avais employé le verbe "saboter" dans le sens de la dégradation matérielle, après l’avoir dit je serais allé le faire » ; « Si je suis déclaré coupable de mes paroles, je répéterai le même délit en criminel endurci et récidiviste ». Moi j’appelle ça avoir de la tenue.
Ça, c'est un homme ! Ça s'appelle se tenir debout ! Ça c'est de la dignité. Sans esbroufe. Des questions, monsieur Valls ?
Voilà ce que je dis, moi.
Note : l'idée de ce billet m'a été fournie par le petit article (Le Canard enchaîné, 4 février) de l'excellent Jean-Luc Porquet, qui n'a plus l'ami Cabu pour l'illustrer. Il n'a pas fini de me manquer, celui-là, nom de dieu.
09:00 Publié dans DANS LES JOURNAUX | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : france, politique, société, manuel valls, nicolas sarkozy, apartheid, afrique du sud, nelson mandela, madiba, israël, palestine, ghetto, oss 117, hubert bonnisseur de la bath, erri de luca, naples, napolitain, notre dame des landes, barrage de sivens, tunnel lyon turi, pierre et marie curie, prix nobel de chimie, val de susa, amiante, polonium, radium, la parole contraire, le canard enchaîné, jean-luc porquet, cabu, humour, caricature