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jeudi, 26 septembre 2024

C'ÉTAIT L'ESPRIT HARA KIRI

Je ne vais pas faire l'éloge du grand hebdomadaire fondé en 1969 par François Cavanna et Georges Bernier, alias "professeur Choron" (du nom de la rue où la revue siégeait).

Je ne vais pas non plus me lancer dans une analyse savante des tenants et aboutissants de la rupture violente qu'a représentée l'entreprise dans le paysage de la presse d'alors, dont la doctrine était plutôt de ramer dans le même sens que les mouvements d'opinion que les divers organes voulaient servir.

"Bête et méchant", slogan revendiqué, "mauvais goût", "provocation" et autres qualificatifs désobligeants porté par ceux qui se pinçaient le nez face à l'objet, oui, c'était un esprit pour le moins clivant. Du mauvais esprit bravement décomplexé. 

Je veux juste ici donner à percevoir la façon dont la bande de joyeux drilles traitait événements et faits relevant de l'air du temps. Tout passait par la moulinette, les tabous, les stéréotypes, les conventions, le convenable, la pudeur. Rien n'échappait au jet de vitriol. Juste tout ce que les nouveaux stéréotypes, les actuels tabous cloueraient au pilori et assigneraient en correctionnelle. 

Je prendrai pour exemple un ancêtre de nos campagnes de défense de l'environnement, en l'occurrence celle guidée par le mot d'ordre édifiant « Un bébé, un arbre », dont on voit les traces dans ces quelques documents remontant à l'année 1971.

On voit ci-dessous la façon dont chaque membre du groupe pose son propre regard — singulier — sur le thème.

BEBE 1971 12 13 H.K. UN BEBE UN ARBRE  .jpg

A tout seigneur, tout honneur : la revue princeps prend au pied de la lettre l'expression "Le choc des photos" popularisée par un hebdo qui n'avait vraiment rien à voir, c'est le moins qu'on puisse dire. On peut voir dans cette image la patte du professeur Choron, provocateur en chef (Chenz était sans doute le photographe).

Et puis, dans l'ordre, le somme toute gentil Cabu, puis le sévère Gébé, révolté par les atrocités commises par les Américains au Vietnam, à coups de bombes et d'agent orange. En conclusion, le ricanement sardonique de l'impitoyable Reiser.

BEBE 1971 10 25 C.H. N°49 CABU MME POMPIDOU .jpg

BEBE 1971 11 29 C.H. N°54 UN BEBE UN ARBRE.jpg

BEBE 1971 11 01 C.H. N°50 UN BEBE UN ARBRE .jpg

Toutes ces gaudrioles sont à placer sous le signe de l'humour (noir, évidemment), je le rappelle. Et dois-je le dire, je regrette profondément qu'un tel esprit ait été chassé de l'ensemble du paysage médiatique actuel.

Aujourd'hui, où la France est dirigée, gérée, digérée par des charlots qui se foutent bien de l'avenir du pays, on éprouve la cruelle absence des Cabu, des Gébé, des Reiser, des Fournier, et même des Choron.

Car ce n'est pas l'actuel Charlie Hebdo, sorte de pauvre ectoplasme végétatif et laid de son modèle, qui peut prétendre assumer l'héritage.

L'esprit Hara Kiri est mort et enterré, laissant orphelins des tas de gens atterrés devant le spectacle du monde tel qu'il va mal.

De profundis.

Commentaires

Petit message de l'un de ces orphelins dont vous faites mention dans ce billet. Billet qu'il m'est difficile de commenter sans le paraphraser, tant je suis d'accord avec son contenu.

Deux petites choses insignifiantes, donc. Tout d'abord, si l'on en croit Cavanna dans "Bête ét méchant", le "gentil" Cabu était selon lui le plus féroce d'entre tous. Je suis assez d'accord avec Cavanna à ce point de vue. Il y a dans certains des dessins de Cabu un véritable dégoût de l'humanité, sans le moindre second degré apparent.

Toujours pour citer le père François, il me semble que, dans les dernières années de sa vie, son rêve était de ressusciter Hara-Kiri et de laisser tomber le Charlie Vallifié puis Charbifié qui n'était déjà plus que l'ombre de sa gloire passée. A-t-il senti qu'il était déjà trop tard ?

Écrit par : Guy | jeudi, 26 septembre 2024

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J'ai hésité sur "gentil", j'ai failli mettre des guillemets. Mais bien d'accord : si Cabu était un doux dans la vie, ses jugements sur le monde qui l'entoure dépassent en férocité ce qu'on peut imaginer.
Au sujet du Charlie de Val, puis Charb, j'ai lu Mohicans de Denis Robert, qui établit certaines vérités, parfois même gênantes (au sujet de Cabu).

Écrit par : chambe | vendredi, 27 septembre 2024

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