vendredi, 10 août 2018
C'EST BEAU, LE SPORT CYCLISTE
Lance Armstrong, en posture de dieu cycliste, avant que ses sept titres de vainqueur lui soient enlevés parce que le monsieur se dopait ! Document servant de frontispice majestueux au dossier où, dans son album publié en 2005, l'association Reporters sans frontières récapitule l'intégralité des podiums du Tour de France de 1903 à 2005. Quel bel exemple, quel beau modèle, quel bel idéal pour notre belle jeunesse !
Dans les quelques billets publiés dans Le Monde sous la plume de l'excellent Antoine Vayer – l'homme qui prouve le dopage scientifiquement et sans prélèvement, juste par le calcul de la puissance développée par le coureur dans certaines côtes –, il semblerait que l'entraîneur ait désormais remplacé les "docteurs" (Michele Ferrari, Bernard Sainz, alias Docteur Mabuse). La suprématie de l'équipe Sky, de Christopher Froome et de Geraint Thomas (je m'informe), non contente de tuer le suspense, est là pour le prouver. Heureusement, le public ne se laisse pas abuser, comme le montrent les huées qui ont servi de cortège triomphal à Froome.
Gérard Rancinan est le photographe qui a tressé cette couronne de lauriers à la gloire des maillots jaunes encore vivants en 2005.
samedi, 18 juillet 2015
DOPAGE ET TOUR DE FRANCE
Je finissais mon billet du 14 juillet sur une citation d’Antoine Vayer à propos du démarrage foudroyant de Christopher Froome dans le Ventoux en 2013 (1028 watts de poussée instantanée). Eh bien bingo ! Le voilà maillot jaune en 2015. Comme quoi la persévérance est payante. Mais il semble qu’il y ait quelque chose de pourri au royaume de la petite reine. Et que l’omerta ne paralyse plus comme autrefois les langues. Les observateurs les plus neutres font désormais la fine bouche.
Même la grande presse nationale ne joue plus le jeu de l’enthousiasme béat face aux performances toujours plus exaltantes des « forçats de la route ». Pensez, Le Monde et Libération datés 16 juillet s’y mettent. En une du Monde, un appel d’article ainsi rédigé : « Chris Froome sème ses rivaux mais pas la suspicion ». Celle de Libé n’y va pas par quatre chemins, en titrant en très gros : « Le péril jaune » (très subtil, n’est-ce pas ?).
Le titre du Monde en page 15 est sans ambiguïté : « Froome plombe le Tour ». L’article assez neutre et consensuel, signé Henri Seckel, est doublé par un autre, de Yann Bouchez, beaucoup plus net : « Cachez ces données que seul le maillot jaune saurait voir ». Les deux articles (on s'est réparti le travail) comportent des éléments intéressants, mais c’est d’abord celui-ci qui attire mon attention, bien entendu.
Car on y apprend l’existence du SRM, « petit capteur placé dans le pédalier du vélo ». Il indique un certain nombre de paramètres, parmi lesquels « fréquence de pédalage, vitesse, pulsations, puissance ». Les données de Christopher Froome, piratées (paraît-il), se sont retrouvées sur les réseaux sociaux, défilant en même temps que la désormais célèbre scène du Ventoux, et révélant « l’infernale fréquence de pédalage, la puissance qui a atteint les 1000 watts au paroxysme de l’accélération et le rythme cardiaque qui reste relativement stable ». C’est bien connu, un bon entraînement permet de maîtriser les battements du cœur : un champion cycliste est forcément un vrai maître yogi. Qui plus est, Froome refuse « de communiquer sa VO² max (consommation maximale d’oxygène), facteur déterminant dans les sports d’endurance ».
Le succulent de l’affaire est l’attitude de Froome et de son directeur Dave Brailsford : impavide, leur attitude, face à toutes les questions sur les raisons des performances stratosphériques du coureur. Tant qu’il n’y a pas de preuve, on ne saurait l’accuser de quoi que ce soit. Tous deux savent qu’ils ne risquent rien. Ils seraient un rien narquois que ça ne m'étonnerait pas. Façon de dire : « Allez-y mes poussins ! », comme le meurtrier abrité derrière son alibi en béton.
Les petits copains du peloton, quand ils parlent, on peut compter sur leur admiration (et leur silence). Prudence est mère de sûreté : personne ne veut risquer un procès en diffamation. Reste Antoine Vayer (voir 14 juillet), le physicien des performances cyclistes, que Yann Bouchez semble avoir rencontré : « Selon lui, si les informations sur le leader de Sky sont sorties, il ne s’agit pas d’un "piratage", mais d’une "fuite" ». Un vilain jaloux dans l’équipe ?
Toujours est-il que Christopher Froome, s’il n’a pas « tué le Tour » à La Pierre-Saint-Martin, a écœuré la concurrence : il a cloué sur place ses rivaux : « Mardi, en voyant le leader de l’équipe Sky s’en aller seul, à 6,5 kilomètres du sommet, alors que tous ses concurrents explosaient dans son sillage, on a cru revivre la 15ème étape de l’édition 2013 » (la fameuse étape du Ventoux).
Les managers de l’équipe Sky ont-ils mis au point la recette miracle du « crime parfait » en matière de sport ?
Le dossier de Libération sur le même sujet est mi-chèvre-mi-chou. Il ne faudrait pas risquer de tuer le spectacle. Mais attention, Libé : Froome s'est fait huer par une partie du public, le matin du départ de La Pierre-Saint-Martin.
Si le public aussi s'y met, maintenant .... Aujourd'hui c'est l'égalité : le percheron au croupion superbe (le breton n'est pas mal non plus) peut faire jeu égal avec le cheval de course (le maire de Champignac n'est pas plus lyrique).
L'égalité, on vous dit : le crack et le bourrin, même combat. Ben non.
Faut-il s'ennuyer dans la vie pour s'intéresser à ce spectacle bidonné !
Voilà ce que je dis, moi.
09:00 Publié dans DANS LES JOURNAUX | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : sport, cyclisme, tour de france, amaury sports organisation, dopage, triche, christopher froome, antoine vayer, maillot jaune, la petite reine, mont ventoux, journal le monde, journal libération, yann bouchez, henri seckel, 14 juillet, omerta, capteur srm, dave brailsford, la pierre-saint-martin, équipe sky, maire de champignac, franquin, bande dessinée
mardi, 14 juillet 2015
LES PARAMÈTRES D’ANTOINE VAYER
Je ne sais plus à quand remonte la première intervention d’Antoine Vayer dans les journaux. Antoine Vayer était entraîneur d’une équipe cycliste qui a beaucoup fait parler d’elle en 1998 : Festina, et en particulier Richard Virenque, célèbre pour avoir légué aux Guignols de l’info une expression passée dans le langage courant : « A l’insu de mon plein gré ». Autant dire qu’Antoine Vayer s’y connaît en performances cyclistes. Et en moyens de les améliorer. Mais pas à tout prix. Je ne sais plus quel col l'équipe Festina avait franchi presque au complet, en tête et bouche fermée. Oui, je suis d'accord : ça peut étonner.
Vayer travaille depuis nombre d’années dans un laboratoire dédié précisément à l’étude des performances des sportifs, en particulier des cyclistes, comme de juste. Son truc à lui, ce n’est pas de jouer au chat et à la souris avec les tricheurs, de jouer les chimistes ou les biologistes des agences antidopages qui font la course avec les docteurs Ferrari (l’ami de Lance Armstrong) ou les Manolo Saiz, les bien connus améliorateurs de résultats (Marco Pantani, Miguel Indurain, Alberto Contador). Etant entendu que les truqueurs ont toujours un coup d’avance sur les chevaliers blancs.
Non, le truc d’Antoine Vayer, c’est l’application des sciences physiques aux performances humaines. Autant dire que l’Union Cycliste Internationale n’est pas près d’adopter cette grille de lecture, trop simple et trop objectivement observable pour être contournée. Quand on veut pouvoir cuisiner sans être dérangé par des intrus, rien de mieux qu’un peloton de biochimistes embringués dans toutes sortes de règlements procéduriers et légalistes qui n’aboutissent que rarement et difficilement. La méthode d’Antoine Vayer est imparable. Lumineuse.
Il s'est contenté de calculer la poussée maximale possible d’un humain, compte tenu d’un certain nombre de facteurs (poids, capacités pulmonaires (VO²max), …), tout cela rapporté au pourcentage de la pente escaladée (car c’est dans les montées que la preuve devient aveuglante). Il part du principe que le surhomme n’existe pas encore.
Son unité de base est le watt-étalon. D’après ses calculs, on est obligé d'avoir des doutes sur l’honnêteté de tout coureur capable de développer 410 watts et au-dessus. Mais il cite un exemple de tricheur à la testostérone à 395. Je crois me souvenir, dans ses propos, que la base d’un bon cyclotouriste se situe autour de 250 (sans garantie).
La grille mise au point par Antoine Vayer projette une lumière crue sur le gouffre qui sépare sa méthode de celle de l’Agence Mondiale Antidopage (et jette donc un doute sur la volonté d'éradiquer la triche). Celle-ci, sur 250.000 contrôles qu’elle effectue dans l’année, détecte à peine 2 % de cas positifs.
Vayer, lui, parvient à « flasher » entre 50 et 100 % des coureurs en « excès de moyens », suivant la catégorie à laquelle on peut les rattacher : on est « mutant » à 450 watts-étalons (Pantani, Bjarne Riis, Indurain), « miraculeux » à 430 (Armstrong, Contador, Ullrich, Leblanc, Rominger, Virenque, .......) et « suspect » à 410 (Ugrumov, Mayo, Rasmussen, Julich, Boogerd, ....). La pauvre AMA a laissé filer des "miraculeux" (Luttenberger, Escartin,) et des "suspects" (Nibali, Tour 2014, et Wiggins, Tour 2012).
Dans son article du Monde daté du 9 juillet, Antoine Vayer ne lésine donc pas : il cafte : « Les plus malins comme Jalabert continuent d'asséner leurs vérités à la télévision ». Ainsi, Andy Schleck (2ème du Tour 2009) a été « flashé » à 434 watts « sur Arcalis, Verbier, Petit-Saint-Bernard, Colombière, Ventoux ». Il cite donc quelques-uns des quarante-huit noms des coureurs « inhumains » qu’il a pris en flagrant délit (en vingt ans) d’ « excès de moyens » (je suis assez content de ma petite formule). Bon prince, il ne s’attarde pas trop sur ce qui se passe en dessous de 410 (sous-entendu : il faudrait peut-être).
Allez, une dernière pour la route (Vayer conclut ainsi son article) : « … Froome possède également la puissance, inversement proportionnelle à la maigreur de ses jambes : en 2013, sur le mont Ventoux, nous l’avons flashé passant de 19 km/h à 31 km/h en cinq secondes, en développant une puissance instantanée de 1028 watts. Le dernier de la liste : Quintana. Epargnons-le pour l’instant, il va l’emporter cette année ». Sur ce dernier point, nous verrons bien. Mais franchement, 1028 watts ! ... A-t-on idée ?
Plutôt qu’ « inhumain », il faudrait dire « surhumain ». Antoine Vayer a peut-être tort : le cyclisme biomédical a déjà inventé le surhomme. Et ce n'est pas fini : à l'étape suivante, je vous présenterai le "transhomme", que des bidouilleurs de cyborgs de la « si l'icône valait » (chili con valley) sont en train de concocter pour un avenir pas si futur que ça.
Voilà ce que je dis, moi.
09:00 Publié dans DANS LES JOURNAUX | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : journal le monde, antoine vayer, tour de france, cyclisme, lance armstrong, dopage, testostérone, salbutamol, floyd landis, marco pantani, bjarne riis, miguel indurain, alberto contador, richard virenque, laurent jalabert, bradley wiggins
jeudi, 04 avril 2013
DE L'INNOVATION EN ART
CECI EST UN LUGER P 08, DONT IL FAUT IMAGINER LA JAMBE DE LA CULASSE QUI SE PLIE QUAND LE COUP PART, COMME SI ELLE ETAIT DOTEE D'UN GENOU
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Parenthèse inaugurale : Cahuzac ? Ben si, parlons-en, puisque ça mousse partout, ça pique les yeux, irrespirable. Je suis frappé par un truc : tout le monde est étonné. Moi je me souviens du Tour de France : tout le monde débarque sur la Lune quand les dopés sont pris la main dans le sac. Résultat ? Le Tour de Flandre vient d'avoir lieu, Fabian Cancellara l'a gagné, saluons la performance de ce pur sportif ! Réécoutez les commentaires : c'est exactement ça. Cahuzac, donc ? Même tabac. Peloton des coureurs du Tour de France et peloton des grenouilles dans le grenouilloir politique de France sont régis par une même loi, qui a nom : OMERTA. Et ce n'est pas le pétage de plomb de Gérard Filoche chez Michel Field, qui est fait pour me rassurer sur le problème de fond.
Deuxième remarque : tout le monde s'extasie (pardon : se scandalise) : « Mon dieu, il a menti, c'est un menteur, il a menti à tous ses confesseurs ! ». Mais vous savez comment c'est : faute avouée est à moitié pardonnée. Un mensonge en France n'a rien à voir avec le statut du parjure aux Etats-Unis. On oubliera. Comme si le gros plan sur le mensonge permettait à Cahuzac d'occulter son acte de tricherie, disons le mot : son délit. Cahuzac a publiquement avoué qu'il est un délinquant. Voilà ce qu'il ne faudrait pas oublier.
Moralité : le soupçon s'étend à tout le peloton ? Eh bien tant pis pour les honnêtes !!! Ils n'avaient qu'à pas être là !
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Abordons pour finir l’autre face de l’extrémisme démocratique. Après j’arrête.
Nous évoquions le naufrage de la définition, cette chose désuète qui ne servait qu’à distinguer quelque chose appelé « œuvre d’art » de toute autre réalité. Qu’est-ce qui est beau ? Qu’est-ce qui est laid ? Le nœud du problème, quoi : si l’on ne peut se mettre d’accord sur la définition du beau, c’est qu’il n’y en a plus, disparue noyée dans l’infinité des interminables controverses et contestations liées au triomphe de la subjectivité. Pourquoi, quand je dis : « Ceci est beau, ceci est laid », y a-t-il toujours quelqu'un pour me reprendre : « Tu ne peux pas dire ça : dis plutôt : "J'aime, j'aime pas" ». Eh bien non, Elisabeth, je persiste et signe.
L’interdiction de la définition, qui interdit le jugement (c'est peut-être à ça qu'elle sert, l'interdiction), revient finalement à une porosité générale de toutes les notions, de toutes les distinctions entre ce qu’une chose est et ce qu’elle n’est pas. Quand « l’un est l’autre », cela s’appelle l’indifférenciation. Or, il est bon de le dire : l'indifférenciation consiste à tout mettre dans le même sac de nœuds de vipères lubriques.
Car une définition ne sert qu’à une chose : établir des différences. Sans définition exacte et précise des termes, Carl von Linné n’aurait pas pu établir les fondements de la botanique. Soit dit en passant, qu’est-ce que c’est, la botanique ? C’est un classement des végétaux : les feuilles, sur la tige, sont-elles « alternes », « opposées », « connées », « opposées-décussées », « verticillées » ? Le sommet du limbe foliaire est-il « aigu », « acuminé », « apiculé », « mucroné » ou « obtus » ? La découpure du limbe est-elle « palmatifide », « palmatipartite » ou « palmatiséquée » ? Tous ces mots descriptifs ne vont pas sans une définition bien sentie et bien balancée.
En gros, définir est une façon de se repérer dans l’infinie variété du vivant. En posant des mots sur des choses. Ça simplifie la vie. Mais quand on est seul à mettre un mot sur une chose, le mot ne sert pas à grand-chose. Voyez le petit fripounet surréaliste Magritte, mais qui a su se rattraper dans l’attrape-gogo publicitaire. Ce n’est pas le destin, c’est la loi. Pour ne pas rester seul, il faut donc se mettre d’accord sur les mots et leur définition.
Les arts dits « contemporains » ont, depuis, disons, 1900, promu une autre façon de procéder. Je propose d’appeler ce processus « singularisation ». Oh, ça ne s’est pas fait du jour au lendemain, mais ce qui s’est mis en place accompagne comme une ombre le progrès des techniques connu sous le nom d’ « innovation ». Ah, l’innovation ! Le maître-mot ! Le 20ème siècle est celui de l’innovation majuscule !
L’innovation est le moyen par excellence de se faire un nom. Les artistes ont piqué le truc aux scientifiques et aux techniciens. Les tiroirs marqués « Michel Ange » ou « Léonard » étant définitivement occupés, il fallait en effet trouver autre chose. Le monde de l’art s’est donc tourné, pour que ses tenants aient une petite chance de se singulariser, vers ce qu’a offert le 20èmesiècle technique : l’innovation permanente et tous azimuts.
Ne parlons pas des précurseurs. Evoquons le plus brièvement possible le père de tous les chercheurs d’innovations, Marcel Duchamp, non pas pour ses « ready mades » (pour une fois), mais pour son Nu descendant un escalier, qui n’est rien d’autre qu’une application picturale de la chronophotographie inventée par Etienne-Jules Marey (ci-contre et ci-dessous) ou Edward Muybridge (juste avant le cinéma).
Même remarque pour sa Mariée traversée par des nus, vite, et pour son Jeune homme triste dans un train. C’est sûr que, pour les titres, Duchamp a eu du génie : il a compris que le plus important est de jouer comme des gosses. Et de poser, sur n’importe quelle chose, n’importe quel mot : TOUT est bon. Et le plus grand écart apparent est forcément le meilleur. Les dadaïstes, les surréalistes et, à leur suite, la publicité, n’ont eu aucun scrupule à déplacer le curseur du mot à la chose, et inversement. A l’arrivée, ça fait gloubiboulga. Beaucoup de gens trouvent même ça poétique. Le plus fort, c'est qu'on ne les met pas en taule.
L’innovation, c’est le fin du fin. C’est même devenu la fin des fins. Un but en soi. Le Graal ultime. C’est la condition pour émerger de la masse. L’innovation par excellence, le prototype et l’archétype de l’innovation appartient encore à Marcel Duchamp, le paresseux infatigable, et consiste à désigner : vous prenez un objet, et vous en faites une œuvre (les bien connus ready mades). Ce n’est pas pour rien qu’il a d’ailleurs inventé l’ « objet-dard ». Pour faire bonne mesure, il a inventé la feuille de vigne femelle (un moulage, à n'en pas douter).
Les mots du langage, avec Marcel Duchamp, ont pris possession des territoires du visible. La grande confusion.
Voilà ce que je dis, moi.
09:00 | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : photographie, revolver, pistolet, luger p08, affaire cahuzac, tour de france, tour de flandre, fabian cancellara, omerta, dopage, politique, société, gérard filoche, michel field, art contemporain, démocratie, beau laid, carl von linné, botanique, rené magritte, publicité, ceci n'est pas une pipe, marcel duchamp, ready made, nu descendant un escalier, chronophotographie, etienne-jules marey, edward muybridge, dadaïsme
lundi, 20 août 2012
REFERMONS L'OLYMPISME A JAMAIS !
Pensée du jour : « Il y a deux sortes d'hommes : ceux qui pensent qu'il y a deux sortes d'hommes, ... et les autres ». CHARLES DE GAULLE
Nous en étions restés à la performance hallucinée du relais 4 x 100 féminin, gagné par l’équipe américaine, et au triomphe de l'industrie chimique dans le sport.
Et les quatre clowns Jamaïcains du 4 x 100 messieurs ? BOLT, BLAKE, CARTER et FRATER, ils s’appellent. Record du monde pulvérisé, là encore. Enfin, de seulement 16 centièmes, mais quand même. Bon, c’est vrai que YOHAN BLAKE a été contrôlé positif en 2009. Mais là, trois médailles pour lui, pas une de moins. Et, certes, avec les pieds, mais sans les mains, admirez le travail de bipède ! Chapeau l’artiste ! C'est bien le moins, pour un qui a sûrement renoncé à se doper. Sûrement.
De toute façon, soit dit par parenthèse, à propos d'USAIN BOLT, j'aimerais qu'on m'explique à quoi ça sert de courir à plus de 36 kilomètres à l'heure si c'est pour s'écrouler au bout de 100 mètres. Qu'est-ce qu'il apporte à l'humanité ? Plutôt qu'aux sprinteurs, bourrés de muscles aptes à exploser, intéressons-nous aux athlètes du demi-fond et du fond, bien plus utiles, parce que plus près d'une physiologie normale (je ne parle pas de leurs performances). Passons.
L’ancien champion CARL LEWIS, lui-même asticoté naguère par les autorités antidopage, émet quelques points d’interrogation à propos d’USAIN BOLT. Pudiquement, Le Nouvel Observateur (le site) pose la question : « Faut-il douter des performances de BOLT ? ». C'est retors, pour le moins. D'une pierre deux coups : on répond subtilement à la question qu’on fait semblant de poser. Tout en évitant un procès en diffamation.
Derrière les Jamaïcains, qui trouve-t-on ? Les Américains. Tiens donc. Avec 37,04 secondes, ils égalent l’ancien record du monde. Quoi de plus normal, après tout ? L’ancien est fait pour être dépassé par le nouveau. C’est même inscrit dans la définition des mots. Parmi les Américains, un certain JUSTIN GATLIN. Un jeune homme de 30 ans.
Quoi, il a purgé quatre ans de suspension pour dopage ? Il a purgé sa peine, oui ou non ? Tout homme a droit au rachat, tout de même ! Quoi, 30 ans, c’est l’âge où les performances diminuent ? Mais c’est qu’il a su se maintenir au top de la condition, voilà tout ! Regardez ALBERTO CONTADOR. Eh bien il les a faits, ses deux ans de suspension pour taux excessif de clenbutérol dans le sang. Qui oserait douter de la pureté de son retour dans la Vuelta (tour d'Espagne) ? Mais le public, lui, est un juge indulgent, tant qu'on n'a pas égorgé ou violé une enfant (cela veut dire : on a des valeurs, NOUS !) : il a déjà oublié, puisqu'il applaudit.
Pendant ce temps, les nageurs olympiques ont battu neuf records du monde. Pendant ce temps, DAVID RUDISHA, Kenyan de métier, se contente quant à lui de transformer le 800 m. en sprint : il bat son propre record du monde. Pendant ce temps, les foules énamourées se prosternent devant la divinité nommée « EXPLOIT SPORTIF». Je n'en reviens pas.
Les milliards de pions humains, vous savez, ces petites machines aux performances productives sinon douteuses, du moins ordinaires, endoctrinés à coups de slogans du genre : « Indignez-vous ! », « Engagez-vous ! », « Surpassez-vous ! » (le dernier prout éditorial, la dernière bouse de vache éructée par l'anus de STEPHANE HESSEL (un « moteur à injonctions », selon le mot génial de PATRICK BESSON, dans Le Point) porte le titre hallucinant de : Vivez !), sont béats de vénération devant des machines humaines optimisées, applaudissent à tout rompre les mutations génétiques chaque fois que les mutants battent un record, et se peignent les moustaches en bleu-blanc-rouge. Tout cela est très seyant.
Conclusion : les Jeux Olympiques sont bien la fête par excellence de la fraternité humaine, n'en doutons plus. C'est prouvé par le carnet de chèque, le compte en banque et les contrats d'exclusivité. Sans compter les « à-côtés ». Comme quoi une entreprise privée peut apporter le bonheur à l’humanité entière. L'idéologie ultralibérale vous l’avait bien dit.
Le pire n’est pas toujours sûr, mais le COMITÉ INTERNATIONAL OLYMPIQUE est le sublime signe annonciateur du Progrès Humain : la GRANDE PRIVATISATION DE L’HUMANITÉ. Je traduis : faire enfin (après 200.000 ans d'homo sapiens gratuit) de l'entreprise humaine quelque chose de rentable. Jusque-là, homo sapiens sapiens travaillait à fonds perdus. Être homme, mes bien chers frères, deviendra PAYANT. On mettra des péages à la sortie de tous les utérus. Gare aux fraudeurs !
Déjà qu'à l'autre bout de la vie, les Grecs avaient Charon pour traverser le Styx vers le royaume des morts, contre monnaie. Chacun sera aussi désopilant que la Soeur Anne de GOTLIB (c'est dans le "Barbe-bleue" de La Rubrique-à-brac) : « Soeur Anne aux deux berges raque ». Je ne donne aucun indice.
C'est une condition de survie de l'humanité nantie. Car on a bien compris, dans l'affaire des Jeux Olympiques, qu'il y en a deux, d'humanités : les lites et l'émasse. Euh non, je me trompe : l'élite et les masses. Et attention, quand je parle de l'élite, c'est 200.000 personnes grand maximum dans le monde, qui sont capables de payer les armées chargées de les protéger. La vision olympique de l'humanité a quelque chose à voir avec une double perspective : BANCAIRE et MILITAIRE.
J'aime bien, chez RABELAIS, l'histoire suivante : un portefaix est assis dans la rue, mangeant son pain après l'avoir laissé s'imprégner des fumées qui sortent de chez le rôtisseur. Celui-ci s'avise de lui faire payer sa fumée. Une altercation s'ensuit. Joan le fou arrive, et accepte de rendre sa "justice" au moyen de la pièce d'or du portefaix.
Il fait sonner celle-ci et prononce sa sentence : « La Cour vous dit que le portefaix qui a mangé son pain à la fumée du rôti a payé le rôtisseur au son de son argent ». Ce fou est un nouveau Salomon. J'aimerais que l'humanité paie les Jeux Olympiques avec cette monnaie incroyable : AU SON DE SON ARGENT. Vous l'imaginez, une corruption accomplie au SON de l'argent ? Moi je suis pour ce bling-bling-là.
Le Comité Olympique, vous savez, cette ONG désintéressée et même philanthropique, remplie d'un idéal humain de toute pureté, est en réalité une société privée, une simple entreprise juridiquement assujettie aux règles du droit privé suisse. Je l’ai déjà dit, je me répète, mais c’est exprès. Car il faut que ça se sache.
Et ce n’est pas le solennel (mais pathétique) appel que PATRICK CLASTRES (chercheur rattaché au Centre d’histoire de Sciences-Po) adresse au CIO pour lui demander de modifier ses fondements mêmes qui va y changer quoi que ce soit. Il ne l’ignore sans doute pas, et ne se fait guère d’illusion sur la faculté du CIO de se réformer lui-même. Il fait ça « only for fun ». Ou alors pour justifier un budget alloué. Je ne sais pas. De toute façon, pour réformer le CIO, il faut commencer par le détruire. Avant sans doute de ne pas le reconstruire.
PATRICK CLASTRES critique le fonctionnement actuel du CIO. Entendons-nous bien : il n’accuse personne. C’est vrai qu’il a affaire à forte partie. Une partie qui peut le réduire en bouillie en moins de rien. Il aurait vite fait de se faire corriger le portrait. Et pas sur photoshop. Il la joue donc en douceur. Son angle d’attaque repose sur le souhaitable et le désirable. Sur le « il faudrait », c’est assez dire qu’il rêve tout éveillé.
Il s’efforce de ne pas piquer trop fort le monstre qui sommeille (c'est juste une image, pas une réalité). Mais enfin, il émaille son texte de mots qui finissent par dessiner un tableau assez nettement crasseux, pour ne pas dire puant, de l’univers olympique : « corruption, scandales des athlètes dopés, tricheries récurrentes, menacé de gangrène par les mafias, … ».
Ses propositions de réforme (vouées aux oubliettes) contiennent en creux des critiques féroces du fonctionnement actuel. Il faudrait changer le mode de recrutement (opaque ; je traduis : les membres actuels sont-ils corrompus ? notez que je garde la tournure interrogative), modifier la charte (sans dire sur quels points ; là, j'ai du mal à traduire), rendre les comptes financiers transparents (tiens, tiens !). En bref, il faudra changer la façade une fois qu'on aura fait disparaître l’intérieur.
Le CIO actuel ? Payez, et on vous déroule le tapis rouge. Tiens, qu’a payé l’Arabie Saoudite pour faire admettre la judokate en bonnet de bain islamique (qui vaut le burkini, ci-contre) ? Ce serait une information intéressante. Le CIO, cette machine à profits, est devenu sensible à un seul argument : avoir les moyens de toucher sa « sensibilité ».
Je vais vous dire ma conviction : si le Paris de BERTRAND DELANOË n’a pas eu les Jeux Olympiques 2012, c’est parce que DELANOË n’a pas assez arrosé. Et je le remercie pour cette raison même. Vous imaginez l’état de la France aujourd’hui, après trois semaines de cette chevauchée d’Attila ? De ce rouleau compresseur aveuglé et fanatisé par l’enthousiasme ?
LA PLUS BELLE AVENUE DU MONDE, VRAIMENT ?
Pourquoi croyez-vous que la France n’a pas vendu un Rafale depuis qu’elle a signé je ne sais plus quel protocole de moralisation du commerce mondial des armes, et surtout qu’elle le respecte ? Fini, les « commissions », les « rétrocommissions » et autres outils d’enrichissement personnel (lisez, pour en savoir plus, Armes de corruption massive, de JEAN GUISNEL (La Découverte, 2011), je vous assure que ça, c’est du journalisme d’excellence).
Soit dit en passant, JEAN GUISNEL révèle que l’Allemagne, la si vertueuse Allemagne, corrompt à tout va les individus capables d’influer sur les décisions des gouvernements acheteurs. Pour exporter, il faut arroser. Si la France veut les Jeux, il va falloir qu’elle accepte d’enchérir. Sur fonds secrets. Les Jeux Olympiques ? D’abord et avant tout, une affaire, de gros intérêts, de grosses affaires à faire. Avec risques et périls : voyez la Grèce et ses Jeux Olympiques, en 2004, et puis huit ans après.
En fait, et pour être franc, en plus et en dehors de l'horrible fable olympique, je n’aime AUCUN des bobards que les médias déversent à tombereaux ouverts dans nos yeux et nos oreilles, jour et nuit : si l’on fait un peu attention, on en arrive à comprendre comment fonctionne la nouvelle dichotomie « MYTHE / RÉALITÉ ».
Plus je regarde la réalité, plus je suis effrayé de ce qui attend l’humanité (je ne reprends pas l'énumération, je n'entonne pas la litanie des calamités observées et attendues). Plus je regarde la télé, plus je deviens optimiste (tout le monde rit, tout le monde est heureux, sauf aux informations, et encore ...). Vous ne trouvez pas ça bizarre ? Ah bon ? C’est donc ça qu’on appelle PROPAGANDE ? Bourrage de crâne ? Endoctrinement ? Eh bien dans quel état sont nos esprits, les amis ?
Conclusion : LA PESTE SOIT DES OPTIMISTES ! Il faudrait les amputer de la télé. C'est à bon droit qu'on pourrait alors les traiter de : « Amputé de ta mère ! ». Parce que les amputés aussi ont droit aux Jeux Olympiques !
Voilà ce que je dis, moi.
09:00 Publié dans UNE EPOQUE FORMIDABLE | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : stéphane hessel, indignez-vous, engagez-vous, vivez, patrick besson, le point, charles de gaulle, jamaïque, usain bolt, sprint, 4 x 100, record du monde, dopage, le nouvel observateur, américains, justin gatlin, performance, alberto contador, tour de france, vuelta, espagne, david rudisha, exploit sportif, jeux olympiques, cio, olympisme, humanité, société, culture, rabelais, ong, patrick clastres, sciences-po, bertrand delanoë, arabie saoudite, attila, jean guisnel, corruption, propagande, optimisme, gotlib, rubrique-à brac
dimanche, 19 août 2012
ON A ENFIN REFERME L'OLYMPISME
Question du jour : « Faut-il réagir contre la paresse des voies ferrées entre deux passages de trains ? ».
MARCEL DUCHAMP
Enfin, l’écume olympique est retombée. Enfin, vient de s’ouvrir une nouvelle olympiade. Olympiade veut dire : « Ouf, quatre ans sans Jeux Olympiques, c'est pas trop tôt, il était temps que ça s'arrête ». Oui, je sais de quoi je parle. Pour les mal informés et les ignorants, je signale que le mot olumpias (ỏλυμπιάς), en grec, désigne, en plus des nymphes du mont Olympe, séjour des dieux, la période de quatre ans qui sépare deux Jeux Olympiques, autrement dit pendant laquelle les cités grecques de l’antiquité pouvaient allègrement se faire la guerre.
Car c'était ça, le SENS des Jeux Olympiques : la trêve des armes. Clin d'oeil (façon de parler) à la Syrie, au Soudan, au Kivu, etc. « Olympiade » n’est donc pas du tout synonyme de « Jeux Olympiques ». Avis aux journalistes en général, et aux journalistes sportifs en particulier (les ânes que je préfère, à cause d'un braiement particulièrement distingué).
Alors, les Jeux Olympiques de Londres ? Furent-ils une grande réussite comme le claironne l’unanimité des organes de presse ? J’ai lu quelque part que Monsieur GORDON BROWN attend 16 milliards d’euros (ou de livres ?) de retombées financières dans les quatre ans qui viennent. C’est une bonne nouvelle, si ça se réalise, mais ce n’est pas encore fait.
En tout cas, ce qu’on sait, c’est ce que ça a coûté : au départ, la prévision était de 6 milliards, mais – et on a vu la même chose avec l’extravagante élucubration architecturale du Musée des Confluences, qui trônera bientôt tout en pointe de la presqu’île lyonnaise (voir ci-dessous) – on est arrivé à 12 milliards. Je n’ai aucune idée concrète de ce que ça fait, comme somme, 12 milliards. J’observe que les spécialistes chargés de creuser les déficits et les dettes doivent détester commettre des impairs, puisqu’ils sont des adeptes des nombres pairs (6, 12, 16). Au moins quelques-uns qui sont pour la parité, me dis-je dans mon for intérieur qui n'en pense pas moins.
LA FUTURE POINTE DE LA PRESQU'ÎLE LYONNAISE.
ÇA NE VOUS RAPPELLE PAS "RENCONTRES DU 3ème TYPE" ?
Tout ça a donc coûté très cher. Qu’est-ce qu’on ne ferait pas, n’est-ce pas, pour faire oublier aux masses humaines l’effondrement de la Grèce, l’ensanglantement de la Syrie, la flambée spéculative des denrées alimentaires et les prochaines émeutes de la faim qu’elle devrait provoquer dans le monde, comme en 2008, la corruption qui fait sans doute du Mexique (mais il y a de la concurrence) le premier Etat gouverné par la Mafia (même si la façade de l’immeuble donne les apparence du flambant neuf) et la montée de l’extrême-droite en Europe ?
Puisque l’Empire romain s’effondre, donnons aux masses humaines du pain et des jeux. Notons que, si les Jeux Olympiques ne se passent pas dans un Cirque, ça y ressemble diablement. Comme dit le capitaine Haddock aux Dupondt : « Le Cirque Hipparque n’a pas besoin de deux clowns. Vous ne pouvez donc faire l’affaire ». Ah ça, des clowns, il y en a eu, dans le bordel olympique. Mais c’est peut-être grâce au tartan orangé de la piste d’athlétisme.
Comme les vitesses mutantes (le dopage mutant dont parle ANTOINE VAYER) atteintes lors du Tour de France : c’est grâce aux nouveaux bitumes des routes, on vous dit. Le sport moderne a inventé le frottement qui accélère. Tous les physiciens vous le diront : la vitesse augmente en proportion de l'intensité du frottement !!!
LES CLOWNS DU CIRQUE HIPPARQUE
(MAIS C'EST LA FAUTE DES COMPRIMES N 14)
Car ils ont accompli des performances de clowns, à croire qu’ils se sont inspirés des coureurs du même Tour de France, véritable modèle en matière d’exploit ... disons « sportif ». Prenons le 4 x 100, par exemple. Priorité aux dames, n’est-ce pas. Elles sont américaines. Elles n’étaient pas au mieux de leur forme : « Personne dans l’équipe n’était fraîche. On a enchaîné les courses, mais on voulait ce record ». C’est ALLYSON FELIX qui parle, déjà médaille d’or sur 200 m.
Traduction ? On était crevées, alors on est allées plus vite. Quasiment du SARKOZY dans le texte : au départ, je fonce, et en vue de l'arrivée, j'accélère.
Résultat ? En plus de la médaille d’or, le record du monde (WR, sur la photo) pulvérisé de 55 centièmes de seconde. Oui madame. Un journaliste ose même parler de « chrono irréel ». Quelle audace dans le vocabulaire ! Un record qui tenait depuis 1985, rendez-vous compte ! Tout le monde le disait imbattable. Mais Sony en a rêvé, et elles l’ont fait ! Les anciennes recordwomen ? Des clowns d’Allemagne de l’Est. Les lanceuses de marteau, les sprinteuses, les nageuses étaient formatées comme KORNELIA ENDER (ci-dessous).
PREMIERE AU CONCOURS "MISS DEMENAGEURS BRETONS"
Oui, vous savez, ces femmes en forme de déménageurs bretons (un copain m'a soufflé « armoire normande », mais j'ai mon éthique, nom de diable) auxquelles il poussait de la moustache, des poils entre les seins et je ne sais quoi d’autre, à force de petites pilules roses ou bleues gentiment offertes par leurs « entraîneurs ».
Comment rester femme tout en allant à des vitesses stratosphériques ? Faites comme les quatre clowns Américaines de 1997, les seules depuis 1985 à approcher de juste quelques centièmes le record des déménageuses bretonnes d’Allemagne de l’Est. Les Américaines de 2012 ont enfin trouvé la recette du cocktail gagnant. Sans trop se bousculer le brushing.
Quand je pense que le record du monde de la perche, à 6,14 mètres, est détenu, depuis 1993 par l’inamovible SERGUEI BUBKA (l’homme qui se laissait pousser la mâchoire inférieure à coups d’hormones de croissance), et que RENAUD LAVILLENIE, médaillé d’or en 2012, franchit à peine 5,97. Dix-sept centimètres de moins. Quel minable, finalement.
Je n'évoque même pas (ceci est une prétérition) le saut en longueur du siècle de BOB BEAMON en 1968 (à 8,90 mètres !!! soit 55 cm de plus que l'ancien record, en une seule fois, que ça sortait du cadre mesurable prévu !!!), qui ne fut battu que 23 ans après (POWELL).
Que fait le Progrès Humain, pendant ce temps ? Il se prélasse sur une plage des îles Caïman, l’oreille collée à son smartphone, en train d’écouter l'effet des variations du cours du maïs à la bourse de Chicago sur les comptes secrets qu'il a dans le paradis fiscal. BUBKA aurait pu faire passer la recette, quand même, au lieu de la stocker dans un coffre-fort.
Ça ne vous a jamais intrigué, l’évolution morphologique des athlètes, au cours du temps ? Ne parlons pas de l’haltérophilie, archétype et parangon du sport anabolisé. Mais comparez le corps humain de MICHEL JAZY (1955 à 1965, à gauche) et le corps anabolisé de BEN JOHNSON (JO 1988, à droite). Comparez CHRISTINE CARON (années 1960, à gauche), l’est-allemande KORNELIA ENDER (1976, voir ci-dessus) et l'invraisemblable torse de Monsieur Muscle d'ALAIN BERNARD (à droite).
Comparez les VILLEPREUX, GACHASSIN ou CAMBERABERO du rugby à l’ancienne (je veux dire normaux) et les monstres du Gévaudan australiens ou néo-zélandais (JONAH LOMU, 1,96 m., 119 kilos) poussés à la créatinine qui règnent aujourd’hui. Ça ne vous saute pas aux yeux, cette évolution dans le GABARIT ? Moralité ? Ce n’est plus le sportif qui gagne, c’est l’industrie chimique, c’est tout. Alors franchement, les « valeurs de l’olympisme » ? Ne me faites pas rire, j’ai les lèvres gercées.
Voilà ce que je dis, moi.
A suivre.
09:00 Publié dans UNE EPOQUE FORMIDABLE | Lien permanent | Commentaires (3) | Tags : sport, jeux olympiques, marcel duchamp, athlétisme, athlètes, olympiade, londres, gordon brown, déficit, dette, grèce, syrie, mafia, mexique, extrême droite, tour de france, dopage, les dupondt, capitaine haddock, record du monde 4 x 100, stéroïdes anabolisants, serguei bubka, renaud lavillenie, michel jazy, ben johnson, alain bernard, journaliste sportif, antoine vayer
mardi, 17 juillet 2012
SUPERMASCULIN, VOUS DITES ?
Préambule d'actualité : je suis d'accord : BACHAR EL ASSAD est une épouvantable brute, un dictateur sanguinaire, et je vote à l'unanimité, comme tout le monde, pour ces gens qui sacrifient leur vie pour le déstabiliser et, si possible, le renverser. Ce qui m'embête un peu dans l'affaire, c'est toute la main d'oeuvre djihadiste et les petites mains d'Al Qaïda qui rappliquent en ce moment de partout et qui profitent de l'occasion pour faire le coup de feu, noyauter cette opposition et s'installer dans le paysage syrien. De véritables « brigades islamistes internationales » se sont mises en place. Quand on voit le sort réservé aux touaregs indépendantistes par les islamistes radicaux d'AQMI au Mali, qui les ont virés comme des malpropres, et manu militari, du fauteuil de chef, on ne peut que s'inquiéter de la couleur du prochain pouvoir qui s'exercera à Damas. Fin du préambule.
Résumé : ALFRED JARRY est un auteur maudit. Il a interposé entre lui et le monde la marionnette monstrueuse d’Ubu. Ce qui a mis définitivement à l’abri de l’attention générale une pléiade d’ouvrages qui méritent un détour, voire valent le voyage. Le pauvre, quand il se met à la littérature « alimentaire », cela donne Le Surmâle, qui est loin d’avoir tenu ses promesses, mais qui bénéficie encore d’efforts éditoriaux notables.
Dans le fond, l’homme « moderne » est une machine à ce qu’on voudra, ici André Marcueil, le « héros », est une machine à baiser. C’est publié en 1902, je le signale. C’est même un homme qui en remontre à la machine, puisque, au cours de l’invraisemblable « Course des 10.000 milles », l’homme ordinaire rattrape chaque jour, sur son vélo qui grince, le train lancé à toute allure, qui transporte sa « fiancée » Ellen Elson, pour déposer sur son wagon un bouquet de roses fraîchement coupées.
Car Ellen Elson, cette pure vierge (pas pour longtemps), qui dit à André Marcueil : « Je crois à L’indien », est à bord de ce train lancé à des vitesses « qu’on n’a jamais osé rêver », contre laquelle lutte la quintuplette emmenée par Bill Corporal Gilbey.
Un petit mot sur cette course : vous avez cinq bonshommes sur un vélo à cinq places et, en plein milieu de la course avec le train, Jewey Jacobs meurt, et le chef, pour ne pas perdre la course, décrète : « Ah ! il est mort ? Je m’en f…, dit Corporal Gilbey. Attention : ENTRAÎNEZ JACOBS ! ».
Les quatre autres forcent donc la rigidité cadavérique, et la suite : « En effet, non seulement il régularisa, mais il emballa, et le sprint de Jacobs mort fut un sprint dont n’ont point idée les vivants ». Et les quatre de s’exclamer : « Hip, hip, hip, hurrah pour Jewey Jacobs ». Un mort qui se met à pédaler plus vite que les vivants, et que ceux-ci ovationnent. Ce genre d’idée, il fallait oser, non ? La quintuplette fait même mine, à plusieurs reprises, à force de vitesse, de se prendre pour un aéroplane, mais ce n’est que du « vol de vautour ».
N’attendez, dans le livre, aucune description graveleuse. Ce n’est pas, à cet égard un de ces « livres qu’on ne lit que d’une main ». Exceptons cependant quelques – oh ! très modestes – allusions lorsque les prostituées invitées pour subir la performance seront enfermées à clefs dans un local où, s’ennuyant ferme, elles trouveront quelques moyens de se … désennuyer entre elles.
C’est Ellen Elson, fille unique et préférée du célèbre chimiste américain William Elson, père de la mythique Perpetual Motion Food : l’aliment du mouvement perpétuel, en français : la potion magique, – c’est Ellen Elson, disais-je, qui a enfermé les hétaïres, car cette très jeune femme n’a froid nulle part, encore moins là où vous pensez, bande d’obsédés, et elle veut subir à elle toute seule les assauts de « l’Indien tant célébré par Théophraste ».
Le professeur Bathybius est témoin de la scène et, au bout des vingt-quatre heures imparties, cet observateur objectif, rigoureux et parfaitement scientifique, peut inscrire le chiffre faramineux de quatre-vingt-deux "actes" (82) dans les 24 haures imparties : le public n’en revient pas : « La dépopulation n’est plus qu’un mot ! », dit un sénateur idiot, qui ne se rend pas compte que le nombre des naissances dans une population ne dépend pas du nombre d'hommes mais de femmes.
En tout cas, quatre-vingt-deux « assauts », voilà qui pulvérise la vantardise d’un grand séducteur, dragueur et baiseur devant l’Eternel, j’ai nommé VICTOR HUGO. Il dira, longtemps après la nuit de noces qui suivit son mariage avec ADÈLE FOUCHER, qu’il l’a honorée quatorze fois. Elle s’était trouvée déjà comblée des huit « postes courues » par VICTOR lors de cette nuit, et s’en était trouvée longtemps tout éblouie.
Pour revenir à ALFRED JARRY, l’apothéose finale, je devrais dire la « Passion » d’André Marcueil, se déroule de la façon suivante : l’ingénieur Arthur Gough fabrique la « Machine-à-inspirer-l’amour ». « Si André Marcueil était une machine ou un organisme de fer se jouant des machines, eh bien, la coalition de l’ingénieur, du chimiste et du docteur opposerait machine à machine, pour la plus grande sauvegarde de la science, de la médecine et de l’humanité bourgeoises. Si cet homme devenait une mécanique, il fallait bien, par un retour nécessaire à l’équilibre du monde, qu’une autre mécanique fabriquât … de l’âme. » La préoccupation de JARRY, on le voit, est physicienne : équilibrer les forces. Pour lui, la vie est une équation à résoudre par la déduction logique.
André Marcueil est donc ficelé sur un fauteuil, revêtu de diverses électrodes, finissant par ressembler à je ne sais quel Christ. Mais, au grand dam des trois savants qui suivent les événements, « c’est la machine qui devint amoureuse de l’homme », car c’est la machine dont le potentiel est le plus élevé qui charge l’autre. Elémentaire, mon cher Watson !
Dans une explosion de métal chauffé à blanc, de verre fondu et de débauche électrique, le surmâle finit donc par mourir. Ellen Elson saura dès lors de contenter d’un mari aux performances ordinaires.
Il n'empêche que ce roman d'anticipation anticipe vraiment, d'une façon terrible et authentique, le monde actuel, où une économie tyrannique et totalitaire, appuyée sur l'hégémonie d'une technique triomphante, exige de chaque individu des performances de surhomme. Tout en condamnant de la bouche le dopage. Qui est inscrit dans le code génétique de la vie quotidienne de monsieur et madame tout le monde.
Et le public du roman, en extase devant les performances d'André Marcueil, ne fait-il pas penser aux milliards de gogos (pardon, de consommateurs) qui se gavent, émerveillés ou ennuyés, d'un tas de réalités virtuelles devant leur écran ? L’écran est le point d’aboutissement du programme actuel de l’existence humaine, n’est-il pas vrai ? L'un des livres les plus vendus dans le monde n'est-il pas le "Guinness" des records ? Et ça ne vous fait pas peur, à vous ?
Voilà ce que je dis, moi.
09:00 Publié dans LITTERATURE | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : alfred jarry, littérature, le surmâle, pataphysique, ubu, science fiction, performance, dopage, course cycliste, sexe, acte sexuel, victor hugo, guinness des records
mardi, 26 juin 2012
BICYCLETTE, DOPAGE ET LITTERATURE
Résumé : ce n’est pas la peine de chercher l’exception : dans le peloton du Tour de France, celui qui ne se dope pas, c’est l’aiguille (si j’ose dire !) dans la botte de foin : on ne peut pas le trouver.
Le cyclisme (professionnel, mais aussi amateur, et très tôt) est donc le monde de la triche organisée et systématique, où les sportifs, s’ils veulent « percer », sont obligés de se procurer hors de leur organisme des « ressources » impossibles à trouver au-dedans. JACQUES ANQUETIL ne disait pas autre chose : « Il faut être un imbécile ou un faux jeton pour s’imaginer qu’on peut courir 265 jours par an sans stimulants ». Il comparait lui-même ses cuisses et ses fesses à « des écumoires ».
Je signale que LANCE ARMSTRONG, avec ses sept victoires dans le Tour de France, risque dans peu de temps de s’en voir privé, si les poursuites engagées par les instances sportives américaines aboutissent (le coureur est un gros lobby à lui tout seul).
Il semble qu’elles aient assez de « biscuits » pour conclure, si j’en crois L’Equipe (eh oui, ça m’arrive aussi !), qui sous-titrait récemment un article : « L’Agence américaine antidopage détient les preuves absolues que Lance Armstrong fut un terrifiant tricheur ». Pourquoi « terrifiant » ? Parce tout le milieu a été lâche et complice, et qu’il a si longtemps fermé les yeux ?
Le déjà nommé ANTOINE VAYER s’étonnait (?), en 1998, que l’équipe Festina au grand complet arrivât groupée, quasiment « en ligne », et « bouche fermée » au sommet de je ne sais plus quel col impossible. Il dit d’ailleurs de ce genre de coureurs : « Plus ils roulent, plus ils récupèrent ».
C’était le rêve d’André Marcueil, le personnage créé par ALFRED JARRY pour Le Surmâle, où cinq cyclistes, sur une quintuplette, font la course (de 10.000 milles) avec une locomotive, aidés par la « perpuetual motion food » (l'aliment du mouvement perpétuel) du bon Dr Elson. ALFRED JARRY fut un précurseur en matière de dopage. Il faudra que j’en parle un de ces quatre.
Il faut savoir que le taux d’hématocrite dans le sang (proportion des globules rouges) diminue dans les efforts longs et intenses, ce qui rend un sportif impropre à toute performance s’il ne se repose pas pour le reconstituer (eh oui, j’ai essayé de me documenter, mais je ne vais pas vous bassiner avec les données).
Au cours de toutes les affaires de dopage qui jalonnent la compétition cycliste depuis bientôt quinze ans, j’ai vu passer de temps en temps un article de PAUL FOURNEL, qui regrettait profondément les saloperies qu’on faisait au cyclisme et qui ternissaient son image, mais qui n’a jamais, pour son compte, renoncé à l’amour du vélo. Et on le comprend bien volontiers. Mais son bouquin Les Athlètes dans leur tête date (1988) d'avant l'arrivée de l'EPO, qui donne au pire canasson des ailes de crack.
Il fait dire à son ANQUETIL (des propos rapportés comme répétés à ses plus proches), dans son dernier livre : « Je crois bien que je n’aime pas, que je n’ai jamais aimé, que je n’aimerai jamais le vélo ». Dans la nouvelle qu’il lui consacre, il fait dire à son narrateur, parlant du vrai crack : « … un trait de caractère que je n’ai jamais eu et que je n’aurai jamais : un certain dégoût pour la bicyclette et une tendance à la laisser au garage plutôt que de s’entraîner ». Mais ce qui est sûr, c’est que FOURNEL, qui aime le vélo, est carrément baba devant le champion qui porte le nom de JACQUES ANQUETIL.
C’est qu’avec FOURNEL, on a vraiment l’impression d’être dans le bonhomme qui agite les jambes sur sa bicyclette, d’être au fin milieu du peloton, avec les amabilités diverses qui se déversent pendant une course : on ne voit pas pourquoi les mecs seraient muets, mais le spectateur se demande toujours : « Qu’est-ce qu’ils peuvent bien se dire ? ».
Dans Les Athlètes dans leur tête, je passe sur « La Course en tête », où le Portugais dont il est question fait le vide autour de lui, à cause d’une trajectoire erratique, et dangereuse pour ses voisins, surtout dans les sprints finaux. Une nouvelle qui commence par : « Il en va souvent ainsi des cyclistes : les plus malicieux manquent de cuisses et les plus cuissus manquent de malice. Ce Portugais était très cuissu ». A cause de l’ellipse, on dirait du VIALATTE.
La nouvelle finit par : « … il avait eu la sensation fugitive que le Portugais n’était pas vraiment mécontent de voir arriver cette bordure de trottoir en plein dans sa figure, à la vitesse d’une dernière gifle de béton ». Là, je ne peux pas dire qu’on dirait du VIALATTE, mais je me demande si VIALATTE n’aurait pas aimé écrire une phrase comme ça.
J’aime bien la nouvelle « Gregario » (le troupeau de l’équipe, au service exclusif de la vedette). A cause de quelques phrases, peut-être. Le gregario parle d’Yvon, le sprinter : « C’est lui qui fait rentrer l’argent dans l’équipe, c’est lui qui lève les bras sur la ligne pour qu’on puisse lire « Salami-Store » sur son maillot, à la télé, dans les journaux. Dans notre équipe, on roule pour du saucisson ». Il n’y a pas à dire : PAUL FOURNEL prend le monde tel qu’il est. Il n’en cache rien, il ne se fait aucune illusion, mais il « y va », comme on dit. C’est un choix. Ce n’est pas le mien, mais là, je respecte, parce qu’il sait écrire.
Je passe très rapidement sur « Méticuleux », canular montrant le gars qui se la joue, mais qui n’a plus envie que d’une chose : se taper la cloche dans une bonne auberge, après avoir fait semblant de partir pour l’Izoard. Je passe aussi sur « La forme », qui raconte la bonne journée (il arrive 30ème de l’étape) d’un basique qui s’étonne d’être encore dans la course. Aujourd’hui, « il était monté comme dans une chanson (…). Le revêtement rendait bien, les boyaux sifflaient juste, il passait en danseuse sans à-coups… ».
PAUL FOURNEL, on ne dira pas le contraire, aime et connaît le vélo.
Voilà ce que je dis, moi.
Le meilleur reste à venir.
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lundi, 25 juin 2012
JACQUES ANQUETIL ET LE DOPAGE
Voilà, PAUL FOURNEL a enfin concrétisé un vieux rêve : consacrer tout un livre à une des idoles de son âge enfantin, qui s’appelle JACQUES ANQUETIL. Le livre s’appelle Anquetil tout seul (Seuil, 16 €). Ce n’est pas un gros livre : 150 pages. Je ne l’ai pas encore lu. Je ne sais d’ailleurs pas si je le lirai, parce que, franchement, ANQUETIL, hein …
Pourquoi je dis que c’est un « vieux rêve » ? Parce que le bouquin sur le cycliste me fait irrésistiblement repenser à un autre livre du même PAUL FOURNEL : Les Athlètes dans leur tête, paru en 1988. C’est un recueil de nouvelles. L’ensemble est absolument délicieux. Vingt-deux histoires très courtes qui racontent toutes un moment particulier, peut-être décisif, dans la vie d’un sportif de haut niveau, cycliste, perchiste, haltérophile, skieur, enfin toute la panoplie.
On m’apprendrait que PAUL FOURNEL a une préférence marquée pour le vélo qu’on ne m’étonnerait pas : pas moins de six récits le mettent en scène. Des miettes pour les autres sports, mais des miettes à grignoter sans hésiter.
Car ce qui est bien, dans les sports racontés par l’auteur, c’est la manière, l’attitude, le style, si on veut : à la fois amusée, un peu distante et en même temps pleine d’affection (ne parlons pas d’amour) pour les activités sportives et pour ceux qui les pratiquent : « … car le sport était une des plus belles choses que l’homme ait inventée pour toucher les hommes ». Si ça, ce n’est pas une déclaration d’amour, moi je suis un Nambikwara converti au bouddhisme option mahayana.
Moi, le vélo, je n’ai rien contre, à condition de ne pas abuser. Depuis le scandale de 1998 sur le Tour de France (d’où vient le célèbre « à l’insu de mon plein gré » du regretté RICHARD VIRENQUE : est-ce de lui ou des Guignols de l’info ?), je lis dans les journaux les chroniques d’ANTOINE VAYER, un spécialiste qui prouve le dopage par la puissance mécanique développée (calculée en watts).
FREDERIC PORTOLEAU, son confrère, définit ainsi la puissance : « La notion de puissance est assez simple à comprendre. Pour un système mécanique en rotation comme un pédalier, la puissance est égale au produit du couple moteur, lié à la force appliquée sur les pédales, par la fréquence de rotation (vitesse). Un coureur en très grande forme qui dispose d’un fort potentiel physique va mettre un grand braquet et tourner vite les jambes: sa puissance sera élevée.»
ANTOINE VAYER donne les précisions suivantes : « Comment procède-t-on ? Comme vous, devant votre télévision : on enclenche le chronomètre au point de départ précis référencé pour les principales difficultés du Tour 2009 et on l’arrête au sommet. Nos mesures tiennent compte de paramètres abscons mais tout à fait scientifiques comme, entre autres, la surface frontale, le coefficient de roulement, le pourcentage de la pente, la densité moyenne de l’air ».
PORTOLEAU et VAYER, eux, ils se fichent donc pas mal de l’analyse d’urine, de la prise de sang et de tous les efforts dépensés (c’est le mot !) pour y trouver les traces de substances prohibées par la noble « charte déontologique » du sport : ils analysent les performances du coureur. Ils collectent toutes les données chiffrées possibles, enfin tout ce qui peut se chiffrer par l’observation des faits.
C’est quand la course est terminée que le travail commence : on applique alors sur toutes les données collectées une grille qui permet de déterminer la puissance développée par le coureur au cours de l’étape. PORTOLEAU et VAYER arrivent à la conclusion que le maximum auquel puisse arriver un athlète normalement constitué est une puissance développée de 410 watts, sachant que le coureur du dimanche correctement entraîné est capable de développer entre 200 et 250. A partir de 410, il y a objectivement dopage.
Pour le Tour 2011, voici ce que dit ANTOINE VAYER : « C’est 23 coureurs à 31 km/h de moyenne dans la pente finale de Super-Besse à 5,75 % de dénivelée, derrière Rui Costa, le vainqueur qui revient d’une suspension pour usage de Méthylhexanamine. C’est une foultitude d’Eddy Merckx côté potentiel athlétique qui mène la bande 2011 à 41,32 km/h de moyenne horaire après neuf étapes (quel cru !). ».
Dimanche 19 juillet 2009, lors de l'ascension vers Verbier, ALBERTO CONTADOR a établi un record de vitesse : il a parcouru les 8,5 km de montée (7,5 % de pente moyenne) en 20 min 55. Jamais un coureur du Tour n'avait grimpé aussi vite. Selon ANTOINE VAYER, dans Libération, le coureur espagnol aurait eu besoin d'une VO2 max (consommation maximale d'oxygène) de 99,5ml/mn/kg pour produire cet effort. C’est rigoureusement impossible pour quelqu’un qui a un peu étudié la physiologie humaine. Et ça fait une puissance développée de 506 watts !!!
Et il fait semblant de s’étonner que, dans le col de la Croix, ce ne soient pas moins de 80 coureurs qui grimpent à 393 watts ! HORNER, à Mûr-de-Bretagne, développe « 453 watts pendant 4’16’’ dans la côte finale », c’est-à-dire un VO2 max de 87,5. Mais HORNER « s’est cassé le nez derrière huit coureurs "anaérobies" plus puissants à 515 watts » (cinq cent quinze ! à comparer aux 150 de monsieur tout le monde) ; « ils auraient au-delà de 95 » de VO2 max.
Le vélo est une chose merveilleuse, à condition d'en sortir.
Voilà ce que je dis, moi.
Promis, demain, je reviens à la littérature, à ANQUETIL, à PAUL FOURNEL.
09:00 Publié dans LITTERATURE | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : littérature, paul fournel, jacques anquetil, anquetil tout seul, éditions du seuil, les athlètes dans leur tête, éditions ramsay, sport, cyclisme, dopage, richard virenque, à l'insu de mon plein gré, antoine vayer, le monde, libération, tour de france, alberto contador
dimanche, 31 juillet 2011
DE LA PROPRETE DANS LE TOUR DE FRANCE (2)
Le récit que fait WILLY VOET de son passage de la frontière belge en 1998 est réjouissant : les douaniers le font déshabiller, et il a beau finir par planquer dans son slip son flacon de « pot belge » (un gentil cocktail : amphétamines, cocaïne, caféine, antalgiques, héroïne, morphine), le pot aux roses est découvert. Ainsi commence l’affaire Festina, avec la désormais immortelle phrase de RICHARD VIRENQUE, qui s’était retrouvé dopé « à l’insu de son plein gré ».
Et voilà tous les responsables, y compris politiques, mués en chevaliers blancs. Cela devient le refrain à la mode : il faut en finir. L’U. C. I. le jure la main sur le cœur. Madame BUFFET, ministre, met en place l’A. F. L. D. Ça va saigner chez les tricheurs. Vous allez voir ce que vous allez voir. Et c’est vrai que c’est dans le cyclisme que les contrôles sont les plus nombreux, mais curieusement, les cas de dopage avéré sont extrêmement rares. Vous avez dit bizarre ?
En face de l’OMERTA qui règne chez tous ceux qui se nourrissent du Tour et leurs dénégations outragées, quand ce n’est pas l’enthousiasme lyrique qui leur fait déclarer qu’aujourd’hui le cyclisme n’a jamais été aussi « propre », il reste pas mal de sceptiques, mais on n’a aucune preuve. Et ça c’est bien embêtant, l’absence de preuve.
Eh bien si ! Des preuves, il y en a ! Et scientifiques, s’il vous plaît ! Et cela fait des années qu’un monsieur les administre, patiemment, avec ténacité. Ce monsieur s’appelle ANTOINE VAYER. Alors attention, je n’y connais rien en physique (ni en mathématiques, qu’on se rassure), et je suis incapable de reproduire ici les formules et les calculs qu’ANTOINE VAYER a mis au point. Mais c’est absolument imparable.
En gros, ce professeur d’E. P. S. et ancien entraîneur de l’équipe Festina se fiche complètement des analyses d’urine ou de sang, parce que, dit-il, les coureurs savent parfaitement contourner les contrôles. Comment fait-il, alors ? Eh bien il mesure en watts la puissance développée par un coureur par rapport à son poids et à sa vitesse (et plusieurs autres données). Il calcule par exemple sa capacité respiratoire (alias VO2 max, en millilitres d’air par minute et par kilo ; le chiffre qui commence à prouver le dopage se situe à 85 de VO2 max).
Dès lors, pour savoir si le cycliste est ou non dopé, il suffit de comparer sa performance avec la grille établie par ANTOINE VAYER. A partir de 410 watts, c’est le dopage avéré. A 430, c’est le dopage « miracle ». A 450, c’est le dopage « mutant ». C’est bien, les chiffres : c’est neutre. Et tout ça découle d’un calcul. Ici, personne ne peut être accusé de vouloir la fin du Tour.
Qu’est-ce qu’il dit, ANTOINE VAYER ? HORNER, à Mûr-de-Bretagne, développe « 453 watts pendant 4’16’’ dans la côte finale », c’est-à-dire un VO2 max de 87,5. Mais HORNER « s’est cassé le nez derrière huit coureurs "anaérobies" plus puissants à 515 watts » (cinq cent quinze !) ; « ils auraient au-delà de 95 » de VO2 max. Il voit 80 coureurs qui montent allègrement le col de la Croix à 393 watts, et il s’étonne. Il juge que « JEAN-CHRISTOPHE PERAUD, 27ème au classement général le 11 juillet, est peut-être le "vrai" maillot jaune », derrière 26 tricheurs.
« C’est 23 coureurs à 31 km/h de moyenne dans la pente finale de Super-Besse à 5,75 % de dénivelée, derrière Rui Costa, le vainqueur qui revient d’une suspension pour usage de Méthylhexanamine. C’est une foultitude d’Eddy Merckx côté potentiel athlétique qui mène la bande 2011 à 41,32 km/h de moyenne horaire après neuf étapes (quel cru !). ».
Tout ça, c’est mieux que les grandes déclarations, d’où qu’elles viennent, n’est-ce pas ? Dans le milieu, peu nombreux sont ceux qui apprécient ANTOINE VAYER. La preuve, c’est qu’on le trouve sur internet, et pas forcément pour son bien.
09:10 Publié dans DANS LES JOURNAUX | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : willy voet, cyclisme, tour de france, dopage, pot belge, uci, richard virenque, antoine vayer, lutte antidopage
samedi, 30 juillet 2011
DE LA PROPRETE DANS LE TOUR DE FRANCE
Le Tour de France est enfin fini. Ils ont fini par visiter « la plus belle avenue du monde », qu’on se le dise.
C’est génial, le Tour de France : c’est une vraie légende, c’est entendu. Depuis 1903 exactement. Au passage, je signale que, si une étape de 250 km est considérée aujourd’hui comme quasiment inhumaine, les cyclistes de 1903 étaient des surhommes. Pensez : seulement six étapes, dont la première, Montgeron – Lyon, fait 471 km. Et les vélos n’étaient pas les mêmes : plus de onze kilos (aujourd’hui, moins de sept).
Alors la légende, il y a ceux qui la font vivre, qui la propagent et la perpétuent. Ceux-ci se divisent deux groupes : les gros lards qui mangent leur casse-croûte sur le bord de la route, autrement dit les spectateurs, on pourrait aussi bien dire les « croyants » : ils vont comme à la messe. Les autres, ce sont tous ceux qui ont intérêt à ce que la légende perdure et se renforce : organisateurs, journalistes sportifs, cyclistes. Car plus elle perdure, plus ça leur rapporte.
Et puis il y a ceux qui ne peuvent pas supporter la farce de cet héroïsme en mie de pain, et qui se postent dans la côte du col des Montets pour que les coureurs aient bien le temps d’entendre les injures qu’ils leur décochent, au risque de prendre des coups de la part des fanatiques rangés le long de la route. C’est évidemment au dopage que je pense.
Alors, dopés ou pas dopés, les coureurs ? La réponse est claire : dopés, mon général ! Et CABU a raison de les dessiner avec plusieurs seringues plantées dans le dos. Et cela dès les débuts de la compétition. Les frères PELISSIER donnent la recette du « pot belge » au journaliste ALBERT LONDRES dès les années 1920. Son livre Les Forçats de la route paraît en 1924. Il paraît même qu’on utilisait un mélange à base de café et de strychnine (poison de formule C21 H22 N2 O2, stimulant à très faible dose).
Et pendant un demi-siècle, il valait mieux ne pas crier trop fort que le dopage était une honte : une nette majorité de gens était favorable à l’usage de substances capables d’ « aider » le sportif. DE GAULLE lui-même s’en fichait éperdument. La seule chose qui comptait pour lui, c’était la Marseillaise à l’arrivée. JACQUES ANQUETIL disait : « Laissez-moi tranquille. Tout le monde se dope. Pour savoir si je me dope, il suffit de regarder mes fesses et mes cuisses : de véritables écumoires. ». C’est à se demander pourquoi, aujourd’hui, le dopage est devenu un scandale inadmissible. Et punissable.
Allez, je m’offre une petite parenthèse sur JACQUES ANQUETIL, le crack des cracks. « Le crack », c’est le titre d’une délicieuse petite nouvelle qu’on trouve dans Les Athlètes dans leur tête, de PAUL FOURNEL (éditions Ramsay, 1988). L’action se passe à Yssingeaux. On est dans les critériums d’après Tour, « ces épuisantes et lucratives balades ».
Mais quelque chose cloche. « Il était livide, les yeux bordés de noir, les lèvres blanches. » L’équipier est aussi catastrophé que les organisateurs : « le grand Jacques », dans cet état pitoyable ! Lamentable ! Il est convenu que Jacques abandonnera discrètement, conduit par lui jusqu’à son hôtel. Il n’a jamais tant transpiré. Il vacille sur son vélo. Les gars du peloton viennent à tour de rôle contempler l’épave.
Mais à 500 mètres du but fixé, « je sentis son souffle et il vint se placer à ma hauteur. Je n’oublierai jamais le regard qu’il me lança : un regard glacé, tranchant, plein. Et il me posa cette question ahurissante : T’as pas deux sucres ? ». « Bien entendu, je ne le revis qu’après l’arrivée. Il gagna le critérium après avoir offert un festival au peloton médusé. Il volait. » La conclusion n’est pas triste : « Tout le monde apprit ce jour-là que le vrai crack, c’est celui qui est capable de cuver en pédalant une cuite à coucher un bataillon. Je m’en doutais déjà. ». PAUL FOURNEL est fondu de vélo. Je ferme la parenthèse.
Suite et fin au prochain numéro.
09:05 Publié dans DANS LES JOURNAUX | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : tour de france, cyclisme, dopage, festina, littérature, société, antoine vayer, pot belge, albert londres, forçats de la route, jacques anquetil, paul fournel