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mardi, 14 juillet 2015

LES PARAMÈTRES D’ANTOINE VAYER

Je ne sais plus à quand remonte la première intervention d’Antoine Vayer dans les journaux. Antoine Vayer était entraîneur d’une équipe cycliste qui a beaucoup fait parler d’elle en 1998 : Festina, et en particulier Richard Virenque, célèbre pour avoir légué aux Guignols de l’info une expression passée dans le langage courant : « A l’insu de mon plein gré ». Autant dire qu’Antoine Vayer s’y connaît en performances cyclistes. Et en moyens de les améliorer. Mais pas à tout prix. Je ne sais plus quel col l'équipe Festina avait franchi presque au complet, en tête et bouche fermée. Oui, je suis d'accord : ça peut étonner.

Vayer travaille depuis nombre d’années dans un laboratoire dédié précisément à l’étude des performances des sportifs, en particulier des cyclistes, comme de juste. Son truc à lui, ce n’est pas de jouer au chat et à la souris avec les tricheurs, de jouer les chimistes ou les biologistes des agences antidopages qui font la course avec les docteurs Ferrari (l’ami de Lance Armstrong) ou les Manolo Saiz, les bien connus améliorateurs de résultats (Marco Pantani, Miguel Indurain, Alberto Contador). Etant entendu que les truqueurs ont toujours un coup d’avance sur les chevaliers blancs. 

Non, le truc d’Antoine Vayer, c’est l’application des sciences physiques aux performances humaines. Autant dire que l’Union Cycliste Internationale n’est pas près d’adopter cette grille de lecture, trop simple et trop objectivement observable pour être contournée. Quand on veut pouvoir cuisiner sans être dérangé par des intrus, rien de mieux qu’un peloton de biochimistes embringués dans toutes sortes de règlements procéduriers et légalistes qui n’aboutissent que rarement et difficilement. La méthode d’Antoine Vayer est imparable. Lumineuse.

Il s'est contenté de calculer la poussée maximale possible d’un humain, compte tenu d’un certain nombre de facteurs (poids, capacités pulmonaires (VO²max), …), tout cela rapporté au pourcentage de la pente escaladée (car c’est dans les montées que la preuve devient aveuglante). Il part du principe que le surhomme n’existe pas encore. 

Son unité de base est le watt-étalon. D’après ses calculs, on est obligé d'avoir des doutes sur l’honnêteté de tout coureur capable de développer 410 watts et au-dessus. Mais il cite un exemple de tricheur à la testostérone à 395. Je crois me souvenir, dans ses propos, que la base d’un bon cyclotouriste se situe autour de 250 (sans garantie). 

La grille mise au point par Antoine Vayer projette une lumière crue sur le gouffre qui sépare sa méthode de celle de l’Agence Mondiale Antidopage (et jette donc un doute sur la volonté d'éradiquer la triche). Celle-ci, sur 250.000 contrôles qu’elle effectue dans l’année, détecte à peine 2 % de cas positifs.

Vayer, lui, parvient à « flasher » entre 50 et 100 % des coureurs en « excès de moyens », suivant la catégorie à laquelle on peut les rattacher : on est « mutant » à 450 watts-étalons (Pantani, Bjarne Riis, Indurain), « miraculeux » à 430 (Armstrong, Contador, Ullrich, Leblanc, Rominger, Virenque, .......) et « suspect » à 410 (Ugrumov, Mayo, Rasmussen, Julich, Boogerd, ....). La pauvre AMA a laissé filer des "miraculeux" (Luttenberger, Escartin,) et des "suspects" (Nibali, Tour 2014, et Wiggins, Tour 2012).

Dans son article du Monde daté du 9 juillet, Antoine Vayer ne lésine donc pas : il cafte : « Les plus malins comme Jalabert continuent d'asséner leurs vérités à la télévision ». Ainsi, Andy Schleck (2ème du Tour 2009) a été « flashé » à 434 watts « sur Arcalis, Verbier, Petit-Saint-Bernard, Colombière, Ventoux ». Il cite donc quelques-uns des quarante-huit noms des coureurs « inhumains » qu’il a pris en flagrant délit (en vingt ans) d’ « excès de moyens » (je suis assez content de ma petite formule). Bon prince, il ne s’attarde pas trop sur ce qui se passe en dessous de 410 (sous-entendu : il faudrait peut-être). 

Allez, une dernière pour la route (Vayer conclut ainsi son article) : « … Froome possède également la puissance, inversement proportionnelle à la maigreur de ses jambes : en 2013, sur le mont Ventoux, nous l’avons flashé passant de 19 km/h à 31 km/h en cinq secondes, en développant une puissance instantanée de 1028 watts. Le dernier de la liste : Quintana. Epargnons-le pour l’instant, il va l’emporter cette année ». Sur ce dernier point, nous verrons bien. Mais franchement, 1028 watts ! ... A-t-on idée ?

Plutôt qu’ « inhumain », il faudrait dire « surhumain ». Antoine Vayer a peut-être tort : le cyclisme biomédical a déjà inventé le surhomme. Et ce n'est pas fini : à l'étape suivante, je vous présenterai le "transhomme", que des bidouilleurs de cyborgs de la « si l'icône valait » (chili con valley) sont en train de concocter pour un avenir pas si futur que ça.

Voilà ce que je dis, moi.

lundi, 20 août 2012

REFERMONS L'OLYMPISME A JAMAIS !

Pensée du jour : « Il y a deux sortes d'hommes : ceux qui pensent qu'il y a deux sortes d'hommes, ... et les autres ». CHARLES DE GAULLE

 

 

 

Nous en étions restés à la performance hallucinée du relais 4 x 100 féminin, gagné par l’équipe américaine, et au triomphe de l'industrie chimique dans le sport.

 

 

Et les quatre clowns Jamaïcains du 4 x 100 messieurs ? BOLT, BLAKE, CARTER et FRATER, ils s’appellent. Record du monde pulvérisé, là encore. Enfin, de seulement 16 centièmes, mais quand même. Bon, c’est vrai que YOHAN BLAKE a été contrôlé positif en 2009. Mais là, trois médailles pour lui, pas une de moins. Et, certes, avec les pieds, mais sans les mains, admirez le travail de bipède ! Chapeau l’artiste ! C'est bien le moins, pour un qui a sûrement renoncé à se doper. Sûrement. 

 

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De toute façon, soit dit par parenthèse, à propos d'USAIN BOLT, j'aimerais qu'on m'explique à quoi ça sert de courir à plus de 36 kilomètres à l'heure si c'est pour s'écrouler au bout de 100 mètres. Qu'est-ce qu'il apporte à l'humanité ? Plutôt qu'aux sprinteurs, bourrés de muscles aptes à exploser, intéressons-nous aux athlètes du demi-fond et du fond, bien plus utiles, parce que plus près d'une physiologie normale (je ne parle pas de leurs performances). Passons.

 

 

L’ancien champion CARL LEWIS, lui-même asticoté naguère par les autorités antidopage, émet quelques points d’interrogation à propos d’USAIN BOLT. Pudiquement, Le Nouvel Observateur (le site) pose la question : « Faut-il douter des performances de BOLT ? ». C'est retors, pour le moins. D'une pierre deux coups : on répond subtilement à la question qu’on fait semblant de poser. Tout en évitant un procès en diffamation.

 

 

Derrière les Jamaïcains, qui trouve-t-on ? Les Américains. Tiens donc. Avec 37,04 secondes, ils égalent l’ancien record du monde. Quoi de plus normal, après tout ? L’ancien est fait pour être dépassé par le nouveau. C’est même inscrit dans la définition des mots. Parmi les Américains, un certain JUSTIN GATLIN. Un jeune homme de 30 ans.

 

 

Quoi, il a purgé quatre ans de suspension pour dopage ? Il a purgé sa peine, oui ou non ? Tout homme a droit au rachat, tout de même ! Quoi, 30 ans, c’est l’âge où les performances diminuent ? Mais c’est qu’il a su se maintenir au  top de la condition, voilà tout ! Regardez ALBERTO CONTADOR. Eh bien il les a faits, ses deux ans de suspension pour taux excessif de clenbutérol dans le sang. Qui oserait douter de la pureté de son retour dans la Vuelta (tour d'Espagne) ? Mais le public, lui, est un juge indulgent, tant qu'on n'a pas égorgé ou violé une enfant (cela veut dire : on a des valeurs, NOUS !) : il a déjà oublié, puisqu'il applaudit.

 

 

Pendant ce temps, les nageurs olympiques ont battu neuf records du monde. Pendant ce temps, DAVID RUDISHA, Kenyan de métier, se contente quant à lui de transformer le 800 m. en sprint : il bat son propre record du monde. Pendant ce temps, les foules énamourées se prosternent devant la divinité nommée « EXPLOIT SPORTIF». Je n'en reviens pas.

 

 

Les milliards de pions humains, vous savez, ces petites machines aux performances productives sinon  douteuses, du moins ordinaires, endoctrinés à coups de slogans du genre : « Indignez-vous ! », « Engagez-vous ! », « Surpassez-vous ! » (le dernier prout éditorial, la dernière bouse de vache éructée par l'anus de STEPHANE HESSEL (un « moteur à injonctions », selon le mot génial de PATRICK BESSON, dans Le Point) porte le titre hallucinant de : Vivez !), sont béats de vénération devant des machines humaines optimisées, applaudissent à tout rompre les mutations génétiques chaque fois que les mutants battent un record, et se peignent les moustaches en bleu-blanc-rouge. Tout cela est très seyant.

 

 

Conclusion : les Jeux Olympiques sont bien la fête par excellence de la fraternité humaine, n'en doutons plus. C'est prouvé par le carnet de chèque, le compte en banque et les contrats d'exclusivité. Sans compter les « à-côtés ». Comme quoi une entreprise privée peut apporter le bonheur à l’humanité entière. L'idéologie ultralibérale vous l’avait bien dit.

 

 

 

Le pire n’est pas toujours sûr, mais le COMITÉ INTERNATIONAL OLYMPIQUE est le sublime signe annonciateur du Progrès Humain : la GRANDE PRIVATISATION DE L’HUMANITÉ. Je traduis : faire enfin (après 200.000 ans d'homo sapiens gratuit) de l'entreprise humaine quelque chose de rentable. Jusque-là, homo sapiens sapiens travaillait à fonds perdus. Être homme, mes bien chers frères, deviendra PAYANT. On mettra des péages à la sortie de tous les utérus. Gare aux fraudeurs !

 

 

Déjà qu'à l'autre bout de la vie, les Grecs avaient Charon pour traverser le Styx vers le royaume des morts, contre monnaie. Chacun sera aussi désopilant que la Soeur Anne de GOTLIB (c'est dans le "Barbe-bleue" de La Rubrique-à-brac) : « Soeur Anne aux deux berges raque ». Je ne donne aucun indice.

 

 

 

C'est une condition de survie de l'humanité nantie. Car on a bien compris, dans l'affaire des Jeux Olympiques, qu'il y en a deux, d'humanités : les lites et l'émasse. Euh non, je me trompe : l'élite et les masses. Et attention, quand je parle de l'élite, c'est 200.000 personnes grand maximum dans le monde, qui sont capables de payer les armées chargées de les protéger. La vision olympique de l'humanité a quelque chose à voir avec une double perspective : BANCAIRE et MILITAIRE.

 

 

 

J'aime bien, chez RABELAIS, l'histoire suivante : un portefaix est assis dans la rue, mangeant son pain après l'avoir laissé s'imprégner des fumées qui sortent de chez le rôtisseur. Celui-ci s'avise de lui faire payer sa fumée. Une altercation s'ensuit. Joan le fou arrive, et accepte de rendre sa "justice" au moyen de la pièce d'or du portefaix.

 

 

Il fait sonner celle-ci et prononce sa sentence : « La Cour vous dit que le portefaix qui a mangé son pain à la fumée du rôti a payé le rôtisseur au son de son argent ». Ce fou est un nouveau Salomon. J'aimerais que l'humanité paie les Jeux Olympiques avec cette monnaie incroyable : AU SON DE SON ARGENT. Vous l'imaginez, une corruption accomplie au SON de l'argent ? Moi je suis pour ce bling-bling-là.

 

 

Le Comité Olympique, vous savez, cette ONG désintéressée et même philanthropique, remplie d'un idéal humain de toute pureté, est en réalité une société privée, une simple entreprise juridiquement assujettie aux règles du droit privé suisse. Je l’ai déjà dit, je me répète, mais c’est exprès. Car il faut que ça se sache.

 

 

Et ce n’est pas le solennel (mais pathétique) appel que PATRICK CLASTRES (chercheur rattaché au Centre d’histoire de Sciences-Po) adresse au CIO pour lui demander de modifier ses fondements mêmes qui va y changer quoi que ce soit. Il ne l’ignore sans doute pas, et ne se fait guère d’illusion sur la faculté du CIO de se réformer lui-même. Il fait ça « only for fun ». Ou alors pour justifier un budget alloué. Je ne sais pas. De toute façon, pour réformer le CIO, il faut commencer par le détruire. Avant sans doute de ne pas le reconstruire.

 

 

PATRICK CLASTRES critique le fonctionnement actuel du CIO. Entendons-nous bien : il n’accuse personne. C’est vrai qu’il a affaire à forte partie. Une partie qui peut le réduire en bouillie en moins de rien. Il aurait vite fait de se faire corriger le portrait. Et pas sur photoshop. Il la joue donc en douceur. Son angle d’attaque repose sur le souhaitable et le désirable. Sur le « il faudrait », c’est assez dire qu’il rêve tout éveillé.

 

 

Il s’efforce de ne pas piquer trop fort le monstre qui sommeille (c'est juste une image, pas une réalité). Mais enfin, il émaille son texte de mots qui finissent par dessiner un tableau assez nettement crasseux, pour ne pas dire puant, de l’univers olympique : « corruption, scandales des athlètes dopés, tricheries récurrentes, menacé de gangrène par les mafias, … ».

 

 

Ses propositions de réforme (vouées aux oubliettes) contiennent en creux des critiques féroces du fonctionnement actuel. Il faudrait changer le mode de recrutement (opaque ; je traduis : les membres actuels sont-ils corrompus ? notez que je garde la tournure interrogative), modifier la charte (sans dire sur quels points ; là, j'ai du mal à traduire), rendre les comptes financiers transparents (tiens, tiens !). En bref, il faudra changer la façade une fois qu'on aura fait disparaître l’intérieur.

 

 

Le CIO actuel ? Payez, et on vous déroule le tapis rouge. Tiens, qu’a payé l’Arabie Saoudite pour faire admettre la judokate en bonnet de bain islamique (qui vaut le burkini, ci-contre) ? stéphane hessel,indignez-vous,engagez-vous,vivez,patrick besson,le point,charles de gaulle,jamaïque,usain bolt,sprint,4 x 100,record du monde,dopage,le nouvel observateur,américains,justin gatlin,performance,alberto contador,tour de france,vuelta,espagne,david rudisha,exploit sportif,jeux olympiques,cio,olympisme,humanité,société,culture,rabelais,ong,patrick clastres,sciences-po,bertrand delanoë,arabie saoudite,attila,jean guisnel,corruption,propagande,optimisme,gotlib,rubrique-à brac Ce serait une information intéressante. Le CIO, cette machine à profits, est devenu sensible à un seul argument : avoir les moyens de toucher sa « sensibilité ».

 

 

Je vais vous dire ma conviction : si le Paris de BERTRAND DELANOË n’a pas eu les Jeux Olympiques 2012, c’est parce que DELANOË n’a pas assez arrosé. Et je le remercie pour cette raison même. Vous imaginez l’état de la France aujourd’hui, après trois semaines de cette chevauchée d’Attila ? De ce rouleau compresseur aveuglé et fanatisé par l’enthousiasme ?

stéphane hessel,indignez-vous

LA PLUS BELLE AVENUE DU MONDE, VRAIMENT ? 

 

Pourquoi croyez-vous que la France n’a pas vendu un Rafale depuis qu’elle a signé je ne sais plus quel protocole de moralisation du commerce mondial des armes, et surtout qu’elle le respecte ? Fini, les « commissions », les « rétrocommissions » et autres outils d’enrichissement personnel (lisez, pour en savoir plus, Armes de corruption massive, de JEAN GUISNEL (La Découverte, 2011), je vous assure que ça, c’est du journalisme d’excellence).

 

 

Soit dit en passant, JEAN GUISNEL révèle que l’Allemagne, la si vertueuse Allemagne, corrompt à tout va les individus capables d’influer sur les décisions des gouvernements acheteurs. Pour exporter, il faut arroser. Si la France veut les Jeux, il va falloir qu’elle accepte d’enchérir. Sur fonds secrets. Les Jeux Olympiques ? D’abord et avant tout, une affaire, de gros intérêts, de grosses affaires à faire. Avec risques et périls : voyez la Grèce et ses Jeux Olympiques, en 2004, et puis huit ans après.

 

 

En fait, et pour être franc, en plus et en dehors de l'horrible fable olympique, je n’aime AUCUN des bobards que les médias déversent à tombereaux ouverts dans nos yeux et nos oreilles, jour et nuit : si l’on fait un peu attention, on en arrive à comprendre comment fonctionne la nouvelle dichotomie « MYTHE / RÉALITÉ ».

 

 

Plus je regarde la réalité, plus je suis effrayé de ce qui attend l’humanité (je ne reprends pas l'énumération, je n'entonne pas la litanie des calamités observées et attendues). Plus je regarde la télé, plus je deviens optimiste (tout le monde rit, tout le monde est heureux, sauf aux informations, et encore ...). Vous ne trouvez pas ça bizarre ? Ah bon ? C’est donc ça qu’on appelle PROPAGANDE ? Bourrage de crâne ? Endoctrinement ? Eh bien dans quel état sont nos esprits, les amis ?

 

 

Conclusion : LA PESTE SOIT DES OPTIMISTES ! Il faudrait les amputer de la télé. C'est à bon droit qu'on pourrait alors les traiter de : « Amputé de ta mère ! ». Parce que les amputés aussi ont droit aux Jeux Olympiques !

 

 

Voilà ce que je dis, moi.

 

lundi, 25 juin 2012

JACQUES ANQUETIL ET LE DOPAGE

Voilà, PAUL FOURNEL a enfin concrétisé un vieux rêve : consacrer tout un livre à une des idoles de son âge enfantin, qui s’appelle JACQUES ANQUETIL. Le livre s’appelle Anquetil tout seul (Seuil, 16 €). Ce n’est pas un gros livre : 150 pages. Je ne l’ai pas encore lu. Je ne sais d’ailleurs pas si je le lirai, parce que, franchement, ANQUETIL, hein …

 

 

Pourquoi je dis que c’est un « vieux rêve » ? Parce que le bouquin sur le cycliste me fait irrésistiblement repenser à un autre livre du même PAUL FOURNEL : Les Athlètes dans leur tête, paru en 1988. C’est un recueil de nouvelles. L’ensemble est absolument délicieux. Vingt-deux histoires très courtes qui racontent toutes un moment particulier, peut-être décisif, dans la vie d’un sportif de haut niveau, cycliste, perchiste, haltérophile, skieur, enfin toute la panoplie.

 

 

On m’apprendrait que PAUL FOURNEL a une préférence marquée pour le vélo qu’on ne m’étonnerait pas : pas moins de six récits le mettent en scène. Des miettes pour les autres sports, mais des miettes à grignoter sans hésiter.

 

 

Car ce qui est bien, dans les sports racontés par l’auteur, c’est la manière, l’attitude, le style, si on veut : à la fois amusée, un peu distante et en même temps pleine d’affection (ne parlons pas d’amour) pour les activités sportives et pour ceux qui les pratiquent : « … car le sport était une des plus belles choses que l’homme ait inventée pour toucher les hommes ». Si ça, ce n’est pas une déclaration d’amour, moi je suis un Nambikwara converti au bouddhisme option mahayana.

 

 

Moi, le vélo, je n’ai rien contre, à condition de ne pas abuser. Depuis le scandale de 1998 sur le Tour de France (d’où vient le célèbre « à l’insu de mon plein gré » du regretté RICHARD VIRENQUE : est-ce de lui ou des Guignols de l’info ?), je lis dans les journaux les chroniques d’ANTOINE VAYER, un spécialiste qui prouve le dopage par la puissance mécanique développée (calculée en watts).

 

 

FREDERIC PORTOLEAU, son confrère, définit ainsi la puissance : « La notion de puissance est assez simple à comprendre. Pour un système mécanique en rotation comme un pédalier, la puissance est égale au produit du couple moteur, lié à la force appliquée sur les pédales, par la fréquence de rotation (vitesse). Un coureur en très grande forme qui dispose d’un fort potentiel physique va mettre un grand braquet et tourner vite les jambes: sa puissance sera élevée.»

 

 

ANTOINE VAYER donne les précisions suivantes : « Comment procède-t-on ? Comme vous, devant votre télévision : on enclenche le chronomètre au point de départ précis référencé pour les principales difficultés du Tour 2009 et on l’arrête au sommet. Nos mesures tiennent compte de paramètres abscons mais tout à fait scientifiques comme, entre autres, la surface frontale, le coefficient de roulement, le pourcentage de la pente, la densité moyenne de l’air ».

 

 

PORTOLEAU et VAYER, eux, ils se fichent donc pas mal de l’analyse d’urine, de la prise de sang et de tous les efforts dépensés (c’est le mot !) pour y trouver les traces de substances prohibées par la noble « charte déontologique » du sport : ils analysent les performances du coureur. Ils collectent toutes les données chiffrées possibles, enfin tout ce qui peut se chiffrer par l’observation des faits.

 

 

C’est quand la course est terminée que le travail commence : on applique alors sur toutes les données collectées une grille qui permet de déterminer la puissance développée par le coureur au cours de l’étape. PORTOLEAU et VAYER arrivent à la conclusion que le maximum auquel puisse arriver un athlète normalement constitué est une puissance développée de 410 watts, sachant que le coureur du dimanche correctement entraîné est capable de développer entre 200 et 250. A partir de 410, il y a objectivement dopage.

 

 

Pour le Tour 2011, voici ce que dit ANTOINE VAYER : « C’est 23 coureurs à 31 km/h de moyenne dans la pente finale de Super-Besse à 5,75 % de dénivelée, derrière Rui Costa, le vainqueur qui revient d’une suspension pour usage de Méthylhexanamine. C’est une foultitude d’Eddy Merckx côté potentiel athlétique qui mène la bande 2011 à 41,32 km/h de moyenne horaire après neuf étapes (quel cru !). ».

 

Dimanche 19 juillet 2009, lors de l'ascension vers Verbier, ALBERTO CONTADOR a établi un record de vitesse : il a parcouru les 8,5 km de montée (7,5 % de pente moyenne) en 20 min 55. Jamais un coureur du Tour n'avait grimpé aussi vite. Selon ANTOINE VAYER, dans Libération, le coureur espagnol aurait eu besoin d'une VO2 max (consommation maximale d'oxygène) de 99,5ml/mn/kg pour produire cet effort. C’est rigoureusement impossible pour quelqu’un qui a un peu étudié la physiologie humaine. Et ça fait une puissance développée de 506 watts !!!

 

 

Et il fait semblant de s’étonner que, dans le col de la Croix, ce ne soient pas moins de 80 coureurs qui grimpent à 393 watts ! HORNER, à Mûr-de-Bretagne, développe « 453 watts pendant 4’16’’ dans la côte finale », c’est-à-dire un VO2 max de 87,5. Mais HORNER « s’est cassé le nez derrière huit coureurs "anaérobies" plus puissants à 515 watts » (cinq cent quinze ! à comparer aux 150 de monsieur tout le monde) ; « ils auraient au-delà de 95 » de VO2 max.

 

 

Le vélo est une chose merveilleuse, à condition d'en sortir.

 

 

Voilà ce que je dis, moi.

 

 

Promis, demain, je reviens à la littérature, à ANQUETIL, à PAUL FOURNEL.