dimanche, 27 novembre 2016
HALLOWEEN CHEZ LE FLEURISTE
On n'a pas trop forcé sur la déco.
Photographie Frédéric Chambe.
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samedi, 26 novembre 2016
UN JOUR DE FERMETURE
Après la "vogue des marrons", La Voguette.
Photographie Frédéric Chambe.
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jeudi, 24 novembre 2016
LUMIÈRES DE LA VOGUE DES MARRONS
LYON, CROIX-ROUSSE, 1 octobre - 11 novembre MMXVI
"Le Palais sucré."
Photographie Frédéric Chambe.
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samedi, 19 novembre 2016
DE JOUR / DE NUIT
Ce satané double vitrage !
Un chantier, rue Dumont.
Photographies Frédéric Chambe.
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jeudi, 10 novembre 2016
ÇA FAISAIT DES BULLES …
... C'ÉTAIT RIGOLO.
Aujourd'hui, un Grand Maître aux cimaises de ma galerie BD.
Sa Majesté Gir, alias Giraud, alias Moebius.
Ci-dessus, on a un bonne idée de ce que, dans la BD, on pourrait appeler la Planche Absolue. Gir fait partie du tout petit cercle des gens capables de "ça". On la trouve dans Ombres sur Tombstone, puis dans le volume Apaches, qui rassemble, des cinq volumes de "Mister Blueberry", tout ce qui concerne les Indiens.
Ci-dessous, une demi-page virtuose (qui a quelque chose à voir avec La Vague d'Hokusai) du Major fatal, dès le début duquel Moebius part à l'aventure : on se dit que, d'un épisode au suivant, lui-même ne sait pas du tout ce qui va se passer. Le scénario est un collage de souvenirs de films et de toutes sortes d'inventions, et se fout royalement de la continuité du récit. Il flirte avec tous les genres à la mode, tous les clichés narratifs, quelques poncifs cinématographiques, mais en se moquant éperdument de tous les genres. On y voit même que le ciel commence à se disloquer. Comme dit la chanson : « Dis, dis, qu'est-ce que tu dis ? Tout ça n'est que parodie » (Guy Béart, 4'41"). A moins que ce soit un pastiche.
Dans cette histoire qui se moque éperdument de la logique de l'histoire racontée, il y a un major Grubert, un Jerry Cornélius, un Bakalite, un Star Billiard, robot gigantesque conçu pour rallier le premier niveau par onde Puchpull, qui s'assied en plein désert aussi longtemps que l'espion et la passagère clandestine font l'amour dans son crâne, une dame qui s'appelle Malvina, un certain Graad, un archer masqué (ci-dessus après avoir abattu l'objet volant du destin et recueilli l'ingénieur Barnier, qui se révélera être une femme après avoir perdu son casque). Et un tas d'autres trucs dérisoires et sublimes. Les tâcherons de la science-fiction, du space opera, de l'héroïc fantasy et autres "genres" peuvent aller se rhabiller avec leur uniforme de sérieux et d'application. Moebius reste Moebius : indépassable.
Ci-dessous, on voit, jusque dans le détail le travail d'orfèvre de maître Moebius, une planche du Garage hermétique de Jerry Cornelius, suivi de deux zooms avant pour mieux apprécier la précision. Moralité : côté technique, Moebius m'en bouche un coin et met la barre très haut.
Le grand Hayao Miyazaki, que les Japonais considèrent à raison comme un génie du cinéma d'animation (Princesse Mononoké, Le Voyage de Chihiro, ...), n'évoquait pas sans une vive émotion la grande figure de Jean Giraud alias Moebius, dont il reconnaît très volontiers l'influence sur son propre travail.
Et quand Moebius n'était pas encore le seigneur de la BD qu'on a connu ensuite, il ne dédaignait pas de donner un dessin à des petites revues sans moyens, gravitant autour du fantastique et de la science-fiction. Exemple ci-dessous, avec ce n°1 de Nyarlathotep, revue à la vie courte, fondée par M. M., Lyonnais, fils d'Inspecteur Général, vaguement situationniste, devenu bibliothécaire, puis perdu de vue.
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mercredi, 09 novembre 2016
AVANT L'OUVERTURE
Photographies Frédéric Chambe.
L'installation est pour très bientôt.
Les points clairs en bas à droite (un vert, un rouge) ne sont pas des parasites ou des saletés.
Quelques reflets inopportun à cause du double vitrage.
Pour l'instant, l'accès à la mezzanine semble un peu problématique, sinon compromis. Je me demande si la CHSCT (Commission Hygiène Sécurité et Conditions de Travail) avalisera l'usage de l'échelle télescopique. Cela m'étonnerait un peu.
Ci-dessous la dernière mouture, autrement éclairée, telle qu'elle se présente aujourd'hui même.
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dimanche, 30 octobre 2016
LE MONDE DANS LA VITRE ...
... ET LA VIE DERRIÈRE LA VITRE
(les deux, mon général !).
La boulangerie en train de fermer.
Photographie Frédéric Chambe.
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mercredi, 26 octobre 2016
LE MONDE DANS LA VITRE
Photographie Frédéric Chambe.
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Les facéties de l'actualité.
Au printemps, Nuit debout repeint le monde aux couleurs de la révolution.
A l'automne, voilà que c'est au tour de la police de faire sa Nuit debout.
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lundi, 24 octobre 2016
ÇA FAISAIT DES BULLES …
… C’ÉTAIT RIGOLO
François Schuitten, dans (A suivre) n°3, avec son incroyable trait en courbes de niveau qui m'évoque irrésistiblement le corps zébré des femmes de Lucien Clergue (ci-dessous).
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dimanche, 23 octobre 2016
ÇA FAISAIT DES BULLES …
… C’ÉTAIT RIGOLO.
Jeanne d'Arc, vue, revue et corrigée en foutraque par F'murr.
F'murrr et ses "r" extensibles, son joyeux et débridé délire : Jehanne Darc, Au Loup (où il assaisonne à sa façon, en de nombreuses variantes frapadingues, le conte du Chaperon rouge), et surtout Le Génie des alpages (au moins une douzaine de volumes),
avec son troupeau de moutons en folie qui suivent les cours de la Bourse, son bélier Romuald, son chien qui explique E=MC², son berger au bord de la crise de nerfs plus souvent qu'à son tour, dans (A suivre) n°1.
Corbeau dessiné en direct par F'murr (avec un coup de main en forme de soleil couchant de Mézières), au temps où je courais les signatures-dédicaces (c'était à la librairie Expérience, fermement tenue par Adrienne, rue Petit-David, juste pas loin du théâtre des Ateliers).
Ceux-ci sont dans Barre-toi de mon herbe.
J'ajoute ceci, qui ouvre sur une perspective un peu plus "contemporaine".
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mercredi, 19 octobre 2016
APRÈS LA FERMETURE
Photographie Frédéric Chambe.
Lors de la réfection des locaux, avant l'agrandissement de la boulangerie (c'était une boutique de sapes). Voir 17 octobre.
09:05 Publié dans A LA CROIX-ROUSSE | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : photographie, lyon, croix-rousse, fournil des artistes
lundi, 17 octobre 2016
DES VIES DERRIÈRE LA VITRE
Ça turbine très fort, y compris le samedi soir, avant la réouverture de la boulangerie, agrandie et embellie. Sa « formidable clientèle » [sic], qui a pris son mal en patience pendant les travaux, se prépare pour l'assaut.
Photographie Frédéric Chambe.
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mercredi, 12 octobre 2016
L'ORANGER DES OSAGES
Qulques aspects du fruit (immangeable, paraît-il, je n'ai pas essayé) qui pousse sur un oranger des Osages vu au parc de la Tête-d'or.
Photographies Frédéric Chambe, 10/11 octobre 2016.
08:55 Publié dans PAS PHOTOGRAPHE MAIS | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : photographie, lyon, parc de la tête d'ore, oranger des osages
jeudi, 29 septembre 2016
UN FANTÔME
Voici l'avis de décès que j'ai piqué dans Le Progrès daté du 27 septembre.
Jacques Goudet a fini par avaler son extrait de naissance. Cet homme, qui fut en son temps, un personnage important au sein de l'université lyonnaise, a eu le temps et l'avantage d'être oublié par la rumeur publique. Il se trouve que j'ai un peu croisé sa route en des temps incertains, dans le "ciel de traîne" (comme disent les météorologues) qui a suivi l'orage de mai 1968. Pour tout dire, non seulement je n'étais pas un de ses familiers, mais je l'ai connu à travers une minuscule circonstance étroitement liée à l'époque. Le seul souvenir que le nom de Jacques Goudet m'évoque est en effet celui de l'escouade de gauchistes, probablement maoïstes (trotskistes ?), qui avait fait escorte à ce professeur de langue et civilisation italienne, qui restait impavide, en scandant, le bras tendu à la nazi : « Goudet fasciste ! Goudet fasciste ! ». Tout ça parce que, selon la rumeur, le monsieur avait le tort d'être en relation avec des gens peu recommandables du fascisme italien, comme un certain Pozzo di Borgo. Il se rasait soigneusement le crâne. Il travaillait, disait-on, à la création du réseau d'une internationale fasciste. C'est après tout possible. Je n'en sais rien. On disait aussi, à l'époque, qu'il était père d'une famille de onze enfants, faits ou adoptés avec une épouse asiatique, peut-être annamite. Sous-entendu : catho jusqu'au bout des ongles des doigts de pied. La personne fut sûrement un tout petit peu plus complexe que le schéma que voici. C'est juste une drôle de période qui m'est revenue en mémoire à cette occasion.
Sans nostalgie aucune, qu'on veuille bien le croire.
Voilà ce que je dis, moi.
09:00 Publié dans DANS LES JOURNAUX | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : jacques goudet, lyon, université de lyon, mai 68
vendredi, 23 septembre 2016
DES NOUVELLES DE L'ARCON
Rouvrant par hasard un catalogue d’exposition, je suis tombé sur quelques perles qui, me remettant en présence des trouvailles de quelques artistes contemporains (je veux désigner par là tous ceux qui ont travaillé à l'émergence et au triomphe de l'ARCON, depuis la foutaise inaugurale de Marcel Duchamp et de son postulat : « Tout ce que l'artiste désigne comme étant de l'art est de l'art », postulat qui repose sur cet autre, tout aussi niais : « Tout homme qui se déclare artiste est un artiste »), m’ont fait retrouver toutes palpitantes les raisons qui m’ont découragé d’accorder mon suffrage au grouillement d’innovations innovantes qui ne cesse d’assaillir la modernité des preuves de son interminable agonie, dont l’enthousiasme entraîne l’humanité dans l’infinité de ses impasses.
L’exposition en question est, en alternance avec la Biennale de la danse, une des manifestations « de prestige » que la ville de Lyon s’enorgueillit d’organiser. L’une des dernières expositions d’art du dernier 20ème siècle que j’ai eu la faiblesse de visiter s’appelait « Biennale d’art contemporain de Lyon », dont un certain Thierry Raspail dirige les destinées depuis la création du MAC, logé dans le dernier pavillon survivant de l’ancien Palais de la Foire, qui fait face à la roseraie du parc de la Tête d’or, intégralement remodelé de l’intérieur par un architecte paraît-il dûment diplômé.
Mais la Biennale de l’an 2000 (« Partage d’exotismes », avec un design par je ne sais qui sur la couverture, visez l'objet ci-contre, ça swingue), celle dont je parle, s’exposait sous les poutres de béton de la Halle Tony Garnier, désormais promue au rang de salle de spectacle grand public (Britney Spears, avec ses cohortes de préadolescentes fanatiquement érotisées, …). Honnêtement, il ne me reste pas grand-chose de l’événement (si on peut le nommer ainsi). Il aura fallu le hasard d’un désordre commis par la main d’un petit d'homme pour me remettre en mémoire ce temps des obscénités, qui est devenu le quotidien du spectacle imposé par (ce qu'il faut bien appeler) notre monde à l’œil de l’homme normal, ce survivant.
Parmi les perles dont je parlais, un diamant brille de tous ses feux. La photo de l’œuvre dont il s’agit figure en page 16 du volume II du catalogue célébrant l’événement. C’est celle (« l’œuvre ») d’un nommé Bjarne Melgaard. Elle est intitulée (en français) « Sperme sur la tombe de Paul Gauguin » (en estropiant au passage le nom de Gauguin), et date de 1998.
Mais cette œuvre (si l'on peut dire), si pleine de sens par sa propre pesanteur sémantique, voire séminale, ne serait rien sans le commentaire (en français) qui la commente, avec le réjouissant lyrisme boursouflé du nouvel académisme triomphant. Le baratin que voici illustre à merveille la substitution de la création purement verbale à la technique du métier d'artiste, et l'imposture sur laquelle est assise la création "artistique" contemporaine.
« Le trait insistant de Sperme sur la tombe de Paul Gauguin [sic !] se redouble en cherchant la forme dans des dessins très spontanées [sic authentique !] qui ne renient pas leur allégeance à Munch. Peu importe que ce Nordique qui a longtemps vécu dans l’hémisphère Sud ait joint l’acte à la parole. Tout est dit avec le sacrilège qui libère la semence de la fécondité. Splendide incarnation d’un mythe fondateur ». Libérer la semence de la fécondité ! En voilà un Graal ! Cela veut dire : "vive la masturbation ! vive la stérilité !". « Viva la muerte ! » criaient les escadrons de Franco. Masturbons-nous, c'est le plaisir des dieux ! N'ayons pas de descendance ! Vivement la "post-humanité" : non la "réalité augmentée", dont on nous rebat les oreilles à coups de "pokémon go", mais l'humanité diminuée.
C'est pas beau, ça ? Je jure que je n’ai rien changé au texte, ni une virgule, ni une faute d’orthographe ! Les laïus (pompeusement appelés "notices rédactionnelles") « sont le résultat d'un travail collectif faisant intervenir Marc Augé, M. Convert, Pierre-Alain Four, Alain Girard, Philippe Grand, Hélène Joubert, Anish Kapoor (déjà !), Noah Lurang, Jean-Hubert Martin, Gérald Minkoff, Jean-Christophe Neidhardt, PhiliPeltier, Thierry Raspail (the boss !), Carlo Severi ». Ils se sont mis à tout ça pour pondre leurs sentences définitives.
J’espère que le lecteur de ce billet appréciera la teneur métaphysique du propos, dont les auteurs tiennent à insister sur la liberté nouvellement acquise par le mâle moderne, enfin libéré du fléau asservissant d’avoir à engendrer un être nouveau quand il éjacule, et en allant répandre, à des fins "esthétiques", sa semence dans les cimetières. L'obscur branleur Bjarne Melgaard prenant l'avion pour les Marquises, trouvant dans son imagination la force d'une érection pour aller se masturber (on note que l'homme est gaucher) sur la tombe d'un peintre célébrissime, voilà bien un spectacle auquel je ne regrette aucunement d'avoir échappé.
Je ne sais pas quelles lunettes ornaient le nez (ou ce qu'ils avaient bu ou fumé) des auteurs de la formule : « Splendide incarnation d'un mythe fondateur ». Moi j'appelle ça vouloir engrosser des squelettes.
C'est l’image que l’artiste se fait de l'avenir de son métier et de celui de l’humanité.
Voilà ce que je dis, moi.
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jeudi, 15 septembre 2016
UNE FAMILLE S'EST ÉTEINTE
Léon Paliard, médecin, a épousé Marie-Thérèse Amblard en 1922.
Il est mort en 1924, peut-être d'une crise cardiaque (antécédents familiaux). Leur fils Jacques, né en 1923, a donc été élevé par sa mère, longtemps aidée de sa propre mère, madame Amblard. Elle ne s'est jamais remariée, se consacrant entièrement à Jacques.
Jacques avec sa grand-mère et une personne non identifiée.
Jacques, fils unique, s'est engagé dans la résistance (maquis de Beaubery, en Saône-et-Loire), bientôt nommé "bataillon du Charollais" quand il fut incorporé dans l'armée du général de Lattre.
Il fut tué non loin de Bourbach-le-bas (Haut-Rhin), âgé de 21 ans, dans les combats des 7 et 8 décembre 1944. La lignée familiale s'est donc interrompue, faute de descendance.
Marie-Thérèse a ensuite vécu toute seule, tout petitement, de travaux de couture, puis du "minimum vieillesse". Elle aimait la musique et ne manquait aucun concert donné salle Molière par la Société de Musique de Chambre de Lyon. C'était sa seule et unique distraction. Elle avait une vraie préférence pour les Sonates de Mozart, et écoutait régulièrement l'un ou l'autre disque de leur intégrale Erato (enregistrée au Japon en 1974) par Maria João Pires, qu'elle possédait. Elle en avait même travaillé plusieurs, si j'en juge par les annotations qu'elle a laissées sur le livret accompagnant le coffret.
Il est vrai que les disques (vinyle) qu'elle écoutait encore dans son grand âge sur son électrophone ont tous une caractéristique qui leur est propre : le début de chaque face est rayé de façon parfois criante par le saphir du bras qu'elle y posait sans voir tout à fait ce qu'elle faisait. Je ne lui en veux pas, vous pensez bien : chaque fois que la musique heurte un caillou du chemin, je me dis qu'elle est comme griffée par les ronces de l'existence qui fut la sienne, jalonnée d'épreuves terribles. Alors son beau visage aimable, souriant, ridé comme une pomme en février, m'apparaît.
De la Bible, elle revenait sans cesse à un passage, qui est la grande consolation de ceux qui n'ont rien excepté la foi, et qu'on trouve dans l'évangile de Matthieu (Mt 5, 3-12), connue sous le titre de "Sermon sur la montagne", également appelé "Les béatitudes", qu'elle avait cochée d'une croix au crayon dans son exemplaire de la traduction de Louis Segond, mais qu'elle avait marquée à l'encre et au crayon, de sa main, dans le gros volume du chanoine Crampon, qu'elle préférait. J'ai tendance, moi l'endurci mécréant indécrottable, à croire que ces "Béatitudes" lui ont toujours servi de guide. Respect. Silence. Rien à dire.
Marie-Thérèse Paliard fut une délicieuse, une merveilleuse vieille dame pleine d'amour et de bonté.
Heureux les cœurs purs, car ils porteront témoignage !
Voilà ce que je dis, moi.
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dimanche, 04 septembre 2016
LA TETEE EN 1923
Marie-Thérèse Paliard nourrissant Jacques.
Scan (à même le verre) d'une plaque stéréoscopique prise par le docteur Léon Paliard, le 17 octobre 1923.
Les mêmes, en tirage sur papier.
Jacques Paliard (ici orthographié Paillard, comme souvent), soldat de 2° classe, sera tué en Alsace le 10 décembre 1944. La photo a été prise par sa mère. Je n'ai pas encore identifié le cimetière. Il avait "pris le maquis" dans ce qui s'est appelé le "Maquis de Beaubery", constitué de 250 hommes de toutes conditions qui devaient former le "Bataillon du Charollais" (lisible sur la croix) embauché dans l'armée de De Lattre.
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samedi, 03 septembre 2016
LYON-SUR-VERRE
Dépositaire de quelques archives familiales, je tombe parfois sur des documents qui m’intriguent. J’ai dernièrement eu la curiosité de faire tirer sur papier quelques photos sur plaques de verre (« plaques sèches au gélatino-bromure d’argent » de la marque « A. Lumière et ses fils »). En l’absence de tout élément d’information sur les dates, j’en suis réduit aux supputations.
Le commerce des plaques de verre destinées au public a cessé, paraît-il, en 1950, mais celles dont il s’agit ici remontent selon toute probabilité aux années 1900, 1910 ou 1920. Le lieu de la prise de vue, en revanche, est plus facile à déterminer : on reconnaît Lyon sur plusieurs photos, quoiqu’avec une précision un peu aléatoire dans certains cas.
Car si je peux identifier facilement (ci-dessus) la rue Servient (quartier Préfecture) qui débouche sur le Rhône et le « pont de l’Hôtel-Dieu » qui le traverse (alors pont pour les piétons, encore ainsi nommé sur un plan de 1914, jusqu'à sa démolition en 1916, aujourd’hui pont Wilson),
qui me dira où situer l’image (quartier Bellecour ?) où un détachement de dragons en grande tenue se présente sous la houlette d’un officier qui a mis sabre au clair (noter les clairons des deux cavaliers les plus à gauche) ?
De même, on reconnaît bien, sur la photo du bateau-mouche de la Saône, le clocher de Saint-Georges et la silhouette de la basilique en arrière-plan, mais de quelle gare peut bien s’élancer la locomotive étincelante qu’on voit ci-dessous ?
Il semble évident que l’instantané où un cheval débouche de la gauche a été fait cours de Verdun, alors appelé cours du Midi (on discerne le clocher carré de l'église Saint Irénée, perchée sur la colline),
et les daims qu’on voit sur un autre désignent le parc de la Tête d’or.
Quand aux deux dernières photos, elles montrent sans erreur possible, l’une le pont Tilsitt (aujourd'hui "Bonaparte") avec Saint-Jean derrière et la Croix-Rousse au fond,
l’autre la place des Jacobins avec sa fontaine, où défilent les chars du Carnaval, tout cela vu d’un étage élevé.
Pour avoir une idée de l'époque, on trouve sur le site de la Bibliothèque Municipale une telle photo (ci-dessous) du Carnaval de Lyon prise par Jules Sylvestre, avec cette imprécision : « circa 1900 ».
Voilà, c’est Lyon il y a une centaine d’années. Vu par un citadin de cette ville. Rien de plus, rien de moins.
Ce sont des images qui me rattachent à quelque chose, qui me racontent une histoire que je ne comprends pas tout à fait, à cause des blancs qui entourent leur raison d'être, comme n'importe quel album ancien de photos de famille non légendées, un siècle après. Mais des images à la présence forte et, à tout prendre, poétique.
Voilà ce que je dis, moi.
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jeudi, 25 août 2016
BAUDELAIRE À LYON
Les amateurs des Fleurs du Mal, les spécialistes de la question, les professeurs de Lettres le savent : Baudelaire est passé par Lyon. Il y a même demeuré de 1833 à 1836 : le lieutenant-colonel Aupick, qui a épousé sa mère restée veuve, est en poste dans la ville. En 1834-1835, Charles est élève en classe de troisième, interne au Collège Royal de Lyon (aujourd’hui lycée Ampère). S’il ne brille pas parmi les « premiers-de-la-classe », il n’est pas mauvais élève. La preuve, c'est qu'à la fin de l’année scolaire, il obtient quelques récompenses (qui ne l'empêcheront pas de redoubler sa troisième l'année suivante à Paris, au collège Louis-le-Grand).
A cette époque d' "obscurantisme moyenâgeux", le romantisme dévoyé d'un Prévert n'avait pas encore élevé le cancre à la dignité de héros moderne et de modèle à suivre. A cette époque d' "arrogance élitiste", un égalitarisme intégriste et fanatisé n’avait pas encore causé les ravages auxquels on assiste depuis quatre décennies, et qui ont ruiné le système éducatif républicain. A cette époque "bourrée de stéréotypes archaïques", on craignait si peu de reconnaître les mérites scolaires des meilleurs élèves que ceux-ci étaient célébrés en fin d’année au cours de la cérémonie dite « Distribution des Prix », cette vieillerie que mai 68 a jetée à la poubelle, en même temps que les insupportables « chaires » et autres estrades, qui soulignaient par trop l'imméritée supériorité du maître sur l'élève. Le Collège Royal de Lyon avait même si peu honte qu'il faisait imprimer la liste de ceux qui méritaient le plus d’être distingués. C’était l’imprimeur Boursy, rue de la Poulaillerie (où se situe aujourd’hui le musée de l’imprimerie), qui était chargé de la fabrication de ce "tableau d'honneur".
C’est ainsi que le nom de Charles Baudelaire, en ce jour solennel du 28 août 1835, fut prononcé à six reprises, dans autant de disciplines :
« Thème »,
« Version latine »,
« Vers latins »,
« Version grecque »,
« Arithmétique »
et « Dessin » (spécialité « Figures », les deux autres étant « D'après nature » et « Académies »).
Certaines paraîtront aller de soi, d’autres sembleront plus surprenantes. Quant au dessin, il sera une évidence aux familiers de cette partie de son œuvre où le poète se livre à la critique artistique.
Ce n’est qu’un document, à peine une anecdote ; c'est, si l'on veut, de l'histoire littéraire abordée par son tout petit côté. Pourtant cela me fait quelque chose de voir imprimé noir sur blanc le nom de Charles Baudelaire adolescent (il a 14 ans), dans ce mince volume que je tiens dans la main,
où ont été reliés (demi-basane rouge) les tableaux d'honneur de 1835 et 1836 d'un grand lycée de province. Il ne me semble pas indifférent de pouvoir toucher du doigt un témoignage, si modeste soit-il, du passage d’un tel génie dans notre ville (il n'engloba pas celle-ci dans la même aversion que celle dont le nom d'Aupick était pour lui l'objet. On raconte qu'il criait, sur les barricades de 1848 : « Fusillez le général Aupick ! »). J'ai l'impression de parvenir à lui par une voie facile et proche (si j'ai obtenu un premier prix de version latine [au royaume des aveugles ...], j'ai toujours été infoutu de composer des vers latins), mais inconnue du plus grand nombre.
C'est un privilège.
Voilà ce que je dis, moi.
Note : j'aurais pu faire figurer dans ce billet les noms des trois élèves de cette classe de troisième (« Professeur, M. Carrol ») qui jouent les Usain Bolt pour truster les médailles. Je les mentionne pour mémoire : Benjamin Marcouire, de Montpellier, élève interne, vainqueur toutes catégories, qui revient à sept reprises, dont cinq sur la plus haute marche du podium (« Excellence »,« Thème », « Version », «Vers latins » et « Histoire ») ; Nestor de Songeon, de Bourgoin, élève interne, huit fois cité, mais plus souvent en position de Poulidor ; Jean-Jacques Hardouin, de Lyon, élève interne, excellent "troisième couteau", dont le nom apparaît cinq fois. On trouve encore les noms d'Auguste Blanc, Marius Ginoyer, Eugène Turin, Jean-Baptiste Gérentet, Victor Boisset, Décius Giamarchi (de Vescovato, Corse).
Figure aussi un certain Dominique Barnola (« de Lyon, pension Champavert ») qui me rappelle les monstrueux chahuts que, élèves de 2de dans les antiques bâtiments de ce même lycée Ampère, nous avions fait subir au nouveau professeur de physique-chimie, qui portait ce patronyme, pour étrenner sa première année d'enseignement (dévissage intégral des plateaux - en bois - et des pieds - en fonte - des tables, entre autres, avec les conséquences qu'on peut imaginer). Nous retrouvant à la rentrée suivante, il s'était cruellement vengé, en crucifiant dans les trois premières minutes du premier cours notre camarade Pons, beaucoup moins méchant que nous autres, mais pas assez "discret" (ce qu'on appelle "faire un exemple"). Cette année-là, il fut tranquille. Comme quoi ...
09:05 Publié dans LITTERATURE, LYON | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : charles baudelaire, lyon, poésie, lycée ampère, général aupick, baudelaire à lyon, collège royal de lyon, éducation nationale, najat valaud-belkacem, jacques prévert, distribution des prix, littérature, les fleurs du mal, littérature française
dimanche, 21 août 2016
VU A LA CROIX-ROUSSE
Photographie Frédéric Chambe, 19 août 2016.
09:00 Publié dans A LA CROIX-ROUSSE | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : photographie, lyon, croix-rousse
dimanche, 07 août 2016
DANS UN ALBUM ANCIEN
Lt. Maurice Roux.
Alphonse Bernoud, photographe à Lyon.
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jeudi, 04 août 2016
DANS UN ALBUM ANCIEN
M. C., fin XIX° siècle (autour de 1880). Elle a toujours passé pour simple d'esprit : elle était juste sourde.
A. Lumière, photographe à Lyon.
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jeudi, 09 juin 2016
LYON SANS VOITURES
LYON DANS LE JOURNAL DES VOYAGES 2/2
AUTOUR DE 1880
Là, pas besoin de faire les présentations : ça n'a pas changé, ou si peu. Ah si : le machin sur la colline.
Non, je ne parlerai pas de l'occupation intégrale et quotidienne de la place Bellecour par 20.000 décérébrés. Non, je ne veux pas parler de football. Non, je refuse de parler de la « Fan-Zone ». Zut, trop tard !
Le Journal des voyages faisait travailler l’imagination, activité philanthropique s’il en est. Mais il arrive, avec le temps, que l’esprit critique du lecteur s’aiguise, et ne gobe plus aussi facilement des histoires racontées par des parleurs à l’imagination trop fertile.
Pentes, presqu'île, confluent : pour voir ainsi de telles boucles du Rhône en aval, le poste d'observation du dessinateur devait être vraiment à très haute altitude. Pour ce qui est des méandres, il avait aussi un peu d'imagination : le premier après le confluent est à peu près fictif, dans le creux du deuxième, on apercevrait Givors, mais il faudrait une très bonne (longue-)vue. L'artiste n'a pas osé placer Vienne (30 km) dans le paysage, mais on sent qu'on est passé pas loin.
Le Journal des voyages, qui était très à l’écoute de son lectorat, sut magnifiquement prendre le virage de la vraisemblance familière et du paysage connu, et proposa des plongées dans des contrées moins exotiques. C’est ainsi qu’il envoya ses reporters dans les contrées reculées du beau pays de France.
Schéma de fonctionnement de la ficelle de Saint-Just. Notez la drôlerie : l'illustration place "Fourvières" (sic) entre "Lyon" et "Saint-Just". La station intermédiaire s'appelle "Les Minimes".
C’est ainsi que Lyon apparut comme une destination digne d’intérêt. On n’évite certes pas les cartes postales, du genre de celles qu’on voit encore sur les « lieux emblématiques », ces haltes obligatoires pour les cargaisons de touristes armés de leurs mitraillettes à souvenirs. Mais on trouve aussi une spécificité locale connue localement sous le nom de « ficelles », funiculaires à grimper les collines. Vous savez, ces wagons alternativement tirés et retenus par un câble, qui permettent d'économiser l'énergie dans la traction, grâce à leur mouvement en quelque sorte pendulaire.
Là oui : ça monte à Fourvière (sans "s"). Le numéro du Journal des voyages est daté du 30 novembre 1884.
A Lyon, il y eut cinq ficelles au total (il en reste deux). Trois pour monter à la « colline qui prie » : entre Saint-Jean et Saint-Just ; entre Saint-Jean et Fourvière ; entre Saint-Paul et Fourvière-Loyasse (la "ficelle des morts", par laquelle les cercueils étaient conduits au cimetière). Deux pour la « colline qui travaille », qui desservaient la Croix-Rousse, d'une part depuis la rue Terme, d'autre part depuis la place Croix-Paquet.
La Ficelle Croix-Paquet, sur la place du même nom, tel que c'était avant le métro à crémaillère (pas si longtemps, en fin de compte). Ce n'est pas dans Le Journal es voyages, évidemment.
La dernière a été ouverte pour faire concurrence (tarif divisé par deux), et a permis, lors du creusement du tunnel, de mettre au jour le « Gros-Caillou ».
"Le déménagement à risque du "Gros-Caillou" à la Croix-Rousse".
Voilà ce que devient le "Gros-Caillou" sous la patte de Plonk et Replonk (une commande du musée Gadagne).
Si les lieux ont bien changé, les voitures, à Saint-Just et Fourvière, continuent bravement à se croiser à l’exact milieu de la ligne (415 mètres pour celle de Saint-Just), où la voie se dédouble momentanément. Les lignes de la Croix-Rousse bénéficiaient dès l’origine de deux voies.
Ficelle de la rue Terme. Le dessinateur a fait attention aux détails techniques, en s'efforçant de rendre les roues-guides qui maintiennent le câble dans l'axe.
"Notre route est droite, mais la pente est forte" (Jean-Pierre Raffarin, dans un jour inspiré).
On a fermé la ligne de la rue Terme en 1967 pour en faire un tunnel routier ("Croix-Rousse direct", pour faire ronfler les gros moteurs). Croix-Paquet est devenu la station intermédiaire de la ligne C du métro à crémaillère.
Ce qui m’intéresse dans quelques images, ce n’est pas la nostalgie (fi donc !) : c’est la jalousie. Oui, je suis jaloux des piétons de l’époque : je rage quand, dans ma pauvre rue du Mail, je dois remonter précipitamment sur l’étroit trottoir encombré de "potelets" disgracieux et d'un tas de concurrents à pied, pour éviter la voiture qui m’arrive dessus. Et je ne vous parle pas des jours de parapluie.
Voilà ce que je dis, moi.
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mercredi, 08 juin 2016
LYON SANS VOITURES
LYON DANS LE JOURNAL DES VOYAGES 1/2
Le Journal des voyages, hebdomadaire fondé en 1876 (ma collection court jusqu’à 1899), faisait voyager son lecteur en fauteuil et pantoufles dans le monde entier, si possible dans les endroits, les climats, les altitudes les plus inhospitaliers possibles, le mettait aux prises avec les éléments déchaînés ou les peuplades les plus féroces, et le confrontait aux bêtes les plus dangereuses.
Aux Cordeliers, vus vers l'ouest. Saint-Bonaventure à gauche, Fourvière tout au fond sur la colline, avant l'éléphantesque basilique. La scène (reconstitution d'après gravure de quelle époque ?) date de bien avant la restructuration de la presqu'île.
Le lecteur était même, à l’occasion, invité à frissonner jusqu’aux tréfonds de lui-même en revivant les aventures incroyables d’explorateurs courageux qui découvraient, à Madagascar, une espèce d'arbre cannibale,
Légende de la photo (d'époque, dans le numéro 61 du 8 septembre 1878 : en ce jour de la Nativité de la Vierge, Alfred Jarry fêtait ses cinq ans) : "L'arbre anthropophage : ce fut une épouvantable orgie". L'article ainsi annoncé, qui se voudrait à teneur ethnologique, est hallucinant. On peut cliquer ICI pour en lire un résumé impeccablement objectif, preuves et citations à l'appui (mon billet du 16 juillet 2013).
capables de dévorer des hommes condamnés par leur tribu parce qu’ils avaient enfreint la loi ;
Cordeliers modernes, vus vers l'est. Saint-Bonaventure à droite. A gauche le machin de la Bourse (où sont organisés chaque année les "Quais du polar"). A gauche, on distingue vaguement les anciennes halles, genre "Baltard". Au fond, le pont La Fayette.
des arbres insectivores capables d’engloutir le bras du voyageur insouciant ;
Légende : "A travers l'Australie : L'arbre insectivore".
ou qui racontaient une chasse au Moâ (alias Dinornis, mot à mot « oiseau terrible »), oiseau coureur de 3,6 mètres de haut, mais oiseau paléontologique, disparu depuis longtemps.
Le pont autrefois de "Tilsitt", Saint-Jean (avec son toit très pentu), Fourvière, nantie de sa basilique éléphantesque.
Mais Alfred Jarry saura quoi faire de ce fossile découvert par des gravures, puisqu’il en fait usage dans L’Amour absolu, sous le nom de "diornis".
Pont La Feuillée, passerelle Saint-Vincent, Quai de la Pêcherie, qui méritait alors bien son nom.
On l’a compris, si les auteurs qui écrivent dans le Journal des voyages n’inventent pas tout, on trouve dans l’hebdomadaire des espèces animales et végétales qu'on ne trouve que là, rigoureusement inconnues des zoologues et des botanistes.
L'imagination promet à l'esprit des ailleurs combien plus affriolants que nos platitudes quotidiennes.
Voilà ce que je dis, moi.
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jeudi, 26 mai 2016
FÉLICITÉ DE LA CROIX-ROUSSE
Félicité de la Croix-Rousse est un petit polar écrit en 1968 par Charles Exbrayat. L’intérêt de ce bouquin serait trop mince pour que quelqu’un d’un peu équilibré ose en faire état, si l’action ne se passait pas, précisément et exclusivement, sur le plateau de la Croix Rousse, si l’on excepte une excursion du policier dans les locaux du Progrès pour une consultation de vieux numéros. Si je l’ai rouvert, c’est uniquement parce qu’il y est question de Lyon, et en particulier de cette « Colline aux canuts », chère au cœur de Roland Thévenet, l’auteur d’une pièce de théâtre qui porte ce titre.
Ce n’est pas pour dire, mais Exbrayat, qui n’est que stéphanois (« Tout le monde peuvent pas être de Lyon, il en faut ben d’un peu partout », La Plaisante sagesse lyonnaise, Catherin Bugnard : à noter qu’Exbrayat cite le nom de ce pseudonyme du politicien Justin Godard et même celui de l’Académie des Pierres Plantées qu’il avait fondée), connaît assez bien la Croix-Rousse, et pour un adepte de l’ASSE et du « chaudron » de Geoffroy-Guichard (celui-là même des Guichard-Perrachon qui ont fondé Casino), il n’en dit pas trop de bêtises. Ma foi, je n’en veux pas trop à Exbrayat de l’hommage que ce Vert, dans Félicité de la Croix-Rousse, rend à la capitale des Gaules, ou plus précisément à son quartier le plus ... à son quartier le plus .... Bref, le quartier que ce nom de Félicité caractérise à merveille (soit dit en toute objectivité, cela va de soi).
Son repérage des lieux est impeccable : le terrain de jeu de l’inspecteur (pardon, il faudrait dire l’O.P.) Darius Méjean se situe, d’est en ouest (du Rhône à la Saône), entre les rues Joséphin-Soulary et Chazière et, du nord au sud (de Caluire à la limite des « Pentes »), entre la rue Henri-Chevallier et le boulevard de la Croix-Rousse, où se trouve la poissonnerie « Les Pêcheurs réunis » (sans doute celle qui est devenue « Vianey »). Mais pourquoi faut-il que l’auteur fabrique de toutes pièces un « boulevard Carnot » ? Mystère.
Exbrayat a visiblement parcouru la Croix-Rousse, ce quartier inimitable, dont il rend finalement assez bien compte, pour un étranger, du « climat » particulier, de la place Commandant-Arnaud à la rue Victor-Fort, en passant par la rue Dumont, la rue Henri-Gorjus et la rue de Cuire (rue de Cuir en version imprimée !). J’imagine que c’est à des contraintes propres à la fiction qu’il imagine que la rue Henri-Gorjus possède un n°104 et la rue Chazière un n°326, rues qui, certes, ne sont pas les plus courtes, mais se gardent bien d’atteindre le n° 100 (ce numéro si présent dans les œuvres de jeunesse d’Alfred Jarry, à cause de l’aspect odoriférant et du « balai innommable » qui s’y rapportent).
L’autre côté sympathique de ce petit roman de Charles Exbrayat, c’est qu’il invente deux ou trois personnages de vrais Lyonnais de l’ancien temps, qui puisent leur vocabulaire dans la malle au trésor que constitue le Littré de la Grand’Côte. Voilà qui a dû faire plaisir en son temps aux mânes de Clair Tisseur, alias Nizier du Puitspelu. Le meilleur dans le rôle du Lyonnais fondamental s’appelle ici Ulysse Nizerolles, balayeur des rues de son état, et copain de régiment de l’inspecteur (pardon : de l’O.P.) Méjean.
Voilà un personnage ! Obligé de limiter sa consommation quotidienne à cinq litres de vin, il a l’impression de ne pas être à la hauteur de son défunt père, ancien des chemins de fer, qui en éclusait huit. Les pages où Exbrayat donne la parole à Nizerolles donnent un festival de lyonnaiseries.
Jugez plutôt : « Et qu’est-ce que tu grabottes dans ce coin ? », « Il me rencontre en train de balayer les équevilles », « une salade de clapotons », « il s’est fait un peu trop serrer le corgnolon », « T’as vu quand ils ont assassiné la Ficelle ». Ah, la Ficelle ! La mienne, c’était pas celle de la rue Terme, c’était la « Ficelle Croix-Paquet », celle avec la passerelle,
qu’on passait directement du jardin à la montée Saint-Sébastien, celle avec son « truck » à l’arrière, pour les animaux et les "encombrants" (comme on peut le voir ci-dessus).
Après le festival, le feu d’artifice : « perdre mon temps à bajafler », « elle est toujours à grollasser dans le coin pour apincher ce qui se passe », « mon Alfred, c’était une vraie charipe », « décancane pas, Darius », « la Marguerite, un vrai veson », « grand gognand », « j’ai pas le droit, le dimanche, de me bambaner avec des gones que je connais », « même maintenant, j’en suis encore tout coufle », « le garçon, il doit être pire que toutes ses sœurs réunies. Une bugne, quoi », « t’as bien tort de te bouliguer l’intérieur », « je me sens détrancané ». Ah non, ne comptez pas sur moi pour un glossaire. Trouver des notes de bas de page dans un polar, ce n’est pas courant. Ici, il n’en manque pas une.
On l’a compris, ce qui me plaît dans Félicité de la Croix-Rousse, c’est le côté très « couleur locale », l’ancrage dans le quartier dont je respire l’air depuis très longtemps, même si mon domaine, autrefois, était plutôt « les Pentes » que « le Plateau », du 16, rue Pouteau au gourbi du peintre Sorokine, des traboules que je connaissais par cœur (aucune n’était fermée) à la rampe métallique du passage Mermet, de P'tit Jo le clochard à l'église Saint-Polycarpe.
On peut ajouter à cette couleur locale les figures que l’auteur met en scène, en particulier la famille très particulière sur laquelle l’enquête se concentre. Les Sancourt, c’est cinq sœurs et un frère, tous restés vieux célibataires, tous racornis, tous séchés sur pied, qui semblent vivre sous la férule de l’aînée, Félicité. Nul n’a jamais osé franchir le pas de tomber amoureux. Et les deux velléités manifestées ont avorté. Mais c’est là-dessus que l’intrigue est fondée, alors …
Quant à l’inspecteur (pardon : l’O.P.) Méjean, à ses tribulations avec son chef le commissaire Blaise Bertrand, dit B.B., franchement, on s’en fiche un peu. Que les deux hommes se soient fâchés à cause d’un gratin dauphinois (faut-il ou non râper du fromage dessus ?), cuisiné par l’une des épouses et mal commenté par l’autre, je vois là un « running gag », rien de plus. Les tourments intérieurs et les scrupules de l’inspecteur (pardon : l’O.P.), ça fait plutôt remplissage que ça ne fait avancer l’action. Quant aux scènes à son domicile, en face à face avec l’épouse, je les trouve un peu épaisses.
Bref, tout ce qui se rapporte au côté policier du polar m’intéresse très moyennement, même si l'auteur dédie son livre « A Georges Simenon, notre maître ». Je garde l’évocation d’une Croix-Rousse vivante. Ce qui n’est, après tout, pas si mal.
Voilà ce que je dis, moi.
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