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mercredi, 08 novembre 2023

CLIMAT : QUELQUES POUSSE-AU-CRIME

Troisième temps de la valse macabre.

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ON L'APERÇOIT, LE MONDE D'APRÈS :

TOUS LES GROS LARRONS EN FOIRE S'Y METTENT

Je n'ai pas collecté, loin de là, l'intégralité des titres du Monde parus sur le thème qui suit depuis le début de l'année 2023, mais par les quelques exemples cités ici, on verra que la tendance est avérée, lourde et générale, touchant les domaines d'activité les plus divers. Ce qu'il faut dénoncer, ce n'est plus la spirale « salaires / inflation » (comme à la fin des années 1970 et début 1980 : 14 %), mais la spirale « profits / inflation ». La captation de la plus-value (pour parler le Marx dans le texte) s'est rarement aussi bien portée.

L'extraordinaire, dans la période que nous vivons, c'est que l'explosion du nombre des pauvres ne provoque pas la fondation de « syndicats de défense des intérêts des pauvres ». Oui, je sais : c'est que "pauvre", ce n'est pas une classe sociale, c'est juste un tas d'individus inquiets du frigo, du lendemain et de la fin du mois. Mais il ne faut pas s'étonner que çà et là et de temps en temps, les pauvres donnent à ceux qui ne le sont pas des spectacles de plus en plus enflammés.

Ce chapitre parlant de lui-même, je m'abstiendrai de tout commentaire.

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Ces articles aux teneurs éminemment convergentes ont été publiés dans le journal Le Monde dans les premiers mois (février-mars) de l'année 2023, c'est-à-dire après publication des bilans des entreprises. J'aurais pu joindre ce qui a paru dans la presse dans la rubrique "autoroutes", mais ça aurait vraiment chargé la barque au-delà du raisonnable.

Cela permet d'éclairer tels ou tels titres d'articles parus postérieurement et conséquemment, pour répondre à l'interrogation muette de ceux qui se demandent ce que les bénéficiaires de ce système peuvent bien faire de tout cet argent (ci-dessous).

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Même Lyon n'est pas épargné, comme on le voit dans le journal Le Progrès (14 août et 6 septembre)..

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Récapitulons :

1 - On l'aperçoit, le monde d'après (31 octobre).
2 - Climat : c'est pas gagné (5 novembre).
3 - Quelques pousse-au-crime (8 novembre).
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On fera bientôt le bilan de tout ça.

mardi, 31 octobre 2023

ON L'APERÇOIT, LE MONDE D'APRÈS ...

... ÇA A L'AIR BIEN PARTI.

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UN 

Pour bien commencer.

1 2023 09 03-04 CLIMAT GRANDS DISCOURS.jpg

Le Monde daté 3-4 septembre 2023. Ça, c'est ce que constate Esther Duflo, prix d'économie décerné par la banque de Suède, avec un faux nez bien rouge de Prix Nobel (je pouffe, mais je respecte évidemment la personne Duflo, qui tient en général des propos sensés). Les discours sont bien sûr ceux que tiennent les responsables politiques de la planète. Je compte pour pas grand-chose les déclarations de grandes et bonnes intentions des grands industriels qui affirment être conscients du dérèglement climatique, et dont les résolutions bien arrêtées sont juste de se badigeonner la surface d'annonces vertueuses pour mieux couvrir la réalité inchangée et délétère de leur action. 

En attendant qu'on lime les dents à toutes ces poules aux œufs d'or, gardons, mes bien chers frères, nos oreilles ouvertes à tous les vents, y compris les plus nauséabonds (car « par là je sens pas grand-chose », aurait pu dire le Sâr Rabindranath Duval, alias Pierre Dac)

Moralité : c'est pas gagné.

*

DEUX

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Le Monde, 18 octobre 2023. Pour la Commission Européenne et l'ensemble des "Traités" qu'elle s'acharne à appliquer, à faire appliquer — et au besoin à imposer, quoique très mollement dans certains cas —, c'est le dernier arrivé qui aura gagné. Dans l'ambiance de concurrence féroce que se livrent les grands Etats, les grandes firmes et les grandes ambitions, y a pas de raison que l'Europe fasse le sacrifice de sa compétitivité et de sa richesse. D'où l'effort pour battre les records de lenteur.

En attendant qu'on en sache plus sur le projet profond, cohérent, magique et salvateur nourri dans le secret des bureaux bruxellois par des crânes d'œuf sortis des usines à formater les cerveaux, on restera suspendu dans le même brouillard que celui dans lequel baigne depuis sa conception cette grande Idée : l'Europe. 

Moralité : c'est pas gagné.

*

TROIS

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Le Monde du 6 juillet 2023. La Chine domine paraît-il l'industrie du panneau photovoltaïque, mais aucun pays dans le monde, sauf peut-être l'Inde, ne construit autant qu'elle de centrales thermiques à charbon. On me dit que c'est pour alimenter sa volonté de croissance (de puissance) économique et industrielle. Après tout, c'est possible, non ? La Chine a sans doute des besoins tyranniques ? Ce qui est sûr, c'est que ce pays démesuré n'en a pas fini avec les énergies fossiles.

Moralité : c'est pas gagné.

*

QUATRE

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Le Monde du 15 septembre 2023. Ah, le gros moteur ! Ah, le point de vue surélevé ! Ah, l'espace de rangement pour partir en vacances ! Ah, la belle consommation de carburant ! On aura le plus grand mal à s'en passer ! Ça risque de faire mal !

En attendant la voiture qui marche sans carburant, voire sans moteur, c'est-à-dire la voiture sobre, modeste, incolore, inodore et sans saveur (c'était la définition scolaire de l'eau dans les autrefois), c'est-à-dire la voiture virtuelle, les gaz d'échappement et les particules fines s'en donneront à cœur joie. 

Moralité : c'est pas gagné.

*

CINQ

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Le Monde, 29 septembre 2023. Ah ben les Chinois ont besoin des énergies fossiles ? Et vous voudriez que nous, la vieille Albion (oui, ça se passe en U.K.), nous laissions perdre de telles ressources qui sont là à nous tendre la main depuis nos propres fonds marins [propres, mais pas pour longtemps, n.d.l.r.] ? Ça va pas, la tête ?

En attendant que les Anglais soient touchés par la grâce de la transition écologique, ils vont continuer à bouffer de la planète.

Moralité : c'est pas gagné.

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SIX

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Le Monde du 13 octobre 2023. Vive la fracturation hydraulique !!! Soyons fous !

En attendant que les ingénieurs ingénieux de l'industrie automobile aient inventé le moteur à eau, ou mieux : le moteur qui marche sans dépense d'énergie, les géants de la prospection et de la production d'énergies fossiles n'on pas fini de saloper les paysages de rêve et de tapisser le fond de nos poumons de suies du plus heureux effet décoratif.

Moralité : c'est pas gagné.

*

SEPT

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Le Monde 2-3 juillet 2023. Ben oui, nous revenons sans le crier trop fort sur les quelques engagements mineurs que nous avions pris à la COP 21 au sujet de la sobriété, des gaz à effet de serre et autres fariboles d'écologistes. Faut nous comprendre, aussi, nous autres producteurs d'or noir : suite aux deux ou trois derniers exercices, dont les "résultats nets" (alias les profits) ont dépassé toutes les espérances, nos actionnaires nous ont fait de telles déclarations d'amour que nous ne nous sommes pas senti le cœur de les décevoir dans leurs attentes. C'est humain, non ?

En attendant que les fonds d'investissements (fond spéculatifs, fonds vautours, etc.) renoncent aux rendements ahurissants de 12 voire 15 %, les bons peuples devront se contenter de leur indulgence naturelle envers ces grands enfants un peu gourmands.

Moralité : c'est pas gagné.

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HUIT

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Le Monde du 25 octobre 2023. Bon, alors ça, c'est de la haute stratégie de long terme, de la haute finance et de la haute vision de visionnaire voyant. C'est dit : on ne se laissera pas distancer par les requins chinois du pétrole dans la course à la puissance industrielle et à la toute-puissance financière !

En attendant que les dirigeants politiques du monde entier reprennent le pouvoir que les puissants de la sphère économique se sont approprié à leurs dépens, l'humanité conservera son statut roturier face à cette élite aristocratique, dont le sang qui coule dans ses nobles veines a la belle couleur noire du pétrole.

Moralité : bref, c'est pas gagné du tout. 

***

On a compris, va : il y a des tas de gens qui n'en veulent pas, de la sauvegarde de l'humanité, et qui se soucient comme d'une guigne de l'effet de serre, de la biodiversité et de l'avenir du vivant et de l'humanité. Ce qui compte pour eux, c'est l'argent, c'est le pouvoir, et c'est la liberté qui va avec : le plus riche est le plus libre. Ce qu'il  faut savoir reconnaître, c'est que ce sont des gens terriblement puissants, mais dont malheureusement l'argument principal a des airs imparables : c'est l'ensemble de leurs activités qui a fabriqué notre mode de vie, et qui le gouverne plus que jamais. 

Et nous, en bout de chaîne, ne voyons pas comment faire pour éviter le pire, parce que nous n'avons aucune envie d'envisager une autre manière de vivre que celle qui est la nôtre. Nous avons bien compris le sort qui nous attend si nous poursuivons dans la même direction, mais nous sommes dans l'incapacité de concevoir une manière autre, c'est-à-dire un avenir allant en se rétrécissant sur le plan matériel.

Cette autre manière de vivre, nous la considérons comme une régression insupportable, comme un gigantesque retour en arrière, où l'humanité serait obligée de se débarrasser des machines, des moteurs et de leurs carburants qui lui apportent l'aisance, le confort et la facilité au quotidien, et de remplacer ces machines par l'immémorial travail manuel, l'épuisant, maudit, dégradant, asservissant travail manuel

Franchement, qui parmi nous serait prêt à se passer de toutes ces machines qui nous sont devenues aussi nécessaires, pensons-nous, que l'air que nous respirons ? Quelques héroïques individus, peut-être. Mais nous, l'immense masse des gens ordinaires au rang desquels je me compte ? Même pour nous, les petits milliards d'individus perdus dans la masse, la voracité en énergie est inextinguible. 

***

Note : je fais remarquer que les titres d'articles retenus pour ce petit florilège ne datent pas de Mathusalem. Je veux dire que ce tir un peu groupé (il n'y a sûrement pas tout) indique probablement une tendance lourde et actuelle. L'économie capitaliste n'est pas l'adversaire de l'écologie : elle est l'ennemi à abattre. Les capitalistes ont parfaitement compris ça. Les quelques titres mentionnés le laissent de plus en plus entendre. Qu'on se le dise : ils ne se laisseront pas faire sans réagir, quitte à user de toute la violence dont ils sont capables. On peut lire à ce sujet mes billets des 14 et 15 juin 2019.

jeudi, 10 mars 2022

LE PROBLÈME DES RENOUVELABLES ...

... C'EST QU'ELLES SONT TROP 
VISIBLES !

Prenez tout ce qui nous donne notre belle électricité : nos superbes centrales nucléaires, nos magnifiques centrales thermiques au gaz, au pétrole, au charbon, et même au charmauvais (pardon), vous n'en voyez pas la queue d'une tellement elles sont fondues dans le paysage. Mieux : elles font tellement partie du paysage qu'elles font presque à nos yeux partie de la nature naturelle.

Même si la torchère de Feyzin se fait parfois, à nos yeux de Lyonnais, un peu trop présente, voire odoriférante. Même si les usines de notre cher "couloir de la chimie", au sud de Lyon, fait partie des sites classés "Seveso". Même si, depuis les esplanades de Fourvière ou du Gros Caillou, on a une vue imprenable sur les panaches de vapeur des tours de refroidissement de la centrale nucléaire de Saint-Vulbas (Bugey).

Cela fait partie du plan élaboré par le système qui gouverne les économies du monde, qui s'est imposé à toutes les sociétés du monde, qui a mis tous les peuples du monde dans son étroite dépendance : rendre totalement invisible la force qui permet aux usines de tourner, aux ordinateurs de fonctionner, à nos machines domestiques de nous rendre les services que nous en attendions quand nous les avons achetées.

Cette force, qui s'appelle ÉLECTRICITÉ, cette force qui a fini par échapper à notre attention à force d'usage quotidien, cette force qui nous épargne tout un tas de tâches ingrates (laver à la main "nos liquettes et nos chaussettes" (citation), faire la vaisselle à la main, avoir à domicile une provision de bougies ou de pétrole pour la lampe, etc.), elle a en effet pour caractéristique principale d'être INVISIBLE. Mais cette invisibilité n'a nullement empêché l'électricité de rendre sa présence indispensable, et même parfois vitale, au point que quand elle fait défaut (panne, grève, tempête, etc.), elle plonge des masses de foyers dans la catastrophe. 

Et je me demande si les réticences, les résistances et les révoltes contre les éoliennes ne sont pas tout simplement liées au fait qu'

ON LES VOIT !!!

Et même de loin, et que parfois elles vont jusqu'à envahir notre champ visuel quand elles sont implantées sur la terre. Leur gigantisme pousse les industriels à établir leurs champs d'éoliennes au large, eux-mêmes poussés par les demandes des populations et par le fait que la ressource aérologique se trouve principalement au large, tout en restant quoi qu'il arrive une force intermittente. On veut à tout prix disposer du courant à domicile, mais on ne veut pas s'enlaidir ou se gâcher le paysage.

Je note que les réticences touchent beaucoup moins l'installation des panneaux photovoltaïques. Je l'expliquerais volontiers par leur relative horizontalité, alors que l'éolienne se dresse verticalement, avec arrogance, comme pour se lancer à l'assaut du ciel : Babel n'est pas loin. Le photovoltaïque a besoin de surface, quand une éolienne a besoin de hauteur, ce qui fait qu'il est moins invasif que celle-ci dans un paysage quel qu'ils soit.

Je tire une morale de ces petites remarques : les gens ordinaires, qui sont d'abord des usagers des bienfaits et des facilités procurés par l'électricité, ne veulent rien savoir de la façon dont la "fée électrique" leur parvient pour leur épargner des efforts qui leur sont devenus insupportables, tant ils sont habitués à leurs machines dociles, qui répondent instantanément à la pression du doigt sur le bouton de commande.

Pour la grande masse des gens ordinaires, l'électricité est une composante aussi naturelle et nécessaire que l'eau qu'ils boivent ou l'air qu'ils respirent. D'où cela vient-il ? On s'en fout !!! Comment cela est-il produit ? Rien à cirer !!! Quelles conséquences cela a-t-il pour l'environnement ? Basta !!! Cela ne nous regarde pas. Nous avons un droit imprescriptible d'accès à la ressource. Nous en priver, c'est une atteinte intolérable à ce droit !!!

Il y a de la pensée magique dans la façon dont nous consommons l'électricité : comme l'esprit totémique qui habite le fétiche, la force est là, de toute sa présence, invisible et pourtant efficace. Nous ne pouvons plus nous passer de l'électricité. Peu importe d'où elle vient, peu importe ses modes de production, mais par pitié : « Cachez ce sein que je ne saurais voir ». Entre l'électricité et l'écologie, nous sommes dans le fond d'une immense hypocrisie.

Je me demande si les responsables politiques et industriels n'auraient pas intérêt à méditer sur cet aspect du problème. L'équation à résoudre est : comment rendre les éoliennes aussi invisibles que l'électricité qu'elles produisent.

Voilà ce que je dis, moi.

Note : je crois inutile de traiter à part le cas de tous les engins électriques fonctionnant sur batterie, au premier rang desquels figurent le smartphone (avec tous ses semblables, analogues, cousins et autres parents plus ou moins éloignés) et l'automobile électrique, qui nous est vendue comme une solution miracle par toutes sortes d'imposteurs. Car l'électricité dont ils sont plus ou moins voraces, il faut bien la produire quelque part avant de la stocker. Je m'amuse au passage de la dépendance où sont leurs propriétaires de la présence dans leur environnement immédiat d'un nombre suffisant de prises électriques pour pouvoir y brancher tous les cordons de tous leurs ... "chargeurs". Tiens, tiens ! Vous avez dit "chargeurs" ? Mais quel genre de chargeur ? Ci-dessous du 5,56 OTAN.

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samedi, 15 juin 2019

ECOLOGIE = ANTICAPITALISME 2/2

2

Donc l’anticapitalisme dont je parle n'est en rien "communiste", mais exclusivement écologique, et l'écologie authentique dont je parle est exclusivement anticapitaliste, sachant qu'il ne s'agit ici en aucune manière d'un choix "politique" au sens pépère (= gauche/droite), tout au plus d'un choix politique, au sens où l'entendaient les Grecs, impliquant la décision de tout le corps social dans le choix de son organisation et de son mode de vie.

Car le seul, l'unique, l'exclusif coupable des crimes écologiques actuels (pillage des ressources, destructions innombrables, poubellisation généralisée, ...), c'est le capitalisme industriel et productiviste. Et ce brillant résultat a été vendu à l’humanité grâce à un argumentaire où scintillaient toutes les promesses miraculeuses : l’arracher à la malédiction biblique de la souffrance et du travail, et lui apporter tout à la fois bonheur, prospérité, confort et raton laveur.

L’économie capitaliste a atteint cet objectif, inutile de le nier, et chacun (moi compris) est heureux ou désireux de profiter de ses apports. Au passage, c'est fou ce qu'elle a pu inventer et fabriquer en matière de ratons laveurs superflus et inutiles, pour amuser, divertir, détendre, détourner l'attention, etc. Et s'enrichir. Je veux évidemment parler des "gadgets" et autres marchandises sans utilité, le raisonnement étant fondé sur : « Qu'est-ce qu'on pourrait bien trouver à leur vendre ? ».

Cette réussite a été rendue possible par l’invention de toutes sortes de moteurs, je veux dire de moyens de produire de la force (vapeur, pétrole, électricité, …) par des moyens artificiels (je fais abstraction du moulin à vent, de la voile ou de la roue à aube, qui ne faisaient qu’utiliser – intelligemment – l’énergie produite par la nature). Avec le moteur, l’homme a forcé la nature à lui donner infiniment plus que ce dont elle était capable spontanément.

Bien sûr, un moteur consomme le potentiel énergétique qu'on lui injecte, et la quête effrénée de sources d'énergie qui en découle est une partie cruciale du problème actuel. Toute la civilisation actuelle repose sur le moteur et son carburant. C'est sur le moteur que l'humanité a fait retomber l'essentiel de la quantité de travail. Enlevez le moteur, que reste-t-il ? Tout le monde à la réponse : de combien de moteurs nous servons-nous dans une journée ?

Le capitalisme a donc réussi, mais d'une part en réservant tous les fruits de la récolte à une infime minorité de privilégiés (pays "riches"), et d'autre part en prenant soin, tout au long de son développement, de glisser sous le tapis toutes les saloperies que la machine qu’il avait mise en route jetait à tous les vents, dans toutes les eaux, dans tous les sols et dans tous les êtres.

Il y a maintenant plus d’un demi-siècle que de grands illuminés (la liste est connue) ont été assez perspicaces pour voir que le "développement" étendu à tous les pays conduisait à une impasse, que le tapis n'était plus assez grand pour tout cacher, et que les saloperies commençaient à déborder par tous les pores de la nouvelle civilisation. Ils furent aussi assez inconscients pour proclamer cette vérité à la face du monde, en tenant pour négligeable de passer pour des rigolos ou des faux prophètes. C’est pourtant eux qui avaient raison, c’est aujourd’hui avéré. Et il est sans doute trop tard pour remédier à la folie qui a produit la catastrophe à laquelle nous assistons sans trop nous en formaliser encore (ça commence à remuer vaguement, mais concrètement ? et à quel rythme ?).

Le capitalisme productiviste et technico-industriel s'est imposé il y a deux siècles. A partir de là, il a répandu le Mal (la démesure). Nos ancêtres y ont goûté : ils ont trouvé le Mal délectable, ils en ont vu les bienfaits présents, les bénéfices futurs et, pour tout dire les « progrès » promis à l’humanité. Ils ont donc accueilli le Mal à bras ouverts, avec joie et fierté, persuadés d’œuvrer pour le Bien. Ils ont bu jusqu'à l'ivresse le philtre d'amour du progrès technico-industriel offert par Méphisto (voir le second Faust, je ne sais plus dans quelle scène), qui devait rendre l'humanité puissante et invulnérable. Tragique erreur. 

Et nous-mêmes en sommes tellement gorgés qu’il est devenu indissociable de notre être. Qu'il est devenu notre chair, notre nature, c'est bizarre, mais c'est comme ça. Nous respirons capitaliste, nous mangeons capitaliste, nous buvons capitaliste, nous forniquons capitaliste, nous déféquons capitaliste, nous dormons capitaliste, nous éduquons capitaliste, nous pensons capitaliste, etc. La moindre de nos cellules est capitaliste jusqu'au noyau. Comment logerait-on un écologiste dans ce milieu hostile ?

En un mot : chacun de nous est tout entier capitaliste, de la tête aux pieds, du sol au plafond, du cœur à la peau, du fond à la surface et de la naissance à la mort. Mieux : chacun de nous (y compris moi) est en soi un capitalisme en réduction, puisqu'il en est le produit, et militant avec ça, puisque le fait de consommer alimente le système (comment faire autrement ?). Chacun de nous se trouve dès sa naissance petit porteur de tout le capitalisme. Chacun de nous devient dès lors une parcelle vivante du système capitaliste.

Nous n'avons pas le choix : au mieux, complices taraudés par le doute ; au pire, partisans enthousiastes. Qu'ils soient velléitaires ou résolus, portés par la mauvaise conscience ou par la haine, tièdes ou bouillants, qu'ils aient la ferme intention de détruire le capitalisme ou qu'ils travaillent à le corriger ou à l'améliorer, les ennemis du système sont eux aussi pris dans le système, et du coup sont bourrés de contradictions.

Je veux dire que nous sommes tous si intimement imprégnés de ce que le capitalisme a fait du monde et des hommes qu’il est absolument inenvisageable de nous enlever la moindre parcelle du système sans nous arracher un morceau vital de chair. Nous hurlerions sous la torture. Il suffit pour s’en rendre compte de voir ce que nous coûtera l’abandon de misères telles que les touillettes, les cotons-tiges, et tous les objets en plastique à usage unique. Ne parlons pas du smartphone.

Alors dans ces conditions, tout ce que proposent sincèrement les gens conscients, actifs et responsables pour que le pire n’arrive jamais, tous les appels aux gouvernants, aux puissants, aux industriels et même aux individus, tout cela n’est que poudre de perlimpinpin, miroir aux alouettes, faux espoirs et charlatanerie. Tous les « Discours de Politique Générale » de tous les Edouard Philippe auront beau se « teinter de vert » (« Plus personne  n’a aujourd’hui le monopole du vert ! », a-t-il textuellement scandé le 12 juin), on restera très loin du compte. Je dirai même : à côté de la plaque.

Et le succès de Yannick Jadot aux élections européennes reste, sur le planisphère des activités humaines, une voie de garage, même s'il indique la persistance d'un sentiment de culpabilité des populations à l'égard de la nature naturelle (enfin, ce qui en subsiste) : à quel taux de probabilité s'élèvent ses capacités d'action efficace ? Ses possibilités de transformer l'existant ? Combien sont-ils, les Verts, au Parlement européen ? Et qu'est-ce que le Parlement européen, dans le vaste chaudron de la mondialisation ?

***

Cette hypocrisie générale, ce mensonge n’est plus de mise. Thomas Piketty a bien raison d'intituler sa chronique du Monde du 9 juin 2019 "L'illusion de l'écologie centriste". Malheureusement, il se contente d'observer les jeux de vilains des politicards en présence, du coup la portée de son papier en souffre. Ce n’est pas de demi-mesures, d'accommodements courtois, de corrections à la marge, de remèdes de surface que l’humanité a besoin : ce serait d’un retour radical et volontaire à une conception raisonnable de tous nos rapports avec le monde. Carrément l'utopie, quoi !

C’est précisément cette conception que nous avons perdue et oubliée depuis deux siècles : nous avons quitté sans retour le monde ancien. Et malgré tous les hypocrites "c'était mieux avant" ou "c'était le bon temps", nous nous félicitons à chaque instant, par nos gestes mêmes, du fait que ce monde ancien nous soit devenu étranger (ringard, vieillot, suranné, etc.). Si par extraordinaire nous décidions de retrouver ce mode de vie (frugalité, sobriété, etc.), l’événement serait d’une violence insoutenable (y compris pour moi).

Vous imaginez la quantité astronomique de travail qui nous retomberait sur le dos ? Ce serait une conversion infiniment douloureuse. De façon plus réaliste, je crois que la perte est définitive et irréversible : on n'arrête pas une machine qui a les dimensions de la planète et qui régente l'existence de (presque) tout le monde..

Et si beaucoup de gens souhaitent "faire des gestes pour la planète" (nous culpabilisons), personne n'a vraiment compris. Je veux dire que personne n'est prêt (moi compris) à perdre tout ce qu'il faudrait pour retrouver l'équilibre perdu. Parce que ce serait individuellement trop coûteux. Sans même parler des efforts constants du système pour accroître sa puissance et son emprise, personne ne peut s'extraire de l'engrenage, même les écologistes convaincus, qui aiment se raconter de belles histoires (consommer "bio", circuits courts, agriculture raisonnée, permaculture, etc.). A quelle hauteur s'élève leur refus du système ? Leurs concessions au système ? Tout ça ressemble à : « Encore quelques minutes, monsieur le bourreau ! ».   

Il nous faudrait réapprendre tout ce que nos ancêtres connaissaient par cœur. Dans quelle école apprendrions-nous aujourd’hui ce dont nous nous sommes dépouillés avec soulagement et enthousiasme il y a deux siècles et dont nous avons perdu la mémoire ? Comment trouverions-nous, sept milliards que nous sommes, un terrain d’entente avec la nature, avec la planète, avec le monde, bref : avec les nécessités irréductibles de la nature et des éléments ?

Quel coup de baguette magique nous inculquerait le sens et le respect des limites à ne pas dépasser, que l’humanité a respectées pendant pas mal de millénaires, et dont nous avons fait en deux cents ans des guenilles indignes d’être portées, que nous avons jetées aux orties ? L'humanité présente éprouve une haine viscérale des limites, comme le montrent à profusion les inventions des "créateurs culturels" dans leurs spectacles où fourmillent la transgression, l'attentat aux tabous, le franchissement des limites. Après toutes les Déclarations des droits humains, à quand la signature solennelle de la Déclaration Universelle des Limites Humaines ?

L’humanité présente est une Cendrillon qui n’a pas entendu les douze coups de minuit : il nous reste la citrouille, les rats et les trous dans la pantoufle de vair. Grâce à la machine du capitalisme industriel et productiviste, l’humanité retournera dans son taudis avec les pieds écorchés.

Malheureusement, il nous reste quand même, indéracinable, le rêve de la splendeur du palais princier, le rêve des vêtements chamarrés du bal de la cour. Il nous reste le rêve du bonheur définitif, le rêve de l’abondance des biens, le rêve des fontaines où coulent l’or de nos désirs et les diamants de la certitude de pouvoir les assouvir : la créativité humaine (l'innovation technique) reste pour nous infinie, et nous n'avons ni les moyens ni l'envie d'inverser le cours de l'histoire.

L’humanité présente rêve. Elle vit dans un conte de fées. Elle a fait de la planète un Disneyland géant en même temps qu'une poubelle, et n’envisage à aucun prix d’en sortir. L’humanité, qui a les pieds dans la merde, ne renonce pas à ses rêves sublimes, et ce ne sont pas les écologistes qui la réveilleront. La réalité l’attend au coin du bois.

« La mort lui fit au coin d'un bois le coup du père François ».

"Grand-père", Georges Brassens.

En résumé, si, pour être écologiste, il faut détruire le capitalisme, il faudrait en même temps dire comment on fait. Jusqu'ici, le capitalisme a régulièrement prouvé qu'il était increvable : il a tout digéré, y compris ses pires ennemis. Paul Jorion déclarait assez justement que les capitalistes ne feraient quelque chose pour sauver la planète que si ça leur rapportait. Autrement dit : aucune issue. Tant que l'écologie ne consiste qu'en pratiques fort sympathiques, mais infinitésimales, soigneusement montées en épingle par ses partisans, et qu'elle n'a, à part ça, que des mots à opposer au système capitaliste, celui-ci peut dormir tranquille : il ne sera pas dérangé.

Moralité : être écologiste aujourd'hui, ça n'existe pas. Et ça n'est pas près d'exister.

Voilà ce que je dis, moi.

vendredi, 14 juin 2019

ÉCOLOGIE = ANTICAPITALISME 1/2

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Toutes les grandes âmes, politiques ou autres, se rendent compte aujourd’hui que les populations électorales et consommatrices sont de plus en plus préoccupées par l’état de la planète, le changement climatique, l’empoisonnement chimique de l’environnement et autres réalités antipathiques. En un mot, les populations sont de plus en plus sensibles aux questions écologiques.

Pour leur donner l’impression qu’ils gardent un peu la maîtrise des choses, tous les "amis du peuple" qui briguent ses suffrages ont inscrit la protection de l’environnement à leur programme, sous forme de quelques virgules verdâtres, quelques phrases de sinople ou quelques paragraphes smaragdins, bref : des déclarations d'intention. Disons-le : ils veulent juste faire joli, et ça ne tire pas à conséquence. Le programme du parti écologiste lui-même, dont le chef provisoire ne vise rien de moins que la conquête du pouvoir (déclaration récente de Yannick Jadot), est – et c’est logique – entièrement consacré à ce thème. 

Tous ces braves gens mentent effrontément. Ils mentent quand ils parlent de « développement durable ». Ils mentent quand ils parlent de « croissance verte ». Ils mentent quand ils enfourchent le cheval des « énergies renouvelables ». Ils mentent quand ils parlent de « consommateurs responsables » et de « tri sélectif ». Et la chaîne Biocoop se fout de nous, avec son slogan sur le "consommacteur". Pour résumer, dans la vie politique, l'écologie reste une potiche garnie d'une plante verte dans un coin de la scène où pérorent les responsables.

S’agissant d’écologie et de défense de l’environnement, il n’y a qu’une seule vérité : personne n’est écologiste s’il n’est pas résolument anticapitaliste. Aucun humain ne peut se prétendre écologiste s’il ne considère pas le capitalisme comme l’Ennemi à détruire. Toute autre position, qui accepte de transiger avec ce principe est une lâcheté, une tricherie, un mensonge, une imposture. Partant de cette prémisse, on aura beau chercher un écologiste avec une lanterne à la main, on n'en trouvera pas. Cela veut dire accessoirement que tout le monde ment, y compris les écologistes estampillés.

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Le titre de ce billet est en soi un pléonasme. Pour être vraiment écologiste, il faut être un anticapitaliste résolu. J'avoue que, politiquement, le problème est difficile à résoudre. Dans les croyances les plus répandues, se déclarer anticapitaliste, c'est automatiquement être étiqueté bolchevique, marxiste, collectiviste, communiste, et toutes ces vieilles représentations armées d'un couteau entre les dents, où la planification autoritaire voisine avec la police politique, le Goulag, le KGB et les charmants souvenirs qu’a laissés le camarade Staline, petit père des peuples par antiphrase.

Cet anticapitalisme-là est une sinistre farce qui a été soigneusement entretenue par l'armée des agents de l'URSS à l'étranger connus sous le nom de "partis communistes". Car contrairement à la légende, l’URSS n’était pas anticapitaliste (Lénine a réprimé les premiers vrais soviets) : après 1945, elle fut seulement antiaméricaine. Et ça change tout. Ce qu'on nous a présenté pendant presque un siècle comme la patrie de l'anticapitalisme n'était ni plus ni moins qu'un autre système capitaliste, mais un capitalisme d'Etat, c'est-à-dire opposé au capitalisme à l'américaine, fondé, lui, sur la libre entreprise et l'initiative individuelle.

Dans l'un, tout était fait pour favoriser la libération des énergies des hommes entreprenants et courageux, dans l'autre, tout était administré par le couvercle d'une bureaucratie tatillonne et policière. – Soit dit par parenthèse, le rejeton bâtard de l'URSS nommé Nouveau Parti Anticapitaliste (Olivier Besancenot) ne fait que brouiller la donne. Heureusement : qui y croit ? Je ferme la parenthèse.

En dehors de cette différence – cruciale pour ce qui est des droits de l'homme – on aurait pu calquer à peu près le système soviétique sur le système américain : les deux s'entendaient à merveille pour faire de l’industrialisme et du productivisme à outrance l'alpha et l'oméga de la perfection des inventions humaines (voir par exemple la course à la bombe, la course à la Lune, les Jeux olympiques, ...). Le seul moteur qui alimentait l'antagonisme sauvage (quoique mimétique) que tout le monde prenait pour une incompatibilité de nature, une antinomie essentielle, c'était la performance dans tous les domaines possibles.

On se souvient du mythe de Stakhanov, ce "héros" du prolétariat mondial capable de remonter du fond de la mine cinq fois plus de charbon que le communiste ordinaire ; on se souvient de la souveraineté du "Plan" dont, systématiquement, le Soviet suprême concluait a posteriori que "le bilan était globalement positif". L'Amérique et l'URSS se sont simplement tiré la bourre pendant un demi-siècle pour savoir lequel des deux serait capable d'étouffer l'autre sous la masse supérieure de ses performances économiques, scientifiques et militaires chiffrées.

L'URSS a trahi tous les gogos qui ont cru aux "lendemains qui chantent". Une trop longue illusion qui a plongé toutes les gauches et les travailleurs de la planète entière dans la stupeur et le découragement quand l'imposture, au début des années 1990, s'est brutalement révélée pour ce qu'elle était, et que le "communisme" s'est désintégré sous nos yeux, dans une déflagration soudaine, comme par un effet de prestidigitation, où les apparatchiks purs et durs ont su se glisser du jour au lendemain dans le costume rutilant (et mafieux) des "oligarques" gourmands et forcenés. L'URSS abattue a laissé le champ libre aux Etats-Unis, qui ont pu croire que l'ennemi était définitivement à terre, et qu'il ne se relèverait jamais.

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Vignette quasi-conclusive de Les Secrets de la Mer noire, de Bergèse et De Douhet, n°45 de la série "Buck Danny". Le volume est paru en 1994 !!!

Pour ce qui est du productivisme, de l’industrialisme et de la destruction de la nature, USA et URSS s’entendaient comme larrons en foire, avec cependant une prime aux soviétiques qui se souciaient de la vie humaine et de la sauvegarde de l'environnement encore moins que les Américains (c'est tout dire), comme l’ont montré les premières interventions après l’accident de Tchernobyl (voir La Supplication, de Svetlana Alexievitch, Lattès, 1998). Et il paraît qu’il vaut mieux ne pas tremper un orteil dans les eaux de Mourmansk ou de la Mer blanche, à cause des déchets innommables qui y ont été immergés.

Le capitalisme, incarné par son champion américain, est un anti-écologiste endurci, c'est sa nature, on le sait. Mais son ennemi déclaré, la soi-disant anticapitaliste et "communiste" URSS, était encore plus anti-écologiste que lui. L'écologie est le seul anti-capitalisme authentique.

A suivre.