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vendredi, 08 novembre 2019

CABU : L'ART DE CROQUER

Le trait de Cabu.

Ici, rien que des "anonymes" qui mériteraient de ne pas l'être, tirés de ses 

« reportages dans la France profonde », publiés dans Charlie Hebdo.

 

DANS LA BRIE LES POIVROTS.jpgILLUMINES 1.jpgMARSEILLE 1.jpgDANS LA BRIE LE VIEUX.jpgMARSEILLE 2.jpgMARSEILLE 4.jpgMERE DENIS SON DEFENSEUR.jpg

 

RENNES 3.jpgRENNES 2.jpgRENNES 1.jpg ST MARTIN S OREUSE 2.jpgTOULOUSE PARA.jpgTOULOUSE PUNK.jpg 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

Alors là, le para ? Ou bien le punk ?

Que ce soient des trognes, des trombines, des bouilles ou des bobines, l'art du trait de Cabu fait mouche à tous les coups.

jeudi, 07 novembre 2019

QUELQUES DESSINS DE CABU

Qu'on me dise quel dessinateur arrive à la cheville de Cabu.

STRUTHOF.jpg

Regardez ce trait, rapide, sans repentir. Et tout est là, typé, concret : Cabu photographe.

("Une visite en famille au camp du Struthof, en Alsace".)

FLAMANVILLE.jpg

Là, on est à Flamanville : Cabu portraitiste.

DAMPIERRE EN BURLY.jpg

Cabu paysagiste. Une grue est tombée, quatre morts : Cabu indique l'emplacement des traces de leur sang.

CORSE.jpg

Encore des trognes : ici des Corses. Le gars en face a mal compris le nom de la revue. Visiblement, ça fait bien marrer Cabu.

cabu,dessin de presse,charlie hebdo

Pédagogie-éclair sur la formation des prix au détail.

LOURDES 2.jpg

La marchande de souvenirs de la Vierge chasse du temple le marchand de tapis.

LOURDES 1.jpg

Histoire sans paroles.

mardi, 05 novembre 2019

MÉCANIQUE D'UNE ÉMOTION NATIONALE

RECONSTITUTION DU DÉROULEMENT IMAGE PAR IMAGE D'UNE ÉMOTION NATIONALE.

***

Daté vendredi 9 janvier 2015 (c'est-à-dire paru le jeudi 8 après-midi).

9 JANVIER.jpg

***

Daté samedi 10 janvier 2015.

10 JANVIER.jpg

***

Daté dimanche 11-Lundi 12 janvier 2015.

11 JANVIER.jpg

***

Daté mardi 13 janvier 2015.

13 JANVIER.jpg

***

Daté mercredi 14 janvier 2015.

14 JANVIER.jpg

***

Daté jeudi 15 janvier 2015

15 JANVIER.jpg

***

Daté vendredi 16 janvier 2015.

16 JANVIER.jpg

L'événement occupe l'entièreté de la "une" dans six des sept ici présentes. Ça, c'est pour symboliser l'unité nationale. La septième "une" est de nouveau divisée, comme avant l'événement. Ça, c'est pour indiquer le retour à la norme (au "débat").

***

Moralité : l'émotion, il vaut mieux ne pas s'y fier. La preuve ? Combien aujourd'hui pour dire : « Je suis Charlie » ? Et je ne suis pas sûr de ne pas penser autant de mal de toutes les manifestations publiques des émotions.

Je n'arrive pas à comprendre pourquoi toujours les mêmes "marches blanches", pourquoi toujours les mêmes banderoles proclamant "Plus jamais ça !" Tout le monde le sait parfaitement : la source des circonstances qui motivent ces manifestations n'est pas près de se tarir.

Il ne faudrait pas que ça devienne un automatisme : ça risquerait de devenir « du mécanique plaqué sur du vivant » (Bergson) !

***

J'ajoute (nous sommes toujours le mardi 5 novembre) que les émotions collectives, quand elles deviennent utilisables par des pouvoirs, deviennent des instruments d'oppression d'autant plus inquiétants qu'ils s'exercent hors de la conscience. Celui qui, par son savoir-faire ou son charisme propre, parvient à capter la force émanée de l'émotion spontanée, devient illico un chef, un Führer, un Guide. 

Moralité : politiquement, l'émotion, c'est le Mal.

Voilà ce que je dis, moi.

samedi, 26 octobre 2019

GÉBÉ TOUJOURS ACTUEL

DES "FÜHRER" COMME S'IL EN PLEUVAIT.

Nous n'avons plus besoin d'Hitler. Nous n'avons plus besoin de nous faire peur avec l'épouvantail historique inventeur des chambres à gaz. Nous n'avons plus besoin de nous convaincre qu'Hitler était un monstre, c'est-à-dire qu'il n'avait rien à voir avec l'humanité normale. En un mot : qu'il n'appartenait pas à l'espèce humaine. Nous savons qu'Hitler était un homme ordinaire, tout comme vous et moi.

L'ordre fondé par Hitler n'est pas sans quelque ressemblance, en effet, avec l'ordre du monde tel qu'il est aujourd'hui. La différence, énorme et mince tout à la fois, c'est que l'ordre actuel a reçu l'adhésion générale, certes davantage de fait que de volonté, des foules ordinaires.

Ils sont une minorité insignifiante, les gens qui doutent radicalement de la légitimité de cet ordre.  Chaque jour, par nos gestes, nos choix, nos comportements, nous consentons à l'ordre tel qu'il est façonné. Comment exprimer de façon non dérisoire la légitimité de notre doute ?

Prenez l'eugénisme : quand c'était une pratique du régime nazi, c'était tellement horrible que c'était un crime contre l'humanité ; aujourd'hui, où l'on empêche de naître les futurs trisomiques et autres mal formés, c'est une conquête des progrès de la médecine.

Voici ce que dessinait Georges Blondeaux, alias Gébé, dans La Gueule ouverte n°16 (cela devait être en 1974, le grand Pierre Fournier, fondateur de la revue, était déjà mort). Il dénonçait l'emprise des méga-entreprises qui faisaient régner leur ordre économique sur le monde. Les populations ordinaires menaient leur vie ordinaire, déjà encadrées par cet ordre. Bien obligées.

GUEULE OUVERTE N°16.jpg

C'étaient déjà les maîtres du monde. Des Führer comme s'il en pleuvait. Les méga-entreprises du dessin original ne s'occupaient (impérieusement) que de prospérer, de vendre et de dégager de grosses marges bénéficiaires pour distribuer de gros dividendes à leurs actionnaires. 

GUEULE OUVERTE.jpg

Chaque fois que je fais un geste par l'intermédiaire de ces modernes "Führer", je vote pour lui : c'est lui qui me "guide".

La situation n'a pas changé : elle est simplement beaucoup plus inquiétante. Car les méga-entreprises ici présentes ont simplement ajouté leurs activités aux précédentes, qui continuent à prospérer comme autrefois. Elles obéissent à la même logique d'accumulation capitaliste.

Mais en plus, elles ont pris possession des cerveaux. Il y a eu intrusion : ce sont les activités ordinaires des populations (ce qu'elles disent aux intimes, ce qu'elles pensent, et pas seulement ce qu'elles achètent, ...) qui constituent le gisement inépuisable des profits.

On avait déjà à faire au conditionnement établi du consommateur ordinaire. On a maintenant à faire à l'intrusion des calculs économiques dans les replis les plus secrets de l'âme individuelle. 

Utiliser les services de ces géants économiques, c'est remplir les poches des nouveaux "Führer".

***

Gébé était un bon copain de Gotlib qui, dans sa Rubrique-à-brac, avait donné sa bobine à son commissaire Bougret. Quant à son nom (Georges Blondeaux), il l'avait donné à son criminel patenté, qui avait furieusement, pour sa part, la gueule de René Goscinny.

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***

Note (27 octobre) : j'ai omis de préciser que le dessin de Gébé figurait en "une" du n°16 de La Gueule ouverte (février 1974) sous le titre suivant, que je trouve évocateur, et tout à fait dans l'optique où je l'ai présenté. Les GAFA dont on parle aujourd'hui sont encore plus puissants qu'à l'époque, puisqu'ils échappent totalement à l'autorité des Etats (mais l'Etat américain se félicite de la chose).

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***

Et pour enfoncer le clou de cette vision des choses, voici la une de juin 1974 par le grand Cabu.

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GÉBÉ TOUJOURS ACTUEL

DES "FÜHRER" COMME S'IL EN PLEUVAIT.

Nous n'avons plus besoin d'Hitler. Nous n'avons plus besoin de nous faire peur avec l'épouvantail historique inventeur des chambres à gaz. Nous n'avons plus besoin de nous convaincre qu'Hitler était un monstre, c'est-à-dire qu'il n'avait rien à voir avec l'humanité normale. En un mot : qu'il n'appartenait pas à l'espèce humaine. Nous savons qu'Hitler était un homme ordinaire, tout comme vous et moi.

L'ordre fondé par Hitler n'est pas sans quelque ressemblance, en effet, avec l'ordre du monde tel qu'il est aujourd'hui. La différence, énorme et mince tout à la fois, c'est que l'ordre actuel a reçu l'adhésion générale, certes davantage de fait que de volonté, des foules ordinaires.

Ils sont une minorité insignifiante, les gens qui doutent radicalement de la légitimité de cet ordre.  Chaque jour, par nos gestes, nos choix, nos comportements, nous consentons à l'ordre tel qu'il est façonné. Comment exprimer de façon non dérisoire la légitimité de notre doute ?

Prenez l'eugénisme : quand c'était une pratique du régime nazi, c'était tellement horrible que c'était un crime contre l'humanité ; aujourd'hui, où l'on empêche de naître les futurs trisomiques et autres mal formés, c'est une conquête des progrès de la médecine.

Voici ce que dessinait Georges Blondeaux, alias Gébé, dans La Gueule ouverte n°16 (cela devait être en 1974, le grand Pierre Fournier, fondateur de la revue, était déjà mort). Il dénonçait l'emprise des méga-entreprises qui faisaient régner leur ordre économique sur le monde. Les populations ordinaires menaient leur vie ordinaire, déjà encadrées par cet ordre. Bien obligées.

GUEULE OUVERTE N°16.jpg

C'étaient déjà les maîtres du monde. Des Führer comme s'il en pleuvait. Les méga-entreprises du dessin original ne s'occupaient (impérieusement) que de prospérer, de vendre et de dégager de grosses marges bénéficiaires pour distribuer de gros dividendes à leurs actionnaires. 

GUEULE OUVERTE.jpg

Chaque fois que je fais un geste par l'intermédiaire de ces modernes "Führer", je vote pour lui : c'est lui qui me "guide".

La situation n'a pas changé : elle est simplement beaucoup plus inquiétante. Car les méga-entreprises ici présentes ont simplement ajouté leurs activités aux précédentes, qui continuent à prospérer comme autrefois. Elles obéissent à la même logique d'accumulation capitaliste.

Mais en plus, elles ont pris possession des cerveaux. Il y a eu intrusion : ce sont les activités ordinaires des populations (ce qu'elles disent aux intimes, ce qu'elles pensent, et pas seulement ce qu'elles achètent, ...) qui constituent le gisement inépuisable des profits.

On avait déjà à faire au conditionnement établi du consommateur ordinaire. On a maintenant à faire à l'intrusion des calculs économiques dans les replis les plus secrets de l'âme individuelle. 

Utiliser les services de ces géants économiques, c'est remplir les poches des nouveaux "Führer".

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Gébé était un bon copain de Gotlib qui, dans sa Rubrique-à-brac, avait donné sa bobine à son commissaire Bougret. Quant à son nom (Georges Blondeaux), il l'avait donné à son criminel patenté, qui avait furieusement, pour sa part, la gueule de René Goscinny.

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Note (27 octobre) : j'ai omis de préciser que le dessin de Gébé figurait en "une" du n°16 de La Gueule ouverte (février 1974) sous le titre suivant, que je trouve évocateur, et tout à fait dans l'optique où je l'ai présenté. Les GAFA dont on parle aujourd'hui sont encore plus puissants qu'à l'époque, puisqu'ils échappent totalement à l'autorité des Etats (mais l'Etat américain se félicite de la chose).

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Nous n'avons plus besoin d'Hitler. Nous n'avons plus besoin de nous faire peur avec l'épouvantail historique inventeur des chambres à gaz. Nous n'avons plus besoin de nous convaincre qu'Hitler était un monstre, c'est-à-dire qu'il n'avait rien à voir avec l'humanité normale. En un mot : qu'il n'appartenait pas à l'espèce humaine. Nous savons qu'Hitler était un homme ordinaire, tout comme vous et moi.

L'ordre fondé par Hitler n'est pas sans quelque ressemblance, en effet, avec l'ordre du monde tel qu'il est aujourd'hui. La différence, énorme et mince tout à la fois, c'est que l'ordre actuel a reçu l'adhésion générale, certes davantage de fait que de volonté, des foules ordinaires.

Ils sont une minorité insignifiante, les gens qui doutent radicalement de la légitimité de cet ordre.  Chaque jour, par nos gestes, nos choix, nos comportements, nous consentons à l'ordre tel qu'il est façonné. Comment exprimer de façon non dérisoire la légitimité de notre doute ?

Prenez l'eugénisme : quand c'était une pratique du régime nazi, c'était tellement horrible que c'était un crime contre l'humanité ; aujourd'hui, où l'on empêche de naître les futurs trisomiques et autres mal formés, c'est une conquête des progrès de la médecine.

Voici ce que dessinait Georges Blondeaux, alias Gébé, dans La Gueule ouverte n°16 (cela devait être en 1974, le grand Pierre Fournier, fondateur de la revue, était déjà mort). Il dénonçait l'emprise des méga-entreprises qui faisaient régner leur ordre économique sur le monde. Les populations ordinaires menaient leur vie ordinaire, déjà encadrées par cet ordre. Bien obligées.

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C'étaient déjà les maîtres du monde. Des Führer comme s'il en pleuvait. Les méga-entreprises du dessin original ne s'occupaient (impérieusement) que de prospérer, de vendre et de dégager de grosses marges bénéficiaires pour distribuer de gros dividendes à leurs actionnaires. 

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Chaque fois que je fais un geste par l'intermédiaire de ces modernes "Führer", je vote pour lui : c'est lui qui me "guide".

La situation n'a pas changé : elle est simplement beaucoup plus inquiétante. Car les méga-entreprises ici présentes ont simplement ajouté leurs activités aux précédentes, qui continuent à prospérer comme autrefois. Elles obéissent à la même logique d'accumulation capitaliste.

Mais en plus, elles ont pris possession des cerveaux. Il y a eu intrusion : ce sont les activités ordinaires des populations (ce qu'elles disent aux intimes, ce qu'elles pensent, et pas seulement ce qu'elles achètent, ...) qui constituent le gisement inépuisable des profits.

On avait déjà à faire au conditionnement établi du consommateur ordinaire. On a maintenant à faire à l'intrusion des calculs économiques dans les replis les plus secrets de l'âme individuelle. 

Utiliser les services de ces géants économiques, c'est remplir les poches des nouveaux "Führer".

***

Gébé était un bon copain de Gotlib qui, dans sa Rubrique-à-brac, avait donné sa bobine à son commissaire Bougret. Quant à son nom (Georges Blondeaux), il l'avait donné à son criminel patenté, qui avait furieusement, pour sa part, la gueule de René Goscinny.

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samedi, 05 octobre 2019

LE GÉNIE DE CABU

Cabu est mort en 2015, en pleine possession de ses facultés.

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Cabu, immortalisé par son fils Mano.

Chirac est mort en 2019, et certains susurrent qu'il était gaga. Cela n'empêche pas que tout le monde y est allé de sa larme et de son anecdote personnelle sur le cercueil de celui qui est désormais désigné par les sondages comme étant le meilleur président qu'ait eu la V° République (énormité proférée par le gloubiboulga qu'on appelle "opinion publique"). Tous ces refrains ne font que reprendre la musique dont Georges Brassens avait enrobé ces paroles définitives :

« Il est toujours joli, le temps passé,

Une fois qu'ils ont cassé leur pi-ipe,

On pardonne à tous ceux qui nous ont offensé,

Les morts sont tous des braves ty-ypes ».

On a moins entendu rappeler le slogan que portaient les banderoles dans les rues de France après le 21 avril 2002 : « Plutôt l'escroc que le facho ». Les électeurs ne voulaient certes pas de Jean-Marie Le Pen, mais ils ne se faisaient aucune illusion sur les qualités morales intrinsèques de l'homme qui lui était opposé. Résultat : 82% ! Tous les bons vivants auraient aimé se retrouver à table avec Chirac, et tout le monde se souvient de sa poignée de main, généreuse et franche, quelles que fussent les circonstances.

Tout le monde (ou presque) a oublié le reste. Est-ce que c'était Chirac, l'histoire de la chasse d'eau qu'on tirait chaque fois qu'on ouvrait le coffre-fort pour en sortir des billets de banque ? Je ne sais plus, mais on pourrait aussi parler du château de Bity et de sa restauration complète, qui n'avait pas coûté trop cher au couple Chirac.

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Tiens, à propos de poignée de main (et le regard lourd de sous-entendus que Cabu a fait à la vache !).

Heureusement, tout le monde n'a pas la mémoire sélective, et Le Canard enchaîné ne s'est pas fait faute, le mercredi 2 octobre, de rappeler quelques épisodes qui ont accompagné les quarante ans de "vie politique" de ce "dernier grand fauve", comme certains anciens adversaires ont consenti à le qualifier devant les micros, pour mieux disqualifier la profession de politicien. Et pour rendre cet "hommage", le Canard a donné avec raison la place d'honneur à Cabu. Tous les dessins (sauf un) de la page 4 sont signés Cabu. Heureusement qu'il y a le Canard pour se souvenir de Cabu et de toutes les faces cachées de Chirac, que le dessinateur adorait croquer et mettre au premier plan.

Cabu est mort il y aura bientôt cinq ans. Il n'a pas été remplacé. Nul n'a hérité son trait virtuose qui savait saisir un geste, dessiner un visage, synthétiser une situation, ni son regard souvent féroce, qui atteignait la cible au cœur. Quelques-uns seulement savent, comme lui, faire rire au sujet de réalités (à commencer par les fripouilleries impunies) plutôt faites pour susciter la rage.

ZCHIRAC3.jpg

Inutile de faire l'éloge de Cabu : je ne me console pas de sa perte. Quelques dessinateurs s'efforcent de lui emboîter le pas et de porter la plume dans la plaie. La plupart collaborent précisément au Canard enchaîné : Pétillon, Aurel, Lefred-Thouron, Dutreix, Diego Aranega, l'indétrônable Escaro, Delambre, Wozniak, Kerleroux, Kiro, plusieurs autres. Dutreix, après l'attentat, avait donné un dessin extraordinaire (Cabu est le plus chevelu de l'équipe).

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Le Canard enchaîné est le dernier refuge du dessin de presse et de la satire (le New York Times vient de les bannir de ses pages, à cause de la "political correctness"). Je compte pour pas grand-chose le pauvre dessin de une que Plantu livre laborieusement au journal Le Monde : il est tellement tenu par la "ligne éditoriale" que ses dents (s'il en a) sont limées à ras. Qui pourrait dire quelle "ligne éditoriale" Cabu avait décidé de suivre, en dehors de la sienne propre ?

ZCHIRAC6.jpg

Quant à Charlie Hebdo, je ne l'achète plus depuis très longtemps, déserté qu'il est par les dessinateurs de talent, je veux dire envahi qu'il est par des tâcherons qui ne savent plus faire rire et qui ne connaissent plus que le coup de poing graphique, la brutalité dessinée, la force hargneuse. Cabu, lui, frappait fort, mais ajoutait une règle impérative à l'exigence de percussion : faire rire. La plupart du temps, au kiosque, le mercredi, je jette un regard désolé sur la couverture de Charlie-Hebdo, et je passe mon chemin : trop laide. Des talents y sont-ils maintenant revenus ? Peut-être devrais-je l'ouvrir de temps en temps, qui sait ?

Le Canard enchaîné, par bonheur, entretient la flamme du souvenir de son soldat bien connu, Cabu, en couronnant ses pages intérieures d'une drôle de guirlande : son trombinoscope politique (j'ai compté 41 bobines : il y a des redites). Car Cabu a passé de très longues années à portraiturer la classe politique française, sans lui faire aucun cadeau : il n'y a qu'à puiser et, mis à part quelques éphémères feux de paille politiques trop vite passés à la trappe pour laisser le souvenir de leur trombine, on reconnaît au premier coup d’œil les pipes de tir forain que Cabu ajustait sous sa plume. Je ne remercierai jamais assez Le Canard enchaîné de cette fidélité à un de ses piliers, tragiquement effondré.

Chirac était indéniablement un de ses favoris, mais il y en avait d'autres, immédiatement reconnaissables, et dont quelques-uns sont des chefs-d'œuvre. J'adore le sournois sinusoïdal de son curé faux-jeton, qu'il n'y a pas besoin de nommer. C'est mon préféré : combien de traits pour faire éclater la tartuferie de l'individu (vous savez : « La route est droite, mais la pente est forte ») ?

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Et tout le monde connaît cet objet de vindicte qu'il avait en horreur.

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Mais on trouve, bien des années avant la mort de Chirac, qui n'était alors que maire de Paris et député, des images très différentes du bonhomme, qui n'était pas encore le vieillard débonnaire et consensuel (« usé, fatigué », disait Jospin en 2002, il avait raison) que les Français élisent désormais par sondage (dessin paru dans La France des beaufs, Editions du Square, 1979).

001.jpg

Quarante ans avant, on le reconnaît déjà infailliblement, mais comme spécialiste de l'aboiement et du coup de menton, qu'il n'avait pas encore quadruple, et avec de grandes canines pour la conquête du pouvoir qui lui manquait. Élu président de la République, il a eu douze ans pour digérer sa satisfaction satisfaite.

Cabu l'a suivi attentivement.

Merde à Chirac ! Merci au Canard enchaîné ! Gloire à Cabu !

Voilà ce que je dis, moi.

lundi, 07 janvier 2019

13/14 : HÉMATOLOGIQUE

SANG.JPG

Le jour où j'ai programmé la publication de cette photo, je jure que je ne pensais pas à la date exceptionnelle que représente aujourd'hui le 7 janvier.

4 ans !

C'est un coïncidence. Mais c'est une coïncidence extraordinaire. Je l'assume comme telle, et même je la revendique, fût-ce a posteriori. Car « c'est de ce temps-là que je garde au cœur une plaie ouverte ».

Bon, c'est vrai, ce n'est en réalité que l'image qui reste d'une coupure anodine vite refermée. Il pourrait y avoir "du symbole" là-dedans. Mais du symbole dans le genre minable.

Toutes mes excuses.

lundi, 12 novembre 2018

7/8 VOUS AVEZ DIT "CENTENAIRE" ?

7

QUELQUES HOMMES 3

DES HOMMES QUI TOMBENT

Dans le désordre : Barbâtre (Vendée), Belmont-de-la-Loire (Loire), Céaux (Manche), Craon (Mayenne), Dombasle en Argonne (Meuse), Le Temple sur Lot (Lot-et-Garonne), Marcillac Lanville (Charente), Maynal (Jura), Tréguennec (Finistère), Vis-en-Artois (Pas-de-Calais), Sainte-Tulle (Basses-Alpes, dites "de Haute Provence"), Labastide-du-Temple (Tarn-et-Garonne). Quelques-uns parmi les soixante-cinq monuments aux morts que j'ai collectés sur ce thème.

Note : je constate, en furetant de nouveau sur l'internet depuis quelques semaines (en prévision), qu'on trouve à peu près tous les monuments que l'on cherche, et même qu'on ne cherchait pas ou auxquels on ne pensait pas. Quand j'ai commencé ce qu'il faut bien appeler une quête, pendant l'été 1976, il n'y avait rien, ou presque. Aujourd'hui, on a tout ou presque à sa disposition. J'imagine que, en dehors des apports de l'informatique et du numérique, l'approche du centenaire n'est pas pour rien dans cette espèce de prolifération. Je note aussi que, depuis mes premières photos dans les années 1970 et 1980, des monuments aux morts, qui semblaient abandonnés tant leur aspect laissait à désirer, ont pris un sacré coup de jeune. J'imagine là aussi que ces soins nouveaux ont quelque chose à voir avec le centième anniversaire. Et j'espère que tout le monde a ressenti, hier à 11 heures, la même chose que moi en entendant les cloches sonner à toute volée.

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labastide-du-temple_278647.jpg1SAINTE TULLE 04.JPG1VIS EN ARTOIS 62.JPG


1TREGUENNEC 29.jpg1POUZAUGES 85.jpg1MAYNAL 39.jpg1MARCILLAC LANVILLE 16.jpg1LE TEMPLE SUR LOT 47.jpg1DOMBASLE EN ARGONNE 55.jpg1CRAON 53.jpg1CEAUX 50.jpg1BELMONT DE LA LOIRE 42.JPG

1BARBÂTRE 85.jpg

 

 

 

jeudi, 08 novembre 2018

3/8 VOUS AVEZ DIT "CENTENAIRE" ?

3

J'ai gardé de l'amitié pour une autre photo prise pendant la même marche Metz-Verdun de 1976. Une photo moins "signifiante" d'un certain côté, bien que ce ne soit pas sûr, mais qui fait revivre un personnage que j'ai beaucoup aimé, moi qui n'ai jamais vraiment habité Paris. Un personnage qui fut une personnalité, clochard magnifique, candidat cycliste à la mairie de Paris, harangueur de foule. Je veux parler d'Aguigui Mouna. Je ne dirai rien de la carriole poussée par le camarade Dupont (son vrai nom, et André, son vrai prénom), ni de ce qui était inscrit sur ses flancs, ni des gamins véhiculés, ni ...

MARCHE AGUIGUI MOUNA.jpg

Je l'avais retrouvé le même été, toujours sémillant, autour de la centrale de Creys-Malville (un surgénérateur en construction, contesté, puis abandonné), tenant compagnie, face aux gendarmes mobiles, à Lanza del Vasto. Mouna était un indécrottable idéaliste, pacifiste, antinucléaire, anarchiste, etc., capable d'entonner ex abrupto le célèbre refrain du trio Leclerc-Vigneault-Charlebois : « Quand les hommes vivront d'amour, Il n'y aura plus de misère, Les soldats seront troubadours, Mais nous, nous serons morts, mon frère » (2'27" ci-dessous), et dans la foulée de faire scander par les gens attroupés : "Les-soldats-troubadours-Les-soldats-troubadours !".


Aujourd'hui, on peut penser ce qu'on veut de ce qui, rétrospectivement, peut apparaître comme un entêtement dans la rêverie éveillée et le monde enfantin de la paix universelle réalisée. Je ne me prive pas d'en penser ce que je veux. Je suis devenu un peu réaliste. Et j'ai cessé de rêver d'un paradis.

ORIGINE FRANCE CERTIFIEE.JPG

mercredi, 07 novembre 2018

2/8 VOUS AVEZ DIT "CENTENAIRE" ?

EN MONTANT A DOUAUMONT

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Il m'est arrivé de regretter d'avoir été antimilitariste. C'était à l'époque où il y avait encore un service militaire. De militaire, d'ailleurs, il ne restait que le nom, puisque les exercices proprement militaires (à part les exercices de tir deux fois dans l'année et monter la garde devant le portail endommagé du hangar où dormaient les "Alouettes III", à Corbas) s'étaient faits rares à l'époque, sans doute faute de budget suffisant, et que la hiérarchie se creusait la tête pour trouver un peu d'occupation à "la troupe". Il y a cependant quelque chose que je ne regrette nullement, c'est d'avoir participé un jour à une grande marche européenne non violente pour la démilitarisation (c'était à peu près comme ça que ça s'appelait).

J'étais sorti de mes douze mois moralement amoindri, mais j'étais enfin dans la "vie active". Le rendez-vous de départ était donné dans un parc de Metz, un jour de juillet ou d'août 1976, l'arrivée étant fixée environ une semaine après, quelque part autour de Verdun. Je me souviens d'avoir croisé ou rencontré bien des gens étonnants, parmi lesquels un flamboyant Italien du nom de Marco Panella, leader à l'époque du Partito Radicale ; un homme à la mine humble et grave qui s'appelait Théodore Monod, qui n'arrêtait pas, m'avait-il semblé, de torturer son couvre-chef, un genre de chapeau de marche assez mou ; un Cabu attentif qui ne cessait de griffonner ce qu'il voyait ; bref : du beau monde.

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Théodore Monod et son chapeau.

Il est vrai que s'agissant d'antimilitarisme, on peut dire que Cabu représente à jamais la quintessence de la chose. Il n'aurait pas pu imaginer ne pas être présent sur les lieux mêmes de cette "manif" unique en son genre (celle de l'année suivante, "Haguenau-Landau", fut un innommable n'importe quoi). Monod était plus pacifiste qu'antimilitariste, si cette distinction dit quelque chose à quelqu'un.

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J'ai à peu près tout oublié, en ce qui concerne les détails. Il me reste cependant de cet événement si éphémère, et après tout dérisoire, un souvenir qui a gardé la compacité du granit. Je veux parler de la lente montée par une route forestière vers la nécropole de Douaumont. Verdun, la grande bataille de 1916 (février à octobre), où l'Allemand Falkenhayn avait l'intention de "saigner l'armée française". A l'arrivée, selon les décomptes, 20.000 morts en moins pour l'Allemand, auquel Pétain a cependant dit fermement : « On ne passe pas !». Et qui a fait exactement ce qu'il fallait faire pour cela ("Voie sacrée" et toute l'action concrète de masse que ça impliquait). Mais à quel prix ?

Tant de gens marchant gravement, dans un silence absolu (on n'entendait que le bruit des chaussures sur le bitume, c'était une intense et unanime communion), en direction du symbole absolu de l'absurde don de soi exigé de tous ces hommes de France envoyés là, autrefois. C'était très beau. La chose avait un aspect grandiose : pas un mot, pas un slogan, pas un "message". Seulement la manifestation d'un chagrin définitif, d'un deuil irréparable, d'un respect total devant le "sacrifice". J'ai oublié la déception à l'arrivée, l'accès interdit à la nécropole, les gendarmes en rang et les "beaufs" coiffés de bérets rouges qui nous attendaient à l'entrée, rigolards et avinés. Oui, sincèrement, seuls me restent cette marche sereine, ce silence accompli, cette gravité résolue. 

J'avais juste, en levant bien haut mon appareil, pris cette photo.

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J'ai repensé à cette marche silencieuse un certain dimanche 11 janvier 2015. C'était pour Charlie Hebdo.

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jeudi, 13 septembre 2018

FABRICE NICOLINO ...

...EN GUERRE CONTRE LES PESTICIDES.

Dans la série "Des nouvelles de l'état du monde " (N°61).

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J'ai entendu l'interview de Fabrice Nicolino par Guillaume Erner sur France Culture, dans laquelle il a défendu avec force et éloquence la cause de la vie. Cette fois, il a décidé de partir en guerre frontale contre la folie qui consiste à injecter des poisons dans les sols et dans les plantes, avant leur absorption consciencieuse par les humains dans leur assiette.

Je suis d'accord avec lui à 100% (seul le footballeur est assez crâneur pour affirmer qu'il est à 300% avant le match, après, c'est une autre affaire).

Discutant mercredi au marché du soir sur la petite place de la Croix-Rousse avec une apicultrice qui a 25 ruches sur le plateau du Jura (toute petite exploitation, une région a priori à l'écart des grands épandages de poisons, et donc à l'abri de leurs nuisances), j'ai appris en effet qu'elle n'était pas trop malheureuse. Pensez, elle n'a perdu "que" 30% de son cheptel l'an dernier. Bon, c'est vrai que dans certains endroits, ce sont 80% des abeilles qui ont été exterminées : elle peut donc s'estimer heureuse. Je ne parle pas de l'anéantissement des insectes qui s'écrasaient en masse sur nos pare-brise il y a quarante ans, et qui aujourd'hui les laissent immaculés. Je ne parle pas des masses de nos passereaux (et en particulier les fringilles, ces petits oiseaux qui peuplaient les haies) qui ont d'ores et déjà disparu ou sont en voie de disparition.

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Je n'ai pas besoin de lire l'ouvrage que Fabrice Nicolino et François Veillerette viennent de  consacrer au problème (éditions Les Liens qui Libèrent) pour savoir que parmi les urgences environnementales, il n'y a pas que le réchauffement climatique du fait du rejet aberrant de tous les gaz à effet de serre (nous consommons et détruisons – c'est la même chose – tellement d'énergie !), il y a aussi – et tout aussi immédiate – l'urgence de la menace d'empoisonnement par toutes sortes de pesticides de synthèse qui s'accumulent partout depuis un demi-siècle, avec des effets très largement méconnus par les savants.

En effet, la méthodologie qu'ils appliquent dans leurs études isole soigneusement chaque substance pour mesurer séparément son éventuelle toxicité. Ils n'ont aucune idée de ce qui se passe dans la réalité, quand deux ou plusieurs de ces molécules se rencontrent. Ils ignorent tout de la trilogie :

1 -  Que produisent leurs interactions (que Nicolino appelle "effet cocktail") ? 

2 - Quels effets ont les très faibles doses (allusion à la maxime de Paracelse qui s'est imposée comme une vérité absolue : « C'est la dose qui fait le poison ») ?

3 - De quelle manière varie l'effet de ces produits en fonction de la durée d'exposition

Ce que dit Fabrice Nicolino est d'une grande justesse : de toute façon, ce n'est plus la peine du tout de discuter avec les défenseurs de l'industrie chimique. Tout a été dit et répété. Ce n'est même pas la peine d'exiger que les chimistes fassent la preuve de l'innocuité de leurs produits avant qu'ils soient mis dans le commerce. Tout le monde sait parfaitement qu'un poison est un poison, et qu'il reste poison tout le temps de son existence. Il faut maintenant imposer l'arrêt de cette folie.

Je ne lirai pas le bouquin, étant – depuis quelques dizaines d'années – intimement convaincu que l'humanité creuse sa tombe en confiant la sécurité de son alimentation à l'industrie chimique : autant s'en remettre au bourreau ou au fossoyeur pour assurer sa bonne santé. En revanche, j'ai acheté le dernier numéro de Charlie Hebdo, spécialement consacré au lancement de la campagne contre les pesticides, où Nicolino intervient abondamment. Et là, je me permets une parenthèse, pour m'incliner devant le cercueil de Charlie Hebdo (†), autrefois hebdomadaire effervescent et incandescent, qui a fait mes délices il y a très longtemps. Je suis désolé de le dire, mais je suis stupéfait de la LAIDEUR qui se dégage aujourd'hui de Charlie Hebdo.

C'en est au point que je crains fort que le fait de confier la défense d'une cause comme celle des pesticides à une revue aussi moche revienne à la saboter purement et simplement (la cause). J'espère que Nicolino a mesuré les risques. Et je suis désolé de le dire, mais je crois que le côté repoussant de la chose incombe à tout ce que la revue compte comme dessinateurs, dont aucun n'arrive au bas de la cheville des grands anciens. La double page centrale est juste répugnante. On me dira que c'est le but de la manœuvre ? Certes.

Mais pour le dessinateur de presse, il s'agit, quoi qu'on en pense, en même temps qu'il veut faire ressentir le plus fort possible le répugnant de la chose qu'il veut dénoncer, de susciter l'adhésion la plus complète possible de ses lecteurs à la cause qu'il entend défendre (en général grâce au rire, donc à la virtuosité de son trait et à l'ingéniosité de son approche). Je ne doute pas de la force de la conviction des dessinateurs actuels de Charlie Hebdo, en revanche, je doute de leur capacité à susciter la même conviction chez le lecteur par le dessin qu'ils proposent. Or cela s'obtient – les jeunes rueurs dans les brancards ne le savent pas assez – par le travail et l'acquisition d'un style personnel.

Mais on ne ressuscitera pas Cabu (†), Gébé (†), Reiser (†), Fournier (†) ou Wolinski (†), qui possédaient à merveille ce qu'on appelle un style. Un STYLE, c'est-à-dire, dans leur cas, le génie d'une forme mise au service d'un esprit. On peut aussi appeler ça le TALENT. Par conséquent, je ne comprends absolument pas comment il se fait que les responsables de la revue laissent la médiocrité des dessins s'étaler grassement sur une telle surface de papier. Pour ce qui est du "visuel", le Charlie Hebdo d'aujourd'hui est encombré de petits tâcherons, autant d'infâmes barbouilleurs qui se contentent d'éjaculer la purulence de leurs humeurs mauvaises, et qui ne sont même pas drôles.

Seul le vieux Willem, vieux copain de Choron, tire encore son épingle du jeu. De profundis donc, et fermons la parenthèse.

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Pour revenir à l'appel de Nicolino, oui, j'ai signé l'appel des 100 (ce qui m'a rappelé cet autre "Appel des cent" étourdiment signé en 1974, et qui m'avait valu de finir mon service militaire bien au frais dans un bataillon de chasseurs alpins). Celui d'aujourd'hui s'intitule "Nous voulons des coquelicots". Car c'est vrai, j'ai imprimé dans ma mémoire tellement de champs de blé ornés du bleu des bleuets et du rouge des coquelicots que la disparition de ces couleurs dans les cultures me donne juste envie de prendre le deuil. "Nous voulons des coquelicots" : je ne sais pas si ce titre peut "percuter". Cela m'est égal : j'y vais.


Cette vidéo, par les choix de mise en forme, a quelque chose d'horripilant, à commencer par la publicité inaugurale (on est chez L'OBS, hélas, je veux dire la gauche-bouse-de-vache, la "bullshit-gôche"), mais tant pis, il faut passer là-dessus : l'essentiel est dans le contenu.

Vas-y, Nicolino, fais péter : tu as la tchatche de Mélanchon, sans éprouver l'ivresse de l'orateur. Alors fonce dans le tas. Je te suis, et apparemment, je ne suis pas tout seul.

Je suis prêt à y croire (même si, comme Saint Thomas, j'ai besoin d'avoir vu pour croire).

jeudi, 05 juillet 2018

LE LAMBEAU, DE PHILIPPE LANÇON

Chose promise (voir ici même au 13 juin dernier), chose due : j’ai lu Le Lambeau, de Philippe Lançon, rescapé de la tuerie de Charlie Hebdo. Le Lambeau est un livre redoutable. Peut-être pas pour tout le monde, mais à coup sûr pour tous ceux qui ont ressenti jusqu’au centre d’eux-mêmes la dévastation de la salle de rédaction de Charlie Hebdo, un certain 7 janvier, par un tandem de frères décidés à mourir. "Ressenti" : j’imagine quelque chose de pas très éloigné de ce que fut le "9 / 11" (nine / eleven) pour un Américain.

Pour moi, vieux lecteur du mensuel Hara Kiri, de son petit frère hebdomadaire, de son cousin Charlie (le mensuel de BD tenu par Wolinski) et de son neveu Charlie (l’hebdo, après le coup de ciseau de la censure pour crime de lèse-majesté), l’atmosphère assez « anar » et totalement libre que véhiculaient ces revues était la seule respirable : la dizaine de déchaînés qui faisait souffler ce vent semblait capable de pousser les murs à volonté et d’agrandir l’espace des possibles. J’ai mangé et ruminé mon foin à ce râtelier pendant de nombreuses années. Même si, à la longue, j’ai éprouvé la lassitude pour tout ce qui commence à tourner en rond pour se mordre la queue, les boyaux de mon crâne avaient assimilé tellement de cette matière que l’attentat m’a enlevé une partie de moi-même.

Lire Le Lambeau, dans ces conditions, n’a pas été une partie de plaisir, parce que, du moment où j’ai ouvert le livre jusqu’à la dernière page, j’ai revécu – et je revis en écrivant ces lignes – le 7 janvier dans toute sa dimension incompréhensible, absurde, avec le sentiment constant de l’irréparable. J’y suis finalement arrivé, par toutes petites étapes, en lecteur déjà fourbu au bout de vingt pages. Philippe Lançon est un examinateur impitoyable : il sait comme personne appuyer là où ça fait le plus mal. La balle de 7,62 tirée par Kouachi lui a emporté le maxillaire inférieur, faisant de lui une « gueule cassée » en tout point semblable aux innombrables défigurés de 14-18.

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Une "gueule cassée" dans la réalité. Quelle épouse reconnaîtrait son époux ?

Le Lambeau raconte en détail les étapes de la reconstruction (réinvention) de son visage détruit. En 500 pages, j’ai le sentiment d’avoir laborieusement accompagné la tâche de titan à laquelle les assassins de ses amis ont contraint le journaliste pour revenir parmi les vivants ordinaires. Car l’attentat a fait de Philippe Lançon un « non-mort », faisant tomber un rideau d’acier entre lui et les gens normaux. Pour ses amis (Cabu, Wolinski, Bernard Maris, …), la chose est sans bavure et définitive (le jour fatidique, Reiser, Gébé, Cavanna, Choron étaient excusés, eux, pour cause de décès préalable). Pour lui, que les assassins ont après tout raté, le retour dans la vie quotidienne sera horriblement compliqué, jalonné d'un nombre impressionnant d'opérations chirurgicales. Le bloc opératoire de La Salpêtrière (« le monde d’en bas ») devient un lieu presque familier, où Chloé, sa chirurgienne (« la fée imparfaite »), parfois remplacée par Hossein ou une assistante, tente de lui refaire une mâchoire, morceau par morceau, de peau, de chair et d’os.

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Monument aux morts de 14-18, à Trévières (Calvados), promu "gueule cassée" en 1944.

Lançon explique à la page 249 le titre de son livre. C’est au moment où les chirurgiens décident de lui prendre un péroné pour remplacer l’os pulvérisé par la balle : « La greffe du péroné était depuis plusieurs années pratiquée, d’abord sur les cancéreux de la mâchoire et de la bouche, principaux patients du service. On lui donnait aussi un autre nom et un autre soir, j’ai entendu sortir de la bouche de Chloé le mot qui allait désormais, en grande partie, me caractériser : le lambeau. On allait me faire un lambeau ». Une vie en lambeaux. Un morceau de jambe pour mâcher de nouveau ! Et je ne parle pas des mésaventures de la peau et de la chair dans la reconstitution laborieuse. Par exemple, quand on lui greffe un morceau de cuisse ou de mollet (je ne sais plus) pour faire la lèvre inférieure, des poils vont lui pousser dans la bouche ! Et puis les fuites persistantes, qui font qu’il en met partout quand on l’autorise enfin à manger un yaourt par l’orifice buccal !

Non, Philippe Lançon ne sera plus jamais l’homme qu’il a été, que ce soit pour lui-même ou pour ceux qui l’entouraient avant l’attentat. Il est devenu, en un instant, un bébé exigeant et un vieillard intraitable. Les frères Kouachi ont fait de lui un oxymore, et c'est ce qui passe mal auprès de certains. Par exemple, nous le suivons dans les hauts et les bas que subit sa relation avec Gabriela, la femme aimée – dont la vie suit par ailleurs une trajectoire instable et compliquée : l’homme qu’elle aime n’est plus celui dont elle était tombée amoureuse. Elle supporte mal la brutalité du changement. Accourue de New York aussitôt qu’elle apprend la nouvelle, puis faisant des allers-retours, elle ira jusqu’à reprocher à son amant de ne penser qu’à lui.

Et l’auteur assiste impuissant à cet éloignement, qu’il n’a ni voulu ni causé, mais dont il est, malgré tout, responsable, pense-t-il : « L’attentat s’infiltre dans les cœurs qu’il a mordus, mais on ne l’apprivoise pas. Il irradie autour des victimes par cercles concentriques et, dans des atmosphères souvent pathétiques, il les multiplie. Il contamine ce qu’il n’a pas détruit en soulignant d’un stylo net et sanglant les faiblesses secrètes qui nous unissent et qu’on ne voyait pas. Assez vite, les choses ont mal tourné avec Gabriela.

         J’étais heureux de la revoir, mais j’avais pris des habitudes en son absence, et plus que des habitudes : des règles de vie et de survie. J’avais tissé mon cocon de petit prince patient, suintant, nourri pas sonde et vaseliné autour d’un frère, de parents, de quelques amis et de soignants » (p.343). "Mon cocon" !? "Petit prince" !? Qu'est-ce qu'il lui faut ? Mais qui envierait un tel cocooning de "petit prince" ?

A dire vrai, j’ai trouvé dans un premier temps déplacées ces confidences sur la vie intime de l’auteur, l’accusant de tomber dans l’auto-fiction, par nature indécente. Et puis, je me suis dit que ça aussi, ça appartient de plein droit au récit, et que, après tout, cette façon d’objectiver ce moment de la vie privée permet au lecteur bouleversé de prendre un peu de distance avec le tragique de la situation. Je pense à l’épouse d’une « gueule cassée » de 14-18, et je me dis qu’il lui a fallu bien de l’héroïsme pour rester attachée à son homme, quand elle l'a revu, "après". Qu'est devenu le couple de la "gueule cassée", après 1918 ?

Car juste avant le passage cité, on trouve ceci, qui se passera de mes commentaires : « Mes parents sont arrivés peu après et se sont installés, l’un à droite, l’autre à gauche, chacun me tenant une main et la caressant. J’ai pris la tablette et j’ai écrit : "Miroir ?" Ils l’avaient apporté. J’allais savoir à quoi je ressemblais. J’ai pris le miroir et j’ai découvert, à la place du menton et du trou, cernée par d’épaisses sutures noires ou bleu sombre, une grosse escalope sanguinolente et vaselinée de couleur claire, entre jaune et blanc, d’une surface lisse, glabre et unie comme celle d’un jouet en plastique. C’était ça, mon menton ? C’était pour ça qu’on m’avait opéré pendant dix heures, retiré un os de la jambe et mis dans cet état ? J’étais accablé » (p.334).

Heureusement, Philippe Lançon se fait accompagner par quelques amis infiniment plus dociles et réconfortants : les pages de La Recherche où Proust raconte la mort de sa grand-mère, de La Montagne magique de Thomas Mann, de Kafka, mais aussi et (selon moi) surtout, Jean-Sébastien Bach et Beethoven : « J’ai senti les piqûres et me suis concentré sur la musique de cet homme, Bach, dont j’avais chaque jour un peu plus l’impression qu’il m’avait sauvé la vie. Comme chez Kafka, la puissance rejoignait la modestie, mais ce n’était pas la culpabilité qui l’animait : c’était la confiance en un dieu qui donnait à ce caractère coléreux le génie et la paix » (p.390). Ainsi, Bach a "sauvé la vie" de l’auteur ! Quelle beauté dans la formule ! Oui, la musique de Jean-Sébastien Bach est bien ce qui sauve en dernier recours.

J’ai un seul reproche à faire au livre de Philippe Lançon : l’éloge qu’il fait de Laurent Joffrin. Il est vrai que celui-ci est son patron, et qu’il lui doit sans doute beaucoup dans l’exercice de son métier de journaliste. Mais je n’oublie pas quant à moi l’insupportable gougnafier, capable d’assassiner un dialogue en empêchant son interlocuteur de développer sa pensée, quand celle-ci commet l’impardonnable erreur de s’opposer à la sienne. Invité chez Guillaume Erner ou Alain Finkielkraut, sur France Culture, il se débrouille, avec son importunité fanatique, pour se rendre haïssable, et transformer en bouillie le propos de l’adversaire, qu’il s’appelle Obertone ou Maler. Laurent Joffrin incarne à merveille l’idée que je me fais de l’intolérance bornée (on peut lire ici ce que je disais du monsieur le 17 février 2017).

Il va de soi que cette réserve ne fait pas oublier la violence exercée à travers ce livre sur un lecteur (moi) que les équipes d’Hara Kiri, Charlie et compagnie ont entouré comme des ombres tutélaires pendant quelques dizaines d’années. Et là, non, y a pas à tortiller du croupion :

« Quand l'un d'entre eux manquait à bord,

C'est qu'il était mort.

Oui mais jamais au grand jamais

Son trou dans l'eau ne se refermait ».

(Tonton Georges).

Merci, monsieur Philippe Lançon, pour ce livre tellement dur à avaler. Oui, je vous remercie pour tout ce qu'il m'a coûté. Parce qu'il m'a restitué l'essentiel. On peut appeler ça la Vérité.

vendredi, 15 juin 2018

CABU JUSTE AVANT DE MOURIR

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3 CABU JUSTE AVANT DE MOURIR

LE GÉNIE GRAPHIQUE DE CABU

« Les enquêteurs notent ensuite la présence, entre les corps de mes compagnons, d'un couteau de marque Laguiole "au manche de couleur grise et dont la longueur totale est de 28 centimètres pour une lame d'une dizaine de centimètres", et "un emballage d'aluminium d'un gâteau et des morceaux de cake imbibés de sang". Mais où étaient donc passés les biscuits de Cabu ?

Il en mangeait volontiers pendant ou après la réunion, quand ce n'était pas du vieux pain ou quelque chose comme ça, rangé dans du papier d'aluminium. C'étaient peut-être les seuls instants où il ne dessinait pas – et encore, ce n'est même pas sûr, car il pouvait dessiner d'une main en grignotant de l'autre. Je le regardais souvent faire avec sympathie et inquiétude, comme on regarde agir un enfant jusqu'au moment où l'on s'aperçoit qu'il a quatre-vingts ans, phénomène qui signifie que soi-même on n'en a plus tout à fait vingt. Cabu et sa frange n'avaient pas d'âge, dans la mesure où il était sans cesse rajeuni et comme enluminé par les dessins qui la prolongeaient et, en quelque sorte, la justifiaient. Il était comme ses biscuits, son vieux pain : son intelligence était peut-être limitée, mais son génie donnait du goût à n'importe quoi. Il resterait toujours un écolier insolent, teigneux, timide et surdoué qui caricaturait les fabricants d'autorité sur une vieille table de bois couverte de graffitis et qui, vers la fin du cours, sortait son paquet de biscuits pour en manger un ou deux, comme un rongeur en hiver, avant de continuer à refaire d'un geste sûr le pire et le meilleur des mondes, le nôtre, le seul, sur un support ou sur un autre, y compris dans sa poche ou, pourquoi pas, au creux d'une main ou sur une semelle de chaussure. Tout faisait paroi dans sa grotte, sur quoi laisser des inscriptions et l'ombre d'un rire.

J'étais arrivé à jeun à la conférence de rédaction. Ce jour-là Cabu avait du cake mais, vers la fin, il a fait circuler un paquet de biscuits. Était-ce vraiment le sien ? Je n'en sais rien. Mais c'est lui qui me l'a tendu et ils ont été mon dernier repas avant extinction. Quelques instants avant l'entrée des tueurs, j'en ai mangé un non sans scrupules, car je ne me sentais guère en droit d'accepter le moindre don de la part de ceux avec qui je partageais si peu et auprès de qui, malgré les années, je me sentais toujours aussi marginal et peu légitime, aussi peu apte à mener le moindre combat ou à me rappeler la moindre épopée : je n'avais pas été adulte dans les années soixante et soixante-dix, je n'avais pas eu à expérimenter des libertés dont j'avais bénéficié. J'étais un homme sans abus parmi des hommes qui en avaient commis ou qui, en tout cas, les avaient contés, commentés et dessinés. Ce défaut d'abus m'empêchait souvent d'accepter la brioche de Tignous ou les biscuits de Cabu. »

Philippe Lançon, Le Lambeau, Gallimard, 2018, pp. 97-99.

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IN MEMORIAM

Frédéric Boisseau, Agent d’entretien.

Franck Brinsolaro, Policier du Service De La Protection (SDLP).

Jean Cabut, Dessinateur.

Elsa Cayat, Psychanalyste et Chroniqueuse.

Stéphane Charbonnier, dit Charb, Dessinateur et Directeur de CH.

Philippe Honoré, Dessinateur.

Bernard Maris, Economiste et Journaliste.

Ahmed Merabet, Policier.

Mustapha Ourrad, Correcteur.

Michel Renaud, Organisateur à Clermont-Ferrand d’une exposition de dessins de Cabu, à qui il rapportait ses œuvres.

Bernard Verlhac, alias Tignous, Dessinateur.

Georges Wolinski, Dessinateur.

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DUTREIX.jpg

Hommage de Dutreix à l'équipe de Charlie : « Je vois que vous allez être assassinés par des terroristes ... En votre mémoire, le glas de Notre-Dame sonnera, il y aura un grand défilé avec Hollande, Valls, Sarkozy, Copé, Merkel, Cameron et même Netanyahou ... Il y aura des drapeaux tricolores et on chantera la "Marseillaise" ... On proposera de vous panthéoniser, le Nasdacq et l'Académie française diront "Je suis Charlie" et le pape priera pour vous ». Les quatre copains sont écroulés de rire. On reconnaît à peu près Wolinski et Cabu. Pour les deux autres, je ne sais pas (Charb ? Tignous ? Honoré ?).

Tout ça qui remonte à cause du livre de Philippe Lançon : le trou est resté béant.

Il y a des choses qui ne passent pas.

Il y a des choses qu'il est impossible de pardonner.

jeudi, 14 juin 2018

CABU CHEZ PHILIPPE LANÇON

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Cabu au travail en 1976, lors de la "Marche Metz-Verdun pour la démilitarisation".

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2 CABU CHEZ PHILIPPE LANÇON

« En 2004, après avoir appris sa mort, j'écris sur lui [le batteur de jazz Elvin Jones] une chronique dans Charlie. Cabu se souvient, de son côté, des circonstances où il a vu le batteur, en plein air, au festival de Châteauvallon. Il me le raconte et j'insère son souvenir dans ma chronique : « Soudain l'orage éclate. Il est violent. Les musiciens et le gros du public, tout le monde disparaît comme dans La Symphonie des Adieux ; tout le monde, sauf Jones. Déchaîné, démesuré, battant la mesure d'outre-tombe, le géant aux mains d'acier anime les peaux et les cuivres parmi les éclairs, seul comme un dieu oublié, un dieu oriental aux mille bras. L'orage semble créé pour lui, par lui. Il se fond dedans. Il a cinquante ans, le tonnerre demeure. » C'était en 1977. Vingt-sept ans plus tard, Cabu en fait un dessin qui, posé à côté de ma chronique, lui donne une valeur qu'elle n'a pas, qu'elle n'aurait pas en tout cas sans lui : être "illustré" par Cabu, en partculier sur le jazz, ou plutôt accompagner par écrit l'un de ses dessins, me fait alors rejoindre une adolescence heureuse, celle où je découvrais en même temps que Céline, Cavanna, Coltrane et Cabu. C'est à peu près comme si, écrivant en 1905 un roman se déroulant dans le monde des danseuses, les illustrations du livre étaient faites par Degas.

Si Elvin Jones n'était pas mort, je n'aurais pas écrit cette chronique. Si je n'avais pas écrit cette chronique, Cabu n'aurait pas fait ce dessin. Si Cabu n'avait pas fait ce dessin, je ne me serais pas arrêté pour lui montrer ce matin-là le livre de jazz qui me l'avait rappelé. Si je ne m'étais pas arrêté pour le lui montrer, je serais sorti deux minutes plus tôt et je serais tombé à l'entrée dans l'escalier, j'ai cent fois refait le calcul, sur les deux tueurs. Ils m'auraient sans doute tiré une ou plusieurs balles dans la tête et j'aurais rejoint les autres Palinure, mes compagnons, sur le rivage aux gens cruels et dans le seul enfer existant : celui où l'on ne vit plus.

J'ai posé le livre de jazz sur la table de conférence et j'ai dit à Cabu : "Tiens, je voulais te montrer quelque chose ..." Il m'a fallu un peu de temps pour trouver la photo que je cherchais. Comme j'étais pressé, j'ai pensé que j'aurais dû marquer la page ; mais comment aurais-je pu le faire, puisque je ne savais pas, trente minutes avant, que j'allais la lui montrer. Je ne savais pas s'il serait présent ce jour-là – même s'il ratait rarement la conférence du mercredi : Cabu avait dessiné une infinité de cancres, mais c'était un bon élève.

La photo d'Elvin Jones date de 1964 et s'étale sur les pages 152-153. C'est un gros plan. Il allume une cigarette de la main droite, énorme et fine à la fois, qui tient les deux baguettes en croix. Il porte une élégante chemise à carreaux fins, légèrement ouverte. Les manches ne sont pas relevées. Les yeux clos, il tire sur la cigarette. La moitié du visage, puissant et anguleux, est prise dans le triangle supérieur dessiné par les deux baguettes, comme dans les formes d'un tableau cubiste. La photo a été faite pendant une session d'enregistrement d'un disque de Wayne Shorter, "Night Dreamer". Cabu l'a trouvée aussi belle que moi. J'étais heureux de la lui montrer. Le jazz était au bout du compte ce qui me rapprochait le plus de lui. Quant au livre, il le connaissait déjà. »

Philippe Lançon, Le Lambeau, Gallimard, 2018, pp. 72-74.


Cabu en 2005 sur la chaîne KTO (une petite heure d'entretien simple et sympathique). Note à l'intention de l'intervieweuse : ce n'est pas Isabelle Cabut qui a fondé La Gueule ouverte, madame, c'est le grand Pierre Fournier. En revanche, elle a quelque chose à voir avec la fusion de La Gueule ouverte et Combat non-violent, intervenue au bout d'une vingtaine de numéros de la revue de Fournier, mort après deux ou trois numéros.

Note : Palinure est le pilote de la flotte d’Énée dans l’Énéide. 

mercredi, 13 juin 2018

PHILIPPE LANÇON : "LE LAMBEAU"

1

Quand la presse s'est mise à parler de Le Lambeau, le livre de Philippe Lançon (Gallimard, 2018), je me suis dit que je ne le lirais pas. J'étais déterminé à ne pas le lire. Impossible pour moi, me disais-je, de me replonger dans le massacre du 7 janvier 2015, qui m'avait laissé dans un état de déshérence tel que j'avais l'impression de vivre en France ce que le 11 septembre 2001 a été pour les Américains. Je savais qu'il avait survécu, mais dans un état difficile à vivre. J'imaginais tout le morbide qui pouvait suinter des pages de son bouquin, et je craignais le pire pour ce qui est du récit. 

Et puis un jour j'ai entendu le bonhomme parler à la radio. Et sa façon de raconter et de se raconter a fait que j'ai changé d'avis. Je me suis dit : un gars qui revient de si loin et qui a fait un tel travail sur lui-même mérite mon estime. J'ai acheté le livre. Malheureusement, je suis un très vieux lecteur de Charlie Hebdo, et en tant que tel, je ne peux pas oublier le frisson physique d'horreur qui m'a saisi quand la rumeur, puis l'information exacte, a répandu la stupeur dans tout le pays. J'étais un lecteur ravi d'Hara Kiri Hebdo. J'avais embrayé illico sur la suite quand la guillotine gaulliste avait fait taire cet encombrant trublion qui osait manquer de respect au Général. La première équipe du journal, c'était un peu ma famille d'élection : Cavanna, Choron, Wolinski, Cabu, Reiser, Gébé et toute la compagnie, c'était Byzance ! Le feu d'artifice hebdomadaire. Ce premier Charlie Hebdo, quand il a commencé à devenir une institution, a perdu à la fois sa saveur et ses lecteurs. Et puis l'époque était en train de changer.

Philippe Lançon était le petit jeunot d'une équipe de "vieux" qui ressemblait à ce premier modèle, mais qui avait déjà changé, sous les coups de Philippe Val et de son âme damnée, l'avocat Malka, dans la deuxième mouture de Charlie Hebdo (1992, si je me souviens bien). Le livre de Philippe Lançon est terrible et j'ai beaucoup de mal à avancer dans ma lecture à un rythme normal. Il a fallu que je surmonte un obstacle qui ressemble à l'horreur pour franchir les chapitres 4 ("L'attentat") et 5 ("Entre les morts"). Plusieurs fois, j'ai refermé le livre : non, je ne pouvais pas. Ou alors à très petites doses.

Le chapitre suivant, qui raconte les instants qui suivent le carnage, m'a fait penser à un passage des Croix de bois, lorsque le bataillon est ramené à l'arrière du front après des épreuves qui laissent muet de la même stupeur. Le chef ordonne à ces hommes boueux, en lambeaux et au bout du rouleau de marcher au pas pour la traversée d'un village. Ils se redressent, commencent à frapper le sol du talon en cadence et c'est avec des éclairs de fierté dans le regard qu'ils passent au milieu de la haie formée par les villageois. Et c'est là que ça se passe, car c'est dans le regard de ces villageois que les soldats fourbus mesurent la profondeur de l'enfer dont ils viennent de sortir, lorsque les femmes éclatent en sanglots en murmurant "Les pauvres gars". L'enfer qui sépare les combattants du front du reste des vivants ordinaires.

Lançon ne pensait pas être un combattant du front. Et pourtant. Les deux premiers individus à pénétrer dans la salle de rédaction jonchée de cadavres sont des femmes. D'abord Sigolène, qui aperçoit Philippe Lançon appuyé contre le mur : c'est une "gueule cassée". Ensuite Coco, qui s'en veut à mort parce que c'est elle qui, sous la menace des armes, a ouvert aux tueurs. La réaction des deux femmes est la même : comme les villageoises de 1915, elles pleurent.

Sigolène (Vinson), je me rappelle avoir lu je ne sais plus où le récit de son incroyable face-à-face avec l'un des frères Kouachi, qui finit par l'épargner en criant à l'autre : « On ne tue pas les femmes ! » (c'est trop tard pour Elsa Cayat). Lançon, lui, vient de franchir la frontière qui le sépare désormais des vivants ordinaires : il a sous les yeux la cervelle qui émerge du crâne de Bernard Maris. Il n'est pas mort, mais il n'est plus un vivant comme les autres. Étendu sur un brancard, le blessé entend un "géant" en uniforme s'exclamer en voyant la façon dont il est amoché : « Ça, c'est blessure de guerre ! ».

Oui, monsieur Lançon, votre intervention à la radio m'a convaincu : je lirai jusqu'au bout votre livre terrible, quoi qu'il m'en coûte. Je vous dois bien ça.

Note : j'ai hésité, et j'ai finalement renoncé à inscrire cette note dans la catégorie "Littérature". Je ne sais toujours pas si j'ai bien fait.

samedi, 07 janvier 2017

IN MEMORIAM CHARLIE

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DEUX ANS !

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CABU

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MARIS

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WOLINSKI

Et les autres.

Mais ce sont eux qui me manquent : Cabu et Wolinski pour leurs dessins, Maris pour sa vision lucide et critique de la pseudo-science économique. Oui, Cabu quand même, malgré ce que j'ai pu en écrire ici même à cause des magouilles de Philippe Val dans lesquelles il a accepté de tremper dans la conduite du deuxième Charlie Hebdo (cf. Mohicans de Denis Robert).

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vendredi, 14 octobre 2016

ÇA FAISAIT DES BULLES …

… C’ÉTAIT RIGOLO.

Aux cimaises de ma galerie BD.

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Christian Binet dessine ici la moitié postérieure de Madame Bidochon (la série Les Bidochon en était à son vingtième album en 2010, malgré le procès de vrais Bidochon de je ne sais plus où, qui ont mis plus de dix ans à se rendre compte que, leur nom étant devenu célèbre, ils pouvaient gratter quelque chose, mais qui en ont été pour leurs frais), dans (A suivre) n°26.

J'apprécie la série, sans être un fanatique. Là où je me dis que Binet a fait très fort, c'est qu'il a (presque) fait de Bidochon un nom commun, passé dans le langage courant. Ce qui s'appelle, si je ne me trompe, une antonomase dans le langage des fleurs (de rhétorique), pas tout à fait au même titre que Don Juan, Harpagon, Tartuffe ou Apollon, mais pas très loin. Quel était l'écrivain qui rêvait d'inventer un stéréotype, parce qu'il considérait que c'était une preuve du génie (et du succès : je pense ici au "beauf" de Cabu, mot sur lequel certains ont même bâti le mot "beaufitude" ; remarquez que la Ségolène a bien fait "bravitude", alors ... Après tout, ce n'est qu'une histoire de suffixe !) ? 

dimanche, 22 mai 2016

HARA KIRI FOR EVER

HOMMAGE A UNE ÉQUIPE DE TRUBLIONS SPLENDIDES.

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L'équipe. On reconnaît tout en haut, entre les deux alibis féminins, Choron, Cabu, Cavanna, Wolinski. Viennent ensuite Gébé, Fred (le même que le rêveur inventif de Philémon, mais qui s'y connaissait en humour très noir et en cruautés dessinées), Topor, Reiser (HK 43, sept.64). 



(15')

REPORTAGE DANS L'ANTRE D'HARA KIRI.

Ci-dessus, on constate que Delfeil de Ton galèje sacrément quand il affirme que, non, non, dans l'équipe d'Hara Kiri, promis juré, on ne buvait pas : « Il y a une légende qui court, sur la bande, vous pensez peut-être qu'on a ouvert des bouteilles de vin. Pas du tout. On était sobres. Le vin, la bière, n'avaient pratiquement pas accès rue Montholon » (Ma Véritable histoire d'Hara Kiri Hebdo, p.8). Il est vrai que l'hebdo n'est pas le mensuel. 

 

 

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Dessin de Cabu (HK n°43, sept. 1964) : Choron ne s'était pas encore rasé la boule, et les cheveux de Cavanna avaient encore leur teinte d'origine.

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Les (presque) mêmes en 1969. Je ne montre pas dans quoi ils ont les pieds.

vendredi, 20 mai 2016

HARA KIRI HEBDO PAR DELFEIL DE TON

DELFEIL DE TON 

MA VÉRITABLE HISTOIRE D’HARA KIRI HEBDO 

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En 2008, quand Maurice Sinet, dit Siné, fut lourdé pour un motif infâme, par un vrai sale type, de l’hebdomadaire où il fournissait une chronique chaque semaine, il fonda sa propre revue : Siné Hebdo. Les collaborateurs accoururent de toutes parts pour contribuer, le plus souvent par dégoût et en preuve d’amitié et de soutien. 

La justice a réparé l’injustice flagrante, condamnant le directeur du dit hebdomadaire à verser à Siné de conséquents dommages et intérêts. Et à publier en une le jugement. 

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Très élégamment, le petit Charb obtempère à la décision du tribunal, en insultant celui qui vient de faire reconnaître définitivement son droit. Bas et mesquin ! Mauvais perdant !

Entre-temps (2009), le directeur sans honneur et sans morale, s'était reconverti dans la radio : devenu sarkozyste militant, il s'était fait bombarder directeur d’une grande chaîne nationale. Ne nous attardons pas sur ce sinistre individu, capable d'aller verser sur commande quelques larmes face aux caméras, suite aux assassinats du 7 janvier 2015, sur la mort de gens qui ne lui sont plus de rien depuis des années. 

Pour parler franchement, Siné n’est pas ma tasse de thé. J’avais beaucoup de mal à lire son papier, qu’il s’acharnait à manuscrire. Et puis son radicalisme intransigeant (il était anti-ceci, anti-cela, anti-beaucoup de choses, y compris la corrida et la chasse : un vrai salmigondis qui me fait penser au slogan créé par Pierre Dac pour son parti, le M.O.U., ou Mouvement Ondulatoire Unifié : « Pour tout ce qui est contre, et contre tout ce qui est pour ») avait aussi quelque chose de fatigant. 

Et puis son dessin lui-même ne parvenait pas à m’intéresser. Mais là n’est pas la question : la trajectoire du bonhomme reste impeccablement rectiligne. C'est rare. Cet entêté de la vie a fini par avaler son bulletin de naissance, lui qui avait pourtant choisi comme épitaphe cette belle formule : « Mourir ? Plutôt crever ! », et qui avait demandé au sculpteur Patrick Chappet, de Saint-Jean-d'Angély, de lui faire, comme monument funéraire, un cactus en forme de doigt d’honneur. 

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AU CIMETIÈRE MONTMARTRE.

A droite le futur occupant des lieux.

Parmi les collaborateurs accourus spontanément se mettre au service du rebelle, il y eut un certain Delfeil de Ton. Delfeil de Ton, pseudonyme d’Henri Roussel, était un pilier du grand Hara Kiri Hebdo, frère aîné du grand Charlie Hebdo, le seul, le vrai, l’unique, que le type mentionné plus haut a fait semblant de ressusciter en 1992. Delfeil a refusé de collaborer à cet ersatz, qu'il préfère considérer comme n'ayant jamais existé, mais où Cavanna, Cabu et d’autres eurent la faiblesse de se laisser enrôler, sous la houlette d'un type sans morale. 

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AVEC L'ÉPITAPHE : 

« MOURIR ? PLUTÔT CREVER ! ».

Siné lui a donc offert en 2008 un espace pour une chronique de 2500 signes, requête dont Delfeil a d’ailleurs fait son refrain de conclusion. Comme l’hebdo de Siné a défunté au bout de quatre-vingt-trois numéros, en 2010, cela fait quatre-vingt trois chroniques, que leur auteur a intitulées « Ma véritable histoire d’Hara Kiri Hebdo ». Un titre honnête et véridique : exact et subjectif à souhait. Il suffisait de les réunir pour en faire un vrai livre, portant le même titre. Certes, pas un gros livre (172 pages). Mais une bonne chose de faite, aux éditions Les cahiers dessinés. Et bien fabriqué, en plus, cahiers cousus et tout, ce qui s’est fait rare de nos jours. Vous pensez bien que je n’ai fait ni une ni deux. 

L’auteur, pour dire les choses, n’est pas un historien : qu’on ne s’attende pas à l’objectivité exigée d’un universitaire. Non, il raconte des scènes, il décrit des situations, des circonstances. Il raconte surtout les gens qui ont fait Hara Kiri Hebdo (Cavanna et Choron), et les jeunots, lui compris, qui sont venus s’agglomérer autour de ces planètes à la puissante force de gravitation. 

Hara Kiri, il y avait le mensuel de mauvais goût. Et puis un beau jour de 1969, Cavanna et Bernier déclarent : « On va faire un hebdo, en plus. On continue le mensuel et on fait un hebdo ». Et Delfeil écrit : « Un hebdo à nous et un hebdo rien que pour se marrer », ajoutant : « C’était bien d’être à Hara-Kiri. Il n’y avait que des bons. Pas un seul con ». Et c’est parti, pour ne s’arrêter qu’en 1981, faute de combattants : les lecteurs. 

On n’échappe pas à l’éloge de Cavanna, à qui il a fait lire des chapitres de ses Mémoires, et qui refuse de les lui rendre pour qu’il les relise : « "J’aurais trop peur que tu les abîmes". Dites donc, c’était un compliment, ça ». Du coup le voilà embauché dans l’équipe, à charge pour lui de trouver de quoi alimenter une chronique hebdomadaire, entièrement libre de thème et de ton. 

Delfeil de Ton fait aussi l’éloge de Pierre Fournier, a priori un intrus à Hara Kiri, mais au dessin et à l’humour ravageurs. On le connaît davantage comme fondateur de La Gueule ouverte (1972), le grand ancêtre du mouvement écologiste, même que ça ne lui a pas porté chance, puisqu’il est mort l’année suivante. L’auteur fait son portrait : « On peut dire qu’il tranchait. (…) Un chapeau mou, en feutre, une cravate et un complet gris. C’est encore l’hiver, il porte un manteau qui n’est pas gai non plus ». Ce fonctionnaire de la Caisse des dépôts signait royalement ses articles « Jean Neyrien Nafoutre de Séquonlat », pour dire l’intransigeance. 

Wolinski a droit à son éloge : Delfeil admire la facilité avec laquelle le dessinateur « gribouillait des "petits mickeys" », tout en voyant en lui un vrai « renard », capable de déconner à plein tube chez Choron et Cavanna, mais de fournir ponctuellement son dessin . Il dit de lui : « J’en suis resté comme deux ronds de flan. (…)La drôlerie. La justesse. Encore aujourd’hui, je suis admiratif ». Wolinski était la vedette de la bande. 

Puis c’est le tour de Willem Holtrop, devenu le célèbre et percutant Willem, dessinateur à Libération, et qui a échappé à la tuerie de Charlie Hebdo parce que les conférences de rédaction lui couraient sur le haricot à cause de l’attitude du directeur (le même type que Delfeil nomme p.53). 

Il dit encore de belles choses de Gébé, trop tôt disparu, et de son An 01, utopie sortie du crâne d’un grand rêveur qui prenait ses désirs pour des réalités, mais qui avait réussi à embarquer beaucoup de gens dans cette aventure largement onirique, des gens qui avaient les pieds sur terre, puisque L’An 01 est devenu le premier film d’un cinéaste qui, depuis cette époque héroïque, a fait une belle carrière : Jacques Doillon. La BD de Gébé avait débuté dans la revue Politique Hebdo. 

Quant à Cabu, il a droit à une allusion p.41, sans plus. Bon, je ne vais pas réécrire le bouquin. Je dirai que c’est une curiosité pour les curieux, ceux aux oreilles de qui des noms comme Georges Bernier-Professeur Choron, François Cavanna, Gébé (le Blondeaux Georges-Jacques-Babylas du commissaire Bougret de Gotlib), Wolinski, Willem, Delfeil de Ton, Pierre Fournier et quelques autres (Cabu, …) résonnent comme brillent les derniers feux d’une époque qui pouvait penser que l'avenir était encore largement ouvert. 

Voilà ce que je dis, moi.

mardi, 05 avril 2016

ISLAMISATION, MAIS EN DOUCEUR

Ainsi, jour après jour, l’islam trouve de nouveaux moyens de nous boucher l’horizon et de nous empuantir l’atmosphère. Quand ce n’est pas à coups de kalachnikov et de bombes humaines prêtes au « sacrifice », c’est à coups de maillots de bain « islamiques », vous savez, cet uniforme de ninja (le mercenaire féodal du Japon ancien)

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Il ne manque pas grand-chose pour en faire une guerrière (voir illustration suivante).

fabriqué exprès pour que les dames qui se réclament de la religion musulmane puissent se joindre, dans les piscines, aux femelles lubriques qui ont la coupable impudeur d’offenser les yeux d’Allah et du prophète en ne couvrant leurs parties honteuses (est-il besoin de préciser que "honteuses" désigne les seins, le pubis et le cul ?) que du triangle exigu de quelques morceaux d’étoffe, au risque d'attiser la convoitise et la concupiscence des mâles (on suppose des gens à sexualité normale). 

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Un ninja, un vrai de vrai, pour sûr. Sa tenue, masque compris, s'appelle-t-elle un "burkini" ? Se baigne-t-il ainsi vêtu ?

Après les bombes de Zaventem, donc, le tout dernier cri de la mode qui se donnera à voir sur les plages d’aussi charmants pays que l’Arabie saoudite et du Qatar. Ah, on me dit que ce sera sur nos plages ? Bah, au point où nous en sommes … Blague à part, que nous apprend la mousse médiatique qui vient de se répandre sur ce thème ? 

Je crois que c’est très simple : après le « hard power » (attentats, massacres, bombes, etc.), le « soft power ». Pendant l’offensive islamique armée, l’offensive islamique en douceur continue. Il faut vraiment se voiler la face pour ne pas voir ça. Regardez par exemple ce qui se passe sur les « réseaux sociaux » après que madame Laurence Rossignol (ministre des familles, de l'enfance et des droits des femmes) leur a étourdiment jeté des propos que les dits « réseaux sociaux » attendaient pour pouvoir monter leur mayonnaise. 

Le Monde (3-4 avril) s’est fait l’écho de la chose : « Bien sûr qu’il y a des femmes qui choisissent, il y avait aussi des nègres américains qui étaient pour l’esclavage ». Je trouve que ce n’est pas mal envoyé. Il paraît qu’on a surtout reproché à madame Rossignol l’emploi du mot « nègre ». Les flics du « politiquement correct » font régner l’ordre dans la langue. Pour un peu, ça me réconcilierait presque avec certaines féministes (pas toutes, loin de là, il ne faut pas exagérer). 

Rien de tel qu’une bonne controverse pour asseoir l’objet du débat directement en plein milieu de l’avant-scène, juste sous les feux de la rampe. L’inquiétant, dans cette affaire, c’est que des marques commerciales aient jugé une telle innovation potentiellement assez rentable pour se lancer dans l’aventure en y investissant. Je conclus de cette décision que les marques en question jugent qu’il existe un « marché » pour un tel produit. 

S’il en est ainsi, ça veut dire que le ver est dans le fruit. Que l'ichneumon islamique (à moins que ce ne soit la rhysse persuasive musulmane), perçant de sa tarière notre si fragile verni de civilisation chrétienne, a déposé ses œufs mahométans parmi les larves en lesquelles nous avons dégénéré. Et ça veut dire que notre réalité est en train, paisiblement, de se rapprocher de la fiction que Michel Houellebecq mettait en scène dans son roman « scandaleux » Soumission, paru au moment de l'attentat de Charlie Hebdo : la société française s’accoutume à la soumission à des normes qui contredisent tout ce qui définit la civilisation que son passé lui a transmise. Le simple fait qu'il y ait controverse montre notre affaiblissement "culturel". Et alors ? Où est le mal ? Il faut s’adapter, voyons, vivre avec son temps. 

Madame Badinter est sûrement bien intentionnée en appelant au boycott des marques promotrices du « burkini », mais elle se fourre le doigt dans l’œil : s’il y a un « marché », c’est qu’il y a des clients. J’attends juste de voir à quoi ressemblera la plage l’été prochain : comment réagiront les femelles honteusement dénudées face à des baigneuses vêtues de pied en cap et aux formes soigneusement effacées par la coupe vestimentaire ? 

Comme le déclare Hélène Agésilas : « La France a un retard sur la mode islamique ». La dame a créé la marque Fringadine, « qui vend des vêtements longs typiques de cette mode dite pudique. "Il y a une réelle demande des femmes", souligne-t-elle dans un entretien à l’AFP, citant une étude selon laquelle le marché mondial de la mode islamique, évalué par un cabinet à 230 milliards de dollars (202 milliards d’euros) en 2014, pourrait atteindre plus de 320 milliards en 2020 ». C’est ainsi que se conclut l’article du Monde (je passe sur "une étude" et "un cabinet" : tout ça est bien flou). J'aime beaucoup la formule "la mode dite pudique" : c'est sans danger, voyons, c'est à ranger dans les futilités de la mode. Et puis, s’il y a du beurre à se faire … 

Les mahométans n’ont pas fini de grignoter notre espace et de nous bouffer l'air que nous respirons. Les mahométans se frottent les mains en serinant à leur profit nos beaux slogans sur la "tolérance". Quand ce n’est pas brutalement, c’est tout en douceur, exactement comme dans les interrogatoires : le bon flic (la marque vestimentaire) et le flic méchant (le djihadiste) se partagent la tâche. La stratégie fait que le malfrat (le bon peuple) finit par se confier au premier parce qu’il craint le second (en se disant : "ce sera moins pire"). On peut compter sur la lâcheté et la veulerie morale de Hollande, Valls et compagnie pour leur faciliter la tâche. 

Les djihadistes de l’Etat Islamique qui commettent des attentats et les marques qui lancent la mode du « burkini » ne sont pas ennemis : ils marchent main dans la main, ni plus ni moins que, pour bien cuisiner un suspect, les flics se répartissent les rôles du bon et du méchant. 

La bombe et l’esthétique de la mode sont les deux faces de la même médaille stratégique. Au motif que la recherche vestimentaire est moins pire que l’assassinat de masse, l’Européen, le Blanc, le Français préfèrera la « non-violence » inoffensive du maillot de bain (le flic gentil) agréable aux yeux d’Allah, dans l'espoir que ça lui permettra d'échapper à la folie meurtrière (le flic méchant). 

Sarkozy a beaucoup à apprendre de tout ça : pour ce qui est d'occuper le terrain et de faire parler de soi, il n'arrive pas à la cheville des fervents de l'islam, que celui-ci se présente sous les dehors conviviaux et pacifiques de la tolérance façon Tariq Ramadan, ou qu'il brandisse d'un bras vengeur la kalachnikov ou la bombe. L'islam aujourd'hui a une seule idée en tête : la conquête. Instaurer le débat en France autour de la question de l'islam est en soi une victoire de l'islam : pendant que je discute avec les tolérants, j'avance mes pions. Les esprits européens commencent à se faire à cette perspective. Au fond, pourquoi pas, semblent-ils se dire ?

Si j’ai bien compris, c’est pour demain, l’élection de Mohammed Ben Abbes, patron de "La Fraternité musulmane", à la présidence de la République française. Réalisant point par point le scénario imaginé dans Soumission. 

Ben Abbes président. Et Michel Houellebecq est son prophète. 

Voilà ce que je dis, moi.

jeudi, 03 mars 2016

CABU À LYON

2/2 

Louis Pradel, alias « Zizi », n’a pas fait que du mal, mais il a présidé à quelques-unes des principales défigurations dont la ville a été la victime, à commencer par le passage de l’autoroute A7 / A6 en pleine ville et ses calamiteux corollaires : le tristement célèbre tunnel de Fourvière et le Centre d’Echanges de Perrache (alias « le blockhaus », véritable muraille de Chine obstruant l’immense espace libre et richement arboré que constituait jusque-là le « cours de Verdun »). Imaginez "Central Park" en plein Lyon (à l'échelle de la ville), alors là oui, ça aurait eu de la gueule.

AVANT

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Le cours de Verdun, anciennement "cours du Midi". C'était avant la démence urbanistique de Louis Pradel, avant le tunnel de Fourvière, avant l'immonde "centre d'échanges de Perrache". Oui, Pradel était vraiment atteint de bétonnite furieuse. Heureusement, à gauche, le bâtiment bas en façade abrite toujours la Brasserie Georges (mais il faut voir devant quelle perspective actuelle, peu sympathique).

APRÈS

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Le quartier Perrache après Pradel ! Ça, c'est de l'urbanisme, monsieur ! En haut, l'entrée du fatal tunnel. De gauche à droite : les deux prisons, dont la "panoptique", devenues une université catholique ; la gare ; le "blockhaus", résultat de l'aberration pradélienne ; la place Carnot, coupée en deux par la rampe d'accès. Merci, monsieur le maire !

Les deux "jardins" en terrasse (quatrième ou cinquième niveau, je ne sais plus), c'était juste le "concept" avancé pour vendre tout le projet. Il faut voir aujourd'hui le "concept" de l'intérieur pour mesurer l'aliénation mentale sur laquelle celui-ci repose.

Tous les jours, qu’il est doux d’entendre les automobilistes et les Lyonnais rendre grâce à Zizi Pradel d’être ainsi tombé sous le charme de Los Angeles au cours de son séjour dans cette ville, juste parce qu’ « ils ont des voies express avec seize couloirs de circulation », et que ce qui est bon pour les Américains ne saurait être mauvais pour les Lyonnais. 

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La cathédrale Saint-Jean et la basilique de Fourvière, dans l'axe de la petite et sombre rue d'Amboise. 

Cabu a très bien rendu la nature ubuesque du gouvernement municipal tel que conçu par Pradel, capable de proférer de belles âneries : « J’aime voir couler le béton, car en marbre, cela coûterait trop cher ». Cabu publiait ses reportages dans Charlie Hebdo, ce qui donnait à ses sujets une ampleur nationale. 

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Reportage de Cabu parmi les prostituées réfugiées dans l'église Saint-Nizier. La "porte-parole" se faisait effectivement appeler Ulla.

Aujourd’hui, l’absence d’un tel relais se fait cruellement sentir : quel média national diffuserait, par exemple, un reportage sur la catastrophe qui s’est abattue sur l’Hôtel-Dieu de Lyon, ce « Monument Historique » (ça lui fait une belle jambe) que Gérard Collomb, l’infernal lointain successeur de Pradel, a bradé au privé ? En ces temps de libéralisme fanatique, il ne fait pas bon défendre le bien commun, les services publics, etc. C’est décidé : tout pour la « liberté d’entreprendre ». Autrement dit : liberté pour les loups.

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Les maires se suivent, leurs dégâts se ressemblent. Pauvre Hôtel-Dieu, confisqué aux Lyonnais, auxquels les nouveaux (richissimes) seigneurs des lieux consentiront à faire l'aumône d'une promenade à travers les bâtiments (contre versement de 80.000 euros environ par la municipalité, c'est-à-dire par le portefeuille des contribuables). 

Dans un autre reportage, Cabu évoque l’incroyable manifestation des prostituées lyonnaises, emmenées par Ulla, qui avaient occupé l’église Saint-Nizier pour je ne sais plus quelle raison (tracasseries policières, probablement). La figure que je retiens ici, est celle du curé de Saint-Nizier, le débonnaire père Béal, que Cabu ne nomme pas, dont il dessine un profil tout à fait exact, mais dont je redoutais et haïssais l’haleine fétide qui provenait de derrière la grille du confessionnal, quand il était à Saint-Polycarpe : le père Béal refoulait salement du goulot. L'haleine du père Béal est-elle pour quelque chose dans ma perte de la foi ? 

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"La paroisse des bourgeois lyonnais" : quelqu'un aurait dû l'emmener à l'église de la Rédemption. Là oui, il l'aurait vue, la bourgeoisie lyonnaise.

J’avoue que, sur certains points, les reportages de Cabu tombent dans la facilité des clichés, stéréotypes et autres caricatures : il n’y a pas que le journalisme dans la vie. Il faut bien s’amuser un peu. Alors il ramasse le tout-venant de l'air du temps : Cabu ne s'est pas toujours fatigué à dénicher de l'original. Eh oui, il lui arrivait de se laisser aller. Lyon comptait-il vraiment « une pute pour cent habitants (record de France) » ? Et je ne suis pas sûr qu’il faille ajouter un « fleuve de stupre » (qui « dégouline de la Croix-Rousse », scandale !) aux trois traditionnels (Rhône, Saône et beaujolais). 

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Le père Béal s'excusant auprès des prostituées de les déranger, pour une histoire de petite cuillère ....

Car aujourd’hui, en matière de stupre, la concurrence est rude : il n’y a qu’à se balader sur internet pour voir toutes sortes de quidams et de quidamesses s’adonner à l’exhibition filmée de leurs laborieuses et navrantes galipettes. 

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Une image des notables lyonnais, vraiment ?

Cabu à Lyon, finalement, rigolo, mais non, pas de quoi se relever la nuit. Il a, le plus souvent, fait infiniment mieux.

Voilà ce que je dis, moi.

Note : aux dernières nouvelles, il serait question de reclasser la jonction autoroutière A6/A7 qui traverse Lyon en "boulevard urbain". Si Gérard Collomb, actuel merdelyon, parvient à obtenir cette reconversion, alors là, je dirai : "chapeau !". Et je limerai mes incisives avant de tâter de son mollet.

Courage, Gérard. Juré : si tu finis par obtenir la destruction du "blockhaus", je vote pour toi aux prochaines municipales.

mercredi, 02 mars 2016

CABU À LYON

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Je l’ai dit ici même les 25 et 26 janvier : je n’aurais peut-être pas dû lire Mohicans, de Denis Robert. Trop tard et tant pis : le mal est fait. Ce bouquin a déboulonné la statue de Cabu, que j’avais placée sur un piédestal imaginaire, qui s’est purement et simplement aboli quand j’ai appris le coup de vice qu’il a planté dans le dos de Cavanna. Cabu, t'aurais pas dû. Mais il y a aussi que le consommateur ne sait pas quel produit il achète quand il ne sait pas comment il a été produit. Appelons ça la désillusion. J'étais juste un consommateur de Charlie Hebdo. : j'achetais chaque semaine ma dose d' "esprit Charlie". Bien fait pour moi. Il est vrai que les éditoriaux de Philippe Val, vous savez, ces épaisses tartines de prose, complaisantes et indigestes, ont été très rapidement, après 1992, une force de dissuasion suffisante pour m'éloigner des kiosques.

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Louis Pradel, alias "Zizi", maire de Lyon, sous le crayon de Cabu, et sur fond de naïades et de feu d'artifice. Il n'y a aucun doute là-dessus : Cabu était doué !

Ce que je ne suis pas prêt à digérer, c’est avant tout cette histoire de SCI : le pacte avec Philippe Val, Bernard Maris et X pour acheter les locaux de Charlie sous la caution bancaire de Charlie (achat promptement remboursé par la prospérité de la revue), mais surtout sans impliquer le vieux Rital dans l’actionnariat du nouveau Charlie Hebdo, et pour ne lui concéder qu’un ridicule 0,44%, au titre du propriétaire de la marque, quand le quatuor des actionnaires s’empiffrait de l’essentiel des bénéfices. Il y a des choses qui ne se font pas. Non, Cabu, tout n'est pas permis, que ce soit dans l'économie, dans la société, dans les relations personnelles.

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Une des plus magistrales réalisations de Pradel, maire de Lyon : le tunnel sous Fourvière (entrée nord). Cabu n'a pas tort de se référer à Albert Speer, l'architecte d'Adolf Hitler.

J’explique ce comportement de Cabu comme une faiblesse coupable commise sous l’emprise du manipulateur Val, probablement due au long copinage entre celui-ci et Cabu du temps du duo « Font et Val », dont il dessina au moins une demi-douzaine de pochettes des disques du tandem chahuteur (Ça va chier !, date de 1987, mais il y en a d'autres). Car il fut un temps où Philippe Val, flanqué de Patrick Font (dont Leporello pourrait dire « Sua passion predominante è la giovin principiante », Don Giovanni, "air du catalogue") donnait dans la contestation anarcho-gauchiste, avant de virer sa cuti pour devenir un fervent sarkozyste soucieux d’avancement et d’enrichissement personnel. Le lien de Cabu à Val est ancien. 

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Le pont Morand, l'ancien (le normal) et le nouveau (avec ses deux tubes pour le métro), que Cabu baptise "pont Maginot". Note 1 : il enjambe le Rhône !!!

Note 2 : "Les Équevilles, journal libre lyonnais", était publié par Jacques Glénat-Guttin qui, après quelques ennuis judiciaires avec Pradel, à propos de licences de taxis, a émigré à Grenoble, où il a fondé les éditions Glénat, vouées à la BD. Les "Équevilles", en lyonnais dans le texte, c'est tout ce qu'on jette à la poubelle.

Après un tel compagnonnage, difficile pour Cabu de rompre en visière avec son copain Val, au moment de refonder la maison Charlie, avec l’appui, qui plus est, des vieux de la vieille de la première équipe, à l’exception notable de Choron, et de DDT, qui gratifia Cabu d’une gifle méritée. Comment Cabu a-t-il pu jouer ce tour de cochon à Cavanna, ce vieux camarade des premiers temps ? Voilà ce que je n’explique pas, que j’excuse encore moins, et qui jette un sombre doute sur la sincérité du caricaturiste virtuose et génial dans le deuxième Charlie. 

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La montée de la Grande-Côte (aujourd'hui, ça n'a plus rien à voir), vue du haut. Je me demande où Cabu a bien pu traîner ses guêtres pour avoir vu dégouliner le stupre du haut de la Croix-Rousse. Mettons ça sur le compte de la licence poétique.

Reste donc le génie graphique, que personne ne peut nier. Reste aussi que je ne saurais pardonner à ses assassins. Reste que je n’avais pas attendu le 7 janvier pour tirer un trait définitif sur le Charlie de Philippe Val et consorts (celui à partir de 1992) : ça faisait une paie que j’avais laissé tomber. Reste le Cabu du vrai Charlie, le premier, le seul, l’unique, celui qui est né le 23 novembre 1970. 

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La même montée de la Grande-Côte, vue par en dessous, en pleine "rénovation" pradélienne. C'étaient les Arabes qui occupaient ce quartier, incroyable fouillis de petites maisons peu salubres, mais vrai village traversé de venelles formant une sorte de labyrinthe. Les successeurs ont un peu limité les dégâts, en faisant de l'espace dégagé un grand jardin.

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La façon dont il évoque les putes, les flics et les notables peut en revanche laisser sceptique ou paraître daté. 

Voilà ce que je dis, moi.

mardi, 26 janvier 2016

MON ADIEU À CHARLIE

ROBERT DENIS MOHICANS.jpg2/2 

Alors pourquoi cette tristesse grandissante à la lecture ? D’abord Cabu. Mon Cabu, Cabu l’assassiné. Car Denis Robert arrive à écorner gravement l’image du Grand Duduche. Remarquez que je me doutais de quelque chose. Un article du Monde, en juillet 2008, cité par l’auteur, m’avait chiffonné à l'époque : Charlie publie alors les « caricatures de Mahomet ». Succès fulgurant : 500.000 exemplaires vendus. Moyennant quoi les quatre actionnaires toucheront au total 968.510 euros de dividendes. 

Les actionnaires ? Val, Cabu, Bernard Maris et Eric Portheault (le comptable). Cabu ? Maris ? Comment est-ce possible ? Le gras est pour les deux premiers : 330.000 euros chacun (p.218). La somme, de fait, m’avait semblé énorme, brouillant l’image de l’icône. Trop d'argent, c'est toujours mauvais signe.

Et puis il y a cette histoire des locaux de Charlie rue de Turbigo. Les mêmes actionnaires créent une SCI pour acheter les 200-250 m², empruntent auprès de la banque en faisant de Charlie la caution du prêt – qu’ils rembourseront très vite grâce aux bénéfices de l’entreprise – et feront de la revue leur locataire ! L’entourloupe est superbe, légale et puante. Et quand ils revendront le bien quelques années plus tard, ils toucheront une tout aussi superbe plus-value. Dire que Cabu a trempé là-dedans … qu'il en a profité ... C'est trop moche.

Dans son bouquin, par-dessus le marché, Denis Robert montre un Cabu à la remorque de Philippe Val, capable de lâcher Siné, que celui-ci ose accuser d’antisémitisme, au mépris de la vérité, pour mieux pouvoir lourder ce gêneur incorruptible hors des murs de Charlie : « La pilule est dure à avaler, moins pour Val, pour qui Delfeil (de Ton) n’a aucune considération, que pour Cabu. Découvrir que Cabu, le Cabu des débuts d’Hara Kiri, l’ami et le frère de la glorieuse époque, se prête à ce coup de poignard, est le signe d’une improbable trahison » (p.121). Cabu prendra une gifle de Delfeil, mais Siné gagnera son procès. Deux gifles pour le prix d'une. Allons, il y a encore une justice.

Denis Robert restaurera tant soit peu l’image ternie du Grand Duduche vers la fin du livre : « Même si Cabu a gagné beaucoup d’argent avec Charlie Hebdo, ce n’était pas une motivation suffisante pour comprendre son ralliement constant aux idées de Val. Cabu gagnait beaucoup plus d’argent encore avec ses albums et ses collaborations extérieures. Il vivait modestement. L’argent n’a jamais été un moteur pour lui. Cabu était un buveur de lait, un dessinateur de génie, mais un homme naïf. Sa soumission à Val reste une énigme » (p.292). Il n’empêche : l’image de Cabu en a pris un sale coup. D’abord l’homme d’argent. Ensuite le soutien à Philippe Val, ce particulier peu recommandable. Je suis obligé de le dire : Cabu a mal vieilli. Peut-être a-t-il fini par se faire acheter par le statut social où son talent l'a promu ?

Pour ce qui est de Philippe Val en personne et du portrait que Denis Robert offre de l’individu, rien de bien surprenant en fin de compte. Le personnage m’est depuis fort longtemps antipathique. Avide de pouvoir et manipulateur. Combinard, avec son pote Malka, avocat de Charlie, mais aussi, dans le même temps, de Clearstream (tiens donc !). Je passe sur le curieux comportement de l’avocat Malka à l’égard de son ancien patron Dartevelle. 

Val s’appuyant juridiquement sur Malka pour, dans un double mouvement, faire reconnaître à Cavanna, le fondateur, la propriété du titre Hara Kiri (au détriment de Bernier-Choron), pour mieux le dépouiller ensuite de l’intéressement aux bénéfices de Charlie, dont il se débrouillera pour lui faire verser, royalement, 0,44%. Quand il est devenu directeur de France Inter, puis soutien de Nicolas Sarkozy, mon radar avait cessé depuis très longtemps de capter l'écho de ce petit monsieur. 

Denis Robert, par reconnaissance envers Cavanna et Choron, ainsi qu’à un certain esprit Hara Kiri qui n’a pas été pour rien dans son parcours professionnel, nous fait suivre les traces de ces combattants, mais à une époque où ils sont complètement largués, dépassés par les événements. Cavanna ne comprend rien aux arguties juridiques dans lesquelles il devrait se plonger pour défendre ses intérêts. Cet homme de parole répugne à tout ce qui est paperasse. Et Val saura en profiter honteusement. Choron, lui, a dit un merde définitif à Val, dès la première approche en vue de la reparution de Charlie. Quand Cavanna a compris dans quelles grandes largeurs il s’était fait avoir, il n’avait plus la force de se battre, désabusé, dégoûté. 

Philippe Val, en grand opportuniste, a su saisir les occasions de s’élever, quand elles se présentaient. Au total, on peut se dire, avec Denis Robert, qu’il s’est servi de Charlie comme d’un marchepied, et qu’il l’a très tôt mis au service de son ambition personnelle.  

Le répugnant, c’est que deux faux-jetons, après le 7 janvier, sont allés répandre leur « émotion » sur tous les plateaux de télévision, tout en livrant leur propre version de l’histoire de la revue, qui n’a, selon Denis Robert, pas grand-chose à voir avec la vérité. Revue dont ils n’avaient, au surplus, plus rien à cirer. Quant aux rapports de Val à l’argent, il faut lire le passage édifiant où l’auteur rend compte d’une interview dans laquelle, interrogé (je crois) par Maïtena Biraben, il s’embourbe dans les circonlocutions et les manœuvres d’évitement. Visiblement, il juge ces basses questions fort indiscrètes.

Voilà d’où vient la grande tristesse qui vous prend à la lecture du livre de Denis Robert. D’un côté, la fin d’un Choron complètement désargenté, la fin d’un Cavanna qui n’a plus la force de se bagarrer. Les deux derniers des Mohicans (excellent titre). De l’autre, des gens sans scrupules, machines à traire la vache à lait, qui se sont enrichis sur la bête. J’en veux désormais à Cabu et à Bernard Maris de s’être prêtés à de petites manœuvres bassement intéressées, sans aucun respect des liens d’amitié. Et en contradiction hypocrite avec l’image des combats qu’ils déclaraient mener. C'est sale. Le signal aveuglant d'un changement radical d'époque : l'imposture du retour de Charlie marque l'émergence, puis le triomphe des petits calculs et du mercantilisme. Bien adaptés à l'intégrisme ultralibéral ambiant. Mais bon : paix à leurs cendres.

Il reste cependant le grand Charlie, le seul, l’unique, le premier Charlie, celui de 1970, digne successeur d’Hara Kiri Hebdo, et porté, pendant dix ans, par une inégalée et incomparable équipe de joyeux drilles libres, irrespectueux et créatifs. 

Ça, on ne me l'enlèvera pas. 

Voilà ce que je dis, moi.

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Note : A ceux qui s'étonneraient qu'une présence tricolore puisse être associée à l'équipe anarcho-festivo-alcoolique de Hara Kiri, qui n'en avait strictement rien à foutre, je signale que cette modeste manifestation de patriotisme remonte aux attentats de Paris, le 13 novembre 2015, au stade de France, au Bataclan, aux terrasses du Carillon, de La Belle Equipe, du Petit Cambodge, de Casa Nostra et du Café Bonne Bière.

jeudi, 07 janvier 2016

CHARLIE HEBDO : DOUZE MOIS !

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In Memoriam CABU, WOLINSKI et LES AUTRES. 

« Vous qui voyez la lumière,

De nous vous souvenez-vous ? »

"Pensées des morts", Lamartine, Georges Brassens.

 

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Frédéric Boisseau, Agent d’entretien.

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Franck Brinsolaro, Policier du Service De La Protection (SDLP).

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Jean Cabut, dit Cabu, Dessinateur.

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Elsa Cayat, Psychanalyste et Chroniqueuse.

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Stéphane Charbonnier, dit Charb, Dessinateur et Directeur de Charlie Hebdo.

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Philippe Honoré, Dessinateur.

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Bernard Maris, Economiste et Journaliste.

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Ahmed Merabet, Policier.

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Mustapha Ourrad, Correcteur.

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Michel Renaud, organisateur à Clermont-Ferrand d’une exposition de dessins de Cabu, à qui il les rapportait un certain 7 janvier.

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Bernard Verlhac, alias Tignous, Dessinateur.

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Georges Wolinski, Dessinateur.

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Que des gens à peu près normaux, quoi !

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« Oui mais jamais au grand jamais

son trou dans l'eau ne se refermait :

cent ans après, coquin de sort,

il manquait encore. »

(cliquer pour 5'46" de chaleur)

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Ce n'était déjà pas joli, le défilé (en fait, 10 minutes avant de s'esbigner) de chefs d'Etat, le 11 janvier 2015, en hommage à des gens qui vomissaient, sur tous les pouvoirs en place, leurs mots et leurs traits, mais les plaques solennellement dévoilées par notre guignol présidentiel, et avec la grotesque componction et l'imbécile raideur dans lesquelles il aime tant se draper, c'est vraiment très moche. Et je ne parle pas du Y au nom de Wolinski. Il n'a pas vu, Hollande, que c'est marqué "Pas touche !" ? Non : cet homme n'a pas le sens du sacré.

Et ce d'autant plus que, plus le temps passe, plus on découvre que les services de renseignement français ont salement merdé : voir Le Canard enchaîné du 6 janvier sur la disparition du PV mentionnant la présence de Kouachi devant Charlie Hebdo, qui venait en repérage trois mois avant les attentats. Ils font koua, dans leurs bureaux, les flics ? Ils grattent du papier ?

C'est le même Hollande qui, quand il va en Arabie Saoudite, passe l'honneur de la France au kärcher pour que les Arabes lui achètent le plus possible de ses joujoux militaires, en fermant les yeux sur les décapitations, le wahabisme (la frange la plus rétrograde et rigoriste de l'islam sunnite) et la condition faite aux femmes. Et le lendemain, il n'éprouvera nulle honte à en appeler aux "Valeurs de la République". Mais qui peut croire sérieusement à ces "valeurs", quand elles sont proclamées par ce fantoche qui vire à tous les vents ?

Et pendant ce temps, Valls s'assied bonnement sur l'état de droit quand il annonce tranquillement que la démocratie n'en a plus pour longtemps, puisqu'il prépare activement l'installation d'un Etat policier et d'une société de la peur en lieu et place de la République française, en transférant toujours plus de pouvoir de la justice et des juges vers la police et les préfets, au prétexte qu'il faut "lutter contre le terrorisme". Tout en faisant mine de s'inquiéter de la "dérive autoritaire" en cours en Pologne. Les Français sont massivement d'accord, du moins selon les sondages.

Si les sondages ont raison (ça arrive quand même de loin en loin, même si c'est par hasard ou par erreur), il est temps d'avoir la trouille.