Ok

En poursuivant votre navigation sur ce site, vous acceptez l'utilisation de cookies. Ces derniers assurent le bon fonctionnement de nos services. En savoir plus.

jeudi, 12 janvier 2017

VU DE MA CAPSULE SPÉTIALE

014 1.JPG

Photographie Frédéric Chambe.

"Le silence éternel des espaces infinis m'effraie" (Blaise Pascal).

Heureusement : 

"Le vacarme intermittent des petits coins me rassure" (Oulipo, "littérature antonymique").

mercredi, 17 octobre 2012

L'EURO ET L'IDENTITE NATIONALE

Pensée du jour : « Peu d'oeuvres donne beaucoup d'amour-propre, beaucoup de travail donne infiniment de modestie ».

 

HONORÉ DE BALZAC

 

 

Je serais assez tenté d’accuser les hauts responsables de la France (principalement politiques, mais aussi médiatiques) d’avoir sciemment laissé tomber en déshérence les notions de nation et d’identité nationale. Tenté aussi d’attribuer à cette déréliction volontaire la floraison d’un mouvement comme le Front National, dont l’essentiel de la doctrine se résume d’ailleurs à la nation (« préférence nationale », « souveraineté nationale », et deux ou trois autres babioles, gadgets et bricoles).

 

 

Je vais vous dire, si la nation avait été portée par les grandes voix politiques, LE PEN serait resté le borgne qui faisait 3 ou 4 % aux élections. A cet égard, le fait qu’il doive son ascension électorale au machiavélisme tactique de FRANÇOIS MITTERRAND, en dit long sur le « sens de l’Etat » dont celui-ci a fait preuve.

 

 

Mais ça en dit long aussi sur son patriotisme : la redoutable bête politique qu’il fut a mis la France au service de son ambition et de sa carrière. CHARLES DE GAULLE a fait le contraire, avec un certain orgueil et une certaine classe, faisons-lui au moins ce crédit, en mettant son ambition et sa carrière au service de la France. DE GAULLE aurait fait un excellent homme d'Etat sous l'Ancien Régime.

 

 

Pour POMPIDOU et GISCARD, qui lui ont succédé, la nation française n’était pas encore une faribole, mais déjà plus tout à fait une priorité, perdant alors en netteté. Et la façon dont les politiques actuels se réfèrent aujourd’hui à « nos valeurs » a quelque chose de profondément obscène.

 

 

Et je n’oublierai pas que, sur la photo présidentielle (prise par l’estimable RAYMOND DEPARDON), le drapeau français, en toile de fond, partage l’espace avec le drapeau européen. Le message est clair : le drapeau tricolore n’occupe plus que la moitié du lit.

 

 

D’ailleurs, je ne sais pas si vous avez remarqué, mais vu comme sont présentées les trois couleurs, ça devient le drapeau des Pays Bas. Le gag n’est sans doute pas volontaire. Pendant ce temps, le drapeau azur à étoiles d’or, vous pouvez le tourner dans tous les sens, ce sera toujours le même cercle vicieux.

 

 

Et toujours à propos d’Europe, mais avant de passer à autre chose, parlons donc de l’euro. Qui a fait l’euro ? Et pourquoi ? Comment s’est passé l’abandon des monnaies nationales ? Le Franc ? Dissous dans la grande marmite européenne. Le premier franc ? Il a été battu (de « battre monnaie ») en 1360. Et je dis que le franc entrait pour beaucoup dans la définition de l’identité nationale française. Et l’abandon du franc nous renvoie toute notre histoire à la figure, aujourd’hui que l’euro coule.

 

 

Vous savez ce que ça veut dire, « franc » ? Comme il fallait payer la rançon de JEAN LE BON prisonnier des Anglais, on a appelé la monnaie qui l’a fait sortir de sa prison du nom de « liberté ». Regardez en France, le nombre de villes qui portent « franc » dans leur nom. Regardez le nombre d’expressions de notre langue : « franc-jeu, franc-maçon, franco de port, franc-parler, franc-tireur, … ». « Franc », ça veut dire « libre ».

 

 

La part d’identité nationale française que nous devions à cette monnaie qui nous était spécifique, a été purement et simplement jetée à la poubelle, au nom d’un pur et simple PARI fait au début des années 1990 par FRANÇOIS MITTERRAND, une grande fusion de toutes les identités nationales dans une identité supranationale. Sauf que la monnaie ne suffit pas à faire une identité. Or le reste (identité politique) n’a pas suivi. Ou précédé.

 

 

Ce n’est pas pour rien que JEAN-PIERRE CHEVENEMENT, dans La France est-elle finie ? (Fayard, 2011), a parlé du « pari pascalien » de MITTERRAND, au début des années 1990. Le « pari » de PASCAL, si je me souviens bien, se formule à peu près comme ceci : « Pariez sur l’existence de Dieu. De toute façon, ça ne vous coûte rien et, si Dieu existe, ça vous rapportera la vie éternelle ». Je résume. Le gros lot, quoi. Zéro de mise, en quelque sorte, pour un jackpot infini. Mais un jackpot supposé. Remplacez Dieu par l'euro, l'équation reste la même.

 

 

Le fond du jackpot, les Grecs sont en train de le toucher (du doigt, de la langue et du reste). Mais en somme, ils n’avaient qu’à ne pas parier comme des fous. C’est vrai qu’ils se sont fait prêter par « Dieu », en masse, de la vie éternelle anticipée, « à profiter de suite » en quelque sorte. Ils n’avaient pas le temps d’attendre. Ils ont inversé les termes du pari. Et ils ont bouffé le jackpot avant d’avoir trouvé les bons numéros. Bien fait pour eux. Le problème, c’est que d’autres risquent de suivre.

 

 

Personnellement, je n’aimerais pas que ça nous arrive.

 

 

Voilà ce que je dis, moi.

 

 

 

lundi, 18 juin 2012

ALEXANDRE VIALATTE LE GRAND

Dans son Almanach des quatre saisons, ALEXANDRE VIALATTE rappelle qu’au mois de février, « la grosse erreur est de semer les crosnes du Japon trop serrés, et qu’il faut les mettre à trente centimètres d’intervalle (en dehors de heures de bureau) ». Et il ne manque pas de préciser que « les hommes qui naissent en février aimeront les étoffes chinées. Ce sont des enfants du Poisson. Mystiques et rêveurs, ils seront attirés par la musique, l’abnégation, l’occultisme, les voyages et les liquides ; à la limite, ils feront donc d’excellents marins ou des placiers en spiritueux ».

 

 

Il donne aussi de précieuses indications au sujet de quelques prénoms du mois. Ainsi, « les Blaise (le 3) sont aimés de l’aristocratie slave ; très forts en métaphysique, ils naissent dans les rues commerçantes ». Si, à partir de là, vous avez reconnu BLAISE PASCAL (mais aussi BLAISE CENDRARS), c’est que vous êtes fort, ou que vous avez compris un des aspects intéressants de la tournure d’esprit de l’auteur, ainsi que de son style (la généralisation abusive).

 

 

Toujours à propos de prénoms, mais comportant un autre aspect (l’approximation phonétique) : « Les Armand (le 6) sont heureux, souvent jaloux, volages quelquefois. Selon La Fontaine, ils ont intérêt à ne voyager qu’aux rives prochaines ». Vous avez reconnu une citation d’une des plus belles Fables, Les Deux pigeons :

 

« Amants, heureux amants, voulez-vous voyager ?

Que ce soit aux rives prochaines ».

 

Si je dis « une des plus belles », c’est à cause des derniers vers, qui constituent un rarissime et très touchant exemple où LA FONTAINE se laisse aller à la tentation de se livrer à quelques confidences :

 

« J’ai quelquefois aimé, je n’aurais pas alors

Contre le Louvre et ses trésors,

Contre le firmament et sa voûte céleste,

Changé les bois, changé les lieux

Honorés par les pas, éclairés par les yeux

De l’aimable et jeune bergère

Pour qui, sous le fils de Cythère,

Je servis, engagé par mes premiers serments.

Hélas ! Quand reviendront de semblables moments ?

Faut-il que tant d’objets si doux et si charmants

Me laissent vivre au gré de mon âme inquiète ?

Ah ! Si mon cœur osait encor se renflammer !

Ne sentirai-je plus de charme qui m’arrête ?

Ai-je passé le temps d’aimer ? »

 

 

On est loin de La Cigale et la fourmi ou du Loup et le chien, vous ne trouvez pas ? Mais revenons aux prénoms selon VIALATTE, pour qui les « Apolline (le 9) se lèvent avec le jour. Yeux verts et foie fragile. Elles naissent à Limoges ». Et il conclut : « Si vous tenez à économiser, par avarice ou par manque de moyens, appelez votre filleul Montan ou Dosithée (fête le 29). Vous ne le fêterez que les années bissextiles ».

 

 

Je signale que le village de Saint-Montan (ou Saint-Montant), dans l’Ardèche (entre Viviers, Bourg-Saint-Andéol et Vallon-Pont-d’Arc), produit du vin rouge. Ce vin peut, à excellent droit, être surnommé le roi des « rouges-qui-tachent ». Pour parler franchement, si vous avez rêvé de la « tache absolue », je vous conseille un détour par le rouge de Saint-Montan. Je n’ai jamais vu l’équivalent.

 

 

Pour finir sur le 29 février, il est bon de rappeler que Saint GREGOIRE DE NAREK fut fils de Kosroès, évêque d’Antsévatsik (il paraît qu’il y avait des chrétiens en Turquie, au 11ème siècle) et que, décevant les attentes de tous les jaloux, mauvais et méchants qui lui cherchaient noise, non content de refuser de manger du pâté de pigeonneaux apporté par de vils tentateurs, au motif qu’on était vendredi, il frappa dans ses mains et dit au pâté froid : « Allez jouer, mes petits amis, c’est du poisson qu’on mange aujourd’hui ». Les pigeons s’envolèrent aussitôt dans les arbres. Farpaitement ! C’est comme ça que ça s’est passé !

 

 

Moi je dis que je comprends qu’il ait été invité à naître un 29 février. Parce que vous ne me ferez pas sortir de l’esprit que tout ça, c’est louche. Bon, c’est vrai qu’on ne le fête (encore faut-il ne pas avoir oublié l’aide-mémoire entre la liste des courses de la semaine à Auchan et celle des bonnes résolutions du 1er janvier, qu’on a omis d’ôter du portefeuille) que tous les quatre ans. Mais quand même, ça reste louche, cette histoire de pigeons.

 

 

Bon, j'ai encore fait des « arabesques » (au sens de CHATEAUBRIAND), mais que voulez-vous, s'il fallait se priver de tous les à-côtés, la vie serait bien triste, non ?

 

 

Voilà ce que je dis, moi.

 

 

A la prochaine.