mercredi, 28 décembre 2022
LA VÉRITÉ SUR LES RENOUVELABLES
Rien à dire. La vérité est brutale et balaie les illusions qui pourraient encombrer les cerveaux craintifs, pusillanimes ou avides de sécurité. L'humanité n'est pas encore tout à fait à poil, mais pas loin. Le malheur, c'est qu'elle refuse de le savoir. Elle continue à croire que tout ça va s'arranger, et fredonne avec plus ou moins de conviction : « Toutes ces petites misères seront passagères Tout ça s'arrangera ».
Les quelques lignes ci-dessus sont extraites d'un entretien avec un monsieur qui a aujourd'hui 79 ans (Le Monde, 9 avril 2022) : DENNIS MEADOWS, physicien. L'entretien accordé au journal Le Monde (Audrey Garric) célèbre à sa façon le cinquantième anniversaire du rapport co-écrit en 1972 par le susnommé pour le Massachusetts Institute of Technology : Les Limites à la croissance.
L'originalité bouleversante de ce rapport consistait en la formulation d'une vérité sans doute trop brutale pour l'époque de joie et de prospérité dans la consommation, contre le mur de laquelle l'humanité se heurte aujourd'hui le front, le nez et l'avenir. Ce que susurrait le rapport Meadows et consort en 1972 est devenu un hurlement. Mais le monde a les oreilles bouchées.
Une dernière question :
Quand on sait que le rapport de 1972, commandé aux savants du M.I.T. par le Club de Rome, fut un véritable best-seller à l'époque, nous voilà rassurés, cinquante ans après, sur le sort que l'humanité s'apprête à réserver aux multiples rapports, publiés par ces autres savants réunis au sein du G.I.E.C., qui se succèdent avec bonhomie et régularité sans aucun effet sur la marche du monde, alors qu'ils ne parlent, pour leur compte, que du climat.
« Il n'y a pas de solution sans une réduction drastique de nos besoins en énergie. », affirme Dennis Meadows.
Pourvu que les bons peuples n'apprennent pas ce que signifierait une telle "réduction drastique" sur la qualité de leur mode de vie !!! Déjà que leur situation est souvent des plus précaire ... !!!
« Pas d'espoir pour cette civilisation intensive en énergie et en matériaux », dit pour finir l'excellent Mr Meadows. En clair et en français : "Il faut que tout le monde s'apprête à en prendre plein la gueule".
MAIS BONNE ANNÉE 2023, HEIN !!!
09:00 Publié dans DANS LES JOURNAUX, ECOLOGIE | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : écologie, club de rome, m.i.t., massachusetts institute of technology, dennis meadows, journal le monde, audrey garric, dérèglement climatique, the limits of growth
jeudi, 15 septembre 2022
CEUX QUI ONT LA SOLUTION
Je sais pas vous, mais il y a quelque chose, dans le paysage de notre monde mal barré, qui me fait toujours autant rire, braire et m'apitoyer, dans la façon dont "certains" (en français : des intellos) évoquent les problèmes, les situations et même les événements. A les écouter, ces braves gens, il suffirait de prendre au sérieux leurs propos et appliquer les recettes qu'ils mettent sur la table, pour que les problèmes se résolvent et que les situations s'éclaircissent. A cet effet, ils disposent d'un « Sésame, ouvre-toi ! » dans l'immémoriale expression IL FAUT.
Je me souviens que le journal Le Monde a publié dans ses pages, dans les années 1970, toute une série de dessins d'un nommé Konk, une série intitulée "Faukon, Yaka et Pitucé" (pas besoin de traduire), où il se moquait de ces gouvernants de comptoirs qui détiennent, après quelques apéros, les clés de la bonne gouvernance du pays. La collaboration n'a pas duré trop longtemps, car assez vite on a vu Konk aller mouvoir ses nageoires dans les eaux sales voisines du Front National de Jean-Marie Le Pen, voire dans diverses cellules et officines un peu plus "musclées". Au Monde, on a dit : "Pas de ça, Lisette". On le comprend.
Reste que je demeure abasourdi quand, dans les pages du même Monde, il m'arrive encore de tomber sur des titres contenant la formule sacramentelle autant que passe-partout : il faut. Ces titres, on les trouve en général dans les pages "Débats" du journal. Alors bien sûr ce sont des collectifs, des trios, des tandems ou des individus qui profèrent l'expression fatidique et qui n'engagent nullement la responsabilité du quotidien.
Tous les titres qui figurent dans la petite rafale ci-dessous sont tirés de numéros récents, témoignant de l'étonnante santé d'une formule dont je subodore qu'elle ne doit sa survie qu'à l'indéracinable dose d'espoir qui, chez les humains, signifie l'impossibilité absolue (ou presque) de renoncer à envisager le futur en fermant la porte au nez des lendemains qui chantent. « Il faut subir ce qu'on ne peut empêcher », dit quelque part Jorge Luis Borgès. C'est exactement là que l'homme commence à rêver. C'est là qu'on franchit la frontière de l'imagination. La formule "il faut", c'est empêcher la porte des possibles de se refermer.
A cet égard, j'aime particulièrement les articles de fond produits par des journalistes sérieux et si possible chevronnés, et construits comme des dissertations normales ou comme des notes de synthèse, vous savez : 1 - constat ; 2 - causes ; 3 - perspectives. La troisième partie doit faire la preuve que la situation n'est pas désespérée. Ensuite, le rédacteur est invité à faire preuve d'ingéniosité pour éviter le grossier "il faut". Car la langue française abonde en ressources diverses et en moyens astucieux de tourner autour du "il faut".
En général, j'admire de tels articles aussi longtemps qu'ils décrivent le problème dans tous ses aspects et qu'ils entreprennent d'expliquer l'origine de ce problème : la virtuosité du journaliste peut se donner libre cours. Et puis vient la troisième partie, et patatras ! le cousu de fil blanc apparaît en pleine lumière. L'auteur de l'article y va de ses solutions, de ses propositions, de ses hypothèses, des mesures et des décisions à prendre. Mais il aura beau mettre en œuvre tout son talent pour costumer et grimer le "il faut" sous toutes sortes de fards et de fonds de teint, il butera immanquablement sur le mur du "comment on fait ?". Autrement dit : comment on passe du virtuel au concret ?
La petite suite que je présente ci-dessous n'est qu'un modeste échantillon (été 2022) des manifestations du pouvoir du "il faut" dans les cerveaux de ceux dont le métier est de penser.
Ouais, t'as bien raison, mais tu peux nous dire comment on fait, monsieur le savant ?
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Le Système ? Ouais, l'idée est bonne. Reste plus qu'à nous dire
COMMENT ON FAIT,
crâne de piaf !!!
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Ouais, tout le monde va se mettre autour de la table, comme un gros tas de chouettes copains ! On va dire ça à l'Egypte, au Soudan et à l'Ethiopie pour le partage des eaux du Nil. On dira ça à la Turquie, à la Syrie et à l'Irak pour le partage des eaux du Tigre et de l'Euphrate. On dira ça ...
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Ah, l'implication des citoyens, un beau cheval de retour ! Allez, on vous fera de splendides "Conventions Citoyennes" ! Monsieur Macron aura plein la bouche de beaux discours ! On appellera ça "concertation", et au bout du compte, personne ne sera satisfait.
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Celui-ci, je le trouve particulièrement réjouissant : il me fait penser à une "évaluation à l'entrée en seconde" dont j'ai eu à connaître jadis. Parmi les 32 items des "objectifs" (on ne jurait alors que par la "pédagogie par objectifs"), le premier stipulait cette commination impérieuse et porteuse de tout le programme élaboré par la cohorte des crânes d'œuf qui préside depuis cinquante ans aux destinées de l'Education Nationale, pour le plus grand malheur de celle-ci et de la France : « MAÎTRISER L'ORTHOGRAPHE ». Il aurait fallu demander sa recette au crâne d'œuf. Dans le cas présent, je m'interroge : l'auteur peut-il me citer une période où l'humanité fut gardienne de la planète ("redevenir") ?
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Traduction : attendez-vous à des restrictions !
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Günther Anders est un philosophe. Il est l'auteur, entre autres, d'un ouvrage qui m'a profondément marqué : L'Obsolescence de l'homme, dans lequel il propose le concept de "honte prométhéenne" qui, à mon avis, résume et condense tout le problème des relations entre l'homme et la technique. "Prométhée", c'est l'audace, l'énergie, la créativité, l'inventivité phénoménales dont est capable l'humanité. "Honte", parce que l'homme se rend compte qu'il a donné naissance à des forces sur lesquelles il n'a plus aucune prise (exemple de la bombe atomique). Des forces incommensurables à sa petitesse : les Lilliputiens ont fabriqué Gulliver. Ils ont créé un "Golem".
Dans son bouquin, il évoque la figure d'Ernst Bloch, autre figure de la philosophie germanique, auteur, entre autres, de Le Principe espérance., mais c'est pour lui faire un reproche : « Il n'a pas eu le courage de cesser d'espérer, ne serait-ce qu'un moment ». Si Günther Anders avait été haut fonctionnaire obligé de rédiger une note de synthèse pour un ministre, nul doute qu'il aurait soigné les parties 1 - constat et 2 - analyse des causes, et qu'il aurait arrêté là son texte.
Pour lui, toutes les solutions partielles sont des illusions, voire des impostures. Pour lui, tous les "il faut" qui tentent d'aménager tel ou tel aspect du problème, et non de s'attaquer à la racine de celui-ci, sont autant de mensonges. Pour lui, c'est tout l'édifice de notre civilisation fondée sur la confiance aveugle en les bienfaits de la technique qui est une erreur à la base. Günther Anders reste un des seuls (le seul ?) à ne pas nous beurrer la tartine et à refuser de toujours "finir sur une note d'espoir".
CESSER D'ESPÉRER. Autrement dit : arrêter de rêver tout éveillé. Autrement dit : du tragique en philosophie. C'est ça que ça veut dire, "regarder la réalité en face".
09:00 Publié dans DANS LES JOURNAUX | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : journal le monde, journalistes, konk, front national, jean-marie le pen, emmanuel macron, président de la république, convention citoyenne, dennis meadows, joëlle zask, günther anders, l'obsolescence de l'homme, ernst bloch, le principe espérance, honte prométhéenne