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lundi, 20 juillet 2015

BANDE DESSINÉE : CHARLIE MENSUEL

 Je parlais de la page 1 de la revue Charlie mensuel, celle où se trouve le sommaire de chaque numéro.

N70 LE GRAND GUEDIN'S STUDIO.jpg

Gag rigolo (le gars photographié derrière son trépied demande à la statue de prendre différentes poses pour la photo) signé "Le grand Guedin's studio" (N° 70 : Dingues studio ?). Le témoin a fini par renoncer.

Cette page du sommaire, qui n’est a priori pas faite pour être regardée en elle-même, s’orne en effet d’un dessin (rarement une photo) presque toujours réalisé pour les besoins de la cause (il y a des exceptions : Herriman, Dubout, gravure ancienne, …), autrement dit un dessin où la place du sommaire proprement dit est prévue et ménagée. 

N92 MONIMOTO.jpg

Remarquable dessin d'un nommé Monimoto (N° 92).

On y voit toute sorte de styles, d’imaginations. Ce sont parfois des dessins un peu bâclés, comme si Wolinski avait demandé ce service dans l’urgence à un copain.

N108 MICHELANGELI.jpg

Celui qui donne ces dessins formidables (N° 108) signe Michelangeli.

Parfois, ce sont au contraire des pages très travaillées, presque comme des œuvres à part entière. Le défi, quoi qu’il en soit, est celui que relève constamment tout maquettiste de presse : la liberté règne, quoiqu'avec une contrainte précise, ce qui donne des pages tantôt très aérées (N° 51, un Japonais), tantôt surchargées jusqu'à l'étouffement (N° 60, Carali, je crois, bien qu’il signe Bill). Le tout étant de placer, bien lisible, le programme des réjouissances. Le menu du jour, si vous voulez. On est en plein dans l'art baroque : la déco plutôt que la structure. La volute, plutôt que l'architecture.

N122 GOLO.jpg

Là, c'est le grand Golo (N° 122) des loubards : dessin un peu "sale", bourré de sons et d'onomatopées, qui privilégie l'expressivité.

On trouve des habitués : Willem, qui vous torche en moins de deux sa planche aux cases minuscule, Guitton, l’échappé d’Actuel, éternel baba cool, Nicoulaud, qui dépannait sans doute Wolinski quand il n'y avait personne, Cathy Millet.

N141 MERIAUX.jpg

 

Ce dessin est signé Mériaux (N° 141). Je le trouve intéressant, quoique décoratif.

Pour cette dernière, je me demande si c’est la même que la directrice de la revue Art press. Si c’est elle, elle a aussi pondu La Vie sexuelle de Catherine M., cet éloge de la partouze qui donne autant envie de faire l’amour que les poissons d’Ordralfabétix donnent envie de les manger. 

N148 ALAIN.jpg

 

Ils ont baisé. Je ne suis pas "psy", mais il ne m'étonnerait pas que la femme, à commencer par son sexe, suscite quelque inquiétude chez le Alain (N° 148) qui signe cette planchette.

On trouve aussi, parmi les dessinateurs du sommaire, de parfaits inconnus, des signatures illisibles et même des anonymes. On regrette parfois beaucoup de ne pas savoir qui est là (le joli gag du N° 115, ci-dessous).

N115 ANONYME.jpg

J'aimerais bien savoir à qui on doit ce pot de fleurs qui rate sa cible, et cette page au dessin très léché. Ça ressemble un peu à Honoré, mort lui aussi le 7 janvier 2015.

J’ignore qui est Omez (N° 43). Et puis apparaissent ici et là des noms connus : Barbe (N° 54, voir ici le 15 juillet), Joost Swarte (N° 63, 82) ; Copi (N° 78) ; Veyron (N° 126). Bref, tout se passe comme si Wolinski, l’ordonnateur, se demandait à chaque fois comment il pourrait bien remplir sa page 1.

Ce Charlie-là, sauf erreur, s'est éteint au numéro 152 (septembre 1981, il n'a pas supporté longtemps l'élection de Mitterrand). Georges Dargaud a bien tenté une résurrection en avril 1982, avec Mandryka en "Rédac-chef", mais le cœur (ou l'esprit) n'y était plus.

Wolinski est mort le 7 janvier, à côté de Cabu, Maris et les autres. Une preuve que ce qui reste d'un homme, quand il n'est plus là, c'est bien ce qu'il a fait.

Voilà ce que je dis, moi.

dimanche, 19 juillet 2015

BANDE DESSINÉE : CHARLIE MENSUEL

Tous les amateurs de bandes dessinées connaissent les principales revues de l’âge d’or de la BD (le « neuvième art », comme certains se plaisent à dire, bon, je veux bien) : Tintin, Spirou, Pilote, les pères fondateurs en quelque sorte, qui s’adressaient exclusivement à la jeunesse, sous l’œil vigilant de la loi de 1949, qui permettait de surveiller les publications qui lui étaient destinées.

N42 MOGE.jpg

N° 42 de Charlie mensuel. J'ai croisé, dans le temps, un Moge. Il était professeur de couleur à l'Ecole des Beaux-arts de Lyon. Il trouvait qu'à son âge (autour de la quarantaine), ça devenait difficile de draguer les étudiantes. Est-ce le même ?

C’était l’époque innocente où Marlier pouvait dessiner ses « Martine » avec leur petite culotte, bien avant qu’on lui conseille de la mettre en pantalon pour des raisons « convenables » (traduction : moralisme policier, gare au soupçon de pédophilie). Et puis Goscinny est arrivé, a pris en main les destinées de Pilote, a fait évoluer la BD vers l’âge adulte en recrutant, entre autres, Cabu, Gébé, quelques autres grands.

N47 1 LUCQUES.jpg

N° 47. Lucques est l'auteur des Freudaines, souvent drôles, parfois désopilantes.

Et puis Delfeil de Ton lance Charlie mensuel. Il passe rapidement à Wolinski les rênes de ce « Journal plein d’humour et de bandes dessinées » (c’est la devise).

N49 1 CATHY MILLET.jpg

N° 49. Cathy Millet, qui signe ce dessin, est-elle la papesse qui régna, avant Catherine Francblin, sur cette Pravda de l'art contemporain qu'est la revue Art press ?

Le titre Charlie est un hommage direct à Charles M. Schulz, créateur d’une série célèbre entre toutes : Peanuts, où évoluent, entre autres, Charlie Brown et Snoopy, le chien philosophe (ci-dessous). J'aime bien, sans plus.

N54 1 BARBE.jpg

N° 54. Les visiteurs de ce blog connaissent André Barbe, depuis mon billet du 15 juillet. C'est Snoopy qui mord le flic aux fesses.

Je m’épargnerai non seulement l’effort de faire l’éloge de Charlie mensuel, mais aussi d’énumérer les illustres maîtres et les « petits maîtres » de l’art de la BD qui y ont vu publier leur travail. Eloge de toute façon inutile, « car il n’y a qu’à regarder, et c’est écrit dessus » (Alfred Jarry, « Linteau » des Minutes de sable mémorial).

N63 1 JOOST SWARTE.jpg

N° 63. Joost Swarte, le Hollandais dessinant spécialement pour Charlie. Et facétieux avec ça.

Je veux juste rendre hommage à cette revue mémorable, mais en braquant le projecteur sur une face jamais mise en avant. Wolinski rédigeait une sorte d’éditorial, qu’il publiait en p. 2, en l’agrémentant de dessins venus sous la plume de gens parfois connus, qu’il leur demandait pour l’occasion. On ne s’étonnera pas du dessin (ci-dessous) offert par Guido Crepax pour l’édito du N°37 (février 1972).

CREPAX.jpg

Ça se voit : c'est pondu "vite fait sur le gaz".

Mais sans vouloir vexer les mânes de Wolinski (que la terre lui soit légère), c’est la page 1 qui m’intéresse ici. Parfaitement : la page du sommaire, qui indique à quelle page il faut aller pour trouver ci et ça, et dont des exemples jalonnent le présent billet.

N67 1 GUITTON.jpg

 

N° 67. Guitton, l'indécrottable baba-cool, les petites fleurs, les petits oiseaux, les étoiles ... et les femmes.

Le sommaire de Charlie mensuel : voilà une manière marrante de jouer avec la contrainte. Un défi pour un dessinateur.

Voilà ce que je dis, moi.

La suite à demain.