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mardi, 12 juin 2012

POROSITE, DISSOLUTION

Résumé : les parois entre les mots, entre les choses, ne sont plus étanches, ont perdu en consistance, en densité. Elles sont devenues POREUSES. Cela vaut pour la catégorie du temps. Cela vaut aussi pour d'autres catégories.

 

 

Vous en voulez encore un, d’exemple de la POROSITÉ qui nous gouverne ? Après le temps qui n’est plus le temps qui passe, mais celui qui devrait ne jamais passer ou être déjà passé depuis lurette, voici l’espace, je veux dire la négation de l’espace, et plus particulièrement de la distance. A quoi sert cette terrible trouvaille qu'est le téléphone portable ? L’iphone ? Le smartphone ? Le lecteur MP3 ? Mais ça sert tout simplement à ne pas être là où l’on est. De même que la fillette est la femme, l’ici est l’ailleurs. Le temps est sans être. L’espace existe sans exister.

 

 

Ce n’est pas que ça donne l’ubiquité, ça non. C’est juste un paradoxe : l’individu n’est pas où il est. Vous ne trouvez pas intolérable et humiliant, d’être attablé avec un copain, et d’assister au spectacle du copain parti, par la magie de son portable, très loin de vous, dans un ailleurs inaccessible, aussi longtemps qu’il le voudra ? Je trouve ça inamical, voire méprisant. Le téléphone portable réalise le paradoxe en nous permettant de vivre dans l'oxymore.

 

 

La POROSITÉ qui nous gouverne se situe au cœur du verbe être, qui instaure un signe d’équivalence absolue entre ce qui est devant et ce qui vient derrière. Regardez le monde changer de planète, entre le film de 1966 (Un Homme et une femme, CLAUDE LELOUCH), et le film de 1998 (L’Homme est une femme comme les autres, JEAN-JACQUES ZILBERMANN). Je ne parle évidemment que des titres, qui sont avant tout des symptômes.

 

 

Voyez la magie opérée par le passage de la copule (si, si, c'est le mot juste) de coordination et à l’affirmation de l’identité des contraires, par la simple magie du verbe être. N’attendez pas maintenant de moi que je me lance dans une nouvelle diatribe contre les fanatiques qui voudraient bien substituer je ne sais quel « genre » à mon sexe.

 

 

Si vous insistez, je veux bien envisager de faire un effort. En attendant, je me contenterai de redire quelques mots à ces intégristes. Ils voudraient bien convaincre le monde que l’homme est un être 100 % « culturel », intégralement et de A à Z façonné par ses seuls acquis. Que l’homme ne contient plus la moindre parcelle de « nature » innée, sorte d'impureté, de scorie, de déchet qui pourraient lui rester attachés (pour traduire : son sexe physique, anatomique).

 

 

Les adeptes du GENRE voudraient bien que soit réalisé le voeu de BAUDELAIRE, qui faisait de la Nature la matrice de tout le Mal qui fût au monde : « ... la nature n'enseigne rien, ou presque rien, c'est-à-dire qu'elle contraint l'homme à dormir, à boire, à manger, et à se garantir, tant bien que mal, contre les hostilités de l'atmosphère. C'est elle aussi qui pousse l'homme à tuer son semblable, à le manger, à le séquestrer, à le torturer; car, sitôt que nous sortons de l'ordre des nécessités et des besoins pour entrer dans celui du luxe et des plaisirs, nous voyons que la nature ne peut conseiller que le crime. C'est cette infaillible nature qui a créé le parricide et l'anthropophagie, et mille autres abominations que la pudeur et la délicatesse nous empêchent de nommer ». Cela surprend ? C'est dans Le Peintre de la vie moderne. Sois désormais exaucé, CHARLES !

 

 

Au fond, les adeptes du GENRE ne sont que des ayatollahs à la sauce « moderne ». De plus, ils travaillent exactement à accélérer le processus dont je parle ici, le processus de cette POROSITÉ toujours plus marquée entre les contraires, à abolir le pouvoir discriminant de ce qu’on appelle des critères, donc à abolir ( = à interdire), en même temps que les différences, la possibilité du jugement.

 

 

Ils sont les victimes de graves attaques phobiques d’une urticaire morale virulente et géante dès que sonnent à leurs oreilles les mots de « limite », « démarcation », « seuil », « frontière », « cloisonnement », « compartimentation », « séparation », « distinction », etc. En revanche (nonobstant et subséquemment, gendarme Mirliflore), ils se retrouvent à l’aise et baignent dans leur jus quand ils croisent L’Un est l’autre (notez le verbe être), ouvrage bien connu d’ELISABETH BADINTER (1986).

 

 

La logique qui est à l’œuvre dans leur raisonnement est : « Tout est dans tout et réciproquement, parce que tout découle d’une construction sociale, donc d’un arbitraire insupportable qu’il s’agit d’urgence de déconstruire, à commencer par le carcan de l'identité et de la différence sexuelles ». N’est-ce pas, que j’ai bien résumé les thèses de JUDITH BUTLER ? Presque pas de caricature.

 

 

La toile de fond, l’horizon de cette pensée « genriste » (qui n'est qu'une idéologie, une doctrine) n’est rien d’autre que l’homme 100 % artificiel, une « humanité de synthèse », en quelque sorte. Je signale que le grand romancier MICHEL HOUELLEBECQ n’a pas peint un autre tableau quand il a publié Les Particules élémentaires (1998), avec son projet d’espèce humaine génétiquement modifiée et contrôlée, dès lors débarrassée du sentiment, de l’affectivité, et donc inaccessible à toute souffrance morale ou psychologique.

 

 

Voilà ce que je dis, moi.

 

 

Allez, vous en reprendrez bien une louche ?

 

 

 

 

 

 

 

dimanche, 16 octobre 2011

"GENRE" ET BOURRE ET RATATOUILLE (2)

Je voudrais par ailleurs qu’on m’explique ce que le « genre » apporte de nouveau, et que l’humanité ignorait scandaleusement depuis toujours. Selon moi, il n’apporte RIEN qu’on ne sût déjà, d’un savoir dûment répertorié. Alors comme ça, tous ces gens empressés autour du « genre » découvrent stupéfaits qu’il faut vingt ans de socialisation pour rendre un humain assez autonome pour se prendre en charge.

 

 

Ils découvrent ahuris que le petit d’homme débarque dans une culture toute faite, dans une langue toute faite, et qu’il va passer 7300 jours (= 20 ans, sans compter les 29 février, réservés à La Bougie du Sapeur) à emmagasiner, à acquérir, à APPRENDRE. Quand je suis né, je n’avais pas demandé à apprendre le français. Et pourquoi pas l'ourdou, le tchouvache ou le khabardino-balkare ? Eh bien tenez-vous bien, j’ai été obligé ! Parfaitement ! C’est intolérable ! C’est fasciste ! Après tout, la langue aussi, c’est une « construction culturelle » ! La langue ? Une réserve inépuisable d’arbitraire. Pourquoi dit-on « table » pour exprimer une table, après tout ?

 

 

Je n’ai pas demandé non plus à marcher. Eh bien c’est pareil, on m’a forcé. Pourtant marcher, c’est encore une « construction culturelle » ! Après tout, on pourrait ramper, retourner à quatre pattes, non ? Il s’est passé la même saloperie pour « travailler », « écrire », « s’habiller », « manger » et un tas d’autres trucs : rien que des « constructions culturelles » ! Tout ça qu’on inculque (les « valeurs », les « manières » et tout ça), sans même demander l’avis du petit, franchement, vous voulez que je vous dise : c’est abuser. Ma parole, mais c’est le règne de l’arbitraire !

 

 

Alors tous ces gens, puisque ça les amuse de « déconstruire » les faits culturels, mais qu’ils y aillent carrément ! Pourquoi se limiter au sexuel ? J’ai parlé de la langue, mais tout est susceptible « d’y passer », à la casserole « déconstructionniste ». Oui, au fait, je ne l’ai pas dit : cela s’appelle « déconstruire ». D’ailleurs un des rares trucs que la France ait exportés aux Etats-Unis, en dehors de son « patrimoine immatériel de l’humanité », qui est la gastronomie, c’est le « déconstructionnisme » inventé par JACQUES DERRIDA et MICHEL FOUCAULT. Avouez que ce n’est pas de veine.

 

 

En gros, « déconstruire », ça consiste à couper les cheveux culturels en quatre, et si possible davantage. Il n’y a pas de limite au « déconstructionnisme ». Pour faire simple, on analyse les faits, les valeurs dont nous sommes faits, l’histoire dont nous sommes le résultat, et l’on s’efforce de démontrer « scientifiquement » que tout ce qui nous constitue est le résultat d’un conditionnement arbitraire, donc scandaleux. Dans le fond, nous aurions pu être tout à fait autres que ce que nous sommes si les choses avaient tourné autrement pour nous. C Q. F. D. (on ne peut qu’abonder à tant d’évidence). Si vous ne saviez pas ce qu’est un « truisme », en voilà un beau.

 

 

Car des « constructions culturelles », on en prend plein la figure et on en rend autant tous les jours comme s’il en pleuvait. On est encerclé, on baigne dedans, on en fabrique à tout moment de la journée. Et je me dis que s’il faut « déconstruire » tout ça, on n’a pas fini. Autant s’y mettre dès la naissance. Ah ! On me dit que ce n’est pas possible, qu’il faut attendre que quelque chose soit construit. Pas de chance !

 

 

Bon, je sais bien que les sectateurs sectaires du « genre » focalisent leur attention sur le sexuel. On ne sait jamais, l’obsession n’est pas loin. D’une manière générale, ils regardent, pour les « déconstruire », les codes sociaux. Pourquoi pas ? Mais ça ne change rien à la question de base : pourquoi vivons-nous comme nous vivons, et pas autrement ? Ni aux questions suivantes : pourquoi la société impose-t-elle ses conditionnements de façon autoritaire et stéréotypée ? Et pourquoi les jouets des filles sont-ils des poupées ? Et pourquoi les hommes ne s’habillent-ils pas en robe ?

 

 

Bon, un « code social », qu’est-ce que c’est ? Pour faire simple, c’est renoncer à flanquer ta main dans la figure du type dont la gueule ne te revient pas. Au final, c’est ce qui permet aux gens de ne pas s’entretuer. Et même, soyons fou, de rendre possible, voire agréable, la cohabitation avec des gens qu’on n’aime pas, ou du moins des gens qu’on n’a pas choisis. Au total, ça fait une somme astronomique. Mais ce n’est pas vraiment à ça que s’en prennent les furieux du « genre ».

 

 

Car ce qu’ils ont dans le collimateur, c’est situé plus profond. Ils dénoncent la façon même dont madame Lasociété (c'est la mère maquerelle du bordel ambiant)  façonne les gens à l’intérieur, leur impose une identité qui n’est pas la leur, les empêche d’ « être eux-mêmes ». « Deviens ce que tu es », c’était une publicité Lacoste. Pour tout dire, on conditionne les individus à se conformer, non à ce qu’ils sont en vérité, mais à un rôle tout fait, un modèle sur lequel ils doivent prendre exemple, dont ils doivent adopter les attitudes. Mais qu'est-ce qu'ils « sont en vérité » ?

 

 

Un schéma sexuel organise l’éducation du garçon, et lui impose de devenir quelque chose de masculin. Même chose en féminin pour les filles. Il y a du stéréotype dans la façon dont la société s’y prend pour fabriquer du masculin et du féminin. Moi, je dis : « Et alors, coco, qu’est-ce qui te chiffonne là-dedans ? ». « Deviens ce que tu es », finalement, c’est un drôle de mensonge. D’abord, à partir de quel moment peut-on dire de quelqu’un ce qu’il est ?

 

 

NICOLAS SARKOZY a bien essayé de lancer l’histoire de dépister les futurs délinquants avant trois ans, mais heureusement, cette offensive a fait long feu (enfin, pas tout à fait, aux denières nouvelles, puisqu'on en reparle pour l'école maternelle). En gros, si l’individu est en naissant ce qu’il sera, à quoi sert l’éducation ? C’est bien de l’argent et de la peine jetés par les fenêtres. Et si l’individu est façonné (y compris sexuellement) par son environnement, à quoi bon se faire du souci, puisque, si l’on voulait faire l’inventaire exhaustif du dit « environnement », il faudrait collecter, classer et interpréter quelques milliards de données. Bonne chance au « scientifique » !

 

 

Dans le dossier du Monde cité plus haut, la journaliste ANNE CHEMIN dresse un honnête historique de la théorie du « genre », donnant la parole aux thuriféraires et aux pourfendeurs de la notion, dans ce classique « essuie-glace » de la technique journalistique (un coup à droite, un coup à gauche, et moi journaliste au milieu).

 

 

Le drôle de son article est dans les deux dernières phrases : « Le genre masculin n’est pas neutre. On ne naît pas homme, on le devient ». Ces paroles d’une force à défoncer la porte ouverte sont dites par la sociologue MARGARET MARUANI. Finalement, c’est ce qui me semble le plus drôle dans la controverse : la stupéfiante naïveté feinte de ces gens qui découvrent que le rond n’est pas carré, et inversement.

 

 

Quant à la papesse de ce mouvement, JUDITH BUTLER, son propos s’adorne de considérations plus fleuries les unes que les autres. Elle répond à la question de FREDERIC JOIGNOT : « Voulez-vous dire que la France est en retard dans les études sur le genre ? – Oui, notamment à l’université. » J’ai publié ici une note le 27 mai pour dire tout le mal que je pense de cette sorte de « retard » : en « retard » sur qui ? Le Malawi, les îles Kiribati ? Indirectement, c’est une idée raciste à l’égard de ces sociétés « arriérées », où règne un obsolète « ordre patriarcal ».

 

 

« Ce qui gêne, c’est de dire que l’homosexualité n’est pas une anomalie, (…) », sauf que, ne serait-ce que statistiquement, ça reste une anomalie. « La question est donc de savoir si nous sommes plus attachés à classer et à définir les normes qu’à comprendre la complexité de la sexualité humaine », à ceci près que la norme, c’est comme la langue : elle transcende, elle n’appartient à aucun individu ou groupe de pression en particulier, elle s’impose d’au-dessus.

 

 

Ce qu’elle confirme plus loin : «  De l’autre, nous sommes ligotés par des normes et des obligations que nous n’avons pas choisies ». Bien sûr, que nous ne les avons pas choisies : une norme qui serait l’objet d’un choix est une magnifique contradiction dans les termes. Imaginons cela : chaque individu, en toute indépendance, se donne à lui-même les normes auxquelles il se conformera. Ce serait drôle, d'ailleurs, un supermarché dont les rayons seraient remplis de milliards de normes : on viendrait avec son caddie, on choisirait ses normes, avec leur qualité, leur prix, leur couleur, leur goût. Ce serait le bonheur, comme dans la chanson de CLAUDE FRANÇOIS. J’y vois déjà se profiler la silhouette d’un monde merveilleux, bienheureux.

 

 

Allons, calme-toi, et bienvenue dans le CHAOS.

 

 

samedi, 15 octobre 2011

"GENRE" ET BOURRE ET RATATOUILLE

Je vais vous dire, ça commence à me fatiguer. Voilà qu’ils remettent ça, les adeptes du « genre ». Ma parole, ils ont le feu quelque part. C’est pire que « un, deux, trois, soleil ! » : on n’a pas encore tourné le dos qu’ils ont déjà avancé de trois cases. L’offensive bat son plein. Comment ? Mais bien sûr, que c’est une offensive ! Ils ont déjà réussi quelque chose, c’est à mettre le bazar dans les points de repère. Remarque, peut-être qu’ils étaient suffisamment mal en point et que le bazar y était déjà.

 

 

Quand j’entends deux intellectuels (j’ai oublié les noms, mais ils sont forcément éminents, parce qu’ils étaient chez ALAIN FINKIELFRAUT, sur France Culcul Ture) se chicorner comme samedi dernier, je me dis que les gars ont fait très fort. Tout le monde s’y est mis, tout le monde place son mot (moi y compris). La dame, elle disait comme ça que le genre, hé ben le genre, mon gars, c’est pas une « théorie », c’est une « substance », comme j’te l’dis. Si c’est ça être philosophe, je pouffe.

 

 

Le Monde s’y est mis aussi, et pas qu’un peu : trois grandes pages, enfin presque, parce qu’une bonne part de la surface est occupée par les très seyantes photos d’une série pertinemment intitulée « Androgyne », de  THIBAULT STIPAL, qui confirme assez bien ce que je disais ici même le 5 octobre, et qui annonce très clairement la couleur de l’offensive en question.   

 

 

En un mot comme en cent : le « genre » est le char d'assaut de l'offensive homosexuelle. On est dans une guerre  idéologique. C’est, si je puis ainsi dire, le « coin » enfoncé dans la brèche faite à la normalité sexuelle (je ne mets pas de guillemets au mot normalité, qui effarouche tant certains). Le but de l’offensive, c’est évidemment la prise de la citadelle de la normalité et la promotion de l’homosexualité en norme. L’habileté de la chose, c’est évidemment qu’elle n’est pas annoncée comme explicitement d’origine homosexuelle, mais qu’elle se présente dans le décor et sous le masque neutres de la science et du discours objectif.

 

 

Or, si l’on considère la norme comme un outil statistique, l’hétérosexualité  est la norme de l’histoire de l’humanité. Je me permets d’ajouter que, en l’absence d’une norme hétérosexuelle, je me demande où en serait l’humanité. Par ailleurs, est-il tout à fait illégitime et incompréhensible que la norme statistique soit devenue normative, c’est-à-dire s’impose à tous ? Si c'est le cas, j'aimerais qu'on me l'explique autrement que par l'argument de l'odieux arbitraire que ferait peser l'ordre hétérosexuel sur l'humanité.

 

 

Bien sûr, TOUTES les institutions humaines, depuis qu'il y en a, sont essentiellement arbitraires dans leur conception, leur mise en place et leur mise en oeuvre, à commencer par la façon dont la sexualité est instituée. J'aimerais aussi qu'on m'explique par quels miracles l'humanité aurait pu éviter de procéder ainsi. S'agit-il d'autre chose que d'instaurer  des règles, des codes, des conventions, des institutions, pour rendre possible la vie avec les autres ?

 

 

Tous les peuples se sont donné à eux-mêmes leurs propres règles, fondées sur l'idée qu'ils se faisaient de leur identité. J'aimerais qu'on m'explique sur quels concepts universels on s'appuie pour contester cet arbitraire-là (et un universel qui ferait spontanément un adhésion unanime, évidemment). Existe-t-il une unité de mesure admise par tout le monde qui permette de mesurer la légitimité de cet arbitraire-là ? Non. Sinon, je ne sais plus ce que c'est que la différence avec l'autre, non plus que la tolérance. 

 

 

En fait, il est impossible de légitimer, dans l'absolu et selon la nature, l'institution humaine, parce qu'elle est d'ordre conventionnel, et qu'il ne saurait y avoir de convention naturelle. L'expression « convention naturelle » est un oxymore, une contradiction dans les termes. Vouloir remplacer le sexe par le « genre », c'est donc uniquement vouloir substituer un arbitraire à un autre.  

 

 

On aura beau argumenter, pérorer, ratiociner tant qu’on voudra, on aura beau inventer des utérus artificiels, des grossesses masculines et autres fantaisies « meilleurdesmondesques », la norme veut qu’un homme anatomique et une femme anatomique s’emboîtent pour se perpétuer. Le socle et la condition de l’humanité, c’est la différence des sexes. Cette réalité NATURELLE ne plaît pas à tout le monde. Et la norme elle-même est maintenant considérée comme épouvantable et philosophiquement rédhibitoire.

 

 

Le problème, avec le MILITANT (le conducteur du char d’assaut, Act Up, PIERRE BERGÉ, tout ce qu’on voudra), c’est qu’il n’a aucune envie de discuter de quoi que ce soit avec qui que ce soit. Lui, il a sa vérité, il combat pour une cause, et il n’aura de cesse que de l’avoir fait triompher de ses ennemis. Alors pour lui, l’habillage neutre de la « science » est une précaution très utile.

 

 

Car il faut que ça se sache : oui, ce sont des homosexuels qui ont inventé, et surtout diffusé le « genre », à commencer par la fondatrice des « études de genre », JUDITH BUTLER, qui s’inspire des travaux de MICHEL FOUCAULT. S’ils ne l’ont pas inventé à proprement parler, sans eux, il n’aurait jamais connu un tel succès.

 

 

JUDITH BUTLER ne s’en cache aucunement : elle est lesbienne depuis l’âge de quatorze ans. Quant à MICHEL FOUCAULT, cette Tour Eiffel de la pensée française exportée aux Etats-Unis, il était homosexuel et ne s’en cachait guère. C’est grâce à lui, par exemple, que MATHIEU LINDON (Ce qu’aimer veut dire, éditions P. O. L.) a « revendiqué son homosexualité, commencé à se rendre dans les backrooms et assumé ce que les méchantes langues disaient alors de lui : "pédé, drogué et ami de Michel Foucault" » (site bibliobs.nouvelobs).

 

 

Le « genre », à cet égard, c’est une trouvaille, dont la théorie (j’ai l’impression d’être bouché quand j’entends nier que c’en soit une) est fondée sur un truisme : le sexe psychologique ne correspond pas forcément au sexe anatomique. La belle affaire ! Quelle découverte majeure !

 

 

Il est vrai que la théorie du « genre » va plus loin : elle postule qu’il ne faut pas ériger en « donnée naturelle » ce qui n’est que l’effet d’une « construction culturelle ». C’est entendu, « on ne naît pas femme, on le devient » (c’est de l’affligeante SIMONE DE BEAUVOIR). C’est entendu, on ne naît pas homme, on le devient. La belle affaire ! Tous ces gens redécouvre le binôme « NATURE / CULTURE » ! Je leur fais remarquer qu’ils devraient séance tenante se pencher sur le cas du fil à couper le beurre, de l’eau tiède, et de tout un tas d’inventions à refaire.

 

 

Là où les militants d’Act Up et autres chars d’assaut du « genre » deviennent des prestidigitateurs, c’est quand ils font tout simplement disparaître le socle « naturel » derrière la « construction culturelle ». Désolé, le « genre » n'abolit pas le sexe. Désolé, les gars, l’humain a beau être un produit de plus en plus raffiné et élaboré de nos « constructions culturelles », il reste quelque chose, tout au fond. Ben oui quoi : l’animal, la bête, enfin ! La Nature. L’ACQUIS n’a pas encore éliminé totalement l’INNÉ. Ça viendra peut-être. On en sera alors arrivé à la conclusion des Particules élémentaires de MICHEL HOUELLEBECQ.  

 

 

A suivre …

 

 

lundi, 05 septembre 2011

TU VAS RANGER TES GENRES ?!

On n’en finit jamais avec les innovations. La première fois que j’ai assisté en spectateur à un débat sur le GENRE, c’était en salle fumeur. Deux estimables collègues, pas trop vieux (c’est-à-dire plus jeunes que moi) faisaient assaut de considérations « branchées » sur cette notion alors entièrement nouvelle (au moins pour moi, mais je suis long à la détente). Ça avait l’air intelligent, ça avait même l’air intellectuel, voire intello. Effectivement, c’était intello. Là, je suis infirme. Si si, je vous jure !

 

 

J’ai consacré un petit article, récemment et ici même, à l’introduction du « genre » dans des manuels de « Sciences et Vie de la Terre », en tant que notion à part entière. J’en ai dit tout le mal que j’en pense : en gros, la notion de genre est totalement inutile. L’enseigner en tant que telle n’est absolument pas innocent. Pour résumer, ma thèse est que le hasard de la conception dote chacun d’un sexe anatomique et que, ensuite, c’est à chacun de se débrouiller avec dans la vie, en fonction de ce que celle-ci lui présente comme expériences.

 

 

Ce n’est pas l’avis des promoteurs du « genre », évidemment, y compris du délicieux et suave RAPHAËL ENTHOVEN, qui sévit sur France Culture. Enseigner le genre à des adolescents, qu’on le veuille ou non, c’est leur présenter leur évolution sexuelle comme une croisée des chemins, où ils vont mettre en œuvre leur liberté et leur raison, pour décider en pleine conscience : moi, garçon, moi, fille, ai-je envie de vivre ma partie féminine ou ma partie masculine, puisqu’on m’a persuadé qu’il y a une part de masculin dans le féminin et inversement ? Ils ou elles choisiront donc délibérément, pour eux-mêmes, le yaourt masculin ou le yaourt féminin sur le rayon de l’hypermarché de la consommation sexuelle. Et pourquoi pas les deux ? La bisexualité comme avenir de l’humanité ?

 

 

La morale de tout ça, c’est qu’on présente l’homosexualité exactement à égalité avec l’hétérosexualité, et ce, au nom du combat contre la norme, obligatoirement mauvaise. Et surtout, il faut empêcher coûte que coûte le jeune d’éprouver le moindre sentiment de culpabilité si par hasard il n’entre pas dans le moule de cette effroyable norme. Il faut surtout que le jeune se sente libre, on se tue à vous le dire !

 

 

Conclusion : les mêmes éducateurs qui en appellent à grands cris à conforter et renforcer les « points de repère psychologiques » qui permettent aux jeunes de « se construire », ont entrepris de détruire ces « points de repère » en militant (ça aussi, c’est un problème) pour accroître la confusion dans les esprits.  Autrement dit, on voudrait faire de la propagande pour l’homosexualité, on voudrait y encourager, on voudrait faire du prosélytisme homosexuel, on ne s’y prendrait pas autrement.

 

 

Eh bien, pendant qu’on solde les cadres de ce qui structure l’humanité depuis la nuit des temps (j’ai nommé la DIFFERENCE DES SEXES), l’offensive continue. Et puisqu’il s’agit de détruire cet ennemi à la racine, elle continue en amont de l’adolescence, pour remonter jusqu’à l’âge le plus tendre. Et le champ qu’il s’agit de nettoyer de tous les miasmes de la différenciation sexuelle, c’est maintenant le champ du JOUET. Parfaitement messieurs-dames.

 

 

Parce qu’on ne le dira jamais assez : il y a quelque chose de totalitaire dans le fait de donner au petit garçon des petites voitures ou des soldats, et à la petite fille des poupées dans des poussettes. Les parents ne se rendent pas à quel point ils orientent abusivement l’esprit de leur progéniture : c’est du terrorisme parental !

 

 

C’est donc entendu : tu es un garçon, tu joueras à la guerre en miniature, et ça te préparera à donner ta vie pour ton pays quand tu auras l’âge ; tu es une fille, tu joueras à la maman, et ce faisant tu répéteras longtemps à l’avance les gestes qu’il faudra faire quand tu auras ton premier.

 

 

C’est donc entendu : tu subiras un horrible conditionnement, un ignoble lavage de cerveau. C’est ce que les féministes et adeptes de la théorie du genre (qui est bel et bien une théorie, malgré RAPHAEL ENTHOVEN) appellent un déterminisme, un surdéterminisme, un dressage ou je ne sais quoi. C’est ce qu’ils trouvent absolument insupportable.

 

 

D’abord, ces gens-là sont ignares, ou ils font semblant : ils ne savent pas qu’il existe des garçons qui n’aiment pas jouer au foot ?  Ils ignorent que certaines filles sont des « garçons manqués », comme il ne faut plus dire ? Les bras m’en tombent : les gamins n’ont pas attendu les savantasses intellos machins pour indiquer à leurs parents leurs préférences en matière de jeux et de jouets, quittes à ne pas respecter le « schéma dominant », quittes à tomber sur des becs qui les font plus ou moins souffrir.

 

 

Ensuite, il ne faut pas être passé par de grandes écoles de psychologie ou de psychanalyse pour se rendre compte que le schéma est exactement l’inverse de celui qu’avancent les adeptes du « genre ». Pourquoi offre-t-on, EN REGLE GENERALE, soldats et voitures au garçon ? Pourquoi offre-t-on, EN REGLE GENERALE, des poupées aux filles ?

 

 

Est-ce que par hasard ça ne serait pas parce que le petit garçon veut  ressembler à son père, et l’imiter ? Ecoutez deux garçons discuter dans la cour de récréation : « C’est mon père qui est le plus fort, le plus riche ! – Ouais, mais c’est mon père qui a la plus grosse voiture, la plus grosse … ! » ? Ou deux filles : « C’est ma mère qui est la mieux habillée ! – Ouais, mais c’est ma mère qui est la plus belle ! » ? Non, je ne vais pas prétendre que tout ça, c’est inné, évidemment. Mais je n’invente rien si je dis, après les plus hautes autorités en la matière, que le gamin a BESOIN de s’identifier au parent de même sexe (et accessoirement d’essayer de séduire le parent de l’autre sexe).

 

 

Quoi, vous me dites que ce serait déjà le résultat d’un conditionnement ? Mais moi, digne et sans faire de chichis, je rétorque : « ET ALORS ? ». Vous avez vraiment l’intention d’éradiquer jusqu’à la moindre trace de conditionnement dans l’éducation de l’être humain ? C’est la notion de conditionnement qui vous taraude à ce point la comprenette ? Mais, messieurs-dames, je regrette : c’est vous qui êtes totalitaires, et mine de rien – et  c’est d’ailleurs très drôle – vous rejoignez la bande de ces éducateurs post-soixante-huitards, qui s’interdisaient d’intervenir de façon autoritaire dans le « parcours éducatif » de l’enfant, comptant sur son développement spontané pour qu’il arrive par lui-même à s’éduquer et à s’instruire.

 

 

S’inspirant de Libres enfants de Summerhill, de ALEXANDER SUTER NEILL (éditions Maspero, 1971), des allumés de l’éducation sans contrainte avaient ouvert des « écoles », comme celle du « Tournesol », dans la région lyonnaise. Je me souviens de Journal d’un éducastreur (éditions Champ libre, 1971), d’un nommé JULES CELMA. Il est sorti de tout ça la certitude plus ou moins affirmée qu’une telle démission de l’autorité adulte, selon l’exigence de « libre épanouissement » de l’enfant, débouche sur quelque chose qui a à voir avec la violence, la tyrannie et l’homosexualité (dans le livre de CELMA). Et toutes ces « écoles nouvelles » ou presque, fondées sur les meilleures intentions du monde, ont lamentablement (et heureusement) fait naufrage.

 

 

Il existe quantité de définitions de ce qu’est, doit être ou devrait être un ADULTE (« avoir pardonné à ses parents » SAINT-EXUPERY, « être adulte, c’est être seul » JEAN ROSTAND, « un enfant gonflé d’âge », ça c’est de la détestable et confusionniste SIMONE DE BEAUVOIR, etc.). Je proposerais volontiers quant à moi celle-ci : un parent, un éducateur est adulte quand il exerce l’autorité que, en vertu de sa fonction, la société lui délègue. Il est adulte quand il accepte d’être celui qui conditionne celui dont il a la charge.

 

 

Eduquer, c’est vouloir donner une forme et une structure à un esprit, à une personne. Imagine-t-on qu’il puisse y avoir une formation sans aboutissement à une forme ? Mettez une boule d’argile sur un tour de potier, n’y mettez surtout pas les mains, et puis admirez le résultat. De toute façon, la liberté du gamin est forcément respectée, du fait du RATAGE plus ou moins grand des efforts de l’adulte. Toute éducation est, qu’on le veuille ou non, plus ou moins RATÉE. Je ne sais plus qui affirmait : « Il y a trois métiers impossibles : éduquer, enseigner, psychanalyser ».

 

 

Le GENRE, finalement, va tout à fait dans le sens de la doctrine d’enseignement actuellement en vigueur : faire en sorte que ce soit l’élève lui-même qui « construise son propre savoir ». Comme le disait excellemment JAIME SEMPRUN (L’Abîme se repeuple, éditions de l’Encyclopédie des Nuisances, 1997) :   

 

« Quand le citoyen écologiste prétend poser la question la plus dérangeante en demandant : Quel monde allons-nous laisser à nos enfants ?, il évite de poser cette autre question, réellement inquiétante : A quels enfants allons-nous laisser notre monde ? »

 

Oui : à quels enfants allons-nous laisser notre monde ? Ce n’est pas pour rien que JEAN-CLAUDE MICHÉA cite cette interrogation à la fin de son minuscule et lumineux livre L’Enseignement de l’ignorance (Editions Climats, 1999).