Ok

En poursuivant votre navigation sur ce site, vous acceptez l'utilisation de cookies. Ces derniers assurent le bon fonctionnement de nos services. En savoir plus.

jeudi, 19 janvier 2017

MASCULINITÉ ET MODERNITÉ

De la pratique de l’auto-mutilation en musique. 

Je ne sais pas vous, mais moi, je trouve difficile de trouver dans le paysage musical un ensemble vocal dans lequel on n’entende pas une ou plusieurs voix dont le rayon perce avec plus ou moins de brutalité le nuage sonore, normalement « fondu », quand il est capable de « sonner » dans l’oreille de l’auditeur comme si le collectif de chanteurs, à force d’homogénéité dans l’émission des sons, ne montait que d'un seul gosier. Or il me semble avoir pu remarquer que, le plus souvent, cette voix qui a du mal à « se fondre » dans le chœur, c'est celle du haute-contre. Pas moyen de tomber sur un groupe dépourvu de haute-contre. 

Pourtant allez sur France Musique écouter l’ensemble Huelgas de Paul van Nevel, dont le concert autour du Livre de chœur d’Eton (répertoire religieux de la période des Tudor) était retransmis le 17 janvier, et vous éprouverez le sentiment de la perfection du chant collectif a cappella. Et ce soir-là, s’il y avait un « ténorino », nulle trace de haute-contre. Le chant choral évite autant que possible l’expression des individualités : chacune est invitée à faire sienne le mot que Mathias Grünewald fait sortir de la bouche d'un Saint Jean-Baptiste pointant son index vers le crucifié : « Illum oportet crescere, me autem minui ». 

GRÜNEWALD JB GROS PLAN.jpg

En français libre : c’est lui qui doit grandir, moi je dois me faire tout petit. Chanter en chœur est un exercice d’humilité, j'en sais quelque chose, pour avoir chanté plusieurs années sous la direction de Bernard Tétu (chœurs de l'ONL). Pour la beauté de l'ensemble, il faut que la fierté de chacun soit mise en berne. C’est la raison pour laquelle la version donnée des madrigaux de Carlo Gesualdo par le Quintetto Vocale Italiano d’Angelo Ephrikian sonne aussi singulière, voire étrange, parmi les versions disponibles : ses membres sont des solistes.

Ce que je reproche à quelqu’un comme Dominique Visse, qui dirige l’ensemble Clément Janequin, est sa façon particulière, aigre et métallique, d’émettre le son, qui tient pour une part à son timbre, mais aussi à ce qu’il est haute-contre (alors que sa voix parlée serait plutôt celle d'un baryton - léger, lourd-léger ou poids welter, je n'en sais rien).


Pour avoir le son dans l'oreille (5'46"). Je précise que le problème que j'ai avec la voix de Dominique Visse ne m'empêche pas d' "ouyr les cris de Paris" (ci-dessus) avec la délectation du mélomane tout prêt à s'enthousiasmer pour le travail de virtuose du quintette vocal qu'il a réuni : c'est du "travail à la petite scie", si cela veut encore dire quelque chose à quelqu'un. L'ensemble Clément Janequin a commis quelques objets sonores dignes de marquer à jamais l'oreille de l'amateur. On peut s'en convaincre en écoutant, par exemple, une "Fricassée parisienne", dans le CD du même titre.

Il est hélas bien rare que le haute-contre, dans quelque ensemble vocal que ce soit, ne se fasse pas remarquer. Cela tient sans doute au fait qu’un timbre masculin, quand il se fait entendre dans un registre normalement réservé aux femmes, ne « sonne » pas comme les autres malgré une tessiture identique. Cela pourrait passer pour bizarre, mais je postule cette hypothèse qu'il existe, sous les couches superposées de la "culture", au moins une couche imputrescible de "nature" : sous le déguisement féminin, quelque chose de masculin consiste, persiste et résiste. 

Même Philippe Jarrousky, la coqueluche actuelle de toutes les scènes baroques, est reconnaissable à son timbre, alors même que sa voix pourrait passer à s’y méprendre pour une voix féminine. Il n’y a pas à tortiller : le transsexualisme, complet (mais est-il jamais complet ?) ou seulement vocal, est un rêve bien difficile et coûteux à réaliser. A propos de Jarrousky, on trouve dans l’encyclopédie en ligne cette précision : c’est « son aisance et son plaisir d’interprétation dans ce registre » qui a décidé de son choix. C’est son droit, évidemment : son plaisir lui appartient, mais c'est son plaisir à lui.

Je pourrais développer en soulignant que, question durée ou intensité, le plaisir féminin n'a pas grand-chose à voir avec le masculin, mais le terrain pourrait vite devenir glissant. Je me contenterai de signaler l'aberration qui consiste pour un homme à espérer un jour éprouver ce qu'éprouve la femme (quand elle a la chance de voir l'orgasme lui arriver) en se comportant comme elle dans l'amour. Le plaisir masculin est ce qu'il est, voilà tout : intense, mais bref. Ne pas confondre verbe d'action et verbe d'état. Je n'ai guère envie d'envier ma voisine pour ce qu'il y a dans son assiette.

Ce qui me gêne dans cette affaire, c’est que le haute-contre (ou contre-ténor, ou falsettiste, ou sopraniste ou que sais-je, pour les différences, voyez un spécialiste) est devenu une figure incontournable du paysage musical. Il en vient de partout, et tous techniquement très au point, souvent talentueux, si bien que le marché est de plus en plus encombré. Cette espèce d’anomalie d’attribution (erreur de casting si vous voulez) s’est répandue, jusqu’à faire paraître étranges les ensembles vocaux qui n’en comprennent pas un ou deux.

Je dis bien « anomalie », parce qu’il ne faut pas oublier comment les « Saints-Pères » successifs ont fabriqué les haute-contre à Rome : prenez les jeunes garçons qui ont la plus jolie voix, castrez-les avant la mue de la puberté et faites-les chanter à la Chapelle Sixtine. C'est là (et sans doute pas que là) que les prélats, évêques et cardinaux prenaient leur pied.

Alors c’est vrai, aujourd’hui, les hommes qui choisissent une telle voie pour leur voix ne subissent plus pareille mutilation, et c’est à force d’entraînement, de travail et de technique qu’ils obtiennent un résultat satisfaisant. La tessiture ne change plus rien à l'anatomie. Mais je ne peux pas m’empêcher de me dire qu’il y a là quelque chose qui ressemble à ce qu’on appelle « automutilation », vous savez, ces pratiques des prisonniers qui avalent des fourchettes ou des bidasses de 14-18 qui se coupaient quelques doigts pour ne pas monter au front.

N’est-ce pas en effet s’automutiler que de renoncer à un attribut du masculin quand on est doté physiquement de ce sexe ? A ce propos, qu’on ne compte pas sur moi pour adhérer à la fable du « genre », puisqu’on sait immémorialement que, si la nature dote l’homme de caractères sexuels précis – les exceptions (« intersexuées » comme on dit quand on est LGBT) sont rarissimes – l’homme en fait ensuite plus ou moins ce qu’il veut. Il exerce la liberté que lui permet la culture dans laquelle il a grandi, à moins que ce soit celle qu’il a décidé de prendre, comme toute l’histoire de l’humanité en est littéralement farcie : l'histoire des fantaisies humaines en matière sexuelle est définitivement inépuisable. Alors franchement, la petite écume de vaguelette de risée du « genre », non merci.

Je suis frappé de l’aisance avec laquelle le coin du registre de la voix féminine des hommes est entré dans le beurre mou des cercles mélomaniaques de nos sociétés. Je me dis qu’à ce stade, ça tient du fait de civilisation. Freud nous avait bien fait la leçon sur la part féminine qui sommeille en tout homme (et la part masculine chez toute femme).

Je constate cependant que ce qui n’était là que comme la part dormant dans l’inconscient des individus, sous la surveillance du rôle social assigné à chacun par « l’ordre patriarcal » (désormais obsolète, que les cercles militants se rassurent), a eu l’occasion de se réveiller, sous la poussée féministe. « Macho » est désormais une insulte, on stigmatise la « virilité » et la dévirilisation des mecs a atteint, dans des portions non négligeables d'une population plutôt jeune, une sorte de rythme de croisière (je parle de ce dont je suis témoin) qui donne lieu de croire à l’amorce d’une vraie dynamique dans ce sens. Je le constate dans les rues, au nombre de poches marsupiales, attribut normal de la kangouroute, dont s’affublent les jeunes pères qui ont, comme on disait autrefois, « charge d’âme ».

ACTUEL DEBANDADE DU PHALLUS.JPG

Quand les féministes (M.L.F., bien connu) et les homosexuels (F.H.A.R., pour Front Homosexuel d'Action Révolutionnaire ! Si ! C'est comme je dis !) partaient à l'assaut de vastes territoires.

Revue Actuel, n°25, novembre 1972.

La débandade du phallus ? C’est devenu une enseigne, presque l’image de marque des types qui veulent « vivre avec leur temps ». Le mâle qui tient à sa réputation de « moderne » est du genre arrondi aux angles, il a perdu de sa rugosité, il est devenu « tendre et aimant », « gentil » et « doux ». Il ne répugne même pas à se mettre en ménage avec un homologue. Mais je dis que ce n’est pas parce qu’on n’est pas un « gentil garçon » qu’on est méchant pour autant. On peut même être un "normal". Il y avait déjà un rien de commisération quand on disait jadis de quelqu’un que c’était un « brave homme ».

Après tout, c’est l’époque qui veut ça. Il suffit aujourd’hui, bien souvent, d’appuyer sur des boutons pour voir se réaliser les tâches : les travaux de force se sont faits rares. On peut se dire que les féministes ne sont sans doute redevables de plusieurs de leurs conquêtes qu’à la popularisation d’une foule d’outils dont le maniement a été rendu toujours plus facile par les progrès de la technique. Plus besoin de muscles ! La technique a rendu le mâle superfétatoire. La technique a rendu bien des services à la cause féministe.

Aujourd'hui, tout le monde, tous sexes confondus, est en mesure de « caresser son téléphone » pour aboutir là où il voulait. L’égalité homme-femme ne commence-t-elle pas là ? On a entendu les féministes tonitruer pour des publicités jugées « dégradantes » pour l'image de la femme, pour la représentation insuffisante de leur sexe dans le personnel politique, pour l'absence de femmes dans la pré-liste des "nominés" au Festival 2015 de la BD d'Angoulême. On attend encore leur glapissements pour réclamer la parité face au marteau-piqueur ou aux travaux de terrassement quand par hasard ils sont manuels. 

Pour revenir à la musique, il y a fort à parier que l’énorme vague de contreténors qui a déferlé sur le monde musical, baroque en particulier, entre en résonance avec cette tendance de fond qui exige de l'homme occidental qu'il se dévirilise, en gros depuis les années 1970. C’est pourquoi on a peut-être quelque raison d’observer (en le déplorant), au sujet de l’homme d’aujourd’hui, que "le doute l’habite".

Voilà ce que je dis, moi.

samedi, 25 avril 2015

LA FÉMINISATION DANS LA MUSIQUE

Je ne connais pas Eric Zemmour. Le peu de fois que je l’ai entendu parler, il m’a plutôt agacé. Je l’ai écouté, entre autres, dans un « Répliques » d’Alain Finkielkraut, faire un historique assez acrobatique, celui qui l’amène à intituler son bouquin, en bout de course, Le Suicide français (que je n'ai ni lu ni l'intention de lire). Je n’ai pas été trop convaincu par l'acrobatie, même si je tire une conclusion assez proche de la formule du titre. 

Il aborde aussi dans son livre, paraît-il, la question du processus de féminisation en cours qu’on peut observer en France depuis la sortie de la guerre, et plus généralement dans les pays occidentaux. Alors là j’approuve. J’abonde même avec force. J'applaudis d'une main contre l'autre.

Déjà qu’on savait que les poissons mâles du Potomac (E.-U.) changent de sexe sous l’effet de quelques merveilles chimiques qui agissent sur le système endocrinien ; que la fertilité des hommes (concentration de spermatozoïdes dans le sperme) a notablement diminué au cours des trente dernières années (dévirilisation probablement due aux phtalates ou autres « perturbateurs endocriniens », mais les « marchands de doute » (Oreskes & Conway, voir ici même, 26-27 février) proclament l’absence de preuves scientifiques formelles). 

Parallèlement à cette évolution biologique, dans la « sphère culturelle » cette fois, on a commencé à vanter les « papas-poules », en même temps que les femmes se convertissaient massivement au pantalon, au « droit au travail » et au « partage des tâches ». C’est devenu le modèle dominant, sous la pression des exigences d’ « égalité », de « parité » et de « non-discrimination ». Ce n’est pas mon sujet, même s’il y aurait des choses à dire (de quoi n’y a-t-il pas « quelque chose à dire » ?). 

Mon sujet ? La féminisation dans la musique. Je laisse à Eric Zemmour l'attaque contre les voix de crevards de certains chanteurs de variétés (Michel Berger, il paraît). Ce qui m'intéresse, c'est le phénomène qui touche la musique dite « classique » depuis la sortie de la guerre, et en particulier les voix masculines. La voie a été ouverte principalement par le regain d’intérêt pour la musique "baroque", étiquette commode sous laquelle on classe toutes sortes de musiques de cour, d’église et de salon d’avant 1750. Après la redécouverte du clavecin, avec Wanda Landowska, on a redécouvert la tessiture de contreténor. 

On peut croire que ce regain d'intérêt n'aurait pas été le même s'il n'y avait pas eu Alfred Deller. Car le registre de contreténor s’est subitement et superbement incarné dans la voix de ce chanteur qui a marqué toute son époque. Il est vrai que le succès d’Alfred Deller ne se comprendrait pas si sa voix n’avait pas répondu à une attente, jusqu’alors virtuelle et en filigrane dans l’époque. Il fut le grand inaugurateur, longtemps un cas unique. La renommée qui est encore la sienne signifie simplement, en quelque sorte, que l'époque était mûre.

Aujourd’hui, le contreténor a proliféré comme le lapin avant la myxomatose. Qu’il faille dire « voix de fausset », « haute-contre », « sopraniste », « contreténor », je m’en contre-fiche (pardon). Peter Eötvös a écrit tout un opéra à partir de la pièce de Tchekov Les Trois sœurs, où ce sont autant de mecs qui chantent les frangines en question. J'ai vu ça, dans le temps. Oui, bon.

La diva (insupportable comme toutes les divas) qui règne actuellement en la matière s’appelle Philippe Jaroussky : c’est simple, on le voit partout, il va même jusqu'à pousser la chansonnette. Si j’ose dire et sans vouloir froisser personne, le contreténor aujourd’hui a le vent en poupe : je veux dire que la tessiture la plus féminine de la voix masculine est devenue une composante "normale" du paysage sonore. Elle a un succès fou, et l'on entend quotidiennement des hommes chanter avec des voix de femme. Je vais vous dire : ça en devient lassant. Question de génération, peut-être.

Quand ils étaient peu nombreux, j’arrivais à mémoriser les noms et à reconnaître les voix, j’allais même jusqu’à apprécier : Henri Ledroit, René Jacobs (vu en pythonisse dans David et Jonathas de Charpentier), Gérard Lesnes, Paul Esswood, Dominique Visse (fondateur - dont il faut supporter la voix perçante - de l'ensemble Clément Janequin), James Bowman, Michael Chance. C’était encore vivable. Le problème, c'est que, désormais, des contreténors, il en tombe comme à Gravelotte. Comme s'il en pleuvait. C’est devenu envahissant, comme si un nouveau stéréotype s’était durablement installé : le contreténor, c'est beau. Trop, c’est trop. A chaque coin des avenues musicales, on se heurte à un contreténor (la musique rock s'y est mise il y a déjà un moment).  

Cela tient peut-être aussi à la mode du baroque, à la marotte presque maniaque des « instruments anciens », à la recherche de « l'authenticité d'époque », aux résurrections fourmillantes de vieilles partitions de compositeurs dont le nom finisse si possible en « i », enfouies dans des bibliothèques poussiéreuses.

C'est à qui déterrera le plus beau cadavre. Musicologues et musiciens s’acharnent à « redécouvrir » des compositeurs jusque-là totalement sortis des mémoires et des répertoires. J'observe que la manie de la reconstitution ne pousse pas les contreténors actuels à faire le sacrifice des attributs qu'on enlevait aux futurs castrats avant que leur voix ne muât.

C'est peut-être que les musiciens et musicologues sont avides de se faire un nom et une place sur ce créneau maintenant fort encombré. Il faut que tout le monde trouve du boulot, c’est vrai. Je n’ai rien contre la musique baroque. Bien au contraire, j'en écoute toujours autant. Mais je ne crois pas qu'il faille absolument « sortir de l’oubli » à tout prix l'intégralité du catalogue des œuvres écrites avant 1750 : beaucoup ont amplement mérité qu’on les oublie. L'exhumation devrait être encadrée par des lois sévères.

C’est pareil à toutes les époques. On ne m’ôtera pas de l’idée que Félicien David est un compositeur estimable, mais qu'il ne mérite pas le même nombre de pages dans les dictionnaires des musiciens que Hector Berlioz, même si Le Désert (du premier, avec une incroyable performance du ténor, dans le rôle du muezzin appelant à la prière) est plus intéressant que le Chant du chemin de fer (du second). Pourtant, qui a retenu le nom de Félicien David, dont Berlioz en personne vantait pourtant le génie, en 1844, après la première du Désert ? 

Pour l’âge baroque, c’est la même chose, avec cette circonstance aggravante que c’est de la musique d’Ancien Régime, je veux dire séparée de nous par un abîme sans fond (la Révolution et quelques autres menues circonstances historiques) : c’est sûrement agréable à l’oreille, mais c’est définitivement hors de notre portée. Inatteignable autrement qu'après un énorme travail de rat de bibliothèque, un énorme effort de reconstitution historique. Tout ça est laborieux, et finalement factice. Comment peut-on sans pouffer entendre prononcer le français « à l’ancienne » ? 

Nous n’avons plus les codes sociaux dans lesquels s’inscrivait cette musique : elle nous échappe, quoi que nous fassions. Je crois intensément qu’en matière d’art, le temps ne laisse surnager que la crème de la crème. Combien de sommets bas, avant d'arriver au Mont Blanc ? Combien de « Petits Maîtres », avant d'apercevoir un Génie ?Faut-il coûte que coûte amener au jour la partie immergée de l'iceberg ? Je ne suis pas du tout amateur de reconstitution du passé. La recherche patrimoniale a des limites.

Ceux qui aiment refaire Austerlitz en costume à date fixe me font marrer, et les habitants d'Autun, les figurants et acteurs du Puy-du-Fou (et autres lieux) me font pitié quand je vois les photos de leurs fêtes du moyen âge ou de la chouannerie. Je déteste les romans historiques. J’avais détesté le film Pelle le conquérant, de je ne sais plus quel cinéaste nordique. 

On va dire que je « stigmatise », mais cette vogue d’hommes chantant comme des femmes, et peut-être d'hommes qui se prennent pour des femmes, n'est pas bon signe. Ça me fait penser à une autre banalisation : celle de l’homosexualité, dont on peut dire qu’elle aussi a envahi le paysage, avec toutes sortes de propagandistes de la « cause ».

L'homosexualité est désormais un marché florissant, parfois célébrée comme une norme à part entière, en concurrence avec celle qui définit les gens normaux. Gloire désormais à l’ambiguïté, à l’effacement des frontières entre les sexes, à la liquéfaction de la notion de norme. Ce n’est pas pour rien, j’imagine, qu’on fait tout un ramdam en ce moment autour de la peinture du Caravage, l'artiste au pinceau gras (ne pas confondre avec Rubens ou Jordaens, peintres du gras), parfois visqueux. 

On me dit qu’il faut être « moderne ». Pour une fois, je dirai comme ce prince des modernes parmi les modernes, hélas "sémiologue" à ses heures, Roland Barthes : « Tout d’un coup, il m’est devenu indifférent de ne pas être moderne » (épigraphe d’un chapitre d’Extension du domaine de la lutte, de Michel Houellebecq). 

Pour une fois, je ne lui donne pas tort : que nous importe la modernité ? 

Voilà ce que je dis, moi.