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jeudi, 06 septembre 2012

QUEL ULTRALIBERAL ÊTES-VOUS ?

Pensée du jour : « Notre héritage n'est précédé d'aucun testament », écrit RENÉ CHAR dans Feuillets d'Hypnos (fragment 62). HANNAH ARENDT fait de la formule la phrase inaugurale de La Crise de la culture.

 

 

Le fond doctrinal du libéral, chacun en sera d’accord, c’est l’autonomie accordée aux individus par la société. Qui dit liberté, dit par là même responsabilité de l’individu. Plus on est libre, plus on est responsable. Il n’y a pas à tortiller. Enfin, on me l’a dit. Et – théoriquement – plus épais et consistants sont les comptes à  rendre.

 

 

J’observe cependant que les contradictions ne manquent pas. Je me propose de me pencher sur quelques curieux paradoxes. Ainsi, dans le domaine économique, catalogue-t-on A DROITE (politiquement) des gens qui soutiennent mordicus la liberté d’entreprendre, d’embaucher et de débaucher les travailleurs au gré des conjonctures. Ce qu’on appelle la « flexibilité » du marché du travail. Pour que l’affaire marche, on a bien compris, il faut que le patron ait les mains libres. Plus il les a libres, les mains, mieux c’est. Et on le comprend.

 

 

C’est vrai que pour qu’une affaire marche, il est nécessaire d’équilibrer les charges : comme disait le dernier Guide Suprême de la France, celui qui a été battu lors du dernier Combat des Chefs, il faut penser aux trois acteurs : l’actionnaire (le propriétaire qui attend le retour sur investissement) ; le dirigeant, qui prépare l’avenir en adaptant la production au marché et en modernisant sans cesse l’outil de travail ; le travailleur (comme c’est devenu un gros mot, je dirai plus loin le dernier acteur cité), qui font tourner l’outil de travail avec leur « force de travail ».

 

 

En face, on étiquette A GAUCHE des gens qui, spontanément ou non, préoccupés par le sort fait au dernier acteur cité, qui n’a en sa possession que sa force de travail (selon la grille marxiste, mais on ne peut pas dire que ce soit faux), se portent à son secours pour le protéger d’un rapace (c’est l’actionnaire) qui incite un tyran (c’est le dirigeant) à toujours réduire les coûts. Demandons-nous en passant pourquoi le rapace et le tyran rangent le travail du dernier acteur cité dans la colonne des coûts, et non celle des investissements. Passons.

 

 

On voit tout de suite le conflit des deux intérêts : Monsieur DEDROITE actionnaire veut que sa poche se gonfle le plus possible ; le dirigeant y a par nature intérêt, sinon, s’il n’est pas le propriétaire, celui-ci, mécontent, l’éjecte. Monsieur DEGAUCHE veut empêcher le dirigeant de nuire sans mesure au dernier acteur cité.

 

 

Pour décrire les choses simplement, disons que Monsieur DEDROITE veut que la machine tourne, Monsieur DEGAUCHE lutte contre l’esclavage. A l'un la "réalité" concrète, à l'autre le brassage d'idées.

 

 

Notons en passant que Monsieur DEGAUCHE, concrètement (et bizarrement), s’en prend très rarement au propriétaire-actionnaire, sauf en campagne électorale (« Mon ennemi, c’est la finance ! », lança bravement, mais étourdiment, FRANÇOIS HOLLANDE). Pour une raison simple : il faudrait inscrire au programme du parti la destruction du SYSTEME qui fait de l’actionnaire la source de l’économie. Et cela n’est pas au programme, mais alors pas du tout. Car cela s’appelle la révolution.

 

 

Oui, je parle, on l’a compris, de la gauche « responsable », de la gauche « de gouvernement ». Cet homme de gauche-là ne veut surtout pas détruire le système. Il en aime les pantoufles. Je traduis en français : depuis 1983, le Parti Socialiste s’est converti à l’économie de marché. Fini le militant en bras de chemise et la clope au bec : la rue de Solférino ne laisse entrer dans ses murs que des costumes trois-pièces armés d’attachés-cases et sortant de l’ENA. Le Parti Socialiste n'est plus à gauche, mais à GÔCHE. Et ça change tout.

 

 

L’économie de marché (autrement dit la jungle de l’offre et de la demande), elle place à son sommet et (!!!) à sa base l’actionnaire. Renverser cet ordre, seuls de dangereux utopistes osent en rêver. Qui rêvent en douce de grimper au sommet de leur échelle de l’Egalité.

 

 

Donc, l’homme de gôche a renoncé à la révolution, donc il accepte le règne de l’actionnaire. On voit par là qu’entre l’actionnaire-marteau et l’homme de gauche-enclume (une enclume pas toujours au service du dernier acteur cité), le dirigeant a intérêt à avoir pris des leçons de diplomatie auprès des intrigants florentins du 16ème siècle ; des leçons de méthode auprès des grands stratèges (CLAUSEWITZ, SUN TSU) ; des leçons de ruse auprès des vizirs arabes. S’il veut sauver sa peau.

 

 

Résumons-nous : l’homme de droite réclame le maximum de liberté (d’entreprendre) ; l’homme de gauche réclame le maximum de justice (sociale). « Liberté n’est pas licence ». Paraît-il. L’homme de droite, en économie, est favorable au « libéralisme », qui permet à l’entrepreneur de s’enrichir. L’homme de gauche, pour l’empêcher de se servir du dernier acteur cité comme d’un simple citron à presser, exige que l’économie soit « administrée ». La liberté s’oppose à la régulation, comme le pôle nord au pôle sud. Et lycée de versailles.

 

 

Je résume ce qui précède : l’Entrepreneur est contre l’Etat et pour la Liberté. La Sécurité Sociale et le Code du Travail sont contre l’Esclavage qui découle de cette Liberté. En très gros. J’espère que vous suivez. Je schématise, mais il y a de ça.

 

 

Entre la liberté (d’entreprendre) et la protection (sociale), c’est une sourde et permanente lutte pour pousser le curseur du « bon » côté. En ce moment, on pourrait dire par exemple que l’esclavage a le vent en poupe. Et que l’Etat est devenu le toutou de l’Entreprise : « Donne la papatte, allez, fais le beau, JEAN-MARC AYRAULT ». Et JEAN-MARC AYRAULT donne la patte, fait le beau et remue la queue. C’était l’autre jour au MEDEF.

 

 

Voilà ce que je dis, moi.

 

 

A suivre : promis, demain, étonnant renversement de perspective et de rôle.

 

Dernière minute pour les Lyonnais : a lieu ce soir le vernissage d'une exposition. La galerie Gilbert Riou (1, place d'Ainay, 18 heures) montre des oeuvres tout à fait estimables d'AGATHE DAVID, qui s'est inspirée des Psaumes de David pour faire surgir des souvenirs de bestiaires, de la botanique et des livres d'heures.