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samedi, 08 novembre 2014

LES MATINS DE FRANCE CULTURE

UNE PENSÉE POUR CHRISTINE GOÉMÉ

 

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Je garde en mémoire les noms d’Henri Laurens, de Mireille Delmas-Marty, d’Yves Lacoste, d’autres. Le premier, hélas invité parmi d’autres, avait malgré tout eu un peu de temps pour expliquer que le Proche-Orient est un problème désespérément insoluble (multiplicité des intérêts divergents ou incompatibles, renversements d'alliances extraordinaires, calculs politiques, ...). Mais je connaissais un peu ses travaux, irréfutables et d'une précision diabolique. La seconde avait évoqué les entorses faites aux principes démocratiques sous prétexte de sécurité.

 

Le dernier avait éclairé (entre autres) les différences des tracés frontaliers effectués respectivement sur les cartes par les officiers de l’infanterie et ceux de la marine. Eclairage très drôle, quoique peu à l'avantage des premiers, davantage portés  (paraît-il) sur l'abus de la ligne droite. Les gens qui ont quelque chose d’intéressant à dire – ceux qui connaissent à fond une question, pas les habitués des micros et des caméras – ont besoin de la durée, de la continuité, bref, d’une température pas trop élevée de l’atmosphère.

 

Mais avant la "Matinale" (ancienne manière), j’écoutais aussi avidement l’émission qui précédait (je suis un « lève-très-tôt »). Mais c’était avant l’intrusion dans mes petits matins de « Un autre jour est possible », piloté par le multiculturaliste Tewfik Hakem, émission de divertissement et de promotion de l’actualité culturelle, s’efforçant consciencieusement de coller à l'événement en train de se produire, en vendant tout ce qui se fait de mieux en termes de modernité esthétique et sociétale.

 

Cette émission lente et posée, supplantée par l'air du temps, s’appelait « Eloge du savoir ». Elle était produite par une dame sûrement un peu ennuyeuse, qui a pour nom Christine Goémé, mais qui savait s’abreuver (et abreuver l’auditeur dans la foulée) aux plus hautes sources. Son émission était absolument formidable, partagée entre des cours au Collège de France et des conférences de haut niveau données dans le cadre d’ « Université de tous les savoirs ».

 

Je perdrais sans doute mon temps à expliquer tout ce que j’ai ainsi appris dans cette tranche horaire de 6h – 7h (eh oui, c’est aux aurores, mais c’est justement ça qui me convient), sur des sujets aussi divers que le recrutement des Janissaires à l’époque de l’Empire Ottoman triomphant, les origines composites de bien des récits de l'Ancien Testament, les religions indo-iraniennes, le contexte de civilisation européenne dans lequel a pu prospérer un mythe comme celui de Perceval, combien d’autres ? … Cette émission suait par tous les pores le miel délectable et embaumé de la Haute Culture.

 

L’agression a commencé avec la déprogrammation de l’émission, l'exil à 0h, et son remplacement par le nommé Tewfik Hakem et sa tambouille culturalo-moderne de « promotion » de l’air du temps, ce qui s’appelle, pour le coup, « sauter sur l’actualité » (comme la Légion Etrangère sur Kolwesi). Sans compter la demi-heure de bonus accordée à la « Matinale » de Marc Voinchet, sans doute pour favoriser une émission qui « dopait l’audience ».

 

J’ai bien été obligé de faire mon deuil et de me les accrocher en bandoulière (je parle des cours du Collège de France, qu’alliez-vous penser ?). Exit Christine Goémé, exit L’Eloge du savoir, précipités « Dans l’grand trou noir d’ousse qu’on n’revient jamais » (Chanson du décervelage, on la trouve dans toute bonne Bible de la 'Pataphysique).

 

On me dira que je n’ai qu’à veiller ou à me brancher sur franceculture.fr pour écouter ? Et puis quoi encore ? Cette placardisation brutale de la culture sur France Culture, sans doute pour crime d’ « élitisme », m’avait déjà semblé de mauvais augure. Le râteau à ratisser large, cela s’appelle un attrape-tout. Pour trouver, c'est facile, vous ne pouvez pas vous tromper : c’est juste avant le grand n’importe quoi.

 

C’est aussi quand France Culture, sous prétexte de « s’adapter à la modernité », de « suivre le mouvement de la société », commence à sacrifier la culture.

 

Encore un bel exemple de « Négation de soi » (voir quelques billets précédents).

 

Voilà ce que je dis, moi.

 

Note : j'entends dire que madame Christine Goémé ne va pas bien. Une pensée pour elle. 

samedi, 28 décembre 2013

IRRECUPERABLE 2

LE MAUVAIS SUJET NON REPENTI (suite)

J’en étais resté à l’ordre moral que s’efforcent de faire régner « les associations », à l’autorité qu’elles tentent d’acquérir, d’une part, en faisant pression sur les responsables politiques pour en obtenir des législations favorables à leurs intérêts, d’autre part, une fois la loi modifiée en leur faveur, de porter les coupables d’infractions à cette loi devant les juges correctionnels pour qu’ils soient dûment punis d’avoir osé attenter aux dits intérêts.

Le plus ancien de ces groupes de pression est peut-être la LICRA : d’après M. Wikipedia, elle est née en 1932, après deux ébauches de 1927 et 1931. C’est un assassinat commis par un juif en plein Paris sur un responsable supposé des pogroms qui affectaient alors l’Ukraine, qui a servi de motif à un certain Bernard Lecache. L’association ainsi créée s’est d’abord appelée Ligue Contre l’Antisémitisme, le mot « racisme » fut ajouté ensuite, sans doute pour élargir l’action de défense à d’autres que des juifs, pour qu’elle paraisse moins unilatérale, donc plus impartiale.

Je ne suis pas prêt à suivre des gens comme Dieudonné M’Bala M’Bala ou Alain Soral sur la piste glissante où ils font la danse du ventre en tendant le bras droit vers le bas et posant la main gauche sur l’épaule. Il paraît que ça s’appelle le « salut de la quenelle » ou, encore plus simplement, « la quenelle ». Le geste est-il antisémite ? Je n’en sais rien et, à la limite, je m’en fiche.

Toujours est-il que certains individus de confession juive l’interprètent ainsi, au point d’organiser des expéditions punitives musclées contre des individus qu’ils ont vu (ou dont on leur a dit que) faire le geste sur les réseaux sociaux. Six d’entre eux viennent d’être mis en examen à Villeurbanne. On en est là.

Mais si je trouve le geste stupide et ridicule, cela reste un simple « geste ». Je veux dire que ce n’est pas un « acte ». Il faut différencier les deux. C'est à la rigueur une provocation. L’expédition punitive menée par des gens qui se présentent comme des « justiciers » de la communauté juive, en revanche, est un acte. C’est même un délit.

Tout ça pour dire que je trouve étonnant, au point d’en être éberlué, qu’on puisse incriminer des auteurs de gestes et de paroles, aussi bêtes et méchants que soient ces gestes et ces paroles. C’est vrai que la « quenelle » n’est pas interdite par la loi, mais le « bras » ou le « doigt d’honneur » le sont-ils ? Tiens, essayez d’en faire un en public face à un haut responsable (préfet, président,…), pour voir.

Les paroles maintenant. Faites comme Edgar Morin (accompagné de Sami Naïr et Danielle Sallenave), signez une tribune dans Le Monde daté 4 juin 2002 intitulée Israël-Palestine : le cancer, où vous dénoncez l’attitude de l’Etat israélien à l’égard des Palestiniens, adoptant à leur égard les procédés mêmes utilisés à l’encontre des juifs au cours de l’histoire, singulièrement sous le règne des nazis : ghettoïsation, persécution, …

Apprêtez-vous alors à subir l’accusation infamante d’ « antisémitisme », portée par deux « associations » : France-Israël et Avocats sans frontières. Il vous faudra aller jusqu’en Cour de Cassation pour être enfin blanchi. Heureusement. C'est un petit exemple du pouvoir de nuisance des « associations ». Leur caractère nuisible est lié à ce qui a motivé leur création : l'arbitraire et le capricieux de leurs dirigeants est à la à la fois leur origine et un corollaire.

Maintenant, quant à moi, je me demande si je ne suis pas antisémite. Non que j’aie quoi que ce soit à reprocher aux juifs en tant que juifs. Pas plus que je n’ai à m’en féliciter. J'ai lu les Bagatelles pour un massacre de Louis-Ferdinand Céline, et j'ai la conviction que l'antisémitisme féroce qui dégouline à presque chaque ligne est le symptôme aigu d'une maladie mentale. Mais ne suis-je pas, comme Edgar Morin, effaré d'observer la volonté d’une partie non négligeable du peuple israélien de perpétuer la guerre qui dure depuis plus de soixante ans en Palestine ?

Ben oui quoi, c’est bien l’électeur majoritaire d’Israël qui porte très régulièrement au pouvoir des gens cramponnés à l’idée que toute cette terre leur appartient. Les plus intégristes de ces malades sont convaincus qu’il est légitime de coloniser la Cisjordanie, et de dégoûter ses habitants arabes au point de les faire déguerpir jusqu’au dernier.

Chaque implantation de colonie juive en territoire arabe est à considérer comme une déclaration de guerre. Peut-on encore rêver un gouvernement israélien modéré ? Peut-on rêver, symétriquement, un Hezbollah pacifique, un Hamas non-violent, si ce ne sont pas des oxymores ? Ecoutez les cours précis et désespérants de monsieur Henri Laurens au Collège de France, où il reconstitue méticuleusement l’histoire du Proche Orient depuis la 2ème guerre mondiale, et vous serez persuadé de l’inextricabilité de l’écheveau et de l’insolubilité du problème.

En attendant, je persiste à trouver profondément injuste l’attitude d’Israël. Si c’est ça, être antisémite, alors … ça voudrait dire que ce sont « les associations » qui ont raison. Ce serait quand même fort de café, non ?

Voilà ce que je dis, moi.