Ok

En poursuivant votre navigation sur ce site, vous acceptez l'utilisation de cookies. Ces derniers assurent le bon fonctionnement de nos services. En savoir plus.

dimanche, 28 avril 2019

GAFFOPHONE

Curieusement, j'ai été très surpris, dans l'ensemble des aventures de Gaston Lagaffe, par le petit nombre des planches dont le thème principal est le gaffophone, ce terrible monstre antédiluvien censé produire des sons musicaux (la sensibilité auditive de Gaston a quelque chose à voir avec la voix d'Assurancetourix – « Non, tu ne chanteras pas ! » –, le célèbre barde gaulois), mais qui en réalité produit des effets comparables aux pires machines de guerre sorties d'un cerveau humain (on pense un peu (pas plus) au moment où Assurancetourix peut enfin donner toute la mesure de son "talent" face à la tribu des féroces Normands, venus là pour apprendre à voler en apprenant la peur, au motif que « la peur donne des ailes »).

J'ai dénombré une vingtaine de gags en tout et pour tout. Au fond, c'est terriblement peu quand on se réfère à la résonance stratosphérique de la trouvaille. Car cette invention qui tient d'une harpe XXL additionnée d'un gros tambour et d'un énorme tam-tam africain pour la "résonance", capable de produire des vibrations comparables à la puissance d'une éruption volcanique ou à un séisme de magnitude 10, issue du cerveau prolifique de Gaston par la médiation de celui de Franquin, son interprète, son mage, son prêtre terrestre, est capable, en plus de résister aux termites traîtreusement introduits dans l'instrument par le malveillant Lebrac, de faire retourner en une fraction de seconde le camion qui le transporte à l'état d'inventaire intégral des pièces détachées nécessaires à sa fabrication (ce que les fabricants de pistolets, revolvers et autres joyeusetés appellent un "éclaté", – noter que Gaston rejette la faute sur le choix du camion par Fantasio) ;

P2 1 CAMION.jpg

P2 2 CAMION.jpg

de remplacer au pied levé (et gratuitement) toute une équipe de spécialistes de la démolition des cheminées d'usine ;

P19 0 CHEMINEE D'USINE.jpg

P19 1 CHEMINEE D'USINE.jpg

P19 2 CHEMINEE D'USINE.jpg

P19 4 CHEMINEE D'USINE.jpg

d'opérer en un clin d’œil la démolition de la dite rédaction de Spirou (aidé en cela, pour cette fois, par les instruments de Jules-de-chez-Smith-en-face, de Bertrand Labévue et de l' "Anglais", et attention les yeux quand les lascars les auront électrifiés), sûrement pour que celle-ci soit reconstruite en plus beau ;

P4 1 CONCERT.jpg

P4 2 CONCERT.jpg

de perturber les manœuvres de l'aviation de chasse, voire d'en faire éclater les cockpits « ... et tous les cadrans du tableau de bord et même le verre de ma montre » ;

P10 AVION DE CHASSE.jpg

de faire fuir pour le compte de Greenpeace les baleines loin des horribles navires baleiniers, harponneurs de cétacés ;

P18 BALEINES.jpg

de "simuler un tremblement de terre" pour empêcher une fois de plus M. de Mesmaeker de signer un contrat avec les éditions Dupuis ;

P9 2 SEISME.jpg

de débarrasser Gaston lui-même de l'enduit aux aiguilles de sapin dont le produit miracle qu'il avait inventé devait débarrasser l'arbre de Noël et qui l'ont "habillé" d'un revêtement pour le moins piquant ;

P12 1 AIGUILLES DE PIN.jpg

P12 2 AIGUILLES DE PIN.jpg

de chasser toutes les taupes des terres de l'ami paysan, mais aussi hélas, et par la même opération, de faire de son troupeau de vaches une nouvelle espèce migratrice ;

P5 1 CAMPAGNE.jpg

P5 2 CAMPAGNE.jpg

de terroriser l'agent Longtarin lors d'un transport nocturne et pédestre ;

P7 NUIT.jpg

et de briser la carrière et d'envoyer clochardiser sous les ponts le malheureux Fantasio, le jour où l'idée saugrenue et irréfléchie lui prend de couper une à une les cordes du gaffophone, jusqu'à ce que la grosse branche dont il est fait (et que Gaston a eu le plus grand mal à plier) se détende pour écraser brutalement le magnifique service de Limoges de 118 pièces que M. Dupuis a eu la très mauvaise idée de faire entreposer à proximité immédiate.

P6 1 SERVICE LIMOGES.jpg

P6 2 SERVICE LIMOGES.jpg

P6 3 SERVICE LIMOGES.jpg

Je ne connais aucun autre cas, dans toute la bande dessinée que je connais, d'une trouvaille aussi formidable qui, en un nombre aussi réduit de mises en scène, parvient à produire un effet aussi démesuré. C'est sûr, l'imagination débordante et proliférante de Gaston doit tout à celle de son créateur, mais aussi à son trait virtuose, dont l'expressivité magistrale réussit à donner vie, force et crédibilité à tout ce qu'il dessine. On constate ci-dessous que Franquin va jusqu'à concevoir son gaffophone comme un écosystème à part entière, où la vie animale et végétale s'affirme avec énergie : une nature à lui tout seul.

001 B.jpg

Les commentaires sont fermés.