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lundi, 03 décembre 2012

DES HÔTELS EN TRES HAUTE MONTAGNE

Pensée du jour :

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"SURFACE" N°4

« Le printemps hésite ; à juste titre, car on ne sait pas encore s’il va faire chaud ou froid. Mais il viendra aux premiers beaux jours. Paris est gris autour du dôme des Invalides, et le soir la tour Eiffel darde ses yeux de ténia. L’homme rêve de s’occuper de choses importantes ».

 

ALEXANDRE VIALATTE

 

 

Je parlais il n’y a pas très longtemps des quelques moments que j’ai consacrés, pendant un temps, à des activités sportives en montagne. On appelle ça « alpinisme », il paraît. Mais déjà, l’été au cours duquel j’ai fait, en compagnie d’ALAIN et CHRISTIAN, l’ascension du Mont Blanc, nous trouvions qu’entre les deux principales voies d’accès (refuge du Goûter et refuge des Grands Mulets), la fréquentation de l’arête des Bosses « atteignait des sommets » (si je peux dire). 

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VU DU BREVENT

En 2005, on a dénombré entre 25.000 et 30.000 personnes sur le Mont Blanc. Certains envisagent même avec horreur (mais réalisme) un chiffre futur de 50.000 à 100.000. A ce compte, ce n’est plus de l’alpinisme, c’est les Champs-Elysées. Sans parler du danger pour les hommes que pourrait représenter cette véritable bousculade, parlons de l’état de la montagne. 

 

 

A commencer par les abords du refuge du Goûter (je parle de l’ancien, pas de l’ « œuf d’inox » qui vient d’être achevé à quelque distance). Imaginez que la foule des marcheurs est composée de personnes qui mangent et qui boivent. Et que, fatalement, ces gens doivent expulser de leur corps les matières liquides et solides qui n’ont pas été assimilées. 

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ET JUSTE DERRIERE L'ANCIEN, QU'ON APERÇOIT AU FOND, IL Y A L'ANCÊTRE

Ajoutez à ces données numériques du problème le fait que la nuitée au refuge est facturée autour de 25 €, et que beaucoup d’amateurs, n’ayant pas les moyens, se contentent de monter avec leur tente. Et aux dernières nouvelles, fort peu de tentes sont équipées de latrines. Le résultat ? Il fut visible (et olfactivement intense, paraît-il) il y a quelques années, où les chutes de neige avaient été insuffisantes : la neige fondant, les abords du refuge étaient devenus un vrai champ d’épandage, sauf que ce n’était pas pour faire pousser des légumes. 

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L'ANCIEN (A DROITE), ET PUIS L'ANCÊTRE (LE SEUL !)

C’est ce moment que le Club Alpin Français choisit pour construire un nouveau refuge, avec une capacité d’accueil de 120 personnes. Révolutionnaire de forme et de conception, le nouveau refuge ! J’ai dit dans un billet précédent à quelles tristes circonstances il est lié, dans mon esprit. J’y pense, mais je n’y reviens pas. 

 

 

ELISABETH CHAMBARD, dans la revue du Conseil Régional, présente la construction comme un « hôtel des sommets ». C’est affreux. Franchement, s’il en est ainsi, je crains le pire. Passe que le refuge Albert 1er soit depuis longtemps considéré comme un hôtel, du fait que télécabine (Charamillon) et télésiège (col de Balme) transforment la « montée en refuge » en promenade, en quelque sorte. Une « nuit en refuge » est une expérience éventuelle, pourquoi pas ?

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BIONNASSAY : SUPERBE !

Mais le Goûter ? D’abord on est à 3.835 mètres. Ensuite, pas de remontée mécanique (si : le TMB vous monte à 2835, mais il vous reste 1.000 mètres à faire par vos propres moyens, et ce n’est pas du sentier, mais une ascension à part entière). C’est sûr, il est très beau, le nouveau Goûter : une architecture audacieuse, un porte-à-faux vertigineux, des perspectives uniques (l’extraordinaire arête et la magnifique aiguille de Bionnassay comme si vous y étiez !). Je dis bravo. 

 

 

Mais quel est le but du Club Alpin Français ? Je vais vous dire mon opinion : il aurait voulu envoyer à tous les amateurs de Mont Blanc un message du genre : « Vous pouvez y aller », il ne s’y serait pas pris autrement. Je me rappelle un matin : nous avions pris le téléphérique de l’aiguille du Midi. Passant sous la paroi rocheuse pour faire l’arête des Cosmiques, nous avons vu quelques cordées qui patientaient au pied, attendant que la cordée précédente ait avancé pour démarrer. 

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VOUS LES VOYEZ, LES BONSHOMMES ?

Et cette paroi (la voie Contamine) est réservée à des varappeurs très expérimentés. Alors imaginez, sur un itinéraire où le minimum exigé n’est pas un gros bagage technique de grimpeur, mais une simple endurance à toute épreuve. Un bon entraînement préalable, et vous êtes candidat « naturel » au Mont Blanc. 

 

 

En haute montagne, la difficulté technique élimine d’office tous les blagueurs et autres insuffisants. Si vous parlez de difficulté physique, vous élargissez automatiquement la clientèle potentielle. Ouvrez un hôtel au pied de la face sud de l’aiguille du Fou, vous mettrez rapidement la clé sous la porte : les gens capables d’arriver au sommet sont assez rares.

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IL FAUDRAIT ÊTRE FOU POUR Y OUVRIR UN HÔTEL, NON ?

Mais construisez un « hôtel des sommets » au départ d’une « avenue des Champs-Elysées » : c’est l’affluence à Carrefour la dernière semaine avant Noël.

 

 

C'est ça qu'il veut, le Club Alpin Français ?

 

 

Voilà ce que je demande, moi.