lundi, 19 septembre 2016
36 BALZAC : LE CURÉ DE VILLAGE (1837-1845)
UN ROMAN ÉDIFIANT.
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Résumé : roman hybride, qui commence dans une misère assise sur un tas d’or, se poursuit en plaidoyer pour la peine de mort (« la peine de mort, ce grand soutien des sociétés », écrit Balzac au deuxième chapitre), continue par de hautes considérations sur l’état moral et matériel de la France, et se termine dans l’outrance religieuse, sur un dithyrambe catholique.
Le vieux Sauviat, Auvergnat habitant à Limoges dans une maison à la limite de l’insalubre, exerce la profession de marchand forain. Il a épousé une demoiselle Champagnac (devenue ainsi « la Sauviat »), qui lui a plu parce qu’elle parlait le même patois que lui. Leur fille Véronique avait la beauté qu’on prête aux anges, mais la petite vérole l’a défigurée.
Le train de vie du ménage est d’une modestie telle qu’on pourrait le croire dans la misère, mais il n’en est rien : Sauviat, à force d’acheter et vendre de vieilles ferrailles, a pu, disons-le, amasser une petite fortune, qui permet de doter richement sa fille et de lui faire épouser M. Graslin, banquier limougeaud quarantenaire, ravi de faire une bonne affaire. Il n’est pas bien beau, souffrant d’éruptions cutanées liées à sa suractivité financière, heureusement épisodiques. Véronique va donc s’installer dans le superbe hôtel Graslin et devenir le centre d’attraction de la ville.
Au deuxième chapitre, changement radical de décor. Le bien nommé Pingret, vieil Harpagon, a été assassiné, en même temps que sa servante, dans le jardin où, de nuit, il alimentait son trésor, consistant en pièces d’or contenues dans quatre jarres, qu’on retrouve évidemment brisées. Il y en a pour quatre-vingt mille francs, somme énorme. L’enquête conduit à un jeune ouvrier porcelainier, Jean-François Tascheron. On le soupçonne d’avoir commis son crime à cause d’une femme de la bonne société.
Tout le temps de l’enquête, et jusqu’à la fin du procès d’Assises, Tascheron reste muet sur le mobile de son acte et sur l’identité de la femme, mais suivez mon regard : Mme Graslin, à plusieurs reprises, et fort subtilement, émet des avis tendant à dédouaner le jeune homme, qui n'avouera qu'au curé Bonnet, en confession, ce qu'il a dissimulé à tous, à commencer par la cachette où repose l'or. Vaste débat en Limousin : certains vont jusqu’à juger Pingret responsable de son propre assassinat ! Personne cependant n’est effleuré par le moindre soupçon sur la conduite de la belle Mme Graslin.
Pourtant on aurait quelque raison de s’interroger. Pourquoi, après la condamnation de Tascheron à mort, et après le rejet de son recours en grâce, cette dernière dirige-t-elle sa haine massive contre M. de Granville qui, avocat général aux Assises, a obtenu la tête du criminel ? Pourquoi, après la mort de son banquier de mari, quitte-t-elle Limoges pour aller s’enterrer dans le château de Montégnac, que celui-ci a fait construire sur une hauteur de ce petit village pauvre, inhospitalier, et même déshérité, du fait d’une nature ingrate ?
C’est d’abord à cause de M. Bonnet, curé de Montégnac. Ce prêtre, d’une humilité exemplaire, a par son ministère fait d’une population de vauriens prêts à rançonner le voyageur qui se hasardait, voire pire, une population de catholiques fervents et de bons travailleurs, assidus à la messe (d'où le titre du roman, bien que le personnage principal soit Mme Graslin). Mais c’est aussi à cause du fait que Jean-François Tascheron est né là, et qu’il y sera bientôt enterré, à la demande de Mme Graslin, sitôt exaucée que formulée, tant sa réputation est immaculée.
Le roman tombe alors dans le schéma du Médecin de campagne, ce roman où éclate la volonté d'un homme énergique d'amener le bonheur et la prospérité dans une région démunie de Savoie, où le docteur Bénassis, grâce à son génie de l’organisation, et avec l’aide de quelques appuis, au premier rang desquels le colonel Genestas, a complètement transformé tout un coin de montagne. Au passage, notons que Bénassis, dans sa générosité, a quand même fait déporter tous les crétins des Alpes (ci-contre un authentique) qui, en se reproduisant, perpétuaient l’arriération dans laquelle vivait la vallée, et interdisaient son essor économique, un essor fondé sur le labeur, l’intelligence et la volonté. Il faut savoir ce qu’on veut, que diable ! Comme dit l'autre, là où il y a une volonté, il y a un chemin !
A l’image de Bénassis, Véronique Graslin se fait la grande dispensatrice des bienfaits qui ne tarderont pas à faire de Montégnac une commune riche et prospère. Elle embauche Grégoire Gérard, jeune ingénieur ambitieux, frais émoulu de Polytechnique, qui se morfond dans la routine stérile de l’emploi que l’Etat lui a donné.
Appuyé sur l’investissement des sommes énormes que la châtelaine a empruntées grâce à son crédit, tout le monde se met à l’ouvrage et transforme le paysage, en traçant des chemins, plantant des arbres par centaines, construisant des barrages pour recueillir les eaux pour irriguer les sols et en prévision des futures sécheresses, faisant de landes stériles des terres à fourrage, sur lesquelles vaches et chevaux ne tardent pas à se multiplier. Le résultat, après quelques années, est spectaculaire, la région métamorphosée. Le paysage, enfin façonné de la main de l’homme, est devenu productif et utile à tous. Inutile de décrire la dévotion qui entoure de toutes parts la personne de Mme Graslin, considérée comme une véritable sainte. Mais …
Voilà ce que je dis, moi.
09:00 Publié dans LITTERATURE | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : littérature, littérature française, honoré de balzac, le curé de village, limoges, peine de mort, catholiques, catholicisme, chrétien, église, balzac le médecin de campagne, docteur bénassis balzac, arthur hiller love story, france, société, ignace de loyola