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mardi, 19 novembre 2024

L'ÉTAT DE LA FRANCE 1

CHRONIQUE D'UNE DÉCHÉANCE ANNONCÉE.

Je ne sais pas combien de gens se souviennent de Le Niveau monte, ce brûlot publié en 1989 par les sociologues Christian Baudelot et Roger Establet pour combattre la soi-disant "propagande" de tout ce que l'époque comportait alors de "déclinistes" qui se lamentaient sur la déchéance touchant notre système éducatif tout entier (tous des "réactionnaires", bien sûr).

Toujours est-il que la suite a montré (et montre de plus en plus clairement) que c'étaient les "déclinistes" qui avaient raison. Et que même ils péchaient par un excès d'optimisme : il n'y a qu'à regarder dans quel bourbier intellectuel, éducatif et administratif, et dans quels sables mouvants de recrutement ("professeur" est désormais un métier fort peu attirant, et même repoussoir aux yeux des jeunes bourrés de qualités) pataugent pêle-mêle enseignants, personnels encadrants, élèves et parents d'élèves pour se rendre compte de la supercherie balancée dans le public par le tandem de gentils statisticiens chantant "La Vie en rose". 

Car comme l'écrit quelque part Samuel Beckett : « Quand on est dans la merde jusqu'au cou, il ne reste plus qu'à chanter ». Et chanter "Cocorico", évidemment.

Ensuite, on se rappellera peut-être, à l'occasion, que Nicolas Baverez avait reçu sur la figure des tombereaux de critiques plus ou moins pures, honnêtes et propres quand il avait fait paraître en 2003 La France qui tombe. Oh le pauvre, qu'est-ce qu'il avait pas dit, l'oiseau de mauvais augure ! Le moins qu'on puisse dire, c'est qu'il avait "suscité des réactions diverses", et surtout variées. 

Les Français n'aiment pas qu'on leur annonce Azincourt, Waterloo, la fin de l'Empire, la capitulation de 1871, la déculottée de 1940, la perte des colonies. Ils préfèrent faire mousser 1918, alors qu'ils n'auraient rien pu faire sans les Alliés, et passer la brosse à reluire sur la Résistance, qui a impliqué moins d'1% d'entre eux.

Aujourd'hui, ce ne sont plus des signes avant-coureurs ou des messagers de malheur qui cherchent à affoler les populations. Tout le monde s'y est mis, à commencer par la montée en puissance des régimes autoritaires gouvernés par le mépris de l'état de droit et du réchauffement climatique, mais aussi par les scientifiques du GIEC, des gens intègres, eux, pour avertir que l'on n'en est qu'au début d'un gros effondrement, comme l'humanité n'en a jamais connu, et peut-être définitif.

D'ailleurs, les journaux sérieux ont été obligés de s'y mettre : "Tout va de plus en plus mal, et on n'a encore pas tout vu, il faut s'attendre à pire". On trouvera donc ci-dessous, non pas un inventaire exhaustif de ce qui se dégrade : tout juste un florilège de quelques joyeusetés qui nous guettent au coin du bois pour nous faire notre fête. Ce n'est qu'un début !

Je me propose de faire défiler tour à tour les vocables utilisés dans des titres de journaux déployant toute la richesse d'un vocabulaire, et même d'un "champ lexical" (si si !) résolument catastrophiste.

Il ne sera ici question que d'amputation, baisse, coupe, déclin, décrochage, défaut, déficit, dégradation, dégringolade, détresse, effondrement, érosion, fermeture, finitude, fonte, manque, effritement, manque, menace, pénurie, péril, perte, raréfaction, recul, réduction, reflux, repli, rétrécissement, suppression, taille. Je crois que c'est tout. Accrochons-nous, aujourd'hui, au fétiche du mot "baisse".

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Ci-dessus et ci-dessous, curieux appariement de deux titres qui devraient se contredire. 

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Tous ces titres (j'en publierai une bonne soixantaine ou davantage) sont tirés du journal Le Monde, grand quotidien national, et du journal Le Progrès, notre PQR (presse quotidienne régionale) à nous autres Lyonnais et circumvoisins régionaux. Leur parution se répartit sur tout le temps écoulé depuis le début de l'année 2024.

A suivre.

mercredi, 18 juillet 2012

LE BAC : UN COURONNEMENT ?

Ainsi donc, le Baccalauréat a encore eu lieu cette année. Il n’y a pas de quoi s’étonner, quand on constate que le niveau des élèves de terminale ne cesse de se hausser à des hauteurs de plus en plus vertigineuses. Le Ministère de l’Education Nationale n’a-t-il pas en effet trouvé la force (en poussant comme un malade, il est vrai) de nicher, en les serrant bien dans d’innombrables cases pas trop larges, 85 % d’une « classe d’âge » (je raffole de la formule).

 

 

Bon, c’est vrai qu’à la sortie, il y a eu un peu de déchet, puisque la proportion de la « classe d’âge » à obtenir le sésame pour l’enseignement supérieur tombe à 77,5 %. Il n’empêche que le niveau de nos jeunes ne cesse de progresser, puisque cette proportion ne cesse de progresser. C’est logique, non ? Et il faut s’en réjouir. Allez, reprenons en chœur : « Alléluia ! Gloria ! ».

 

 

C’est sûr, le niveau des élèves bat d’une année sur l’autre son record précédent. Vous voulez une autre preuve ? Ben, regardez les mentions. En 1967, on comptait, en tout et pour tout, 0,7 % de mentions TB. Qu’est-ce qu’ils étaient mauvais, quand même ! Et les autorités n’avaient pas honte ! Regardez en 2012 : 7 % !!! Un taux dix fois supérieur. Enfoncés, les ancêtres ! LE NIVEAU MONTE, je vous dis. « Jusqu’où s’arrêtera-t-il ? », aurait demandé finement COLUCHE.

 

 

Et les mentions, en général, vous allez me demander, comment ont-elles évolué, entre 2002 et 2012 ? J’allais justement vous le dire : toutes confondues, elles sont passées de 33,1 % à 54,3 %. Un gain d’un tiers (à vue de nez et au doigt mouillé). Plus de la moitié des lycéens français obtiennent le bac avec mention. S’il y en a encore parmi vous qui doutent que LE NIVEAU MONTE, c’est à désespérer.

 

 

Voilà donc le refrain qu’entonne le « journal de référence » (alias « journal du soir », alias Le Monde), avec un gros titre de « une », qui dit bien haut tout le bien qu’il faut penser de la chose : « Objectif atteint : 85 % d’une génération au niveau du bac ». Chacun de nous est évidemment transporté d’aise et « ne se sent plus de joie » (c’est dans quelle fable, déjà ? allez, on se remue les méninges).

 

 

Notez cependant l’hypocrisie du Monde dans son titre : « au niveau du bac ». C’est vouloir à tout prix voir le verre à moitié plein. J’avais une grand-mère qui, à force de vouloir arriver à cent ans, confondait allègrement « 97 années accomplies » et « dans ma 98ème année ». En comptant comme ça, elle avait fini par arriver à quasiment 99. Les cent ans, c’était comme si c’était fait. On n’allait pas avoir la mesquinerie de mégoter là-dessus, quand même : elle était quasiment « au niveau 100 ». Mais oui, Mamie, je t’embrasse. Tu aurais mérité d’y arriver.

 

 

Les 85 % du journal, c’est la même chose : ça tient du coup de pouce. Donc du coup de bluff. Maintenant, trêve de plaisanterie, j'arrête de faire comme si. Naturellement (j'espère), tout le monde a compris que JE ME GAUSSE, que je parle en pouffant (essayez, tiens), que j'ironise : tout le monde, quand il est de bonne foi, sait que tout ça relève de la FARCE.

 

 

Pour une raison simple : la performance globale de l’école française, de moins en moins bien placée dans la « compétition internationale ». Le système éducatif français, pris dans son ensemble, tombe en ruine. Et je le sais : j'y suis entré quand les premières lézardes ont commencé à fendiller les murs.

 

 

Je veux bien sûr parler de la REFORMITE, cette maladie gouvernementale qui a consisté à inlassablement déstabiliser l'édifice et à vouloir mieux démolir tout en prétendant reconstruire. Ce résultat vaut mieux que toutes les eaux de rose et tous les rubans fleuris dont les ministres de l'Education (droite comme gauche) ont enrobé et emballé leur action quand ils étaient « aux affaires » (quand Louis XIV était "à ses affaires", il faut le savoir, il était assis sur sa chaise percée).

 

 

Ce n’est pas pour rien que 140.000 élèves par an, entre 2005 et 2007 sont sortis sans aucun diplôme du système éducatif. Ce n’est pas pour rien que le temps effectif de cours, sur une séance de cinquante minutes (la norme), diminue inexorablement (temps de mise au travail, bruit de fond permanent (basse continue ou ostinato, je ne sais pas)dû aux bavardages, élèves de plus en plus incontrôlables et imperméables, …).

 

 

Tiens, rien que pour rire un peu et only for fun, et si on faisait passer aux élèves d'aujourd'hui (supposons la formation et les programmes identiques) les épreuves d'il y a quarante ans ? Non ? Vous croyez que ce serait trop cruel ? Bon, tant pis pour mon idée fumeuse.

 

 

JEAN-PIERRE CHEVENEMENT avait une bonne intention (l’enfer en est pavé, paraît-il) en fixant, avec son idéal d’ « élitisme républicain », la barre à 80 % d’une classe d’âge au bac. Mais tout le monde a fort bien compris que, s’il y a, proportionnellement, dix fois plus de mentions Très Bien en 2012 qu’on 1967, ce n’est pas parce que le niveau a monté : c’est parce qu’on a descendu la barre, il n’y a pas à sortir de là.

 

 

Sinon, comment expliquer qu'entre l'activité des élèves constatée par les professeurs et les résultats au baccalauréat, s'est progressivement creusé un abîme insondable qui, au vu des "mentions" accordées, fait se tordre les boyaux aux observateurs les plus neutres, je veux dire ceux qui ne tordent pas la réalité pour qu'elle colle à leur doctrine ?  

 

 

Voilà ce que je dis, moi.

 

 

A suivre.