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vendredi, 14 octobre 2011

AIMER LIRE, AVEC ARSENE LUPIN

Il y avait, en haut de l’escalier de la « petite maison », tout un rayonnage de romans policiers. La « petite maison » comprenait au rez-de-chaussée plusieurs pièces « utiles », et à l’étage, une salle de bains et trois chambres. Le soir, je piochais régulièrement dans les polars, avec une petite prédilection pour les OSS 117.

 

 

C’était alors pour moi le fin du fin du héros au service de son pays, qui accomplit des missions impossibles dans des pays hostiles, et qui revient chez lui même pas dépeigné après avoir séduit, palpé et davantage deux ou trois superbes  femmes pas trop farouches, à la poitrine forcément « généreuse » et aux cuisses forcément « fuselées ». Je serais bientôt en âge de repérer clichés et  stéréotypes.

 

 

Je me rappelle (ce n’est peut-être pas JEAN BRUCE) une scène au Japon, dans laquelle une jeune femme absolument ravissante, mais qui avait eu le malheur de trahir la « cause », est maintenue en l’air d’une main par un épouvantable mastodonte qui, de l’autre main, la « pèle » littéralement de tous ses vêtements pour lui faire subir les pires tortures imaginables. Le héros retrouve son pauvre cadavre après avoir un peu gratté la terre, parce que ça sent vraiment mauvais.

 

 

Les auteurs de ces romans cherchent autant qu’ils peuvent ces moments de paroxysme, qui sont l’acmé de l’intensité en action. Affaire d’imagination, et d’exploration des fantasmes sexuels (sadiques ou autres). C’est un aspect, dans la littérature « populaire », qui manque de noblesse, je le reconnais.

 

 

Et puis il y eut Arsène Lupin. Parenthèse sur Arsène Lupin.

 

 

Il ne faut pas dire de mal de MAURICE LEBLANC. Certains chipotent son mérite, font la grimace, doutent que ce soit de la « littérature ». MAURICE LEBLANC n’est certes pas HONORÉ DE BALZAC : chez lui, pas de « vision de la société », pas de « comédie humaine », mais c’est un raconteur d’histoires d’une grande habileté, et à ce titre, très respectable. Ce n’est pas lui qui va modifier votre regard sur le monde et sur l’humanité. Il veut simplement que ses histoires aient du succès.

 

 

Adolescent, j’ai lu TOUTES les aventures d’Arsène Lupin. Le plus génial dans la trouvaille du personnage d’Arsène Lupin, c’est qu’il n’y a pas de héros plus pratique pour son auteur : comme il change d’aspect comme de chemise, comme il change de nom comme il respire, comme il change de maîtresse sans arrêt, nul besoin pour l’écrivain de s’ingénier à faire de lui un portrait physique fouillé, et encore moins un portrait psychologique. Dans la population des héros de roman policier, Arsène Lupin, c’est de la pâte à modeler, c’est un personnage à la plasticité inépuisable.

 

 

Héros militaire de la guerre de 14 dans L’Eclat d’obus ; légionnaire au Maroc sous les traits de Don Luis Perenna ; bandit diplomate de haut vol capable de convoquer dans sa cellule de prison l’empereur d’Allemagne en personne (dans 813) ; détective d’une subtilité sans égale, sous le nom de Jim Barnett ou de Victor de la brigade mondaine, capable de griller sur le fil les meilleurs limiers de la police et de damer le pion à Herlock Sholmes et Isidore Bautrelet (lui, c’est dans L’Aiguille creuse), les meilleurs parmi les meilleurs, et capable de deviner la présence de la « liste des vingt-sept » dans l’œil de verre de Daubrecq. 

 

 

Arsène Lupin en bandit aristocrate qui, à cause du regard de la femme qu’il aime, et qui vient de le surprendre en pleine nuit, dans le château du Malaquis (si si), en plein « déménagement » des meubles, objets et œuvres d’art appartenant au baron Nathan de Cahorn, est capable, par pur panache, de tout faire remettre en place par ses complices (c'est là-dedans, je crois bien, l'énigme sur le nom de THIBERMESNIL) ; amoureux toujours heureux et toujours transi des plus belles femmes, mais le plus souvent des femmes au caractère moins ardent que mélancolique.

 

 

Arsène Lupin en « deux ex machina » qui, une fois coincé dans une grotte en compagnie d’une jeune femme, pendant qu’on leur tire dessus et que l’eau du lac monte inexorablement (La Demoiselle aux yeux verts), une autre fois coincé dans une grotte dans une falaise bretonne en compagnie d’une jeune femme, pendant que le sol même de la grotte se soulève inexorablement pour les faire basculer dans le vide (L’Île aux trente cercueils), redresse la situation et sauve d’un coup de baguette magique la vie de la belle jeune femme, qui lui en sera éperdument reconnaissante, n’en doutons pas.

 

 

Arsène Lupin en enfant redresseur de torts, connu, une fois adulte, sous le nom de « chevalier Floriani », qui dérobe le « collier de la reine » et en vend les diamants pour sauver sa mère malade, et qui, chevaleresque, en dépose vingt ans après le coffret contenant la monture intacte sur la table de la chambre de Madame de Dreux-Soubise (« Le Collier de la reine », dans Arsène Lupin gentleman cambrioleur).

 

 

Arsène Lupin en justicier grand seigneur, qui rend à l’Etat français l’énorme tas d’or qui attendait bêtement sur un quai qu’on lui assignât une destination, à peine dissimulé sous un énorme et innocent tas de sable (Le Triangle d’or) ; et puis Arsène Lupin amoureux, à genoux devant cette jeune femme évanouie, et la ramenant à la conscience en promenant tout en douceur ses lèvres sur ses joues (La Demeure mystérieuse ?).

 

 

Fin de la parenthèse sur Arsène Lupin.

 

 

A suivre bientôt.