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mardi, 20 mai 2014

LE MONDE DANS LA VITRE

 

 

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« Charles-André Merda, dit Méda, 1773-1812. Plus tard colonel et baron d'Empire. Tué à la bataille de la Moskowa.

Dans la nuit du 9 au 10 Thermidor de l'an II (27 au 28 juillet 1794), Merda est un des premiers à pénétrer dans la salle de l'Hôtel de Ville de Paris où se sont réfugiés Robespierre, Saint-Just, etc. Arrêté dans la nuit, la mâchoire fracassée par un coup de pistolet, Robespierre fut guillotiné sans jugement le 10 Thermidor. »photographie,littérature française,georges perec,je me souviens,roland brasseur,je me souviens de je me souviens,théâtre mogador,sami frey,universitaire,le castor astral éditions,pol éditeur,

On trouve ce souvenir de fait divers dans Je me Souviens de Je me souviens, Le Castor Astral, 1998, l'ouvrage que Roland Brasseur avait, vingt ans après, écrit « à l'usage des générations oublieuses », pour célébrer le Je me Souviens de Georges Perec (POL, 1978). photographie,littérature française,georges perec,je me souviens,roland brasseur,je me souviens de je me souviens,théâtre mogador,sami frey,universitaire,le castor astral éditions,pol éditeur,

Dans le livre de Georges Perec, on trouve exactement, au n° 193 (p.54) : « Je me souviens que Robespierre eut la mâchoire fracassée par le gendarme Merda, qui devint plus tard colonel ». 

La quatrième de couverture du livre de Roland Brasseur nous apprend qu'il avait assisté, le 20 janvier 1989, à la représentation du théâtre Mogador, où Sami Frey récitait, assis sur une bicyclette, les 480 numéros (en fait, c'est ça, les Je me souviens) que comporte le livre de Georges Perec. Je le dis tout net : l'ouvrage de Roland Brasseur est utile mais éminemment regrettable.

Car le principal motif qui pousse le lecteur, dans Je me Souviens, n'est certes pas le désir de trouver les références exactes d'un décor qui fut familier à ses seuls contemporains, mais le bain d'imaginaire poétique et le climat incertain de lointaine et enfouie fraternité dans lesquels l'auteur le plonge par l'accumulation de ses propres souvenirs et par la simple répétition d'une formule qui en devient quasi-sacramentelle, comme le « priez pour nous » des vieilles Litanies des Saints. Même si, du point de vue religieux, alors là, c'est raté.

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Roland Brasseur, en réduisant le livre à son contenu purement informationnel, fait semblant de vouloir servir l'écrivain. En fait, il le démolit. Car il fait semblant de croire au "Ding an sich" de Kant, alors que Perec est dans le Schopenhauer de la "Volonté" et de la "Représentation". Cela s'appelle proprement perdre l'esprit pour s'accrocher à la lettre. Comme un vulgaire mollah prenant le Coran au pied de la lettre et se mettant en tête d'appliquer la Charia. Sa Charia à lui. Et sans commencer par se l'appliquer à lui-même, évidemment.

Au fond, Roland Brasseur prend Georges Perec au sérieux. Avec raison. Mais il a tort.

Voilà ce que je dis, moi.