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dimanche, 24 juin 2012

LECONS POUR BIEN FOUTRE

Le genre littéraire qu’il faut bien, aujoud’hui, appeler « érotique mondain », s’est épanoui en France (et en Italie, on peut bien l'avouer) au 18ème siècle. Il semblera évident à bien des lecteurs, cet amer constat que je fais : le nom de ZORZI ALVISE BAFFO (1694-1768) ne dit rien à personne. L’une des raisons principales de l’ignorance profonde dans laquelle ce nom est plongé est peut-être le dialecte vénitien. 

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IL SIGNOR BAFFO

(avouez, vous lui donneriez pourtant le bon dieu sans confession,

mais c'est quand même lui qui écrit ce qui suit) 

 

Traduit en français, le poème donne ceci :

 

« On foutra toujours :

« L’homme ayant un goupillon, et la femme un vase, il n’est pas étonnant que l’un le lui plonge jusqu’aux poils, et que l’autre le reçoive jusqu’où il peut aller, lorsqu’un même désir les anime tous deux.

 

Je ne suis étonné que d’une chose, c’est qu’il y ait encore des gens qui s’en étonnent ; car tant qu’existeront dans ce monde les instruments qui servent pour pisser, on s’en servira aussi pour foutre.

 

Ce jus délicieux qui jaillit d’un beau vit produit un excellent effet, et la matrice, dont il fait le bonheur, le nomme l’esprit consolateur.

 

C’est un baume, qui a toujours guéri les jeunes filles épuisées par les flueurs, blanches, jaunes, vertes, épaisses ou putrides ; et il guérirait les nonnes mieux que tout médecin, patriarche ou confesseur ». Y a-t-il besoin d'expliquer "flueurs" ?

 

 

Je ne sais pas dans quelle forme d’origine exacte sont écrits les textes.  Ce qui est sûr, c'est que ce sont des sonnets ou des madrigaux galants, parfois pornographiques. Derrière je ne sais plus quelle stèle exposée au Musée des Antiquités Gallo-Romaines de Lyon, est gravé un graffiti d’époque qu’on peut traduire : « Je ne baise pas, j’encule ».

 

 

Certaines grottes peintes du paléolithique supérieur comportent elles-mêmes des dessins « osés ». Le pornographique a donc, selon moi, la légitimité du temps écoulé, écroulé, qui s’écoule à la façon d’humeurs diverses hors du corps humain, au cours d’activités qui, dirait ALEXANDRE VIALATTE, si sa pudeur l’osait, « remontent à la plus haute antiquité ».

 

 

« J’ai essayé différentes manières pour bien jouir d’une femme : tantôt je l’ai fait monter sur mon ventre, tantôt je me suis mis sur le sien.

 

Je l’ai placée habillée sur un lit, ou debout et toute nue ; je le lui ai mis dans le con pendant qu’elle marchait à petits pas, et j’ai déchargé entre ses tétons.

 

De tous ces plaisirs, celui auquel j’ai trouvé le plus de charme, c’est de lui faire prendre mon vit dans la bouche ».

 

 

Je me rallie à la classique distinction entre l’érotisme, où le représenté voudrait éveiller au désir, et la pornographie, qui se contente de montrer l’acte, encore que le désir des uns puisse s’éveiller où commence l’acte des autres, et taratatsoin. Il y a du sexe depuis que l’homme a une conscience. L’animal oublie dans l’instant même de l’instinct sexuel l’intérêt que peut avoir la chose. L’homme ajoute à l’instinct la mémoire, ce qui le pousse à peindre et désirer encore, y compris et surtout dans l’absence de « chose » à désirer. L’écran rupestre du « sapiens » n’est guère différent du nôtre, le cinéma en moins (mais est-ce bien sûr ?).

 

 

« Plaisirs nocturnes d’une femme.

 

« Cette nuit, j’ai eu un plaisir fou, et je ne me suis jamais tant amusée, ce que vous comprendrez quand vous saurez que je l’ai passée entre un prélat et un bardache.

 

Figurez-vous que nous avons fait tant de folies, et que nous les avons recommencées si souvent que cela a duré jusqu’au jour.

 

J’étais entre eux, comme je vous l’ai dit, et pendant que le bardache m’enfilait par devant, le prélat me le mettait par derrière.

 

Ensuite le bardache se mettait à ma place et, pendant qu’il me foutait, le prélat l’enculait ;

 

Et ainsi de suite ; mais j’ai remarqué que le prélat ne me l’a jamais mis dans le con. »

 

 

Un bardache, c'est, comment dire, un frégaton, un uranien, une corvette, un cinède, quoi. Pour tout dire, c'est un schbeb, un marquis, un tonton, un endoffé. Bref, un bougre, un giton, un ganymède. En un mot, un sodomite. On a du vocabulaire, ou on n'en a pas, que diable. Pour les curieux, je peux envoyer sur demande le chapelet complet, avec tous les petits grains des "Je vous salue Marie" et tous les gros grains des "Notre Père".

 

 

Il y a beaucoup à regretter à ne pas connaître le dialecte vénitien : impression d’un aplatissement, forcément. J’ai envie de croire qu’en langue originale, c’est plus spirituel, plus joli, plus drôle, et va savoir, plus poétique. 

 

 

Voilà ce que je dis, moi.