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samedi, 10 mars 2012

TU TRAÎNES SUR PATA KOKOKO !

Résumé : la musique (contemporaine) d’ONDREJ ADAMEK, l’autre soir sur France Musique, a déclenché chez moi une crise de fou-rire.  

 

En disant que cette « musique » me fait rire, je suis absolument sincère. C’est ainsi que j’ai effectivement réagi en l’entendant l’autre soir. Nul doute qu’on assiste à un rare déploiement de compétences supérieures. Nul doute que les musiciens sont de grand talent. Nul doute que le compositeur atteste d’une ingéniosité sans pareille.  

 

Nul doute qu’il s’est livré aux plus savants calculs pour aboutir à la « musique » que l’on entend, excessivement complexe, précise et rigoureuse. Mais qu’on me pardonne, tous ces efforts pour déboucher sur un univers de sons qui relèvent du GAG, j’avoue que tout ça dépasse mon faible entendement.  

 

Ce qui me semble le plus drôle, dans l’affaire, c’est évidemment l’esprit de SÉRIEUX avec lequel tous les acteurs de cette comédie se prêtent au spectacle. Ce serait beaucoup moins drôle si tous ces gens avouaient qu’ils « jouent », comme des enfants dans le bac à sable. Mais visiblement, ça ne rigole pas. On n’est pas chez des plaisantins.  

 

Dites si vous voulez à PIERRE BOULEZ qu’il bassouille dans la gadoue parce qu’il en est resté au stade sadique-anal, mais un conseil, fichez vite le camp avant qu’il vous en retourne une bonne dans la figure. Sa Majesté BOULEZ le prendrait pour un crime de lèse-soi-même. Bon, comme il se fait vieux, la gifle manquerait de force, mais allez savoir, le vieillard est peut-être encore vert … 

 

Si la musique contemporaine a le « vent en prout », si j’ose dire, c’est parce que les morceaux ne durent pas longtemps. L’auditeur sait que sa souffrance sera brève. Le problème, c’est qu’il a du mal à repérer le moment où c’est fini, il est obligé d’attendre que le violoniste, après avoir levé l’archet de son instrument, laisse tomber le bras, et que le clarinettiste ait posé le sien sur ses genoux.  

 

En revanche, la musique contemporaine, c’est très pratique pour les fausses notes, les attaques à contretemps : personne ne s’en aperçoit. Ici, il est à jamais impossible de dire, comme Cornélius : « Arthur, voyons, tu traînes sur pata kokoko ».  

 

Je me rappelle, parmi les innombrables concerts de musique contemporaine auxquels j’ai assisté, une soirée passée à écouter l’ensemble appelé « Percussions Claviers de Lyon ». Le côté spectaculaire de la chose, c’est l’attitude des quatre musiciens : les mailloches en mains, ils ont adopté la position du guépard qui, tous muscles bandés, se prépare à bondir sur sa proie, se guettent les uns les autres dans l’attente, puis précipitent sur un vibraphone les notes de la partition, en gestes comme éjaculés brutalement de leurs bras. Ils sont tellement « au taquet » qu’il ne viendrait à personne l’idée d’accuser qui que ce soit d’avoir fait une faute de lecture.  

 

De la musique contemporaine, on peut dire que j’en ai bouffé. Il y a des témoins. Demandez à J. ce qu’elle pense de Jesus blood never failed me yet, de GAVIN BRYARS. Soixante quatorze minutes quarante-trois secondes avec cette même phrase serinée, d’abord par la bouche édentée et la voix éraillée d’un vrai vagabond, puis par celle, bien mieux faite, mais plus fracassée, du grand TOM WAITS 

 

Il faut dire que J. ne tenait aucun compte de la richesse de l’orchestration de cette deuxième version (1993), qui comporte pas moins de 51 instrumentistes, augmentés de 13 voix chorales. On ne pourra pas dire que le compositeur s’est moqué de l’auditeur. Mais cela dit, il faut comprendre l’agacement de J., qui était alors en train d’apprendre par cœur Mam’selle Clio, de CHARLES TRENET. 

 

 

Le problème de la musique contemporaine, et peut-être la raison pour laquelle elle ne pénètre pas dans le public aussi aisément que les succès de BRITNEY SPEARS, AMY WINEHOUSE ou LADY GAGA, c’est qu’il s’agit moins de faire de la musique que de produire des sons.

 

 

Voilà ce que je dis, moi. 

 

 

A suivre.