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jeudi, 08 mai 2014

EUROPEENNES : VOTEZ PROUT

J’appelais il y a quelques jours (25 avril) à « voter prout ». Avec le sens habituel donné par la bouche populaire à une onomatopée malodorante (« A cul de foyrard toujours abonde merde », dit l’excellent Rabelais citant un proverbe du temps, c'est dans Gargantua, chapitre IX, intitulé « Les couleurs et livrée de Gargantua »). Mais il m’est revenu que le mot « prout » est aussi un nom propre.

 

Et pas n’importe quel nom propre : une frontière. Et pas n’importe quelle frontière : la rivière Prout sépare en effet la Roumanie de la Moldavie. Autrement dit, le Prout constitue l'extrême limite orientale de l’Europe. Et je signale accessoirement que l'est de la Moldavie (Transnistrie) sert de base à quelques troupes de l'armée russe.

PRUT RIVIERE.jpg

Avant agrandissement, bien sûr (je parle de l'inexorable agrandissement de l'Europe conquérante ... quand je dis ça, excusez-moi, j'entends « prout », et ça sent mauvais) : le Prout est loin d’être infranchissable. Mais je ne suis pas sûr que la Russie de Poutine demande un jour prochain à adhérer à notre bienheureuse « Union Européenne ». Il paraît que le Bosphore non plus n'est pas infranchissable. A quand l'Europe de l'Atlantique à l'océan Indien ? Et plus si affinités, bien entendu.

 

La rivière Prout se jette dans le Danube un peu en aval de la ville de Galaţi (le ţ se prononce ts). Je me rappelle avoir traversé le Danube (Dunarea) non loin de ce confluent, avec famille, armes, bagages et véhicule, sur un vieux bac (1leu par personne, 17 lei pour la voiture, sauf erreur le leu est toujours la monnaie roumaine, une monnaie qui, à l'époque, m'a donné l'impression d'être une réincarnation de Crésus), à une époque où tout, en Roumanie, était vieux et noir. Telle était la ville de Galaţi. 

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VOUS CROYEZ QUE NOS JEAN NOUVEL A NOUS ONT DES LEÇONS A DONNER ?

Remarquez que, venant de Tulcea, on n’était pas trop dépaysé. En aval de Tulcea, on ne peut pas se tromper, c’est le delta du Danube (où il fallait éviter de boire l'eau du fleuve, non exempte de germes du choléra). Jolie ville, avec son « combinat » crachant ses épaisses fumées juste à côté de la « Promenade des Anglais » du coin, et ses énormes conduites de chauffage à ciel ouvert. 

ROUMANIE TULCEA.jpg

SI ON MET ICI LES CAPTEURS D' "AIRPARIF" (Qualité de l'air à Paris/Ile de France), ILS EXPLOSENT.

C'était l'époque où les Roumains roulaient tous (quand ils avaient les moyens de rouler, c'est fou le nombre de gens qui marchaient sur des routes interminables, les bras chargés de sacs plastique) en R 12 Renault, rebaptisées Dacia, dont ils ôtaient les essuie-glace le soir pour ne pas se les faire piquer pendant la nuit. Il y avait aussi, plus rares, des Visa Citroën, rebaptisées Oltcit, Olt pour Olténie je suppose, région natale du « Danube de la pensée » qui présidait à l'époque au destin du pays (Nicolae Ceaucescu). 

ROUMANIE GALATI DACIA.jpg

AGRANDISSEMENT DES DEUX "R 12" APERÇUES PLUS HAUT : DANS CE VASTE IMMEUBLE, DEUX FAMILLES AU MOINS EN AVAIENT LES MOYENS.

 

Tout ça pour dire : « Votez Prout ». En même temps mettez un cierge et dites une prière pour que l’Europe, ce grand corps mou, quasi-paralytique, ce vieillard sénile sous tutelle, cesse un jour d’être le n’importe quoi qu’elle est actuellement, terrain de jeu de prédilection pour les marchands et autres spadassins des multinationales, et les pondeurs compulsifs de règlements et autres « directives ».

 

Voilà ce que je dis, moi.

 

Note : je ne suis ni eurosceptique, ni "euro-hostile", ni europhobe. Au contraire, plus je vois la mondialisation mercantile, plus je sens profondes mes racines européennes. Un rêve, quoi. Seulement cette Europe-ci, cette Europe compliquée, concoctée par on ne sait qui, cette Europe déshumanisée, essentiellement procédurale, administrative et juridique, cette Europe de chefs de bureau et de cabinets d'avocats, sans compter les lobbies frénétiques, corrupteurs et puissants, ce gloubi-boulga d'Europe-marchandise, je dis juste : non merci, sans façon.

 

Ceux que ça intéresse pourront ici même, à propos de l'Europe, admirer Jean Gabin en savourant, que dis-je, en se délectant d'un flamboyant morceau de bravoure oratoire. C'est à l'Assemblée Nationale, dans le film Le Président (1961), d'Achod Malakian, alias Henri Verneuil. Dialogues de Michel Audiard, évidemment. L'extrait dure moins de douze minutes. 

 

Je note pour finir qu'à la différence des Allemands, qui envoient à Bruxelles des députés qui prennent leur tâche à cœur et planifient leur action sur la longue durée et font preuve de professionnalisme, les députés que la France envoie sentent souvent ce poste comme une relégation ou une punition, souvent comme un lot de consolation du genre « faute de grives on mange des merles », après une déroute électorale (les « recalés », comme disent les journalistes). D'où l'absentéisme. Ensuite, demandez-vous pourquoi la France a perdu une grande partie de son influence. Ah ? Vous avez la réponse ? Moi aussi.