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jeudi, 30 septembre 2021

TRIBULATIONS D'UN PORTAIL CROIX-ROUSSIEN

1 - Propriété d'une sans doute noble famille (Mazuyer).

1 BD CROIX ROUSSE N°80 ANCIEN PORTAIL LA TOURETTE.jpg

2 - Ecole Normale d'Institutrices (c'est fièrement inscrit sur le fronton).

2 E.N..jpg

3 - Collège moderne (photo ©Largo43) : c'est aujourd'hui.

3 LARGO43.jpg

4 - L'usage change, le portail reste, avec le blason d'origine (blason impossible à lire faute d'indications gravées des émaux et métaux revêtant le champ et les meubles de l'écu).

4.jpg

On trouve ça au N°80 du boulevard de la Croix-Rousse.

Une petite recherche m'apprend la véritable figure du blason Mazuyer, que "SanglierT" (je n'y peux rien : c'est l'auteur) décrit ainsi : « D'azur au chevron d'or accompagné de deux étoiles d'argent en chef et d'un croissant de même en pointe ». C'est peut-être vrai, je n'en sais rien.

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Quoi qu'il en soit, si je voulais chipoter, je reformulerais ainsi : « D'azur au chevron d'or accompagné en chef de deux étoiles à cinq rais d'argent et en pointe d'un croissant ["montant" est facultatif] du même ». Le casque juché sur le chef de l'écu est peut-être d'un baron. Avec de bons yeux, on distinguera un pélican qui s'ouvre le flanc pour nourrir ses petits. Avec une loupe à fort grossissement, on lira la devise : « NON MIHI SUM NATUS » ("Je ne suis pas né pour moi-même"). On admettra que ça change tout, n'est-ce pas.

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Un peu d'histoire pour les amateurs (merci à Mme Catherine Guillot, Conservatrice du Patrimoine, auteur du texte qui suit).

Le Portail de la Tourette à Lyon : un témoignage des demeures champêtres de la Croix-Rousse. Intégré en 1888 à l’école normale d’institutrices, devenue successivement institut de formation des maîtres puis collège, le portail de la Tourette demeure un des ultimes témoignages des clos champêtres situés à la Croix-Rousse.

Ses origines

Les possesseurs successifs du tènement de la Tourette ont été identifiés par Irénée Morel de Voleine, dont la documentation a été enrichie par René Mazuyer dans les années 1930 et donnée aux archives départementales du Rhône en 1947. L’origine de la propriété, située sur le territoire de Maljulin, remonte au XIVe siècle ; celle du portail au 2e quart du XVIIe siècle à la suite de la vente en 1627 par Marguerite Dallier, veuve de Jacques Teste, de la propriété à Jehan Mazuyer. Outre la présence d’une demeure, le terrain est alors essentiellement couvert de vignes.

Arborant les armes des Mazuyer, le portail a dû être édifié peu de temps après son acquisition par cette famille. En effet, en 1628, Jehan Mazuyer a obligation de clore sa propriété de la Tourette, située près des remparts, et c’est sans doute à cette occasion que le portail est érigé. Contrairement à sa situation actuelle, l’édicule était placé entre deux corps de bâtiments. Le terrain demeure propriété de la famille (sous le nom de Parfait, puis de Favier) jusqu’en 1793 au moins, avant sa division en plusieurs lots. 

Un motif pour les artistes de la fin du XIXe siècle

En 1878, le portail attire l’attention d’un artiste soucieux du patrimoine lyonnais ancien, Charles Tournier, qui en réalise un dessin, puis une eau-forte en avril 1878, éditée par Mademoiselle Giraud à Lyon. Une annotation portée sur le dessin localise le portail au 1 rue de la Tourette. En 1883, cette gravure vient illustrer un article consacré au portail dans Lyon Revue du 30 septembre, signé J.J. Grisard. En 1885, Claude-Louis-Bon Morel de Voleine réalise des photographies du portail. Huit ans plus tard, Tournier reprend l’eau-forte dans la première livraison du Recueil d’archéologie lyonnaise, dessiné d’après nature, publié par série de cinq gravures à partir de 1891 ; l’imprimeur Wulliam édite également l’estampe séparément.

Le dessinateur diffuse ainsi une vision du portail antérieure à la construction de l’école normale d’institutrices (1884-1888) et en varie les éléments pittoresques : jeune femme et enfant, couple assis sur un banc sur le dessin, vide de tout personnage, ou, substitut du spectateur, couple de dos au seuil des lieux, sur les différents états de l’eau-forte. Dans ses représentations, il supprime la grille qui fermait le portail et invite à découvrir la propriété, sentiment frustrant pour le spectateur d’aujourd’hui puisqu’il n’existe pas de représentation précise figurée des jardins et de la demeure.

La photographie s’empare également du motif du portail avant son démantèlement : le fonds Sylvestre de la bibliothèque municipale et les fonds de photographies des archives municipales et départementales en témoignent. La végétation qui se multiplie sur les parties hautes confère une note romantique : le portail commence à disparaître sous la glycine.

D’une disparition probable à une recréation

En 1852, la Croix-Rousse est rattachée à Lyon et les fortifications démantelées en 1865. A leur emplacement est aménagé le boulevard de la Croix-Rousse ; des édifices publics sont projetés afin de lui assurer un aspect monumental. En 1879, la formation des futures institutrices est assurée dans les locaux du clos de la Tourette. Dès 1880 est lancé le concours de l’école normale d’institutrices, concours remporté par l’architecte Philibert, dit Philippe, Geneste (1846-1938). L’école doit prendre place sur le même site, entraînant la démolition des bâtiments antérieurs.

Malgré la diffusion de l’image du portail, sa préservation, ainsi que celle d’autres vestiges de la demeure, ne semblent pas être prioritaires. Cependant, grâce à l’intervention de Morel de Voleine et de Félix Desvernay, le portail fait néanmoins l’objet de l’attention du Conseil général, qui décide finalement de le sauvegarder.

D’après Desvernay, le portail est en effet replacé en 1888 par Geneste comme portail de la nouvelle école, en y incluant au revers des vestiges provenant de la propriété, retrouvés en avril 1888 dans le jardin, sans doute à la suite des démolitions, par Desvernay lui-même. Des éléments, dont les plus anciens remonteraient au XVe siècle, sont ainsi intégrés au monument, créant une œuvre en partie nouvelle. La comparaison entre les photographies réalisées avant la démolition et après la reconstruction atteste de la fidélité de cette reconstitution quant à l’élévation antérieure du portail.

Après la « réinstallation » du portail boulevard de la Croix-Rousse, ses représentations continuent à se diffuser, que ce soit par la photographie ou la presse : en particulier, Le Progrès illustré du dimanche 7 avril 1901 montre, dans sa rubrique « Les rues de Lyon », trois images du portail (en élévation, les armoiries et l’assemblage du revers) par le dessinateur H. Girrane.

La reconnaissance patrimoniale du portail trouve son aboutissement en 1910, date à laquelle il est classé au titre des monuments historiques (arrêté du 22 janvier 1910). Sa représentation se répand alors sous la forme d’édition de cartes postales, notamment par la société S. Farges (S.F.) en 1913, et dans l’entre-deux-guerres.Le remontage du portail et la composition élaborée au revers par Devernay et Geneste en font une des rares reconstitutions-créations au sein du patrimoine lyonnais, dans l’esprit des antiquaires de la Renaissance et de l’Age baroque. Désormais implanté le long du boulevard de la Croix-Rousse, le portail demeure l’une des ultimes traces des clos champêtres de la Croix-Rousse non religieux et évoque les anciennes familles lyonnaises par les armoiries qu’il porte ; il est également révélateur d’une vision pittoresque du patrimoine, de l’action de sauvegarde des érudits lyonnais de la seconde moitié du XIXe siècle et d’un esprit de recréation, associant des éléments disparates provenant de l’ancienne demeure, tout en s’intégrant à la composition réalisée par Geneste pour l’école normale d’institutrices.

Le chantier de reconversion de l’institut de formation des maîtres en collège en cours depuis 2010 va permettre la restauration du portail, grâce aux échanges entre le Conseil général du Rhône et le service territorial de l’architecture et du patrimoine (STAP). 

Catherine Guillot – conservatrice du patrimoine à l’Inventaire général du patrimoine culturel, Région Rhône-Alpes.

jeudi, 22 juin 2017

UN PORTRAIT

Portrait d’un drôle de zigoto en 1710, sous la plume du duc.

ST-SIMON BLASON.png

Ecartelé : au 1 et 4 échiqueté d'or et d'azur au chef d'azur chargé de trois fleurs de lys d'or, au 2 et 3 de sable à la croix d'argent chargé de cinq coquilles de gueules.

 

J’ai déjà parlé ailleurs de Courcillon, original sans copie, avec beaucoup d’esprit, et d’ornement dans l’esprit, un fond de gaieté et de plaisanterie inépuisable, une débauche effrénée et une effronterie à ne rougir de rien. Il fit d’étranges farces lorsqu’on lui coupa la cuisse après la bataille de Malplaquet. Apparemment qu’on fit mal l’opération, puisqu’il fallut la lui recouper en ce temps-ci à Versailles. Ce fut si haut que le danger était grand. Dangeau, grand et politique courtisan, et sa femme, que madame de Maintenon aimait fort et qui était de tous les particuliers du roi, tournèrent leur fils pour l’amener à la confession. Cela l’importunait. Il connaissait bien son père. Pour se délivrer de cette importunité de confession, il feignit d’entrer dans l’insinuation, lui dit que, puisqu’il fallait en venir là, il voulait aller au mieux ; qu’il le priait donc de lui faire venir le père de la Tour, général de l’Oratoire, mais de ne lui en proposer aucun autre, parce qu’il était déterminé à aller à celui-là. Dangeau frémit de la tête aux pieds. Il venait de voir à quel point avait déplu l’assistance du même père à la mort de M. le prince de Conti et de M. le Prince ; il n’osa jamais courir le même risque ni pour soi-même, ni pour son fils, au cas qu’il vînt à réchapper. De ce moment il ne fut plus question de confession, et Courcillon, qui ne voulait que cela, n’en parla pas aussi davantage, dont il fit de bons contes après qu’il fut guéri. Dangeau avait un frère abbé, académicien, grammairien, pédant, le meilleur homme du monde, mais fort ridicule. Courcillon, voyant son père fort affligé au chevet de son lit, se prit à rire comme un fou, le pria d’aller pleurer plus loin, parce qu’il faisait en pleurant une si plaisante grimace qu’il le faisait mourir de rire. De là il passe à dire que, s’il meurt, sûrement l’abbé se mariera pour soutenir la maison ; et il en fait une telle description en plumet et en parure cavalière, que tout ce qui était là ne put se tenir d’en rire aux larmes. Cette gaieté le sauva. Il eut la bizarre permission d’aller chez le roi, et partout sans épée, sans chapeau, parce que l’un et l’autre l’embarrassaient avec presque toute une cuisse de bois, avec laquelle il ne cessa de faire des pantalonnades. 

Mais cette gaieté ne le sauva pas, un peu plus tard, de la petite vérole.

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Collier de l'ordre du Saint-Esprit, sur l'attribution duquel Saint-Simon était d'une jalousie sourcilleuse et d'un orgueil intraitable.

samedi, 06 juillet 2013

MON ANTHOLOGIE MONTAIGNE

 

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COUPLE D'INDUSTRIELS, PAR AUGUST SANDER

 

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Je pioche dans mon anthologie personnelle des Essais de Montaigne : « Je suis dégoûté de la nouvelleté, quelque visage qu’elle porte, et ai raison, car j’en ai vu des effets très-dommageables » (I, XXIII, De la coutume et de ne changer aisément une loi reçue). Cette pathologie tout uniment avouée porte un nom savant : c’est le misonéisme, c’est-à-dire la haine de tout ce qui est nouveau. S'il recevait comme nous sur le crâne le déluge de nouveau dont tous les marchands de la terre et autres planètes voisines nous assaillent, dans quel état respiratoire se trouverait-il ?

 

J’aime bien ceci : « Tout ainsi qu’en l’agriculture les façons qui vont avant le planter sont certaines et aisées, et le planter même ; mais depuis que ce qui est planté vient à prendre vie, à l’élever il y a une grande variété de façons et difficulté : pareillement aux hommes, il y a peu d’industrie à les planter ; mais, depuis qu’ils sont nés, on se charge d’un soin divers, plein d’embesognement et de crainte, à les dresser et nourrir » (I, XXVI, De l’institution des enfants). Messieurs et bien chers frères, sachons rester humbles : pour ce qui est des hommes, "il y a peu d'industrie à les planter". Il n'a malheureusement pas tort. Heureusement, il dit quelque part ailleurs : « Madame, j'espère que vous avez eu autant de facilité à le faire sortir que de plaisir à le faire entrer » (cité de mémoire).

 

Au sujet du « devoir conjugal », Montaigne conseille aux maris la modération sexuelle « à l’accointance de leur femme ». Car « il y a de quoi faillir en licence et débordement », dont il craint les pires dommages. Et il conclut sur ce point : « Qu’elles apprennent l’impudence au moins d’une autre main. Elles sont toujours assez éveillées pour notre besoin. Je ne m’y suis servi que de l’instruction naturelle et simple. (…) Certaines nations, et entre autres la Mahumétane, abominent la conjonction avec les femmes enceintes ; plusieurs aussi, avec celles qui ont leurs flueurs » (I, XXX, De la modération). Le Kama-Sutra débridé, ce n'est pas son affaire, on a bien compris. Mais "qu'elles apprennent l'impudence d'une autre main" ! Franchement, il a de ces formules ! Tout le monde aura compris "flueurs", je pense.

 

Montaigne décrit ainsi son blason : « Je porte d’azur semé de trèfles d’or, à une patte de lion de même, armée de gueules, mise en face » (I, XLVI, Des noms). Traduction de l’héraldique, qui est un langage, un art et une science : sur fond bleu, un champ de trèfles jaunes, sur lequel est posé horizontalement une patte de lion dont les griffes sont rouges, comme le montre l’illustration. Je ferai éventuellement quelque chose sur le langage du blason, m'étant arrivé de voir mes modestes propos publiés dans de modestes revues modestement savantes.

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Montaigne n’aimait pas la nouveauté (voir plus haut), ce qui lui faisait parfois manquer singulièrement de flair : au combat, il aime mieux se fier à la qualité de son épée (et de son bras) qu’au « boulet qui échappe de notre pistole, en laquelle il y a plusieurs pièces, la poudre, la pierre, le rouet, desquelles la moindre qui viendra à faillir, vous fera faillir votre fortune ». Il ajoute pour faire bonne mesure : « et sauf l’étonnement des oreilles, à quoi désormais chacun est apprivoisé, je crois que c’est une arme de fort peu d’effet, et espère que nous en quitterons un jour l’usage ». Comme quoi, mon Mimi (Montaigne se prénomme Michel, nobody's perfect), tout le monde peut se tromper : que dirais-tu si tu lisais nos journaux, entre les écoliers américains abattus par dizaines de milliers, les escrocs politiques français par centaines de milliers, les rebelles syriens par millions et les journalistes russes sous le règne de Poutine par milliards ?

 

J’aime bien l’anecdote suivante, concernant une de ses amies, que Montaigne rapporte dans De l’ivrognerie (II, II) : la dame est veuve et chaste. Un beau jour, catastrophe, horreur, enfer et damnation, elle est enceinte, il n’y a pas de doute. Bravant le risque de la honte, elle fait demander au coupable, par le biais du curé en chaire, de se dénoncer, promettant de lui pardonner « et, s’il le trouvait bon, de l’épouser. Un sien jeune valet de labourage, enhardi de cette proclamation, déclara l’avoir trouvée, ayant bien largement pris son vin, si profondément endormie près de son foyer, et si indécemment, qu’il s’en était pu servir sans l’éveiller. Ils vivent encore mariés ensemble ». Je traduis « indécemment » par « le cul à l'air » ...ou pire.

 

Ah le vin ! Je note ici que ce n’était pas un valet de pâturage, mais de labourage : comme dit la chanson : « Emmener sa femme au champ pour la…bourer ». C’est peut-être à cela que Sully pensait, en évoquant les mamelles de la France, allez savoir ? Montaigne achève ainsi une digression où il est question de son père (« Pour un homme de petite taille, plein de vigueur et d'une stature droite et bien proportionnée ») : « Revenons à nos bouteilles ».

 

Et cette autre histoire gaillarde, où il conte « le bon mot que j’appris à Toulouse, d’une femme passée par les mains de quelques soldats : Dieu soit loué, disait-elle, qu’au moins une fois en ma vie je m’en suis soûlée sans péché » (II, III, Coustume de l’île de Cea). J'adore ce cri du coeur : "Je m'en suis soûlée sans péché !". Presque une apologie du viol, vous ne trouvez pas ? On ne risque pas de trouver ces quelques histoires dans Lagarde et Michard. On va peut-être dire que je les choisis exprès ? Et moi, impavide, je rétorque : « Ben tiens, je vais me gêner ! ».

 

Maintenant, je voudrais m’adresser à tels grands-pères de ma connaissance, qui se mettent à fondre comme beurre en casserole chaude et deviennent gagas quand le petit-fils les regarde dans les yeux, grave comme un pape le jour de la messe de Pâques : grands-pères fondus et gagas, lisez donc le chapitre VIII du Livre II des Essais de Montaigne. Son titre ? De l’affection des pères aux enfants. Il me semble que c’est en mesure de décoiffer quelques chauves. Montaigne s’adresse (respectueusement) à madame Geoffroy d’Estissac :

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« Comme, sur ce sujet de quoi je parle, je ne puis recevoir cette passion de quoi on embrasse les enfants à peine nés, n’ayant ni mouvement en l’âme, ni forme reconnaissable au corps, par où ils se puissent rendre aimables. Et ne les ai pas soufferts volontiers nourris près de moi. Une vraie affection et bien réglée devrait naître et s’augmenter avec la connaissance qu’ils nous donnent d’eux ; et lors, s’ils le valent, la propension naturelle marchant du même pas que la raison, les chérir d’une amitié vraiment paternelle ; et en juger de même, s’ils sont autres, nous rendant toujours à la raison, nonobstant la force naturelle ». J'insiste sur "s'ils le valent". En clair : si le bébé montre en grandissant qu’il mérite notre affection, allons-y, mais s’il ne la mérite pas, n’y allons pas. Autrement dit : c’est au gamin de prouver qu’il mérite d’être aimé. Que penserait Montaigne de l'actuelle divinisation de l'enfant ? 

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CES DEUX VIGNETTES SONT TIRÉES DE DINGODOSSIERS 1, DE GOSCINNY ET GOTLIB

Mais ce n’est pas fini. Il conclut même très fort : « Il en va fort souvent au rebours ; et le plus communément nous nous sentons plus émus des trépignements, jeux et niaiseries puériles de nos enfants, que nous ne faisons auprès de leurs actions toutes formées, comme si nous les avions aimés pour notre passe-temps, comme des guenons, non comme des hommes ». Ce n’est peut-être pas gentil pour les guenons. Notez que Montaigne ne s’exclut pas de la réaction niaise de l’adulte face au bébé. Peut-être même qu’il s’agace de réagir ainsi. Eh oui, ma pauvre dame, on ne fait pas toujours comme on veut.

 

Voilà ce que je dis, moi, aux grands-pères de ma connaissance !