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samedi, 21 janvier 2012

ET UNE TÊTE DE ROI SAUCE GRIBICHE !

Résumé : la « décollation » (c’est comme ça qu’on dit) de LOUIS XVI a créé de l’irréversible. Je voulais évidemment marquer la date mémorable du  21 JANVIER 1793.

 

 

 

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UNE TÊTE DE LOUIS XVI 

 

Comment en est-on arrivé là ? On n’est pas au cours d’histoire. Mais il y a quand même un truc qui me frappe. Lors de la Révolution, les députés qui entendaient changer quelque chose à l’ordre des choses se sont assis les premiers dans la partie gauche de l’hémicycle. Ceux qui voulaient le conserver plus ou moins tel quel, dans la partie droite. C’est depuis ça qu’on parle de « droite » et de « gauche ». Je parle de l’aspect général, pas des détails, des nuances et des moments.

 

 

Tout le 19ème siècle a vu cet affrontement (1848, 1871, affaire Dreyfus, laïcité, …). Il ne faut pas s’imaginer que l’ordre ancien se laisse badibulguer sans résistance. Parce que 360 bonshommes, c’est un tout petit peu moins de la moitié des voix, mais ils ne vont pas sans regimber se laisser guillotiner par 361 régicides. Chez les loups, les vrais, on est bien plus avisé : le moins fort adopte rapidement la position de soumission. La Révolution n’a certes pas inventé la guerre sociale, mais elle l’a drôlement structurée, je trouve.

 

 

J’ai en effet l’impression que toute l’histoire récente (1789 en général et 1945 en particulier) de la France a dépendu de cet abîme creusé entre deux France antagonistes par ceux qui ont raccourci le roi en 1793. Comme si la Révolution avait définitivement crispé deux muscles dans un bras-de-fer éternel entre le bras droit et le bras gauche du même corps. Bon, on va dire que je suis en train d'inventer l'eau tiède. J'avoue, mais attendez la fin quand même.

 

 

Je n’en suis pas à dire « Embrassons-nous Folleville » (EUGÈNE LABICHE) ! Je ne suis même pas loin de penser que ce ne sont pas deux bras d’un même corps, mais attachés aux troncs de deux individus différents, qui revendiquent chacun la possession d’une seule identité : la leur. J’ai l’impression que, depuis la Révolution, c’est l’identité française qui est divisée et qui dit : « Ma main droite te caresse, et ma main gauche te gifle ».

 

 

Parce que la Révolution, ça a été drôlement indécis, si on regarde la durée, rien que depuis les Etats-Généraux jusqu'au 9 Thermidor : 5 ans. CINQ ANS ! Les « révolutionnaires arabes » qui la ramènent, c’est rien que des blancs-becs. On verra dans quatre ans, tiens, où ils en sont. Je me dis que les nôtres, c’est un peu comme des couvreurs qui, en zigouillant le roi et tout le paquet de sacré qui allait avec, auraient eux-mêmes fait tomber l’échelle avec laquelle ils sont montés sur le toit : pour redescendre sur terre, il ne reste plus qu’à sauter. Dans l’inconnu.

 

 

En 1793, l’échelle, c’est la tête du roi. C’est un raisonnement du genre « tout ou rien ». Du genre « pacte de sang » : tous complices, donc tous solidaires. Aucun rachat possible. Si c’est une faute, elle est inexpiable. Sinon, on appellera ça un « acte fondateur ». Un peu comme le meurtre rituel du roi chez les « primitifs », dont parle RENÉ GIRARD dans La Violence et le sacré. Le meurtre qui unifie tous les membres de la nation.

 

 

Sauf qu’ici, on est dans un schéma « mythe contre mythe ». La Révolution contre l’Ancien Régime. Le nouveau mythe (la République) n’a pas arraché les racines de l’ancien (le Roi), et pour cause : quoi que tu fasses, le second fait partie du passé collectif. Difficile de s’amputer ou de se déraciner soi-même. Comment unifier les contraires ? ALFRED JARRY a accompli l’exploit de cet oxymore réalisé (dans la ’pataphysique). Mais la gauche et la droite, ce n’est pas envisageable.

 

 

 

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ALFRED JARRY, INVENTEUR DE LA 'PATAPHYSIQUE

GRAVURE SUR BOIS DE FELIX VALLOTTON 

 

Que serait-il arrivé si le roi n’avait pas été décapité ? Là, tu m’en demandes trop. Peut-être que ses partisans, aidés de tous ses « cousins » couronnés d’Europe, auraient eu la peau des Révolutionnaires. Va savoir. Et on ne serait peut-être pas là pour en parler. Toujours est-il que, depuis, droite et gauche demeurent irréconciliables. Je sens que je vous apprends quelque chose, non ?

 

 

La seule solution, c’est de dissoudre. Quoi ? Mais précisément : la gauche et la droite, voyons ! S’il n’y a plus ni gauche ni droite, où sera le problème ? C’est comme le cercle de BLAISE PASCAL et de quelques autres qui l’ont précédé : le centre est partout, la circonférence nulle part. Dit autrement : tout est dans tout, et réciproquement.

 

 

Mais dis-moi au moins, blogueur patafiolé, dissoudre, pourquoi pas, mais par quel miracle ? Mais, cher lecteur, par le miracle de l’économie de marché, de la concurrence « libre et non faussée » et de l’Ecole Nationale d’Administration, que toutes les planètes habitées nous envient. Les révolutionnaires n’avaient rien compris. Ils croyaient que leurs idées devaient triompher, et ils étaient prêts à se faire étriper pour ça. C’est fini. Maintenant que MARX a définitivement perdu la bataille, et même la guerre, c'est fini.

 

 

Tu élimines les idées, autrement dit, tu fais de la politique sans politique, et tu apprends aux futurs politiciens à bien gérer, à bien administrer les affaires d’un pays. Tu les mets sur les mêmes bancs de la même école. Ils apprennent les mêmes choses, à s’apprécier, à se tutoyer. Tant que la « politique » ne s’apprenait pas à l’école, c’est sûr, le pire était à craindre, le pays à feu et à sang et tout ça.

 

 

On a remédié à cette tare : ils ont tous appris à « gérer » les affaires. C’est le service comptable qui est aux commandes. Elle est bien oubliée, la tête du roi. Elle ne peut même plus servir d'épouvantail. Elle est devenue, au sens propre, INSIGNIFIANTE. Et la droite et la gauche ont cessé d’être des adversaires, voire des ennemis, et ne sont plus que des rivales dans la conquête et la conservation du POUVOIR. La gestion a eu raison des idées politiques. Maintenant, "gauche" et "droite" sont de simples éléments d'un décor de théâtre.

 

 

La mort du roi LOUIS XVI, aussi longtemps que j’ai cru qu’on était en République, je l’ai fêtée dignement, commémorée fidèlement, célébrée pieusement, évoquée religieusement. Et joyeusement, s’il vous plaît. Avec le saucisson (ou la tête de veau gribiche) et le vin rouge républicains, s’il vous plaît. Et le bonnet phrygien de rigueur. Avec la fanfare, la clique et l’harmonie pour le « ça ira », « la carmagnole » et tout le saint frusquin.

 

 

Et puis voilà que, maintenant, je me demande ce qui m’arrive, je n’ai plus le cœur à ça. Fini, vidé de sa substance, le 21 janvier. Qu’est-ce qui m’arrive ? Me voilà comme GEORGES BRASSENS le 22 septembre : « Un vingte-deux septembre, au diable vous partîtes, et depuis, chaque année, à la date susdite, je mouillais mon mouchoir en souvenir de vous. Or nous y revoilà, et je reste de pierre, pas une seule larme à me mettre aux paupières. Le 22 septembre, aujourd’hui, je m’en fous ».

 

 

 

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Voilà, c’est arrivé. J’ai mis le temps, vous me direz. Certes. Je n’ai même plus envie d’aller me foutre de la gueule des royalistes et de leur messe commémorative, avec leur folklore, leur latin et leurs déguisements. La technique, la finance et le spectacle ont pris le pouvoir. Plus besoin des idées politiques. Et la mort de LOUIS XVI, aujourd’hui, je m’en fous. Et après tout, pourquoi pas royaliste ?

 

 

Voilà ce que je dis, moi.