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lundi, 20 mai 2013

AU-DESSOUS DU VOLCAN 2

 

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L'ONIRIQUE PHOTO DE MALCOLM LOWRY FIGURANT EN QUATRIEME DE COUVERTURE

Au-dessous du volcan, c’est douze chapitres. Autant que d’heures qu’il reste à vivre au Consul. Lui, il s’appelle Geoffrey Firmin. Il ne sait pas qu’il va mourir ce soir, mais c’est comme s’il attendait cette mort inexorable. Les douze chapitres, tout à la fois, racontent le présent d’une vie noyée dans l’alcool et dressent le bilan d’une vie sur laquelle pèse un vieux crime de guerre qui ne pardonne pas à son auteur d’avoir été enfoui sous tant de tapis au fond de sa conscience.

 

Je dis « une vie », mais je devrais dire trois. Parce que Geoffrey Firmin n’est pas seul dans son enfer. Il y a Yvonne, son épouse. Sont-ils encore mariés ? Divorcés ? Le doute plane. Ce qui est sûr, c’est qu’ils ont vécu – ensemble – des années d’un bonheur intense, depuis Grenade, où ils se sont rencontrés, jusqu’à cet improbable Quauhnahuac (pour Cuernavaca), dominé par le Popocatepetl (accessoirement par sa jumelle Ixtaccihuatl).

 

Yvonne, il y a un an, est partie. Elle a quitté le Consul, sans doute parce qu’il cultivait avec trop d’amour un état d’ébriété soutenu jusqu’au-delà de la soif. Elle lui a tout de suite envoyé une carte postale qui, après avoir été revêtue les tampons postaux les plus variés du monde (Mexico, Paris, Gibraltar, Algésiras, dans l'Espagne fasciste), va lui parvenir dans la journée, et qui aurait pu, arrivée un an avant, changer le destin du couple. Mais voilà, c’est trop tard. C’est pour ça qu’il la glisse sous l’oreiller du metteur en scène, Jacques Laruelle.

 

Mais avant Laruelle, il y a Hugh Firmin, le frangin du Consul. A-t-il été l’amant de l’épouse ? Ce n’est pas impossible. Lui, il ne cesse de penser à la bataille de l’Ebre, aux camarades restés en Espagne avec les Brigades internationales, même si on sait que c’est fini, que Franco a quasiment gagné la partie. C’est un joueur de guitare plus qu’un guitariste, un vagabond plus qu’un marin, un aventurier plus qu’un espion, bref, un homme d’action, la preuve, c’est qu’on le verra chevaucher le taureau dans l’arène de Tomalin, au grand dam de son frère (« Nom de nom de nom ! Quel foutu crétin ! ».

 

Geoffrey, qui fut Consul britannique à Quauhnahuac, n’a plus de fonctions officielles, mais il est resté là, sans doute faute d’avoir de vrais motifs d’aller ailleurs. Le vrai, c’est qu’il n’a plus de volonté. Plus exactement, de volonté, il n’a gardé que celle de savoir où il reste une bouteille, un flacon, une gourde, une topette, une fiole, un récipient, quoi, avec dedans du whisky, de la tequila, du habanero, du mescal, et même je ne sais plus quel alcool de toilette, mais quelque chose qui lui permette de s’absenter.

 

Geoffrey Firmin, on devine plutôt qu’on sait qu’il fut un brillant sujet de Sa Majesté, qu’il a servi sur des « cargos », le genre de proie qui inspire confiance aux prédateurs allemands, au cours de la 1ère guerre mondiale, mais qui dissimule un armement suffisant pour venir à bout d’un U-Boot de la Kriegsmarine. Sauf qu’on raconte qu’il a alimenté la chaudière du navire avec les officiers d’un sous-marin, ce qui n’est guère chevaleresque. Si c'est vrai, on conçoit qu'il ne s'en soit jamais remis.

 

Geoffrey Firmin, c'est la figure poignante d'un homme noyé dans les boissons fortes, qui ne cesse de dire aux autres qu’ils ne peuvent plus rien pour lui. Peut-être est-ce ainsi qu'il affirme sa liberté : la liberté de la solitude.

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LA MÊME PHOTO, EN MIEUX

Voilà ce que je dis, moi.

 

 

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